LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, qui n'est pas nouveau :
Vu l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., adhérent de l'Association pour la culture et les loisirs des Portugais de l'agglomération rouennaise (l'association), participait à un entraînement de danse folklorique dans les locaux de celle-ci, lorsqu'il a été victime d'un jet de bouteille en verre commis par un groupe de personnes en état d'ébriété venant de l'extérieur et ayant réussi à ouvrir les portes de la salle et à provoquer une bagarre ; qu'il a assigné l'association, la Matmut, assureur de celle-ci, et la caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Normandie afin que la première soit déclarée responsable de son dommage et condamnée, avec la deuxième, à l'indemniser de ses préjudices ;
Attendu que, pour accueillir les demandes, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, qu'il n'existait pas de dispositif de contrôle ou de verrouillage à l'entrée, qu'aucune mesure de sécurité n'avait été prise par l'association pour protéger ses adhérents présents à l'intérieur des locaux, et que l'intrusion d'individus en état d'ébriété n'était nullement imprévisible ;
Qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à établir que l'agression, dont M. X... avait été victime, constituait la réalisation d'un risque en lien avec l'activité pratiquée qui aurait imposé à l'association, tenue d'une obligation de moyens, de prendre des mesures particulières de sécurité, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 avril 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente novembre deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour la société Inter mutuelles entreprises et l'Association pour la culture et les loisirs des Portugais de l'agglomération rouennaise.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il avait déclaré l'Aclpar responsable du dommage subi par M. X... à la suite de l'agression survenue le 20 février 2009 et condamné in solidum l'association et la Matmut à réparer son préjudice ;
AUX MOTIFS QUE l'association pour la culture et les loisirs des Portugais de l'agglomération rouennaise (ci-après dénommée l'association Aclpar) organise tous les vendredi soirs dans ses locaux situés à Petit-Quevilly (76) un entraînement folklorique ; que le 20 février 2009, M. Victor X..., adhérent de l'association qui assistait à cette manifestation, a été victime d'un jet de bouteille en verre dans son oeil droit de la part d'un groupe de perturbateurs alcoolisés venant de l'extérieur, qui a réussi à ouvrir la porte et à provoquer une bagarre (…) ; que pour retenir la responsabilité de l'association Aclpar sur le fondement de l'article 1147 du code civil, les premier juges ont constaté qu'il n'était prévu aucune sécurité des locaux recevant plus de 30 personnes chaque vendredi soir et que l'intrusion d'individus alcoolisés cherchant la bagarre, n'était nullement imprévisible lors de manifestations de ce type, ni irrésistible sur le plan des moyens, notamment par un contrôle de l'entrée à l'aide de vigiles ou d'encadrants ou d'un verrouillage des portes (…) ; qu'il résulte des auditions recueillies par les services de police, et notamment de celle du président de l'association M. David Y..., que M. X...était à l'intérieur des locaux lorsqu'il a reçu le projectile qui l'a blessé, lancé par les portes ouvertes au moment où quelques personnes tentaient de contenir les individus alcoolisés venant de l'extérieur, sans qu'il importe que ces derniers aient réussi ou non à pénétrer à l'intérieur dès lors qu'il appartenait à l'association organisatrice d'assurer la sécurité de ses adhérents dans les locaux où se tenait la manifestation ; qu'il n'est nullement établi que M. X...soit sorti à l'extérieur des locaux et aucune faute ne peut être retenue à son encontre en lien avec les violences dont il a été victime ; que la cour adopte les motifs par lesquels le tribunal a jugé que l'intrusion à l'entrée des locaux d'individus alcoolisés n'était nullement imprévisible ; qu'il est constant qu'il n'existait pas à l'entrée de dispositif de contrôle ou de verrouillage, aucune mesure de sécurité n'ayant été prise par l'association pour protéger ses adhérents présents à l'intérieur des locaux ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE l'Aclpar organise tous les vendredis soir dans ses locaux, à Petit Quevilly, un entraînement de danses folkloriques pour une représentation, qui réunit une trentaine d'adhérents, musiciens et danseurs et leurs accompagnants ; que M X... participait à l'une de ces réunions le 20 février 2009 lorsqu'il fut victime d'un jet de bouteille en verre atteignant son oeil droit, un groupe de perturbateurs alcoolisés venant de la voie publique ayant réussi à ouvrir la porte du local et à provoquer une bagarre, notamment, en lançant dans la salle des canettes et des bouteilles de verre, cassant une vitre au-dessus de la porte (…) ; que le tribunal estime justifiée et bien fondée l'action dans la mesure où il n'était prévu aucune sécurité des locaux recevant plus de 30 personnes chaque vendredi soir, musiciens, danseurs, accompagnants, l'intrusion d'individus alcoolisés et cherchant la bagarre n'étant nullement imprévisible lors de manifestations de ce type, ni irrésistible sur le plan des moyens, notamment de contrôle des entrées par vigiles ou encadrants, et de verrouillage des ports ; que le non-respect par l'association de son obligation de sécurité de moyens envers ses adhérents constitue bien une faute au sens de l'article 1147 du code civil, alors que la force majeure ne correspondant pas au cas d'espèce ; que cette faute est bien à l'origine des blessures occasionnées ;
ALORS QU'en exécution de son obligation de sécurité de moyens, une association n'est tenue de prendre que les mesures nécessaires afin de prévenir la réalisation des risques prévisibles de dommages résultant de l'exercice de son activité ; qu'en se bornant à constater que l'association organisait des entraînements de danse folklorique dans ses locaux, réunissant chaque vendredi soir une trentaine de personnes, pour affirmer que l'intrusion d'individus alcoolisés extérieurs à l'association, « cherchant la bagarre », n'aurait pas été imprévisible lors de manifestations « de ce type », et en déduire que l'association aurait manqué à son obligation de sécurité de moyens en ne prévoyant pas un contrôle à l'entrée par des vigiles ou des encadrants ou un verrouillage des portes, la cour d'appel, qui n'a ainsi relevé aucune circonstance caractérisant l'existence d'un risque prévisible d'agression de certains de ses membres lors d'un simple entraînement de danse, par un groupe de délinquants alcoolisés aux motivations inconnues, extérieurs à l'association, justifiant que de telles mesures aient été prises, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil.