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16/11/2016 | FRANCE | N°15-86439

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 16 novembre 2016, 15-86439


Statuant sur les pourvois formés par :
- M. Hervé X...,- Mme Y... Sylvie, épouse X...,- M. Romain Z...,- Mme Christelle A..., épouse Z..., parties civiles,

contre l'arrêt de la cour d'appel de NÎMES, chambre correctionnelle, en date du 8 octobre 2015, qui les a débouté de leurs demandes après relaxe de Mme Caroline B..., épouse C..., du chef d'agressions sexuelles aggravées ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 5 octobre 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, prÃ

©sident, M. Stephan, conseiller rapporteur, M. Castel, conseiller de la chambre ;

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Statuant sur les pourvois formés par :
- M. Hervé X...,- Mme Y... Sylvie, épouse X...,- M. Romain Z...,- Mme Christelle A..., épouse Z..., parties civiles,

contre l'arrêt de la cour d'appel de NÎMES, chambre correctionnelle, en date du 8 octobre 2015, qui les a débouté de leurs demandes après relaxe de Mme Caroline B..., épouse C..., du chef d'agressions sexuelles aggravées ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 5 octobre 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Stephan, conseiller rapporteur, M. Castel, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de M. le conseiller STEPHAN, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, de la société civile professionnelle POTIER DE LA VARDE et BUK-LAMENT, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MONDON ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires commun aux demandeurs et le mémoire en demande et en défense produits ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 222-22 et 222-29-1 du code pénal, 591 à 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a relaxé Mme B... du chef d'agressions sexuelles sur mineurs de 15 ans ;
" aux motifs que, suivant jugement, en date du 13 février 2015, le tribunal correctionnel de Nîmes a déclaré Mme B... coupable des faits d'agression sexuels imposés sur mineurs de 15 ans et l'a condamnée à une peine de dix-huit mois d'emprisonnement entièrement assortie du sursis ; qu'il a également ordonné, à titre de peine complémentaire, l'interdiction d'exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs pour une durée de cinq ans et a constaté son inscription au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ; que les premiers juges ont ainsi retenu dans les liens de la prévention Mme B... tenant les déclarations de certains élèves de l'école où elle avait exercé en tant qu'assistante maternelle et au vue des expertises réalisées par M. Jean-Pierre D..., psychiatre ; que, cependant, la cour relève que la plupart des parents entendus ont indiqué à la gendarmerie n'avoir rien remarqué s'agissant de leur enfant même si certains s'accordaient à reconnaître que la prévenue était assez brusque avec les élèves, aspect de la personnalité de Mme B... non démenti par le maire M. Laurent E... qui déclarait aux gendarmes qu'en 2010/ 2011 il avait reçu des lettres de dénonciations anonymes pour des faits de brutalités sur les enfants au cours des temps de cantine ; que, toutefois, la cour relève que Mme B... a toujours contesté les faits que ce soit devant la directrice, devant les parents d'O..., lors de sa garde à vue, devant le tribunal correctionnel et encore devant la cour d'appel, ne pouvant expliquer les faits qu'on lui reproche ; qu'elle maintient qu'à aucun moment elle n'a enlevé la culotte des enfants sauf si ces derniers avaient souillé leurs sous-vêtements, pour les changer ; que, dès lors, en l'absence de témoin, la cour se doit, à travers les éléments de la procédure et des pièces produites aux débats de vérifier si les faits reprochés à Mme B... sont constitués à l'égard d'O...
X... et de J...
Z... ; que, sur les faits commis à l'encontre d'O...
X..., force est de constater qu'à aucun moment O...
X... n'a indiqué aux enquêteurs que la prévenue lui avait touché le sexe ; qu'au contraire, questionné dans le cadre de la procédure Mélanie, ce dernier n'a, à aucun moment, dit que Mme B... l'avait touché ; que, mieux encore, ce dernier a répondu à plusieurs reprises à l'enquêtrice qui lui posait la question suivante : «- tu lui as dit la vérité à maman ou tu ne lui as pas dit la vérité ?- je ne lui aie pas dit la vérité. » ; qu'ou encore à la question : «- maman, elle a menti alors ? Oui » ; qu'il ne le dira qu'une seule fois à M. Jean-Pierre D..., expert, qui lui posait la question suivante : « Caroline a touché le zizi à d'autre enfants. Non. Elle l'a fait qu'à toi. Oui » ; qu'hormis cette réponse à l'expert, aucun autre élément ne vient corroborer les accusations portées à l'endroit de Mme B... ; qu'en effet, la cour relève que les parents d'O... ont déposé plainte le 11 avril 2014 ; qu'il résulte des pièces versées aux débats par ces derniers et notamment du rapport établi par M. Claude F..., psychologue clinicien, que ceux-ci avaient amené leur fils une première fois le 26 février 2014 chez ce médecin tenant les troubles de comportement que celui-ci présentait ; que le psychologue indiquait dans son rapport qu'il fallait mentionner « un contexte familial, bien que maintenu au loin, d'agressivité conjugale entre le frère et la belle-soeur de la maman » ; que M. Claude F... poursuivait son analyse en expliquant que « la coïncidence des cauchemars et des terreurs à répétition élevée signait assurément déjà l'existence d'angoisse qui disait avec force l'état d'insécurité dans lequel se trouve O... » ; qu'il est, toutefois, important de relever que ce dernier concluait dans son rapport que le 26 février 2014 « rien à aucun moment ne vient orienter le praticien sur la piste de l'effraction de l'intime, pas même d'une maltraitance ; que, pour l'heure les symptômes évoquent plutôt un état réactionnel de témoin involontaire, une violence entrée par les yeux, quelque chose à quoi il aurait assisté malgré lui ; que c'est pourquoi il me paraît plus urgent de traiter l'insécurité que je perçois » ; que cet épisode de violence familiale est extrêmement important car le psychologue expliquait les troubles de comportement de l'enfant par cette agressivité, épisode qui manifestement n'a pas été porté à la connaissance de M. Jean Pierre D... et de Mme Christelle G..., puisque ces derniers n'en font pas état dans leur rapport et qui aurait mérité d'avoir leur analyse quant aux répercussions éventuelles sur l'enfant ; que M. Claude F... poursuivait son rapport en indiquant avoir rencontré l'enfant le 27 mars, le 4 et le 11 avril à la suite des faits d'attouchements dénoncés par la maman, précisant que l'enfant présentait une attitude différente, très impulsive ; que, toutefois, la cour relève que l'enfant n'a, à aucun moment, confié à ce dernier avoir été victime d'attouchement, le praticien prenant le soin de mentionner que la nature de l'atteinte n'avait jamais été abordée avec lui, ni même signifiée ; que, par ailleurs, Mme Christelle G..., psychologue clinicienne qui assure la prise en charge d'O... depuis juin 2014 ne mentionne nullement dans ses deux rapports versés aux débats que l'enfant lui aurait dit que Caroline lui aurait touché le zizi ; qu'il qualifie seulement Caroline de méchante ; que, si effectivement O... présente selon cette dernière, comme elle l'écrit dans son rapport d'octobre 2014, des symptômes psychiques et psychosomatiques pouvant être mis en parallèle avec ceux retrouvés dans le tableau clinique de l'enfant ayant des troubles de somatisations, des troubles anxieux liées à une situation de stress-répété sur un psychotraumatisme, rien ne permet d'affirmer que ces symptômes seraient la conséquence d'une atteinte sexuelle ou s'expliqueraient par un épisode de violence familiale auquel il aurait assisté involontairement et ce d'autant plus que ce dernier n'a plus été en contact avec Mme B... depuis avril 2014 ; que, d'ailleurs, la maman d'O... indiquait lors de sa déposition devant la cour et devant l'expert commis par les enquêteurs, que son fils allait beaucoup mieux depuis le départ de Mme B... ; que la cour ne s'explique pas alors pourquoi O... présente toujours ces symptômes ; qu'il est intéressant de relever que M. Jean-Pierre D... soulignait, dans son rapport, que cet enfant traversait des phases de développement oedipiennes qui pouvaient elles-mêmes entraîner une symptomatologie de cauchemars ou d'énurésie ; que cette analyse pourrait expliquer les difficultés que faisait l'enfant lorsque sa mère le laissait à l'école ; que l'expert indiquera d'ailleurs dans son rapport que l'enfant était dans un tel état d'inquiétude et de pleurs Iorsqu'il avait voulu l'entendre seul qu'il avait été contraint de faire revenir la mère pour pouvoir commencer l'examen ; qu'enfin la cour relève que les parents d'O... ont versé au débat un certificat médical daté du 28 janvier 2014, soit plus de deux mois et demi avant le dépôt de plainte, établi par le docteur Mme H... laquelle « certifie avoir examiné ce jour O... en présence de sa maman qui présente une déchirure du frein du prépuce. Certificat établi à la demande de la maman de l'intéressé pour faire valoir ce que de droit » ; que la cour s'étonne que cette dernière n'ait pas remis cette pièce aux enquêteurs et s'interroge sur les raisons qui l'ont conduite à faire établir ce certificat médical ; qu'en l'état de ces éléments, la cour réformera le jugement querellé, estimant que les éléments constitutifs du délit d'agression sexuelle imposée à un mineur de 15 ans reproché à Mme B... ne sont pas réunis ; qu'il convient par conséquent de renvoyer la prévenue de ce chef de prévention ; que, sur les faits commis à l'encontre de J...
Z..., si contrairement à O...
X..., J...
Z... a déclaré à l'enquêtrice qui l'interrogeait dans le cadre de la procédure Mélanie que Mme lui avait touché le kiki, il convient de prendre avec beaucoup de prudence ses déclarations qui, pour certaines, apparaissent peu crédibles ; qu'en effet ce dernier a exposé que Mme B... lui avait touché le kiki dans la classe devant tout le monde avant de dire que c'était aux toilettes, précisant qu'elle lui avait touché le kiki le temps qu'il fasse pipi ; qu'il expliquait qu'elle baissait son pantalon jusqu'au genou ; que, par contre, il déclarait à l'enquêtrice qu'il lui était arrivé d'enlever complètement son pantalon et sa culotte à l'école et de remettre son slip à l'envers ; que la cour constate que J... a été constant dans ses déclarations puisque ce dernier a réitéré ses propos devant l'expert psychiatre, propos qui ne sont en rien surprenants puisqu'il a toujours indiqué aux enquêteurs que Mme B... lui avait touché le kiki lorsqu'il allait aux toilettes ; qu'enfin, il convient de relever que J... n'a plus rencontré Mme B... depuis avril 2014 ; que, dès lors, la cour s'interroge sur le contenu du certificat médical versé au débat établi le 10 octobre 2014 par le docteur Mme Elizabeth I... qui « certifie qu'il est absolument indispensable pour le jeune J...
Z..., né le 5 mars 2009, de changer immédiatement d'établissement scolaire et d'être accueilli à l'école de Montaren où il est domicilié. Et ce pour de graves raisons de santé et de sécurité qui doivent rester confidentielles. » ; que la cour constate que ces éléments, sont à eux seuls insuffisants pour caractériser les éléments constitutifs de l'infraction reprochée à Mme B... ; qu'il convient par conséquent de la renvoyer des fins de la poursuite de ce chef ;
" 1°) alors que les agressions sexuelles sont définies, par l'article 222-22 du code pénal, comme des atteintes sexuelles commises sur la personne d'autrui par violence, contrainte, menace ou surprise ; qu'en décidant de relaxer Mme B... du chef d'agressions sexuelles sur deux jeunes mineurs, après s'être bornée à vérifier si les faits reprochés sont constitués à l'égard d'O...
X... puis de J...
Z..., mais sans tenir compte des autres éléments à charge contenus dans le dossier, notamment les dépositions des autres enfants ou encore la déposition de son propre mari évoquant des attouchements sur ses propres enfants, qui accréditaient les accusations des jeunes O... et J..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
" 2°) alors que le jeune Alex X... avait déclaré à M. Jean-Pierre D..., expert, que Mme B... lui avait touché le sexe, puis à sa mère qu'elle avait « mis son zizi dans sa bouche » ; qu'en écartant tout acte d'agression sexuelle à l'encontre de ce jeune enfant, en se prévalant uniquement des conclusions d'un expert qui avait mis les troubles de comportements de l'enfant sur un autre épisode familiale, mais sans rechercher si cela n'était pas incompatible avec des agressions sexuelles perpétrées dans le même temps, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
" 3°) alors que la cour d'appel a constaté que le jeune J...
Z... avait déclaré tout au long de la procédure, à l'ensemble des intervenants, que Mme B... lui avait touché le « kiki » ; qu'en écartant tout acte d'agression sexuelle, au motif qu'il convient de prendre avec beaucoup de prudence ses déclarations qui, pour certaines, apparaissent peu crédibles, mais sans rechercher si ces déclarations n'étaient pas corroborées par les autres éléments à charge du dossier, notamment l'ensemble des dépositions des enfants, du mari de la prévenue et son absence d'explication, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
" 4°) alors que la cour d'appel ne pouvait pas, pour justifier la relaxe concernant les faits commis sur J...
Z..., se contenter de relever qu'elle s'interroge sur le contenu du certificat médical versé au débat établi le 10 octobre 2014 par Mme Elizabeth I..., docteur, qui « certifie qu'il est absolument indispensable pour le jeune J...
Z..., né le 5 mars 2009, de changer immédiatement d'établissement scolaire et d'être accueilli à l'école de Montaren où il est domicilié. Et ce pour de graves raisons de santé et de sécurité qui doivent rester confidentielles », sans en tirer aucune conséquence sur la culpabilité de la prévenue ; qu'en se fondant sur un tel motif inopérant, la cour d'appel a de nouveau privé sa décision de toute base légale au regard des textes susvisés " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'à la suite d'une plainte déposée par Mme X... dénonçant des faits d'agressions sexuelles aggravées qui auraient été commis sur la personne de son fils O..., âgé de quatre ans, imputés à Mme C..., agent technique employé dans l'école maternelle fréquentée par l'enfant, une enquête a été diligentée, aboutissant à la révélation de faits similaires concernant J...
Z..., âgé de quatre ans et demi ; que la personne mise en cause, qui a contesté les faits dénoncés, a été renvoyée devant le tribunal correctionnel, lequel l'a déclarée coupable d'agressions sexuelles aggravées et l'a condamnée à dix-huit mois d'emprisonnement, ainsi qu'à l'interdiction d'exercer une activité la mettant en contact avec des mineurs durant cinq ans ; que Mme C... et le procureur de la République ont interjeté appel de cette décision ;
Attendu que, pour infirmer le jugement lui étant déféré, la cour d'appel, après avoir rappelé les différents éléments du dossier et retenu que la prévenue avait toujours contesté les faits, relève, notamment, que, concernant le mineur O...
X..., ce dernier n'a évoqué l'existence d'attouchements que devant l'expert pédo-psychiatre mais non devant les enquêteurs et que le praticien amené à le suivre antérieurement à la révélation des faits avait noté, pour sa part, l'influence d'un épisode familial violent concernant le frère de sa mère, excluant une effraction intime ou une maltraitance ; que les juges ajoutent, concernant J...
Z..., que si cet enfant a fait état d'attouchements de la part de la prévenue, il a varié sur les circonstances et le lieu des faits, et qu'en outre le versement tardif aux débats d'un certificat médical du 10 octobre 2014, concluant à la nécessité de changer l'enfant d'établissement pour des raisons confidentielles de santé et de sécurité est peu compréhensible, dès lors qu'il n'avait plus de contacts avec la prévenue depuis le mois d'avril 2014 ;
Attendu qu'en prononçant ainsi la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen, qui revient à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
FIXE à 1 000 euros la somme globale que M. et Mme X..., M. et Mme Z..., parties civiles, devront payer à Mme C... au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le seize novembre deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 15-86439
Date de la décision : 16/11/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 08 octobre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 16 nov. 2016, pourvoi n°15-86439


Composition du Tribunal
Président : M. Guérin (président)
Avocat(s) : SCP Potier de La Varde, Buk Lament et Robillot, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.86439
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