LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Mme Catherine X..., partie civile,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de RENNES, en date du 9 octobre 2015, qui, dans l'information suivie, sur sa plainte, du chef d'atteinte à l'intimité de la vie privée, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 4 octobre 2016 où étaient présents : M. Guérin, président, M. Parlos, conseiller rapporteur, MM. Straehli, Buisson, Mme Durin-Karsenty, MM. Larmanjat, Ricard, Bonnal, conseillers de la chambre, MM. Barbier, Talabardon, Ascensi, conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Desportes ;
Greffier de chambre : Mme Bray ;
Sur le rapport de M. le conseiller PARLOS, les observations de la société civile professionnelle FABIANI, LUC-THALER et PINATEL, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DESPORTES ;
Vu les mémoires personnel, ampliatif et complémentaire produits ;
Sur la recevabilité du mémoire personnel :
Attendu que ce mémoire, qui n'a pas été déposé dans le délai de dix jours suivant la déclaration de pourvoi au greffe de la juridiction qui a rendu la décision attaquée, ne remplit pas les conditions exigées par l'article 584 du code de procédure pénale ; qu'il est, dès lors, irrecevable et ne saisit pas la Cour de cassation des moyens qu'il pourrait contenir ;
Sur le premier moyen de cassation du mémoire ampliatif pris de la violation des articles 175, 591, 593 du code de procédure pénale et 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme ;
"en ce que la chambre de l'instruction a confirmé l'ordonnance de non-lieu du 21 octobre 2014 ;
"aux motifs que contrairement à ce que soutient Mme X... dans les observations au juge d'instruction jointes à l'acte d'appel, l'ordonnance de non-lieu n'a pas été rendue de façon prématurée ; qu'en effet, l'avis de fin d'information prévu à l'article 175 du code de procédure pénale a été délivré le 11 juillet 2014, le réquisitoire déposé le 7 août 2014, transmis à la partie civile le 8 août 2014 et Mme X... a déposé des observations les 8 septembre et 13 octobre 2014 ; que les délais de trois mois suivant l'avis de fin d'information puis d'un mois après les réquisitions prévues par l'article 175 ont donc été respectés ;
"alors qu'aux termes de l'article 175 du code de procédure pénale et en l'absence de détention de la personne mise en examen, la partie civile dispose, d'une part, d'un délai de trois après l'avis de fin d'information pour des déposer ses observations et, d'autre part, à l'issue de ce délai de trois, d'un nouveau délai d'un mois pour répondre aux réquisitions du parquet ou aux observations des autres parties ; que l'ordonnance de fin d'information ne peut intervenir avant l'expiration de ces délais et ce, même lorsque les parties ont d'ores et déjà déposé des écritures ; qu'en l'espèce, la chambre de l'instruction ayant constaté que l'avis de fin d'information avait été communiqué à Mme X... le 11 juillet 2014 et que le ministère public avait déposé des réquisitions, il en résultait que l'ordonnance de règlement ne pouvait intervenir qu'à l'issue des délais de trois mois et d'un mois prévus par l'article 175 du code de procédure pénale, soit à compter du 11 novembre 2014 ; que la chambre de l'instruction ne pouvait donc, comme elle l'a fait, juger que l'ordonnance de non-lieu, qui a été rendue le 21 octobre 2014, soit antérieurement à l'expiration des délais de trois mois puis d'un mois prévus à l'article 175 du code de procédure pénale, ne l'avait pas été de façon prématurée" ;
Vu l'article 175 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'il résulte de l'article 175 du code de procédure pénale que le délai de dix jours ou d'un mois ouvert au ministère public et aux parties pour présenter, respectivement, des réquisitions et observations complémentaires ne commence à courir qu'à l'issue du premier délai d'un mois ou de trois mois prévu par ce texte ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que Mme X... a porté plainte et s'est constituée partie civile le 12 février 2012, des chefs de diffamation et injure publiques envers un particulier et d'atteinte à l'intimité de la vie privée ; que de ce dernier chef, la plaignante reprochait à certains de ses interlocuteurs sur le réseau internet d'avoir, grâce, notamment, à des piratages informatiques et écoutes téléphoniques pour l'identifier, révélé son identité à la suite de commentaires qu'elle avait postés sur des sites de discussion ; qu'ayant dit n'y avoir lieu à informer sur les délits de presse, le juge d'instruction a rendu, le 21 octobre 2014, une ordonnance de non-lieu du chef d'atteinte à l'intimité de la vie privée ; que la partie civile a relevé appel de cette décision ;
Attendu que, pour écarter l'argumentation de l'appelante, qui a soutenu que ladite ordonnance a été rendue avant l'expiration des délais de trois mois et d'un mois prévus par l'article 175 du code de procédure pénale, l'arrêt retient que, l'avis de fin d'information prévu par cet article ayant été délivré le 11 juillet 2014, le réquisitoire définitif déposé le 7 août 2014 et transmis à la partie civile le 8 août 2014, et Mme X... ayant formulé des observations les 8 septembre et 13 octobre 2014, les délais légaux de trois mois suivant l'avis de fin d'information puis d'un mois après les réquisitions ont été respectés ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que l'ordonnance de règlement ne pouvait être rendue avant le 12 novembre 2014, la chambre de l'instruction a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner le second moyen de cassation proposé :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Rennes, en date du 9 octobre 2015, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Rennes autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Rennes et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quinze novembre deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.