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10/11/2016 | FRANCE | N°15-25281

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 10 novembre 2016, 15-25281


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que l'arrêt attaqué (Douai,15 juin 2015), fixe les indemnités de dépossession revenant à M. et Mme X..., par suite de l'expropriation, au profit de l'Etablissement public foncier Nord Pas de Calais, d'une parcelle leur appartenant ;
Attendu que, pour infirmer le jugement en ce qu'il a majoré le prix du terme de référence retenu en raison de la meilleure situation de la parcelle expropriée, l'arrêt retient que

la nécessité d'apporter au prix de référence obtenu une majoration n'est p...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que l'arrêt attaqué (Douai,15 juin 2015), fixe les indemnités de dépossession revenant à M. et Mme X..., par suite de l'expropriation, au profit de l'Etablissement public foncier Nord Pas de Calais, d'une parcelle leur appartenant ;
Attendu que, pour infirmer le jugement en ce qu'il a majoré le prix du terme de référence retenu en raison de la meilleure situation de la parcelle expropriée, l'arrêt retient que la nécessité d'apporter au prix de référence obtenu une majoration n'est pas établie ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui a statué par voie de simple affirmation, n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 juin 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Douai (chambre des expropriations) ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée ;
Condamne l'Etablissement public foncier Nord Pas de Calais aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'Etablissement public foncier Nord Pas de Calais et le condamne à payer à M. et Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix novembre deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR fixé l'indemnité de dépossession revenant aux époux X... à la somme de 51 578 euros, dont 40 000 euros au titre de l'indemnité principale et 5 200 euros au titre de l'indemnité de remploi ;
AUX MOTIFS QUE dans le cadre du présent recours, il est établi, et d'ailleurs non contesté, que les indemnités allouées par la juridiction de l'expropriation doivent couvrir l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation ; que le jugement entrepris n'est pas critiqué en ce qu'il fixe au 28 octobre 2013, date de l'ordonnance portant transfert de propriété, la date à laquelle la consistance du bien doit s'apprécier ; que, par ailleurs, conformément à l'article L. 13-15 I du code de l'expropriation, l'estimation du bien s'effectue à la date de la décision de première instance, sauf à prendre en considération l'usage effectif du bien, les critères de qualification et les possibilités de construction à la date de référence, qui en l'espèce doit être fixée au 7 décembre 2009, soit un an avant l'ouverture de l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique, conformément au droit commun de l'article L. 13 -15 I précité du code de l'expropriation ; qu'il n'est pas discuté qu'à cette date, la parcelle AK n° 472 est située en zone UA au plan local d'urbanisme de la commune d'Anzin, c'est-à-dire en zone urbaine mixte à caractère central, à dominante d'habitat, pouvant comporter des commerces, des services, des bureaux, des activités artisanales, des équipements publics, compatibles avec un environnement urbain dense ; qu'il s'agit d'un terrain sis 61 rue Anatole France à Anzin, disposant d'une façade de seize mètres sur la rue Anatole France, asphalté accueillant une aire de station automatique de lavage automobile à l'enseigne « Hypromat » et « L'Eléphant bleu », exploité par la société Deta Lavage ; que le premier juge a décrit le bien concerné de façon complète et pertinente dans des attendus que la cour adopte et auxquels il est renvoyé pour un plus ample exposé ; que les parties s'accordent en cause d'appel à reconnaitre que cette parcelle, bien que supportant les aménagements rendus nécessaires par l'exploitation de la station de lavage qui y est édifiée, répond à la qualification de terrain à bâtir, comme possédant à la date de référence, toutes les caractéristiques d'un terrain à bâtir au sens des dispositions de l'article L. 13-15 II 1° du code de l'expropriation ; que, sur l'évaluation, c'est à bon droit que le premier juge a procédé à l'évaluation du bien par comparaison avec des mutations d'immeubles similaires récemment intervenues dans le même secteur géographique, méthode au demeurant non remise en cause par les parties ; qu'à cet égard il ressort du dossier que l'expropriant citait en première instance les termes de comparaison suivants : terme de comparaison n° 1 : vente du 7 janvier 2008 d'une parcelle sise rue Jouglet à Anzin, cadastrée section AP n° 530 et classée en zone UA au plan local d'urbanisme, d'une superficie de 305 m2 au prix de 30.000 euros, soit 100 euros le m², terme de comparaison n° 2 : vente du 2 avril 2008 de deux parcelles sises rue de Paris à Anzin, cadastrées section AL n° 937 et 938 et classées en zone UB au plan local d'urbanisme, d'une superficie de 500 m2 au prix de 50.000 euros, soit 100 euros le m², terme de comparaison n° 3 : vente du 19 janvier 2007 d'une parcelle sise rue Jean Jaurès à Anzin, cadastrée section AB n° 252, d'une superficie de 153 m2 au prix de 20.000 euros, soit 130 euros le m², terme de comparaison n°4 : vente du 9 novembre 2011, publiée sous les références 2011P n° 9647, de parcelles sises rue Gustave Thiétard à Anzin, cadastrées section AD n° 664, 595 et 596 et classées en zone UA au plan local d'urbanisme, d'une superficie de 1.733 m2 au prix de 241.856,50 euros, soit 139,56 euros le m², terme de comparaison n° 5 : vente du 30 décembre 2013, publiée sous les références 2014P00645, d'une parcelle sise place Despret à Anzin, cadastrée section AB n° 167 et classée en zone URh au plan local d'urbanisme, d'une superficie de 170 m2 au prix de 6.000 euros, soit 35,30 euros le m2, terme de comparaison no 6 : vente du 18 avril 2012 de parcelles sises place Roger Salengro à Anzin, cadastrées section AO n° 552 et 585 et classées en zone UZb au plan local d'urbanisme, correspondant à la ZAC Valmont, d'une superficie de 1.533 m2 au prix de 156.090 euros, soit 101,82 euros le m², terme de comparaison n° 7 ; vente du 30 septembre 2011 d'une parcelle sises à Beuvrages, lot 3 du lotissement « Le Ruissard », cadastrée section AH n° 529 d'une superficie de 918 m² au prix de 78.030 euros, soit 85 euros le m², terme de comparaison n° 8 : vente du 28 novembre 2011 d'une parcelle sise à Beuvrages, lot 2 du lotissement « Le Ruissard », cadastrée section AH n° 528 d'une superficie de 902 m² au prix de 81.180 euros, soit 90 euros le m², terme de comparaison n° 9 : vente du 25 septembre 2012, publiée sous les références 2012P06739 d'une parcelle sise rue Robert Fuge à Beuvrages, lot 21 du lotissement « La Couture », cadastrée section A 742 et classée en zone UA au plan local d'urbanisme, d'une superficie de 670 m² au prix de 73.864 euros, soit 110,20 euros le m², terme de comparaison n° 10 : vente du 31 octobre 2013, publiée sous la référence 2013P07411 de parcelles sises rue René Franck à Petite Forêt, cadastrées AN n° 482, 480 et 479 et classées en zone UA au plan local d'urbanisme, d'une superficie de 554 m² au prix de 62.500 euros, soit 112,81 euros le m² ; que les époux X... n'ont pas entendu reprendre en cause d'appel l'unique terme de comparaison qu'ils avaient fourni devant le premier juge, se contentant à cet égard d'émettre devant la cour des observations sur les termes de comparaison fournis par l'autorité expropriante et le commissaire du gouvernement ; qu'en cause d'appel, le commissaire du gouvernement cite, pour sa part, les mêmes termes de comparaison que ceux repris sous les numéros 4, 9 et 10 précédemment exposés ; qu'il convient de rappeler que la méthode d'évaluation par comparaison commande de s'attacher uniquement aux mutations réellement intervenues et d'écarter parmi celles-ci les mutations trop anciennes, portant sur des biens non comparables ou reflétant un intérêt de convenance ; que tous autres éléments (promesse de vente, offre d'acquisition, estimation immobilière, notification de redressement fiscal, article de presse) doivent être écartés au motif qu'il s' agit de références insuffisamment certaines ; qu'à la lumière de ces observations, il convient d'écarter les termes de comparaison 1 à 3 compte tenu de leur ancienneté ; que de même, c'est à juste titre que le premier juge a écarté les termes de comparaison 7 à 10 en ce qu'ils concernent des ventes intervenues sur les communes de Beuvrages et de Petite Forêt, portant au surplus sur des parcelles loties pour celles sises à Beuvrages alors que la parcelle expropriée est située dans le centre-ville de la commune d'Anzin où le commerce est principalement implanté ; qu'il convient encore d'écarter les termes 5 et 6 en ce qu'ils concernent des parcelles situées en zone URh au plan local d'urbanisme de la commune d' Anzin pour le premier et en zone UZb de ce même plan local d'urbanisme pour le second alors que la parcelle en cause est classée en zone UA ; que l'unique terme de comparaison retenu fait ressortir un prix unitaire de 139,56 euros le mètre carré ; que la nécessité d'apporter au prix de référence ainsi obtenu une majoration n'est pas établie de sorte que l'offre formulée par l'autorité expropriante à hauteur de 140 euros, valeur de terrain nu, est satisfactoire, le jugement étant en cela réformé ; que toutefois il ressort des éléments du dossier que lors du prononcé de l'ordonnance d'expropriation le 28 octobre 2013, la parcelle cadastrée section AK n° 472 était l'objet d'un bail commercial consenti à la société Deta Lavage par les époux X... selon un acte reçu en la forme authentique le 21 juin 2002 en vue de l'exploitation d'un centre de lavage à jet haute pression en libre-service ; que ce contrat auquel les parties ont expressément déclaré conférer le caractère d'un bail commercial, a été conclu pour une durée de neuf ans à compter du 1er janvier 2002 pour prendre fin le 31 décembre 2010, depuis reconduit tacitement, moyennant un loyer annuel de base de 9 146,94 euros, révisable à l'expiration de chaque période triennale conformément à la loi ; que ce bail a été reconduit pour une nouvelle durée de neuf ans à compter du 1er janvier 2011, la parcelle en cause étant en tout état de cause toujours occupée à la date de l'ordonnance de transfert de propriété ; qu'il convient partant de pratiquer un abattement pour occupation, M. et Mme X... ne pouvant de ce fait prétendre à une indemnité comme si la parcelle avait été libre de toute occupation ; que dès lors qu'à la date de l'ordonnance d'expropriation le 28 octobre 2013, il restait un peu plus de six années à courir concernant le bail commercial et que le commerçant évincé réclame, au titre de son transfert d'activité, l'allocation d'une indemnité principale d'éviction de 218 820 euros, l'abattement proposé à hauteur de 50 % par l'EPF du Nord-Pas de Calais comme le commissaire du gouvernement sera retenu dès lors qu'il tient compte de la moins-value due à cette occupation commerciale ; que le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a retenu un taux d'abattement pour occupation de 50 % ; qu'ensuite lors de son transport sur les lieux, le juge de l'expropriation a relevé que la parcelle cadastrée section AK n° 472 supportait une station de lavage de véhicules à l'enseigne « L'Eléphant Bleu » ; que la présence de ces aménagements, quoique de construction légère et facilement destructible, déprécie le terrain ; que c'est en conséquence à bon droit que le premier juge, pour obtenir la valeur de terrain « encombré » a pratiqué, sur la valeur du terrain nu, un abattement limité à un coefficient de minoration de 5 %, peu important à cet égard que ces constructions aient été édifiées par la société Deta Lavage, locataire, et que celle-ci soit tenue, en vertu du contrat de bail, d'une obligation de remise en état et donc de démolition, celle-ci n'étant pas opposable à l'autorité expropriante ; que les deux abattements pratiqués, l'un pour encombrement, et l'autre pour location, étant ainsi justifiés dans leur principe et se cumulant comme s'appliquant à des causes distinctes, le montant de l'indemnité principale due sera donc de 140 x 613 x 45 %, soit 38 619 euros, que l'EPF du Nord-Pas de Calais entend toutefois arrondir à la somme de 40 000 euros ;
ALORS, 1°), QUE le juge ne peut statuer par voie de simple affirmation ; qu'en considérant, pour refuser de majorer le prix de référence en vue de tenir compte-compte de la situation particulièrement privilégiée de la parcelle expropriée, que « la nécessité d'apporter au prix de référence ainsi obtenu une majoration n'est pas établie », sans analyser, ne serait-ce que succinctement les pièces sur lesquelles elle se fondait ni s'expliquer sur les constatations personnelles du juge de l'expropriation du tribunal de grande instance de Lille qui s'était transporté sur les lieux et avait constaté que la parcelle expropriée jouissait d'une situation particulièrement privilégiée au sein de la zone UA du plan local d'urbanisme justifiant une majoration du prix de référence, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure ;
ALORS, 2°), QUE un bail d'un terrain nu ne peut relever du statut des baux commerciaux que si le locataire y a édifié, avec l'accord du bailleur, des constructions présentant des caractères de fixité et de solidité suffisants ; que, par ailleurs, si les parties peuvent conventionnellement décider de soumettre leur relation au statut des baux commerciaux, encore faut-il que soit caractérisée, à cet égard, leur volonté non équivoque ; qu'en relevant, pour appliquer un abattement de 50 % pour occupation, que les parties avaient expressément déclaré conférer au contrat de bail du 21 juin 2002, portant sur un terrain nu sur lequel le preneur n'avait réalisé que des constructions légères ne présentant pas de caractères de fixité et de solidité, la nature d'un bail commercial, sans analyser, ne serait-ce que succinctement, les éléments sur lesquels elle se fondait, quand les époux X... contestaient avoir voulu soumettre le contrat de bail au statut des baux commerciaux, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS, 3°), QUE le juge, tenu de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables, doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée ; qu'en supposant que la cour d'appel ait déduit l'existence d'un bail commercial de la dénomination qui en avait faite par les parties, sans rechercher si le bail litigieux, en raison de ses caractéristiques ou de ses conditions d'exécution, relevait du statut des baux commerciaux, la cour d'appel a violé les articles 12 du code de procédure civile, L. 145-1 du code de commerce et L. 321-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
ALORS, 4°), QU'en opérant un abattement de 5 % pour encombrement après avoir pourtant relevé que les aménagements réalisés sur le terrain étaient légers et facilement destructibles, ce qui excluait l'existence d'un encombrement, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 321-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
ALORS, 5°), QU'en opérant un abattement en raison des installations auxquelles la société Deta Lavage avait procédé en exécution du bail du 21 juin 2012, après avoir déjà opéré un premier abattement de 50 % pour occupation du terrain, en raison dudit bail, la cour d'appel a violé l'article L. 321-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
ALORS, 6°) et en tout état de cause, QU'en ajoutant que la clause du contrat de bail, suivant laquelle le preneur était tenu de remettre en état les lieux en fins de bail, n'était pas opposable à l'autorité expropriante, sans préciser le fondement juridique de sa décision, la cour d'appel a violé l'article 12 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 15-25281
Date de la décision : 10/11/2016
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 15 juin 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 10 nov. 2016, pourvoi n°15-25281


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.25281
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