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09/11/2016 | FRANCE | N°14-28124

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 09 novembre 2016, 14-28124


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 3 octobre 2014) que M. X..., engagé le 1er octobre 1993 par la société Compagnie générale des éditions officielles, office de distribution et services, occupait en dernier lieu un poste de directeur commercial, statut cadre ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au salarié une somme à titre de rappel de commissions et de congés payés, à compter du 28 mars

2011, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il est interdit aux juges de modifier l...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 3 octobre 2014) que M. X..., engagé le 1er octobre 1993 par la société Compagnie générale des éditions officielles, office de distribution et services, occupait en dernier lieu un poste de directeur commercial, statut cadre ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au salarié une somme à titre de rappel de commissions et de congés payés, à compter du 28 mars 2011, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il est interdit aux juges de modifier les termes du litige tels qu'ils sont déterminés par les prétentions et conclusions respectives des parties ; que la société soutenait, à propos notamment du tableau produit en pièce n° 12 par le salarié, relatif au montant des commissions brutes pour les années 2008 et 2009, que la cour d'appel ne manquerait pas de relever « l'origine incertaine et le caractère erroné des tableaux produits par l'intéressé à l'appui de ses demandes infondées » ; qu'en retenant néanmoins que cette pièce n° 12 n'était pas contestée par la société, la cour d'appel a modifié les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;
2°/ que la preuve du paiement, qui est un fait, peut être rapportée par tous moyens ; qu'il s'en déduit que le versement de frais professionnels peut tenir lieu de paiement des commissions prévues par le contrat de travail si la preuve est apportée que ces frais professionnels avaient été versés fictivement en lieu et place des commissions afin de faire échapper celles-ci aux cotisations sociales et à l'impôt sur le revenu ; qu'en retenant que le versement de frais professionnels ne peut tenir lieu de règlement de commissions, peu importe que le montant de ces frais paraissent correspondre à celui des commissions et qu'ils aient été réintégrés en salaires par l'URSSAF, la cour d'appel s'est prononcée par des considérations inopérantes et a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1341 du code civil ;
3°/ que la fraude corrompt tout et que nul ne peut percevoir deux fois le paiement d'une même créance ; que l'employeur faisait valoir qu'en vertu d'un accord passé avec les anciens dirigeants de la société CGEO, que la nouvelle direction n'avait pas manqué de dénoncer dès sa prise de fonction, le salarié percevait les commissions prévues par son contrat de travail sous forme de remboursement de frais de déplacement fictifs, afin de faire échapper ces sommes aux cotisations sociales et à l'impôt sur le revenu ; qu'en refusant de rechercher si tel était bien le cas et si la condamnation de la société ne conduisait pas à permettre au salarié de percevoir deux fois le paiement d'une même créance, ainsi que l'avaient retenu les premiers juges, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe fraus omnia corrumpit ;
Mais attendu d'abord que la cour d'appel, qui a statué sur les demandes formées par les parties, n'a pas modifié l'objet du litige en appréciant la portée des éléments de fait et de preuve produits devant elle, relatifs à l'existence et au montant d'un solde de commissions ;
Attendu, ensuite, que les commissions doivent être payées en tant que telles, le versement d'indemnités pour autre cause ne pouvant tenir lieu de règlement de salaire et que le principe de la liberté de preuve en matière prud'homale ne saurait interdire au juge d'apprécier l'objet et la cause d'un paiement ;
Attendu, enfin, qu'ayant retenu que le paiement d'une somme était intervenu à titre, non pas de commissions, mais de frais professionnels, la cour d'appel a, sans être tenue de procéder à des recherches que ses énonciations rendaient inopérantes, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Compagnie générale des éditions officielles, office de distribution et services aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. X..., la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour la société Compagnie générale des éditions officielles, office de distribution et services
Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'AVOIR condamné la société CGEO à payer à monsieur Eric X... une somme de 97 545 € brut à titre de rappel de commissions y compris les congés payés, assortie des intérêts au taux légal à compter du 28 mars 2011 ;
AUX MOTIFS QU'au vu du dernier avenant au contrat de travail signé le 29 octobre 2007 et par lequel le salarié est devenu directeur commercial, il était prévu qu'il avait « pour mission d'atteindre les objectifs fixés soit pour 2008 CA de 4 millions d'euros, développer les taux de marge, animer les forces de vente et co-animer les délégués, que sa rémunération sera décomposée comme suit fixe mensuel brut 5700 € incluant la gestion du portefeuille « direction » et des commissions sur espaces vendus de 18% » ; qu'en l'état, il n'est pas contesté que le salarié devait bénéficier de commissions comme fixées par le contrat de travail ; qu'au vu des pièces versées au débat, il n'est pas justifié par l'employeur qu'il se soit acquitté de la prétendue régularisation annuelle des commissions pour l'année 2010 comme mentionné sur le bulletin de salaire de décembre 2010 à hauteur de 24 191,70 € étant précisé que la seule mention sur le bulletin de salaire ou sur l'attestation Assedic ne vaut pas justificatif de paiement ; que de plus, il convient de constater que le reçu pour solde de tout compte délivré sur la même période ne prend pas en compte cette régularisation puisqu'il mentionne un solde de 65 207,38 € incluant 13 557,58 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés brute, 8 176,62 € à titre d'indemnité de préavis non effectué payé brute et 49 334,10 € à titre d'indemnité légale de licenciement nette ; que par ailleurs pour le surplus période d'avril 2008 à décembre 2009, la réclamation du salarié doit être également accueillie dans la mesure où ce dernier produit au débat en pièce 12 un tableau (non contesté par la partie adverse) où figure le montant des commissions brutes qui lui sont dues pour 2008 et 2009, et les bulletins de salaire desquels il ressort que les commissions de janvier à mars 2008 ont bien été prises en compte et pas les autres mois de 2008 et ceux de 2009 ; que le versement de frais professionnels ne peut tenir lieu de règlement de commissions et peu importe que le montant de ces frais paraissent correspondre à celui des commissions, il y a lieu de condamner l'employeur au paiement de la somme globale telle que sollicitée à ce titre par l'intimé à savoir 97 545 € brut qui comprend [sic] aux commissions dues d'avril 2008 à décembre 2010 y compris les congés payés ; qu'il convient d'ajouter que le fait que comme l'indique l'appelante le montant des commissions ait été réintégré en salaires par l'Urssaf, ne peut dispenser l'employeur de s'acquitter effectivement de ces commissions auprès du salarié, le paiement en frais professionnels ne pouvant y pallier.
ALORS, D'UNE PART, QU'il est interdit aux juges de modifier les termes du litige tels qu'ils sont déterminés par les prétentions et conclusions respectives des parties ; que la société CGEO soutenait, à propos notamment du tableau produit en pièce n° 12 par monsieur X... relatif au montant des commissions brutes pour les années 2008 et 2009, que la cour d'appel ne manquerait pas de relever « l'origine incertaine et le caractère erroné des tableaux produits par Monsieur Eric X... à l'appui de ses demandes infondées » (conclusions récapitulatives de la société CGEO, p. 12) ; qu'en retenant néanmoins que cette pièce n° 12 n'était pas contestée par la société CGEO, la cour d'appel a modifié les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE la preuve du paiement, qui est un fait, peut être rapportée par tous moyens ; qu'il s'en déduit que le versement de frais professionnels peut tenir lieu de paiement des commissions prévues par le contrat de travail si la preuve est apportée que ces frais professionnels avaient été versés fictivement en lieu et place des commissions afin de faire échapper celles-ci aux cotisations sociales et à l'impôt sur le revenu ; qu'en retenant que le versement de frais professionnels ne peut tenir lieu de règlement de commissions, peu importe que le montant de ces frais paraissent correspondre à celui des commissions et qu'ils aient été réintégrés en salaires par l'Urssaf, la cour d'appel s'est prononcée par des considérations inopérantes et a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1341 du code civil ;
ALORS, DE TROISIÈME PART, QUE la fraude corrompt tout et que nul ne peut percevoir deux fois le paiement d'une même créance ; que l'employeur faisait valoir qu'en vertu d'un accord passé avec les anciens dirigeants de la société CGEO, que la nouvelle direction n'avait pas manqué de dénoncer dès sa prise de fonction, monsieur X... percevait les commissions prévues par son contrat de travail sous forme de remboursement de frais de déplacement fictifs, afin de faire échapper ces sommes aux cotisations sociales et à l'impôt sur le revenu ; qu'en refusant de rechercher si tel était bien le cas et si la condamnation de la société CGEO ne conduisait pas à permettre au salarié de percevoir deux fois le paiement d'une même créance, ainsi que l'avaient retenu les premiers juges, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe fraus omnia corrumpit.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-28124
Date de la décision : 09/11/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 03 octobre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 09 nov. 2016, pourvoi n°14-28124


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.28124
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