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19/10/2016 | FRANCE | N°15-18473

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 octobre 2016, 15-18473


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le second moyen, qui est préalable :

Vu l'article L. 1221-1 du code du travail et l'article 1315 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a saisi la juridiction prud'homale pour contester son licenciement pour motif économique prononcé le 12 juillet 2011 par la société Erscha industrie ; que cette société a fait l'objet, le 18 février 2013, d'un jugement de liquidation judiciaire, M. Y...étant désigné en qualité de liquidateur ; que l'AGS-CGEA de Nancy est intervenue p

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le second moyen, qui est préalable :

Vu l'article L. 1221-1 du code du travail et l'article 1315 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a saisi la juridiction prud'homale pour contester son licenciement pour motif économique prononcé le 12 juillet 2011 par la société Erscha industrie ; que cette société a fait l'objet, le 18 février 2013, d'un jugement de liquidation judiciaire, M. Y...étant désigné en qualité de liquidateur ; que l'AGS-CGEA de Nancy est intervenue pour contester l'existence d'un contrat de travail et soulever l'incompétence de la juridiction prud'homale ;

Attendu que pour déclarer le conseil de prud'hommes incompétent au profit de la chambre commerciale du tribunal de grande instance, l'arrêt retient qu'il résulte des attestations établies par MM. Z..., A...et B...que M. X... est l'inventeur et le créateur de la dalle à connexion multiple'CATDAL'dont les documents produits par M. X... démontrent que la commercialisation constituait son activité principale, qu'ainsi, M. X... détenait le monopole des connaissances techniques utiles pour l'activité de la société, les autres associés de la société n'apparaissant être que des partenaires financiers, que M. Z...précise encore que M. X... était l'homme le plus important de la société, tant au niveau commercial qu'au niveau du management et M. C..., gérant de société retraité, qui a également établi une attestation, le présente comme ayant été son partenaire commercial sans faire allusion à la société Erscha, que si M. X... produit le suivi des entretiens auprès de clients potentiels, aucun élément ne démontre que ce document manuscrit ait eu une autre finalité que personnelle et en particulier qu'il ait été établi aux fins de contrôle par le gérant de la société Erscha, qu'en effet, il s'avère purement descriptif et ne contient aucune explication ou analyse de son contenu au regard en particulier de l'activité déployée par son rédacteur, qu'il est établi sans entête et n'est pas accompagné d'un bordereau de transmission, que la liasse'suivi des affaires Erscha industrie'n'est quant à elle pas datée et qu'il n'est pas davantage démontré qu'elle ait été destinée à en référer à la direction de la société, que par ailleurs, M. X..., reconnaît lui-même dans ses écritures qu'il bénéficiait d'une forte autonomie dans l'exécution de sa mission et qu'il ne précise pas en quoi il aurait été soumis aux directives et consignes données par le responsable de la société Erscha, ou à ses observations, étant relevé que le compte rendu de la réunion Erscha du 14 décembre 2010 auquel il fait référence, sans autre explication, ne figure pas dans les annexes versées à la cour, pas davantage que celui de la réunion du 22 février 2011 qu'il cite également, qu'il sera encore rappelé, s'agissant de l'aveu judiciaire invoqué par M. X... comme découlant des conclusions prises en première instance pour le compte de la société Erscha, alors encore in bonis, qui n'a pas contesté sa qualité de salarié, que cet argument est inopérant puisque l'aveu judiciaire ne peut porter sur une question de droit et que l'existence ou la qualification juridique d'une situation ne peut dépendre de l'aveu d'une partie ;

Qu'en statuant ainsi, par des motifs en partie inopérants, alors qu'elle avait au préalable constaté l'existence d'un contrat de travail apparent, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé les textes susvisés ;

Et attendu qu'il n'est pas nécessaire de statuer sur le premier moyen ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 mars 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;

Condamne l'AGS-CGEA de Nancy aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'AGS-CGEA de Nancy à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf octobre deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me Haas, avocat aux Conseils, pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR déclaré la juridiction prud'homale incompétente pour connaître des demandes présentées par M. X..., D'AVOIR dit que le tribunal de grande instance est compétent pour connaître du litige et D'AVOIR renvoyé l'affaire devant la chambre commerciale de ce tribunal ;

AUX MOTIFS QUE, sur la recevabilité de l'AGS CGEA à contester l'existence du contrat de travail de M. X..., aux termes des dispositions des articles L. 3263-6 et suivants du code du travail, l'AGS bénéficie d'un droit propre pour contester le principe et l'étendue de sa garantie dans tous les cas où les conditions de celle-ci ne paraissent pas remplies ; qu'elle est donc recevable à contester l'existence d'une relation salariale liant M. X... à la société Erscha industrie, quand bien même cette société ne l'a pas contestée ;

ALORS QUE, devant la juridiction prud'homale, les règles de compétence d'attribution ne sont d'ordre public que si elles mettent en cause la compétence d'une juridiction répressive ou administrative ou celle de la juridiction française ; que la société Erscha n'a pas contesté la compétence de la juridiction prud'homale pour statuer sur les demandes formées à son encontre par M. X... ; que, dès lors, si l'AGS était recevable à mettre en cause l'existence d'un contrat de travail, cette contestation ne pouvait avoir d'effet que sur son obligation de garantie et non sur la compétence de la juridiction prud'homale pour statuer sur les demandes formées par M. X... contre la société Erscha ; que, par suite, en déclarant, sur la seule demande de l'AGS, la juridiction prud'homale incompétente pour statuer sur l'entier litige, la cour d'appel a violé les articles L. 1411-1, L. 1411-4, L. 3253-6 et L. 3253-14 du code du travail, ensemble l'article 92 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR déclaré la juridiction prud'homale incompétente pour connaître des demandes présentées par M. X..., D'AVOIR dit que le tribunal de grande instance est compétent pour connaître du litige et D'AVOIR renvoyé l'affaire devant la chambre commerciale de ce tribunal ;

AUX MOTIFS QU'en présence d'un contrat de travail apparent, il incombe à l'AGS CGEA de Nancy qui invoque son caractère fictif d'en rapporter la preuve ; qu'il résulte des attestations établies par MM. Z..., A...et B...que M. X... est l'inventeur et le créateur de la dalle à connexion multiple « Catdal » dont les documents produits par M. X... démontrent que la commercialisation constituait son activité principale ; qu'ainsi, M. X... détenait le monopole des connaissances techniques utiles pour l'activité de la société, les autres associés de la société n'apparaissant être que des partenaires financiers ;
que M. Z...précise encore que M. X... était l'homme le plus important de la société, tant au niveau commercial qu'au niveau du management et M. C..., gérant de société retraité, qui a également établi une attestation, le présente comme ayant été partenaire commercial sans faire allusion à la société Erscha ; que si M. X... produit le suivi des entretiens auprès de clients potentiels, aucun élément ne démontre que ce document manuscrit ait eu une autre finalité que personnelle et en particulier qu'il ait été établi aux fins de contrôle par le gérant de la société Erscha ; qu'en effet, il s'avère purement descriptif et ne contient aucune explication ou analyse de son contenu au regard en particulier de l'activité déployée par son rédacteur, il est établi sans entête et n'est pas accompagné d'un bordereau de transmission ; que la liasse « suivi des affaires Erscha Industrie » n'est quant à elle pas datée et il n'est pas davantage démontré qu'elle ait été destinée à en référer à la direction de la société ; que, par ailleurs, M. X..., reconnaît lui-même dans ses écritures qu'il bénéficiait d'une forte autonomie dans l'exécution de sa mission et il ne précise pas en quoi il aurait été soumis aux directives et consignes données par le responsable de la société Erscha, ou à ses observations, étant relevé que le compte tenu de la réunion Erscha du 14 décembre 2010 auquel il fait référence, sans autre explication, ne figure pas dans les annexes versées à la cour, pas davantage que celui de la réunion du 22 février 2011 qu'il cite également ; qu'il sera encore rappelé, s'agissant de l'aveu judiciaire invoqué par M. X... comme découlant des conclusions prises en première instance pour le compte de la société Erscha, alors encore in bonis, qui n'a pas contesté sa qualité de salarié, que cet argument est inopérant puisque l'aveu judiciaire ne peut porter sur une question de droit et que l'existence ou la qualification juridique d'une situation ne peut dépendre de l'aveu d'une partie ; qu'il s'évince des motifs qui précèdent que l'AGS-CGEA a établi à suffisance le caractère fictif du contrat de travail invoqué par M. Richard X... ; qu'il y a donc lieu de constater l'absence de relations salariales entre la Sarl Erscha Industrie et M. X... ;

ALORS, 1°), QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en se fondant, pour écarter l'existence d'un lien de subordination, sur l'absence à son dossier du compte rendu des réunions Erscha des décembre 2010 et 22 février 2011, sans inviter les parties à s'expliquer sur l'absence au dossier de ces pièces, que M. X... avait invoquées dans ses écritures et dont la communication n'était pas contestée par l'AGS CGEA de Nancy, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

ALORS, 2°), QU'en présence d'un contrat de travail apparent, il appartient à celui qui invoque son caractère fictif d'en apporter la preuve ; que le lien de subordination se caractérise par l'exécution d'un travail sous l'autorité de l'employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; qu'en se fondant, pour écarter l'existence d'un lien de subordination, sur le fait que M. X..., d'une part, ne démontrait pas que le document de suivi des entretiens des clients potentiels ait été établi aux fins de contrôle de son activité par le gérant de la société Erscha, d'autre part, ne précisait pas en quoi il aurait été soumis aux directives et consignes données par le responsable de la société Erscha, ou à ses observations, la cour d'appel, qui a fait peser sur le salarié la preuve de l'existence d'un lien de subordination, a violé les articles 1315 du code civil et L. 1221-1 du code du travail ;

ALORS, 3°), QUE le lien de subordination se caractérise par l'exécution d'un travail sous l'autorité de l'employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; qu'en se bornant à relever que la commercialisation des produits de l'entreprise, dont il était l'inventeur constituait l'activité principale de M. X..., que celui-ci détenait le monopole des connaissances techniques utiles à l'activité de la société, qu'il disposait d'une forte autonomie dans l'exécution de sa mission et qu'il était l'homme le plus important de la société tant au niveau commercial qu'au niveau du management, la cour d'appel, qui s'est déterminée par des motifs inopérants, impropres à exclure l'existence d'un lien de subordination, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 1221-1 et L. 1411-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-18473
Date de la décision : 19/10/2016
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 26 mars 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 oct. 2016, pourvoi n°15-18473


Composition du Tribunal
Président : Mme Vallée (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Haas

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.18473
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