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12/10/2016 | FRANCE | N°15-20887

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 octobre 2016, 15-20887


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 1121-1 et L. 1232-1 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'engagé le 9 décembre 2005 en qualité d'agent de sécurité par la société VPI sécurité aux droits de laquelle se trouve la société Aic finances, M. X... a été licencié pour faute par une lettre du 9 janvier 2007 ;
Attendu que pour dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et rejeter la demande de dommages-intérêts de ce chef, l'arrêt énonce que le sala

rié ne conteste pas la réalité de la lettre adressée le 17 décembre 2006 au directeur de ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 1121-1 et L. 1232-1 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'engagé le 9 décembre 2005 en qualité d'agent de sécurité par la société VPI sécurité aux droits de laquelle se trouve la société Aic finances, M. X... a été licencié pour faute par une lettre du 9 janvier 2007 ;
Attendu que pour dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et rejeter la demande de dommages-intérêts de ce chef, l'arrêt énonce que le salarié ne conteste pas la réalité de la lettre adressée le 17 décembre 2006 au directeur de l'établissement d'affectation, par laquelle il mettait en cause le responsable sécurité de cet établissement, mais dénonçait également son responsable direct au sein de la société VPI sécurité, lequel selon lui n'aurait pas non plus appliqué les consignes prescrites, que cette double démarche est révélatrice d'une absence totale de loyauté à l'égard de la société qui l'employait, puisqu'il n'a pas hésité à la court-circuiter et à la discréditer, que cette lettre a par ailleurs fait l'objet d'une réaction immédiate de la société cliente qui, par télécopie du 21 décembre 2006, a fait état des actions à mener afin que ces comportements ne se reproduisent plus à l'avenir, que les faits ci-dessus évoqués s'inscrivent au nombre de ceux susceptibles d'altérer les relations de confiance devant nécessairement exister entre l'employeur et les sociétés utilisatrices, qu'ils ont motivé des lettres de réprobation de ces dernières, qu'ainsi, ils suffisent à justifier le licenciement pour cause réelle et sérieuse ;
Qu'en statuant ainsi, sans caractériser l'existence, par l'emploi de termes injurieux, diffamatoires ou excessifs, d'un abus dans l'exercice de la liberté d'expression dont jouit tout salarié, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 juin 2015, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai ;

Condamne la société Aic finances aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Aic finances et la condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze octobre deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR dit le licenciement de M. X... justifié par une cause réelle et sérieuse et, en conséquence, d'AVOIR débouté le salarié de ses demandes indemnitaires ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE la lettre de licenciement fixe les limites du litige ; Qu'en l'espèce, le courrier du 9 janvier 2007, reçu par Ismaël X..., est libellé dans les termes suivants : « Nous vous avons entendu sur les faits reprochés, à savoir : Le 14 décembre, le client constate que vous discutez avec le personnel Client, contrairement aux consignes qui vous ont été rappelées à plusieurs reprises par votre responsable direct. Le 15 décembre, le responsable d'exploitation se rend sur le site pour vous rappeler, en présence du client, la même consigne, que vous interprétez à votre manière, et que vous refusez d'appliquer. Vous refusez de dire bonjour au Responsable Sécurité, sous prétexte que vous ne comprenez pas le fait qu'il vous impose l'application stricte des consignes du poste. Le 17 décembre, vous envoyez une lettre au Directeur d'établissement dans laquelle vous dénigrez le Responsable Sécurité client, et votre Responsable direct, négligeant totalement la hiérarchie de votre entreprise. Vous avez d'autre part des discussions avec les délégués syndicaux du client, que vous avez sollicité, au cours desquelles vous avez des propos diffamatoires à l'encontre du Responsable Sécurité. Le 19 décembre, vous sollicitez de votre propre initiative, la Responsable des ressources humaines Client, pour lui demander un entretien. Durant votre service, sans prévenir votre hiérarchie, vous abandonnez votre poste pendant 20 minutes, pour vous rendre à l'entretien. Le 21 décembre, alors que vous prenez connaissance d'un changement de votre planning, faisant suite aux événements précités, vous menacez votre Responsable, précisant que si vous êtes planifié sur la CPAM, site où vous avez été formé, vous allez y mettre le'désordre'et que l'autre agent'va vite apprendre à vous connaître'. Suite à ce nouvel incident, notre client ne souhaite plus vous voir affecté sur son établissement, ce qu'il notifie par un courrier en date du 5 janvier 2007. Les explications que vous nous avez fournies pendant l'entretien ne justifient d'aucune manière vos comportements. Plusieurs faits avérés, qui vous sont reprochés, justifient à eux seuls un motif de faute professionnelle grave. Outre le fait que les clients ne souhaitent plus votre présence sur leur site, pour insuffisance professionnelle et écarts de comportement, les conséquences de vos actes sont de nature à occasionner de graves préjudices commerciaux. En effet, par vos manquements répétés et vos attitudes irresponsables, vous semez le discrédit sur l'entreprise et vos collègues de travail. Dans ces conditions, votre maintien dans l'entreprise est rendu impossible. Nous avons par conséquent, décidé de vous notifier par mesure de clémence, votre licenciement pour cause réelle et sérieuse, votre attitude étant jugée incompatible avec votre mission... » ; Attendu que les menaces de mettre le désordre sur le site de la CPAM, non expressément contestées par Ismaël X..., ne sont d'évidence pas demeurées lettre morte, si l'on en juge par le courrier adressé par M. Gérard Z..., Directeur de l'établissement susvisé, à M. Patrick A..., Directeur Régional de VPI Sécurité, étant observé qu'en dépit de l'erreur de date ayant manifestement entaché ce document, Ismaël X... n'a jamais mis en cause le fait que ledit document était bien consécutif à son affectation sur le site de la CPAM, postérieurement au 21 décembre 2006 ; Qu'il convient en outre de relever que si un tel courrier avait effectivement été envoyé à l'employeur de Ismaël X... le 6 janvier 2006 et non 2007, le dit employeur n'aurait évidemment pas affecté, moins d'un an plus tard, le salarié sur un site où celui-ci avait été jugé'indésirable'; Attendu qu'en tout état de cause, Ismaël X... ne conteste pas s'être rendu le 19 décembre 2006, durant ses heures de services, auprès de la Responsable de la société A-Novo, auprès de laquelle il était affecté par son employeur ; Que pour ce faire, il résulte des éléments du dossier qu'il a quitté l'unité 1, périmètre de son activité, pour se rendre sur l'unité 2 ; que l'on ne se trouvait pas dans la cadre d'une ronde d'ouverture ou de fermeture prévue par le règlement intérieur et habituellement exécutée par l'agent de service de l'unité 1 ; Que la circonstance que le salarié ait eu par devers lui son téléphone de service ne saurait justifier le fait d'avoir quitté son unité sans motif de service et sans en avoir au préalable averti sa hiérarchie ; Attendu que Ismaël X... ne conteste pas davantage la réalité du courrier, du reste versé aux débats, adressé le 17 décembre à M. Pierre Olivier C..., Directeur de l'établissement d'affectation, à savoir la société A-Novo ; Que par le courrier susvisé, le salarié mettait en cause M. D..., Responsable Sécurité de A-Novo mais dénonçait également son responsable direct au sein de la société VIP Sécurité, lequel selon lui n'aurait pas non plus appliqué les consignes prescrites ; Attendu que cette double démarche est révélatrice d'une absence totale de loyauté à l'égard de la société qui employait Ismaël X..., lequel n'a pas en effet, hésité à la court-circuiter et à la discréditer ; Qu'elle a par ailleurs fait l'objet d'une réaction immédiate de la société cliente A-Novo qui, par télécopie du 21 décembre 2006 signée de M. Claude E..., a fait état'des actions à mener afin que ces comportements ne se reproduisent plus à l'avenir'; Attendu que les faits ci-dessus évoqués s'inscrivent au nombre de ceux susceptibles d'altérer les relations de confiance devant nécessairement exister entre l'employeur et les sociétés utilisatrices ; qu'ils ont motivé des courriers de réprobation de ces dernières ; Qu'ainsi, ils suffisent à justifier le licenciement pour cause réelle et sérieuse de l'appelant, n'étant par ailleurs nullement démontré que ce licenciement n'aurait eu d'autre fondement qu'une discrimination physique ou religieuse, étant relevé que de telles allégations sont en contradiction avec les propres déclarations de Ismaël X... selon lesquelles il était envisagé par sa hiérarchie de le promouvoir au poste de contrôleur ; Attendu qu'il conviendra de confirmer le Conseil de Prud'hommes en ce qu'il a débouté Ismaël X... de ses demandes (arrêt, pages 3 à 6) ;
ET AUX MOTIFS, ADOPTES DES PREMIERS JUGES, QUE M. X... a été sanctionné par une mise en garde en date du 18 décembre sur les faits du 14 décembre 2006 ; que le principe « non bis in idem » fait obstacle à ce qu'une même faute fasse l'objet de deux sanctions successives ; que le compte rendu de la réunion du vendredi 15 décembre, non utilement contesté par M. X... Ismaël, rappelle à ce dernier la consigne devant être appliquée à la lettre, à la demande du client : « ne pas parler avec le personnel A Novo » ; cette consigne non respectée ayant fait l'objet de la mise en garde sur les faits du 14 décembre ; en conséquence, il y a lieu de dire justifié dans la lettre de licenciement le rappel des faits du 14 décembre et de considérer ce rappel comme motif inopérant pour justifier le licenciement ; qu'aucun élément probant ne vient étayer une faute de M. X... pour la journée du 15 décembre 2006 ; en conséquence, il y a lieu de dire ce motif lié à la journée du 15 décembre 2006 comme inopérant ; que le client A Novo par fax de M. E..., informe la direction de la SAS VPI Sécurité que M. X... a écrit le 17 décembre à la direction d'A Novo ; que M. E...précise que le courrier de M. X... : relate des désaccords concernant des consignes que M. X... n'appliquait pas car non écrites, met en cause le comportement « agressif » de M. D...qui lui aurait rappelé les consignes qu'A Novo souhaitait voire appliquées ; que M. E...précise dans ce fax que lors de la réunion du 15 décembre, M. X... a reconnu les manquements aux consignes et s'est engagé à y remédier et que cette réunion s'est conclue tout à fait cordialement ; que M. E...précise par ailleurs que M. X... a fait part à un des délégués syndicaux d'A Novo que M. D...ne supportait plus son « look » et que les propos de M. X... sont selon lui diffamatoires et aggravés par le fait que M. X... n'ait pas à exposer ses problèmes à notre personnel ; que le contrat de travail doit faire l'objet d'une exécution loyale par les parties ; que les propos tenus par M. X... dans le courrier adressé à la direction d'A Novo, à l'encontre de M. D..., membre d'A Novo, sont de nature diffamatoire faute d'élément attestant d'un comportement méprisant et agressif de M. D...; que dans ce même courrier adressé à la direction d'A Novo, M. X... conteste la sanction prise par son employeur en accusant par ailleurs son responsable de ne pas respecter les consignes ; que le courrier adressé à la direction d'A Novo, client de la SAS VPI Sécurité, méconnaît totalement l'obligation de loyauté qui liait M. X... à la SAS VPI Sécurité de par le contrat de travail ; que ce grief est opérant et non utilement contesté ; en conséquence, et sans qu'il soit nécessaire de vérifier les autres griefs contenus dans la lettre de licenciement, il convient de dire le licenciement de M. X... Ismaël pour cause réelle et sérieuse justifié ; en conséquence, M. X... Ismaël sera débouté de sa demande indemnitaire au titre du licenciement abusif (jugement, pages 3 à 5) ;
1°/ ALORS QUE sauf abus résultant de propos injurieux, diffamatoires ou excessifs, le salarié jouit, dans l'entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d'expression à laquelle seules des restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché peuvent être apportées ;
Qu'en l'espèce, pour dire le licenciement de M. X... justifié par une cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a relevé que dans un courrier du 17 décembre 2006, adressé au directeur de l'établissement d'affectation, le salarié mettait en cause M. D..., responsable sécurité de cette entreprise et dénonçait également son responsable direct au sein de la société VPI Sécurité, en ce qu'il n'aurait pas appliqué les consignes prescrites ; qu'elle en a déduit que cette démarche révélait l'absence de loyauté à l'égard de son employeur qu'il aurait court-circuité et discrédité ;
Qu'en statuant ainsi, sans indiquer en quoi la lettre litigieuse, aux termes de laquelle le salarié se bornait à défendre légitimement ses intérêts en faisant état du traitement incorrect dont il faisait l'objet, aurait comporté des termes injurieux, diffamatoires ou excessifs, la cour d'appel, qui se détermine par une motivation insuffisante et inopérante, a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L 1121-1 et L 1232-1 du code du travail ;
2°/ ALORS QU'en se bornant à relever que dans un courrier du 17 décembre 2006, adressé au directeur de l'établissement d'affectation, le salarié mettait en cause M. D..., responsable sécurité de cette entreprise et dénonçait également son responsable direct au sein de la société VPI Sécurité, en ce qu'il n'aurait pas appliqué les consignes prescrites, pour en déduire que cette démarche révélait l'absence de loyauté à l'égard de son employeur qu'il aurait court-circuité et discrédité, sans répondre au chef péremptoire des conclusions d'appel du salarié, développées oralement à l'audience, qui faisait valoir qu'il s'était borné, ce qui était parfaitement légitime, à dénoncer les faits de discrimination dont il se disait victime, et dont il démontrait la réalité par divers témoignages, de sorte que sa démarche ne pouvait lui être imputée à faute, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
3°/ ALORS QU'en retenant à la charge du salarié le fait d'avoir menacé de mettre le désordre sur le site de sa nouvelle affectation, au sein de la CPAM, sans répondre au chef péremptoire des conclusions d'appel de l'exposant, développées oralement à l'audience, qui faisait valoir que la démarche de l'employeur était malicieuse, dès lors qu'il savait que le responsable de ce site avait tenu des propos discriminatoires à l'endroit de M. X..., de sorte que ce dernier était fondé à refuser une telle affectation et n'avait fait qu'exprimer sa crainte légitime de subir, à nouveau, un grave préjudice, la Cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ ALORS QU'en retenant à la charge du salarié, le fait, qualifié d'abandon de poste, d'avoir participé à une réunion avec les responsables de la société cliente, sans répondre au chef péremptoire des conclusions d'appel de l'exposant, développées oralement à l'audience, qui faisait valoir que cette réunion avait été proposée par Mme F..., directrice des ressources humaines de la société cliente, et alors que dans un courrier du 21 décembre 2006, le dirigeant de cette société énonçait que cette réunion s'était « conclue tout à fait cordialement », ce dont il résulte que cet entretien s'était tenu en accord avec la société cliente, de sorte que l'absence du salarié de son poste, pendant un temps très court, ne pouvait ni caractériser un abandon de poste, ni même lui être imputée à faute, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-20887
Date de la décision : 12/10/2016
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 02 juin 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 oct. 2016, pourvoi n°15-20887


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Coutard et Munier-Apaire, SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.20887
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