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06/10/2016 | FRANCE | N°15-17227

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 06 octobre 2016, 15-17227


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 2254-1 du code du travail et l'article 17 de l'accord national interprofessionnel des voyageurs, représentants, placiers du 3 octobre 1975 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 10 octobre 1990 par la société Dipco, aux droits de laquelle est venue la société Argos hygiène, en qualité de VRP, a été licencié le 16 novembre 2012 ;
Attendu que, pour condamner l'employeur à payer une somme à titre de dommages-intérêts en réparation de

l'illicéité de la clause de non-concurrence, l'arrêt retient que la clause, qui n...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 2254-1 du code du travail et l'article 17 de l'accord national interprofessionnel des voyageurs, représentants, placiers du 3 octobre 1975 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 10 octobre 1990 par la société Dipco, aux droits de laquelle est venue la société Argos hygiène, en qualité de VRP, a été licencié le 16 novembre 2012 ;
Attendu que, pour condamner l'employeur à payer une somme à titre de dommages-intérêts en réparation de l'illicéité de la clause de non-concurrence, l'arrêt retient que la clause, qui ne contient ni contrepartie financière ni mention renvoyant aux dispositions de la convention collective, se trouve frappée de nullité pour ce motif et a nécessairement causé un préjudice au salarié ;
Attendu, cependant, qu'aux termes du premier des articles susvisés, lorsque l'employeur est lié par les clauses d'une convention collective ou d'un accord, ces clauses s'appliquent aux contrats conclus avec lui sauf dispositions plus favorables ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Argos hygiène à payer à M. X... la somme de 29 000 euros au titre du préjudice lié à la nullité de la clause de non-concurrence, l'arrêt rendu le 25 février 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Limoges ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six octobre deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Argos hygiène
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la clause de non concurrence stipulée au contrat de travail de Monsieur X... était nulle et d'AVOIR condamné la société ARGOS à lui payer la somme de 29.000 € à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE « sur la demande formée par Monsieur Olivier X... au titre de la nullité de la clause de non-concurrence – Le salarié fait valoir que bien qu'ayant été libéré de cette clause au jour de son licenciement, celle-ci a limité ses capacités de recherches d'un autre travail durant toute la période d'emploi. La société Argos Hygiène objecte que la clause de non concurrence ne joue qu'après rupture de la relation contractuelle et qu'en l'espèce elle a libéré M. X... de cette clause dès son licenciement, ce dont il se déduit que ce dernier n'a subi aucun préjudice. En application du principe fondamental du libre exercice d'une activité professionnelle et des dispositions de l'article L 1121-1 du code du travail, une clause de non-concurrence n'est licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'employeur, limitée dans le temps et dans l'espace, tient compte des spécificités de l'emploi du salarié et comporte l'obligation pour l'employeur de verser au salarié une contrepartie financière sérieuse, étant observé que ces conditions sont cumulatives. A défaut de limite ou de contrepartie financière, la clause stipulée entre les parties est illicite et le salarié doit être indemnisé du préjudice que le respect de cette clause illicite lui a nécessairement causé. Or en l'espèce il est constant que la clause de non concurrence contenue dans l'avenant n° 3 au contrat de travail liant les parties ne contient aucune contrepartie financière. Cette clause, qui ne contient aucune disposition renvoyant aux dispositions de la convention collective se trouve donc frappée de nullité à ce motif, et a nécessairement causé un préjudice à M. Olivier X.... La société Argos Hygiène ayant libéré M. Olivier X... de cette clause, le préjudice de ce dernier est né de l'interdiction qui a pesé sur lui, durant l'exécution du contrat, de quitter l'entreprise pour exercer les activités prohibées par la clause. Aussi, la cour, tenant compte des éléments de l'espèce pour l'appréciation du préjudice subi par M. Olivier X..., et notamment de l'étendue de l'interdiction faite au salarié ayant eu pour effet de porter atteinte à sa liberté d'exercer une activité professionnelle et de la durée pendant laquelle la clause litigieuse s'est imposée à ce dernier, condamne la société Argos Hygiène à payer à M. Olivier X... la somme de 29 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice et confirme le jugement déféré sur ce point » ;
ET AUX MOTIFS, DES PREMIERS JUGES, EN LES SUPPOSANT ADOPTÉS, QUE « Sur la clause de non-concurrence. L'avenant n° 3 en date du 1er juillet 1999 du contrat de travail de Monsieur X... prévoyait une clause de non-concurrence en son "Article XVI-Non-concurrence" : " (…) Monsieur X... s'interdit en cas de cessation du présent contrat quelle qu'en soit la cause :- De s'intéresser directement ou indirectement et sous quelque forme que ce soit, à une entreprise du même ordre qu'ARGOS-COFIDAVE, ou représenter et faire représenter des produits identiques ou similaires à ceux distribués par ARGOS-COFIDAVE. Cette interdiction de concurrence est limitée à une période de 2 ans (deux ans) commençant le jour de la cessation effective du contrat tant sur le secteur qu'occupait Monsieur Olivier X... que sur le territoire d'activité d'ARGOS-COFIDAVE. Toute violation de la présente clause de non-concurrence rendra automatiquement Monsieur Olivier X... redevable d'une pénalité fixée, dès à présent, aux dix-huit meilleures rémunérations dont Monsieur Olivier X... aura bénéficiées durant l'exécution du présent contrat sans qu'il soit besoin d'une mise en demeure d'avoir à cesser l'activité concurrentielle. En cas de rupture dans les 12 premiers mois d'activité, ladite indemnité sera égale à 12 fois la rémunération moyenne mensuelle. De même, Monsieur Olivier X... sera, dès lors, tenu de restituer à ARGOS-COFIDAVE toutes les sommes qui lui auront été réglées au titre de l'indemnité de non-concurrence. Le paiement de cette indemnité ne porte pas atteinte aux droits que la société se réserve expressément de poursuivre Monsieur Olivier X... en remboursement du préjudice pécuniaire et moral effectivement subi et de se faire ordonner, sous astreinte, la cessation de l'activité concurrentielle. Monsieur Olivier X... reconnaît, toutefois, le droit à ARGOS-COFIDAVE de renoncer unilatéralement à l'exécution de ladite clause ou d'en réduire la durée. En ce cas, l'indemnité compensatrice ne sera pas due ou sera réduite en fonction de sa durée d'application" ; Considérant que cette clause de non-concurrence ne prévoit pas de contrepartie financière au profit de Monsieur X..., le Conseil juge qu'elle est nulle. Or, la stipulation dans le contrat de travail d'une clause de non-concurrence nulle cause nécessairement un préjudice au salarié qui peut en demander l'indemnisation. Il importe peu que le salarié n'ait pas eu à la respecter après la rupture de son contrat de travail ; Le Conseil décide qu'il y a lieu de faire droit à la demande d'indemnisation de Monsieur X... et fixe l'indemnité à 29.000 € » ;
ALORS, TOUT D'ABORD, QUE lorsque l'employeur est lié par les clauses d'une convention ou d'un accord, ces clauses s'appliquent aux contrats de travail conclus avec lui sauf dispositions plus favorables ; que l'Accord national interprofessionnel des voyageurs, représentants, placiers du 3 octobre 1975, dont il était constant aux débats qu'il régissait la relation de travail prévoit, en son article 17, une contrepartie financière en cas de clause de non concurrence ; qu'en déclarant illicite la clause de non concurrence stipulée au contrat de travail, au motif qu'elle ne comportait pas de contrepartie financière et ne renvoyait pas aux dispositions de l'Accord national interprofessionnel des voyageurs, représentants, placiers du 3 octobre 1975, cependant que la disposition de l'accord collectif prévoyant une contrepartie financière de la clause de non-concurrence, plus favorable que le contrat de travail qui n'en prévoyait pas devait recevoir application, la cour d'appel a violé l'article L. 2254-1 du Code du travail ensemble l'article 17 de l'Accord national interprofessionnel des voyageurs, représentants, placiers du 3 octobre 1975 ;
ALORS, ENSUITE ET SUBSIDIAIREMENT, QUE la cour d'appel s'est fondée, pour déclarer illicite la clause de non concurrence litigieuse, sur le fait qu'elle ne comportait aucune contrepartie financière et ne renvoyait pas aux dispositions de l'Accord national interprofessionnel des voyageurs, représentants, placiers du 3 octobre 1975 (lequel prévoit, en son article 17, une contrepartie financière en cas de clause de non concurrence) ; qu'en statuant de la sorte, cependant que la clause résultait d'un avenant n° 3 au contrat de travail, lequel précisait expressément qu'il laissait inchangées les autres dispositions du contrat dont l'article 1er, issu d'un avenant n° 1 en date du 21 février 1992, faisait référence à l'Accord national interprofessionnel des voyageurs, représentants, placiers du 3 octobre 1975, la cour d'appel a dénaturé le contrat de travail, violant ainsi le principe de l'interdiction faite au juge de dénaturer les documents de la cause et l'article 1134 du Code civil ;
ALORS, ENFIN ET EN TOUTE HYPOTHÈSE, QU'en se contentant d'observer que la clause de non concurrence litigieuse ne faisait pas référence à l'Accord national interprofessionnel des voyageurs, représentants, placiers du 3 octobre 1975, et en s'abstenant de rechercher si le contrat de travail en son ensemble ne faisait pas expressément référence audit Accord national, de telle sorte que la contrepartie financière à la clause de non-concurrence prévue par l'article 17 de l'accord national interprofessionnel des VRP du 3 octobre 1975 s'appliquait de plein droit, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du Code du travail et 1134 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-17227
Date de la décision : 06/10/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 25 février 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 06 oct. 2016, pourvoi n°15-17227


Composition du Tribunal
Président : M. Ludet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Zribi et Texier

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.17227
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