La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/10/2016 | FRANCE | N°16-82416

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 04 octobre 2016, 16-82416


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Christophe X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, en date du 10 mars 2016, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 4 novembre 2015, n° 15-82.456), dans l'information suivie contre lui des chefs de vols aggravés, recel, détournement d'objets placés sous scellés, escroquerie, corruption et travail dissimulé, a prononcé sur sa demande d'annulation de pièces de la procédure ;

La COUR, statuant après

débats en l'audience publique du 20 septembre 2016 où étaient présents dans la for...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Christophe X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, en date du 10 mars 2016, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 4 novembre 2015, n° 15-82.456), dans l'information suivie contre lui des chefs de vols aggravés, recel, détournement d'objets placés sous scellés, escroquerie, corruption et travail dissimulé, a prononcé sur sa demande d'annulation de pièces de la procédure ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 20 septembre 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Ascensi, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire ASCENSI, les observations de la société civile professionnelle SPINOSI et SUREAU, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAGAUCHE ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 11 juillet 2016, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 41, 62-2, 62-3, 63, 63-1, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que la chambre de l'instruction a rejeté le moyen tiré de la nullité de la garde à vue du demandeur ;
"aux motifs qu'il résulte de la procédure que c'est le même magistrat du parquet, en l'espèce le procureur-adjoint, M. Olivier Y..., qui a saisi en enquête préliminaire dès décembre 2003 le service DIGPN des Bouches-du-Rhône après avoir pris connaissance des dénonciations faites par M. Dominique Z... quant aux agissements reprochés à plusieurs policiers de Martigues, puis de l'audition de celui-ci adressée par mail après qu'il ait demandé qu'il soit entendu ; que le même magistrat du parquet a demandé à être régulièrement informé de l'évolution de cette enquête préliminaire pour lesquels les actes précédant les mesures de garde à vue portent la mention qu'il s'agit d'une affaire de « vols et recels de vols c/ fonctionnaires de la CSP de Martigues » ; que l'audition de M. Dominique Z..., en date du 6 février 2014, mentionne le nom de M. X... comme étant un des auteurs suspectés des faits ; que la même audition fait état d'une « affaire de voleurs de DAB », de cadeaux reçus de « la banquière », de revente de cuivre appréhendé dans plusieurs affaires et alimentant une « caisse noire » du groupe de policiers, et s'agissant de M. X... il est également relaté l'usage d'une arme de service dont le canon aurait été collé sur la tête d'une personne interpellée ; que l'autorité, en date du 13 juin 2014, de faire usage des dispositions de l'article 78 du code de procédure pénale porte en marge, en plus de « vols et recels de vols », la qualification de « détournements d'objets placés sous scellés ou main de justice » ; que le même magistrat, M. Olivier Y..., procureur-adjoint, apparaît à l'origine de cette autorisation ; que ce sont les mêmes qualification qui sont visées dans l'avis à magistrat ; que la mise en examen de M. X... retiendra en plus les faits d'escroquerie, corruption passive, violences avec arme, comme c'était le cas d'ailleurs de l'avis de placement en garde à vue qui a été faxé par le commandement de l'IGPN de Marseille sans que l'heure n'apparaisse sur le dossier numérisé ; qu'en tout état de cause, un message daté du 17 juin 2014 à 7 heures 15 capté sur l'écran du téléphone professionnel du procureur de la République mentionnant « M. Olivier Y... les quatre policiers en gav. Les perquisitions en cours. Olivier » corrobore s'il en est besoin que le procureur-adjoint après avoir suivi cette affaire depuis son début, ayant parfaitement connaissance des motifs de cette garde à vue qui fait suite à des actes qu'il a lui-même suscité , en informe, s'agissant de policiers placés en garde à vue, son supérieur hiérarchique ; que, lors de son audition en garde à vue, assisté d'un avocat, il a été préalablement demandé à M. X... s'il avait des déclarations à faire spontanément sur les motifs de sa garde à vue ; qu'il a alors répondu par la négative ; que la première comparution devant le juge d'instruction qui a suivi cette garde à vue donnera lieu à un interrogatoire accepté par l'intéressé, toujours en présence de son avocat ; qu'il a porté sur les mêmes faits et la même qualification que celle requise par le procureur-adjoint ; que c'est celle qui sera retenue à l'encontre de M. X... ; que, dans ces conditions, la mesure de contrainte à laquelle a été soumis M. X... a été décidée sous le contrôle de l'autorité judiciaire, en la personne de M. Olivier Y..., procureur-adjoint ; que, loin de contredire les dispositions des articles 62-2 et 78 du code de procédure pénale, ni celles de l'article 6 de la Convention européenne des droit de l'homme, elle s'est effectuée en pleine connaissance de ses motifs tant par l'intéressé lui-même que par le magistrat qui en contrôlait le déroulement dès lors qu'il se déduit de la procédure que celle-ci initiée par ce magistrat du parquet a donné lieu à des qualifications et une mesure de garde à vue dont le procureur-adjoint du parquet d'Aix a validé en temps réel le bien-fondé avant de faire ouvrir une information et de déférer l'intéressé devant un magistrat instructeur ;
"1°) alors que dans sa décision du 4 novembre 2015, par laquelle elle a censuré l'arrêt ayant rejeté la requête en nullité de la garde à vue du demandeur, la chambre criminelle a elle-même constaté, au vu des pièces de la procédure qu'elle a examinées, qu'au-delà du message ne comportant aucune indication sur les motifs ni les qualifications notifiées à l'intéressé, il n'existait aucune « indication complémentaire » permettant de présumer que l'avertissement du parquet avait été opéré de façon régulière ; que c'est en violation de l'arrêt précité que la chambre de l'instruction a cru pouvoir considérer que les éléments du dossier permettaient de présumer la régularité de l'information du parquet ;
"2°) alors que l'information régulière du procureur de la République quant aux motifs de la garde à vue et à la qualification des faits ne saurait être déduite du seul fait que ce dernier a ordonné l'ouverture de l'enquête et en a assuré le suivi ; qu'en jugeant qu'un message ne contenant aucune indication sur les qualifications retenues avait pu corroborer « que le procureur-adjoint après avoir suivi cette affaire depuis son début, [avait] parfaitement connaissance des motifs de cette garde à vue, qui fait suite à des actes qu'il a lui-même suscité, en informe », la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;
"3°) alors que le procureur de la République doit être avisé de l'ensemble des qualifications retenues au moment du placement en garde à vue ; que, si la chambre de l'instruction affirme que les qualifications de vols et recels de vols puis de détournement d'objets placés sous scellés ou main de justice ont été évoquées au cours de l'enquête, elle admet implicitement mais nécessairement qu'à l'occasion de la garde à vue intervenue ultérieurement, ont, en outre, été retenues les qualifications d'escroquerie, de corruption passive et de violences à avec arme ; que, dans ces conditions, la chambre de l'instruction ne pouvait considérer que l'article 63 du code de procédure pénale a été respecté" ;
Vu l'article 63 du code de procédure pénale ;
Attendu que, selon ce texte, l'officier de police judiciaire qui place une personne en garde à vue doit, dès le début de la mesure, en informer par tout moyen le procureur de la République, lui donner connaissance des motifs de ce placement et lui indiquer la qualification des faits notifiée à l'intéressé ; que le défaut d'accomplissement de ces formalités fait nécessairement grief à la personne concernée ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. X..., fonctionnaire de police, a été placé en garde à vue le 17 juin 2014 à 6 heures 30 dans le cadre d'une enquête ouverte sur instruction du procureur de la République à la suite notamment de la disparition de valeurs et d'objets divers lors de contrôles d'identité ou de perquisitions ; que, mis en examen des chefs susvisés, il a saisi la chambre de l'instruction d'une requête en annulation des actes accomplis au cours de sa garde à vue au motif que l'officier de police judiciaire avait avisé le procureur de la République tardivement ;
Attendu que pour écarter le moyen de nullité, l'arrêt relève que, si le message adressé par le procureur-adjoint au procureur de la République pour l'informer du placement en garde à vue du demandeur ne comportait ni les motifs de cette mesure ni les qualifications notifiées à l'intéressé par l'officier de police judiciaire, il résulte cependant des pièces du dossier que le procureur-adjoint a saisi les enquêteurs des faits objet des investigations après avoir pris connaissance de l'audition du plaignant qui mentionnait le nom des policiers en cause et relatait l'ensemble des faits qui lui étaient reprochés et que l'autorisation en date du 13 juin 2014 de faire usage des dispositions de l'article 78 du code de procédure pénale porte en marge certaines des qualifications qui ont été notifiées à M. X... lors de son placement en garde à vue ; que les juges en déduisent que la mesure de contrainte à laquelle a été soumis l'intéressé a été décidée sous le contrôle de l'autorité judiciaire, en la personne du procureur-adjoint, qui en connaissait les motifs ainsi que les qualifications notifiées ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors que, d'une part, il ne saurait être déduit de la seule connaissance que le procureur-adjoint avait des faits objet des investigations des enquêteurs, ni de ce que l'autorisation de faire usage des dispositions de l'article 78 du code de procédure pénale porte en marge certaines des qualifications qui ont été notifiées au demandeur, dès lors que cette autorisation a été délivrée verbalement et a été mentionnée sur un procès-verbal établi par l'officier de police judiciaire lui-même, que le procureur de la République avait connaissance des motifs du placement en garde à vue et des qualifications notifiées à l'intéressé par l'officier de police judiciaire, d'autre part, la Cour de cassation est en mesure de s'assurer, par le contrôle des pièces de la procédure, qu'aucune autre indication complémentaire dans le dossier de la procédure ne permet d'établir que le procureur-adjoint avait été régulièrement avisé par l'officier de police judiciaire des motifs du placement en garde à vue ni des qualifications notifiées au demandeur, la chambre de l'instruction a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 10 mars 2016, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quatre octobre deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 16-82416
Date de la décision : 04/10/2016
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-En-Provence, 10 mars 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 04 oct. 2016, pourvoi n°16-82416


Composition du Tribunal
Président : M. Guérin (président)
Avocat(s) : SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:16.82416
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award