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28/09/2016 | FRANCE | N°15-85049

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 28 septembre 2016, 15-85049


Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Grégory X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 5-12, en date du 29 juin 2015, qui, pour abus de biens sociaux et usage de faux, l'a condamné à quatre mois d'emprisonnement avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 15 juin 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Zerbib, conseiller rapporteur, M. Soulard, conseiller de la chambre ;
Greffier

de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de Mme le conseiller ZERBIB, les observations ...

Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Grégory X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 5-12, en date du 29 juin 2015, qui, pour abus de biens sociaux et usage de faux, l'a condamné à quatre mois d'emprisonnement avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 15 juin 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Zerbib, conseiller rapporteur, M. Soulard, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de Mme le conseiller ZERBIB, les observations de la société civile professionnelle SPINOSI et SUREAU, la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIÉ, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GAILLARDOT ;
Vu les mémoires en demande, en défense et les observations complémentaires produits ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 241-3, L. 241-9 du code de commerce, 441-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que la cour d'appel a reconnu M. X... coupable d'abus de biens sociaux et d'usage de faux et l'a condamné à une peine d'emprisonnement délictuel de quatre mois avec sursis, ainsi qu'au paiement de 484 280, 37 euros de dommages-intérêts au profit de l'Emj mandataires judiciaires, ès qualité de liquidateur judiciaire de la societe parisienne d'investissement Montaigne (SPIM) ;
" aux motifs que'à la suite d'une plainte avec constitution de partie civile de la société SPIM du 26 juin 2007 puis d'une information judiciaire, M. X... est prévenu d'avoir à Paris, courant 2003, 2004, 2005 et 2006 ; qu'étant gérant de droit de la société SPIM, fait de mauvaise foi des biens de cette société un usage qu'il savait contraire à l'intérêt de celle-ci, à des fins personnelles, ou pour favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle il était directement ou indirectement intéressé, en l'espèce en versant à des entreprises ou à des particuliers des fonds appartenant à la SPIM pour un montant de 1 500 000 euros,. altéré la vérité d'écrits destinés à établir la preuve d'un droit ou d'un fait ayant des conséquences juridiques, en l'espèce en falsifiant des relevés de comptes bancaires, des factures et autres documents et fait usage des dits faux et ce au préjudice de la SPIM ; qu'il est plus précisément reproché à M. X..., qui a été gérant de droit de la société SPIM entre juin 2003 et le 12 décembre 2006, d'avoir, en co-action avec M. Y..., qui en était le gérant de fait, d'une part, commis des détournement, essentiellement au profit de M. Y... mais aussi à son profit personnel, d'autre part, établi des faux contrats, des fausses factures et des faux relevés de compte en banque destinés les premiers à justifier les détournements en comptabilité, les seconds à tromper la vigilance de la société Bel air immobilier, qui détenait 75 % du capital de la société ; que concernant les détournements commis au profit de M. Y..., il ressort du jugement, dont celui-ci n'a pas relevé appel, que celui-ci ; que de première part, a, entre le mois de novembre 2003 et le mois de décembre 2004, fait émettre des chèques de la société SPIM à l'ordre de six membres de sa proche famille pour un montant de 294 651, 19 euros, à charge pour ceux-ci de lui en reverser l'équivalent pour ses dépenses personnelles,. de deuxième part, a, entre le 5 juillet et le 31 août 2004, fait émettre six chèques d'un montant de 117 357, 18 euros à l'ordre de son " chauffeur ", M. Frédéric Z..., à charge pour celui-ci d'établir des chèques à son profit pour ses dépenses personnelles, de troisième part, a, entre le 5 août 2004 et le 10 septembre 2004, fait prendre en charge par la société SPIM des travaux de rénovation de l'appartement de la rue Boissière de son ex-épouse, Mme Brigitte Y..., pour un montant de 31 572 euros ; que les détournements commis au profit personnel de M. X..., celui-ci a, entre le 12 novembre 2003 et le 5 février 2004, fait émettre à son ordre, outre son salaire mensuel de 1 350 euros, cinq chèques d'un montant total de 40 700 euros :-12 novembre 2003 : 3 700 euros,-19 novembre 2003 : 9 000 euros,-15 décembre 2003 : 13 000 euros,-4 février 2004 : 10 000 euros,-5 février 2004 : 5 000 euros ; que concernant les faux documents destinés à justifier les détournements en comptabilité, le jugement a relevé :- des fausses factures de conseil immobilier pour justifier les chèques émis en faveur de membres de la famille de M. Y...,- un faux contrat d'agent commercial en date du 7 janvier 2004 entre la société SPIM et M. Y... pour justifier de la perception par ce dernier de rémunérations par l'intermédiaire de membres de sa famille ; que concernant les faux documents destinés à tromper la vigilance de la société Bel air immobilier, il ressort de la procédure qu'entre le 31 décembre 2003 et le 31 mai 2006, M. X... leur a falsifié des relevés totalement fabriqués des deux comptes de la société SPIM ouverts à la Caisse d'épargne, occultant la plupart des paiements par chèques ainsi que les incidents de paiement, agios et autres frais bancaires, dissimulant l'ampleur des débits en 2005, 2006 :- sur le compte courant, un solde débiteur apparent de 8 000 euros alors qu'il était en réalité de 123 000 euros,. sur le compte promoteur, un compte débiteur apparent de 113 000 euros alors qu'il était en réalité de 965 000 euros ; […] que M. X... conteste au moins en partie les faits, arguant à la fois de son jeune âge et de son inexpérience professionnelle à la date de ceux-ci et de l'emprise que M. Y... a eue sur lui ; qu'il a confirmé cette position à l'audience d'appel ; que son avocat fait valoir qu'il était stagiaire et qu'il a effectué son stage d'insertion professionnelle au sein de la société SPIM ; qu'il a perçu une rémunération dérisoire pendant huit mois seulement ; que, concernant les faits d'abus de biens sociaux, il était un simple exécutant et n'avait pas de pouvoir décisionnel ; qu'il reconnaît s'être fait remettre par la société SPIM une somme de 22 000 euros en remboursement de chèques de caution, ce qui est effectivement anormal ; que sa mauvaise foi est cependant loin d'être évidente compte tenu des centaines de milliers d'euros détournés par M. Y... ; qu'il conteste avoir perçu d'autres sommes que ces 22 000 euros ; que sa fonction de gérant de droit a été vidée de sa substance ; que concernant les relevés de compte qu'il a transmis, l'information n'établit pas qu'il savait qu'ils étaient faux ; que M. Y... était le véritable gérant de fait de la société ; qu'il a été instrumentalisé ; […] que la société SPIM, créée au mois de juillet 2003, a été détenue d'une part par la société Bel air immobilier, détenue par M. Alexandre A...et son ami M. Grégoire B..., pour 75 % du capital, et par Mme Eva C..., mère de M. Y... pour 25 % du capital ; que, selon plusieurs témoignages, le père de M. A..., MM. Jean A..., et Y..., qui travaillaient déjà ensemble, avaient décidé de créer une société immobilière, son fils M. Alexandre A...et M. B...apportant chacun 400 000 euros, et M. Y... un certain savoir faire dans l'immobilier ; qu'à l'audience, Grégory X... a déclaré qu'il n'était pas là à cette époque, mais qu'on lui a relaté les choses de cette manière ; que M. X..., qui était le cousin de M. A..., est, à la demande de celui-ci, devenu gérant de la société un mois après sa création ; que la société SPIM a procédé à l'acquisition de l'immeuble du ...à Paris 11e, en vue de sa rénovation, et sa revente par lots, moyennant la somme de 1 133 000 euros, financé par la Caisse d'épargne à hauteur de 780 000 euros et pour le solde par un apport de la société Bel air immobilier ; que M. X... a déclaré que l'opération était en cours lorsqu'il est arrivé et que l'acte de vente a dû être signé une semaine après son arrivée ; qu'à la date de la plainte, la vente des quatre premiers lots avait rapporté la somme de 1 105 950 euros ; que M. X... a ajouté à l'audience qu'il y avait aussi des promesses de vente en cours ; que, selon des témoignages concordants, M. Y..., qui était né en 1962 et avait donc 41 ans, a pris l'ascendant sur MM. X..., A...et B..., nés respectivement en 1977, 1980 et 1981, et âgés de 25, 23 et 22 ans ; qu'à l'audience, M. X... l'a confirmé, au moins pour ce qui le concerne ; qu'il n'est pas indifférent de noter que le casier judiciaire de M. Y... révèle neuf condamnations principalement pour des infractions à caractère financier ; que bénéficiant potentiellement, par l'intermédiaire de sa mère, du quart des dividendes à venir, il n'était pas prévu que M. Y... perçoive une rémunération, et n'avait pas de contrat de travail ; que M. X... déclare qu'il ne sait pas ce qu'il en était, n'étant pas au courant des accords entre associés ; que bien que n'ayant pas signature sur les comptes en banque de la société, M. Y... a réussi à en assurer la direction, s'occupant des relations avec les entreprises, les clients, les banques et l'expert-comptable ; qu'il a réussi entre le mois de novembre 2003 et le mois de décembre 2004 à détourner à son profit personnel les biens de la société pour plus de 400 000 euros ; que M. X... affirme qu'il ne s'en est pas rendu compte, qu'il ne l'a pas vu ; […] que M. X..., qui était gérant de la société, y était présent tous les jours avec M. Y... ; qu'il déclare à la cour que c'est vrai, mais que le samedi et le dimanche il suivait des cours ; qu'il admet qu'il était présent en permanence tous les jours d'ouverture de SPIM ; qu'il avait un salaire net de 1 350 euros par mois, outre un véhicule de fonction ; qu'il précise qu'il s'agissait d'une Smart qu'il utilisait avec d'autres membres de la société ; qu'il admet qu'il s'agit d'une somme importante pour ce qu'il indique être un stage ; qu'il précise avoir perçu cette somme jusqu'à la mi 2004 ; qu'il ne sait pas indiquer pourquoi il n'en a pas référé à son oncle et à son cousin lorsqu'il n'a plus perçu cette somme ; que M. Y... qui avait dit qu'il n'y avait plus d'argent ; qu'il avait seul signature sur les comptes en banque ; qu'il s'occupait de surveiller les chantiers ; qu'il faxait les demandes à la banque pour qu'elle établisse les chèques de banque à l'ordre des fournisseurs mais que progressivement ce serait M. Y... qui s'en serait occupé ; qu'il confirme tout cela à l'audience d'appel ; qu'il a déclaré aux services de police, concernant les détournements effectués par M. Y... : " Je savais qu'il y avait des soucis sur le compte puisque je n'étais plus payé en 2005. M. Y... me disait que cela allait s'arranger. Je savais qu'il avait fait quelques magouilles mais je ne savais pas que ça représentait un tel montant... Il me disait qu'il allait avoir des rentrées d'argent pour pouvoir rembourser l'argent qu'il avait pris dans la société SPIM. Je savais qu'il se faisait payer ses frais par la société SPIM, je savais qu'il prenait un peu d'argent, je me disais qu'il s'agissait d'une avance sur ses dividendes " ; qu'il confirme à l'audience d'appel qu'il n'a plus perçu ses salaires à partir de la mi 2004, que M. Y... lui a dit qu'il allait s'arranger ; qu'il savait que M. Y... percevait une rémunération, mais qu'il ne savait pas sous quelle forme ; qu'il n'a jamais su que cela atteignait 400 000 euros sur treize mois ; qu'il déclare ne pas avoir parlé de ces difficultés à son oncle et à son cousin, l'expliquant par la confiance qu'il portait à M. Y... ; qu'après avoir reconnu sa signature sur le faux contrat d'agent commercial en date du 7 janvier 2004 entre la société SPIM et M. Y..., il est revenu sur ses déclarations ; qu'il n'en a pas aujourd'hui le souvenir ; qu'il a encore déclaré " Je savais que M. Y... avait fait des travaux chez lui, qu'il avait engagé les mêmes sociétés que celles qui travaillaient pour SPIM, mais je ne savais pas que c'était SPIM qui avait payé " ; qu'il confirme à l'audience, qu'il ne savait pas, même s'il était le seul à avoir signature, que c'était SPIM qui avait payé ; que concernant les cinq chèques d'un montant total de 40 700 euros qui ont été émis à son ordre, outre son salaire :-12 novembre 2003 : 3 700 euros,-19 novembre 2003 : 9 000 euros,-15 décembre 2003 : 13 000 euros,-4 février 2004 : 10 000 euros,-5 février 2004 : 5 000 euros ; qu'il a déclaré pour les chèques de 9 000 et 13 000 euros qu'il s'était porté caution pour M. Y... à titre personnel pour un montant de 22 000 euros, que cette caution avait été encaissée que son compte personnel était devenu débiteur, que M. Y... lui avait dit de se rembourser avec les fonds de la société SPIM et que lui-même rembourserait SPIM, ce qu'il n'a jamais fait ; que pour les chèques de 5 000 et 10 000 euros qu'il ne se rappelait pas ; qu'il a reconnu à l'audience qu'il n'aurait pas dû se rembourser avec les fonds de la société pour une dette que lui avait causé M. Y... à titre personnel ; qu'il indique cependant qu'il lui a fait confiance ; qu'il n'a pas pensé à parler de cet incident à son oncle ou à son cousin ; que concernant les faux relevés de compte en banque adressés à la société Bel air immobilier, il a déclaré : " Je devais faxer des documents à M. D..., secrétaire de M. Jean A..., lorsqu'il me le demandait je ne sais pas qui a établi ces faux relevés bancaires. Il s'agit des relevés que j'ai faxés à M. D..., qui m'ont été remis par M. Y...... " ; qu'à l'audience il a reconnu avoir faxé ces documents, mais a ajouté qu'il ignorait qu'ils étaient faux ; que sur la prévention […] que c'est par des motifs pertinents qu'elle fait siens et par une juste appréciation des faits et circonstances particulières de la cause, exactement rapportés dans la décision attaquée, que les premiers juges ont à bon droit relaxé M. X... pour les faits de faux et l'ont déclaré coupable pour les autres chefs de prévention ; qu'il sera précisé, concernant les faits d'abus de biens sociaux et d'usage de faux, que quand bien même il est évident que M. Y..., âgé de 41 ans, a pris l'ascendant sur son entourage beaucoup plus jeune et particulièrement sur M. X..., qu'il était un délinquant d'habitude et que l'essentiel des détournements ont été commis à son profit personnel, il n'en reste pas moins que M. X..., même âgé de 23 ans, sortait d'études de commerce de bon niveau, était gérant de la société, n'ignorait pas quels en étaient les pouvoirs et responsabilités et était présent tous les jours d'ouverture, ayant seul signature bancaire et surveillant les chantiers ; que nonobstant ses dénégations maladroites, il résulte suffisamment des cinq chèques qui ont été émis à son ordre par la société SPIM entre le 12 novembre 2003 et le 5 février 2004 qu'il a détourné à son profit personnel de la société dont il était le gérant une somme de 40 700 euros ; qu'à partir de ce moment, qui intervient très tôt dans le déroulement des faits, soit dès le mois de novembre 2003, il n'est plus en mesure de se confier à son oncle et à son cousin qui, l'ayant choisi comme gérant, auraient dû être ses interlocuteurs naturels ; que M. Y..., qui a ainsi su acheter son silence, peut lui même procéder à des détournements à son profit personnel jusqu'à la fin de l'année 2004 pour un montant global d'environ 400 000 euros ; qu'il ne l'ignore pas, ayant seul signature sur les comptes en banque et ayant reconnu avoir eu connaissance de " ces magouilles ", de ce que M. Y... prenait " un peu d'argent " et de ce qu'il avait fait effectuer des travaux " chez lui " avec les entreprises qui travaillaient sur les chantiers de la société SPIM ; que non seulement il n'a pas été en mesure de révéler ces faits à son oncle et à son cousin, mais il est allé au-delà en leur adressant, dès le 31 décembre 2003, des faux relevés de compte en banque totalement fabriqués, dissimulant à la fois les détournements effectués mais aussi la situation financière compromise de la société ; qu'il est significatif que pris dans cet engrenage, il a continué à adresser ces faux relevés de compte jusqu'au mois d'avril 2006, soit bien au-delà du moment où les détournements ont cessé, au mois de décembre 2004 ; qu'il sera aussi précisé que l'information n'a pas établi dans quelles conditions ces faux ont été fabriqués et qui en a été l'auteur ; que la cour confirmera donc le jugement déféré sur la prévention » ;

" 1°) alors que l'intention frauduleuse du dirigeant social est un élément constitutif du délit d'abus de biens sociaux, à défaut duquel celle-ci n'est pas caractérisée, le prévenu devant non seulement avoir eu connaissance des agissements délictueux mais encore avoir eu pouvoir les empêcher ; qu'en l'espèce, la cour d'appel qui relevait le jeune âge du prévenu, sa faible expérience, le fait qu'il n'exerçait pas de réelles fonctions de direction au sein de la société SPIM dont il était le gérant qu'en titre, ne pouvait se fonder, pour entrer en voie de condamnation, sur les circonstances selon lesquelles il aurait dû avoir conscience des agissements délictueux du gérant de fait de l'entreprise et seul véritable dirigeant de celle-ci tout en constatant que ce dernier avait, de par son âge et son expérience, pris l'ascendant sur le prévenu ;
" 2°) alors qu'il en va de même s'agissant du délit intentionnel d'usage de faux ;
" 3°) alors que ne détourne pas dans son intérêt les biens de la société le dirigeant social qui se borne à se rembourser sur les fonds de l'entreprise des sommes qu'il avait, auparavant, exposées en sa faveur ou des sommes que celle-ci lui devait ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ne pouvait, pour condamner le prévenu, se fonder sur le fait qu'il aurait encaissé cinq chèques émis par la société SPIM pour un montant total de 40 700, 00 euros quand ce dernier faisait valoir, sans être utilement contredit, que ces sommes correspondaient, pour partie à des fonds qu'il avait lui-même exposés auparavant au profit de cette société et pour une autre partie à des sommes qui lui étaient dues à titre de rémunération " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. X..., qui était alors gérant de droit de la société parisienne d'investissement Montaigne constituée fin 2003 en vue de l'acquisition d'un immeuble, de sa réhabilitation et de sa revente par lots, a été poursuivi des chefs d'abus de biens sociaux et faux ; que le tribunal correctionnel l'a déclaré coupable d'abus de bien sociaux et usage de faux ;
Attendu que pour confirmer cette décision, en ce qui concerne l'abus de biens sociaux, la cour, par motifs propres et adoptés, énonce que le prévenu était présent tous les jours dans l'entreprise, qu'il surveillait les chantiers et détenait seul la signature bancaire ; qu'il a émis sans raison des chèques tirés sur le compte social pour un montant total de 484 280, 37 euros, principalement au profit du gérant de fait, M. Y..., dont il a dit avoir eu connaissance des " magouilles ", de ce qu'il " prenait un peu d'argent " et de ce qu'il ne pouvait prétendre à nulle rémunération ; qu'en réponse à l'argument selon lequel une partie des sommes en cause correspondrait au remboursement d'une créance que le prévenu avait sur la société, les juges relèvent que ce dernier ne fournit aucune preuve d'une telle allégation ; qu'ils ajoutent que M. X... a trouvé un intérêt personnel à ces malversations, qui lui ont permis de garder sa fonction de gérant rémunéré et de conserver l'assurance de ne pas voir révéler aux membres de sa famille, porteurs des parts sociales, les détournements de fonds dont il avait lui-même bénéficié ;
Attendu que pour déclarer M. X... coupable d'usage de faux, l'arrêt relève qu'il a régulièrement transmis, pendant les quatre années de la prévention et dès le début d'activité de la société, pour leur information, aux porteurs de parts majoritaires dans le capital social, en connaissance de leur caractère mensonger, de nombreux relevés bancaires de comptes sociaux fabriqués dissimulant tout à la fois les détournements opérés et la situation financière compromise de la société ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le second moyen de cassation, pris à titre subsidiaire, de la violation des articles L. 241-3, 4° du code de commerce, 1382 du code civil, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que la cour d'appel a condamné M. X... au paiement de 484. 280, 37 euros de dommages-intérêts au profit de l'EMJ mandataires judiciaires, ès qualité de liquidateur judiciaire de la societe parisienne d'investissement Montaigne (SPIM) ;
" aux motifs propres que la cour considère que c'est par des motifs pertinents qu'elle fait siens que les premiers juges ont à bon droit retenu que ces infractions ont occasionné à la société SPIM, en liquidation, un préjudice direct et certain qu'ils ont exactement évalué, étant précisé que ces dommages résultent tant des détournements effectués que des fausses informations qui ont été communiquées pendant trois ans au porteur de parts majoritaire pour l'empêcher de prendre les mesures qui s'imposaient ; qu'elle confirmera en conséquence le jugement déféré sur les dispositions civiles ;
" et aux motifs éventuellement adoptés que la société EMJ mandataires judiciaires, prise en la personne de Me Didier E..., mandataire judiciaire agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société SPIM, s'est constituée partie civile ; que par conclusions régulièrement déposées et soutenues par son avocat à l'audience, elle sollicite de se voir déclarer recevable et de voir condamner solidairement MM. Y..., X...et Buffe à lui régler la somme de 648 940, 93 euros, outre la somme de 15 000 euros en application des dispositions de l'article 475-1 du code de procédure pénale ; que la société EMJ mandataires judiciaires sera déclarée recevable ; qu'il sera fait droit à sa demande à hauteur de la somme de 484 280, 37 euros, pour laquelle MM. Y... et X...ont été déclarés coupables du délit d'abus de biens sociaux, la solidarité étant limitée à la somme de 31 572 euros en ce qui concerne M. F..., déclaré coupable de complicité d'abus de biens sociaux à hauteur de ce seul montant ;
" alors que la cour d'appel ne pouvait, sans se contredire, retenir, dans le même temps, que les détournements dont aurait profité M. X... se limitaient à 40 700, 00 euros et le condamner à une indemnité allant bien au-delà de ce seul montant car incluant également les détournements, plus nombreux, dont n'avaient profité que M. Y... et ses proches " ;
Attendu qu'en condamnant M. X... à payer, à titre de dommages-intérêts, une somme d'un montant correspondant à celui des fonds détournés, la cour d'appel a fait l'exacte application des textes visés au moyen, lequel doit en conséquence être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Fixe à 2 000 euros la somme globale que M. X... devra payer à l'EMJ mandataires judiciaires, au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-huit septembre deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 15-85049
Date de la décision : 28/09/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 29 juin 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 28 sep. 2016, pourvoi n°15-85049


Composition du Tribunal
Président : M. Guérin (président)
Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié, SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.85049
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