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21/09/2016 | FRANCE | N°13-24440

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 septembre 2016, 13-24440


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 2 mars 2000, la société Laboratoires 3M santé, devenue la société 3M France, a conclu un accord de plan d'épargne d'entreprise avec la délégation du personnel du comité central d'entreprise prévoyant un abondement de 100 % des versements volontaires effectués par les salariés cadres, et de 4 % des versements des salariés non-cadres ; que Mme X... et quarante deux autres salariés, dont cinq salariés protégés, ont saisi le 5 septembre 2008 la juridiction prud'homale

d'une demande d'indemnisation de leur préjudice résultant du refus par l...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 2 mars 2000, la société Laboratoires 3M santé, devenue la société 3M France, a conclu un accord de plan d'épargne d'entreprise avec la délégation du personnel du comité central d'entreprise prévoyant un abondement de 100 % des versements volontaires effectués par les salariés cadres, et de 4 % des versements des salariés non-cadres ; que Mme X... et quarante deux autres salariés, dont cinq salariés protégés, ont saisi le 5 septembre 2008 la juridiction prud'homale d'une demande d'indemnisation de leur préjudice résultant du refus par l'employeur de renégocier l'accord au regard de l'article L. 443-7 dans sa rédaction issue de la loi n° 2001-152 du 19 février 2001 relative à l'épargne salariale, les alinéas 3 et 4 insérés dans cet article étant devenus respectivement les articles L. 3332-12 et L. 3332-13 du même code, ainsi que de la violation du principe d'égalité de traitement ; que le syndicat Force ouvrière (FO) 3M santé est intervenu volontairement à l'instance ; que dans le cadre d'une réorganisation du site de Pithiviers prévoyant l'arrêt des activités de production de dispositifs d'administration de médicaments pour les laboratoires pharmaceutiques (branche DDS) et conduisant à la suppression de cent neuf postes de travail sur ce site, la société a établi un plan de sauvegarde de l'emploi complété par un protocole d'accord appelé « accord Pharma » et par un accord collectif définissant les modalités de la mise en place d'un congé de mobilité signés le 17 avril 2009 au terme de la procédure d'information du comité central d'entreprise et du comité d'établissement de Pithiviers ; que trente-huit salariés, qui avaient conclu des protocoles de rupture d ‘ un commun accord des contrats de travail pour motif économique dans le cadre de congés de mobilité, les ont contestés et ont ajouté à leurs demandes initiales des demandes relatives à la rupture desdits contrats ; que cinq salariés protégés ont également formé de telles demandes et ont sollicité un sursis à statuer ainsi que le renvoi devant la juridiction administrative d'une question préjudicielle en appréciation de la légalité des autorisations administratives de rupture des contrats de travail ;

Sur le deuxième moyen, pris en sa seconde branche, et sur le quatrième moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens annexés qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de déclarer recevable la demande des trente-huit salariés concernés au titre de la contestation du motif économique de la rupture, alors, selon le moyen, que l'acceptation par le salarié de la proposition de congé de mobilité faite par l'employeur en application d'un accord collectif relatif à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences emporte rupture du contrat de travail d'un commun accord des parties à l'issue du congé et le salarié n'est pas recevable à contester le motif économique de la rupture ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1, L. 1233-3 et L. 1233-77 à L. 1233-80 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu, selon l'article L. 1233-77 du code du travail, inséré à l'intérieur d'un chapitre sur le licenciement pour motif économique dans une section intitulée « Accompagnement social et territorial des procédures de licenciement », que le congé de mobilité a pour objet de favoriser le retour à un emploi stable par des mesures d'accompagnement, des actions de formation et des périodes de travail ; qu'il résulte de la combinaison de ce texte avec les articles L. 1233-3 et L. 1233-80 que si l'acceptation par le salarié de la proposition de congé de mobilité emporte rupture du contrat de travail d'un commun accord, elle ne le prive pas de la possibilité d'en contester le motif économique ;
Et attendu que la cour d'appel, qui a relevé que la rupture des contrats de travail de ces salariés était intervenue dans le cadre de congés de mobilité, a retenu à bon droit que lesdits salariés étaient recevables à en contester le motif économique ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen, tel que reproduit en annexe :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que les licenciements des trente-huit salariés concernés n'étaient pas fondés sur un motif économique et de les condamner à leur payer des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Mais attendu que sous le couvert de griefs non fondés de violation de la loi et de défaut de base légale, le moyen ne tend qu'à remettre en cause l ‘ appréciation souveraine par la cour d'appel des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis et dont elle a retenu qu'ils n'établissaient pas l'existence d'une menace pesant sur la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité du groupe auquel elle appartenait à l'époque de la rupture des contrats de travail ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l'article 2 du code civil, ensemble l'article L. 443-7, alinéa 3, du code du travail issu de la rédaction de la loi n° 2001-152 du 19 février 2001, devenu l'article L. 3332-12 du même code ;
Attendu que pour dire que les dispositions de l'article L. 443-7, alinéa 3, du code du travail telles que résultant de la loi du 19 février 2001 étaient d'application immédiate et que l'accord du 2 mars 2000 sur l'épargne salariale au sein de la société Laboratoires 3M santé, devenue 3M France, était contraire aux dispositions de l'article précité, déclarer les demandes d'indemnisation recevables et condamner la société à verser à chaque salarié et au syndicat FO 3M santé des dommages-intérêts, l'arrêt retient que ces dispositions présentaient un caractère d'ordre public social en sorte qu'elles ne pouvaient que recevoir une application immédiate dès son entrée en vigueur alors qu'aucune disposition transitoire n'était prévue et que le législateur n'avait pas entendu expressément réserver l'application de cet article aux salariés pouvant bénéficier du dispositif de l'épargne salariale en application d'accords conclus postérieurement à la date d'entrée en vigueur de la loi ;
Attendu, cependant, qu'aux termes de l'article 2 du code civil, la loi ne dispose que pour l'avenir ; qu'il en résulte qu'en l'absence de modification, autre que de forme, de l'accord au sens de l'article L. 3322-6 du code du travail instaurant un plan d'épargne d'entreprise, et de nouveau dépôt de cet accord auprès de l'administration du travail, les dispositions de cet accord ne peuvent être contestées qu'au regard des dispositions légales en vigueur au moment de sa conclusion ;
Qu'en statuant comme elle a fait, alors qu'elle avait constaté que le plan d'épargne d'entreprise résultait d'un accord signé le 2 mars 2000 au sein du comité central d'entreprise conformément aux articles L. 443-1 et R. 443-1 du code du travail alors applicables, lequel n'a pas été dénoncé, ce dont il résultait que celui-ci, conforme aux dispositions législatives en vigueur lors de sa conclusion, ne pouvait être contesté au regard des dispositions postérieures de l'article L. 3332-12 du code du travail issues de la loi n° 2001-152 du 19 février 2001, lesquelles ne sont pas d'ordre public absolu, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société 3M France à payer, d'une part, à chacun des salariés une somme à titre de dommages-intérêts pour violation du principe d'égalité de traitement, d'autre part, au syndicat FO 3M santé des sommes sur le fondement de l'article L. 2132-3 du code du travail et de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 10 juillet 2013, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé et signé par M. Frouin, président et par Mme Piquot, greffier de chambre présente lors de la mise à disposition de l'arrêt en son audience publique du vingt et un septembre deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

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Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société 3M France.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR que les dispositions de l'article L. 443-7 du Code du travail telles que résultant de la loi n° 2001-152 du 19 février 2001 étaient d'application immédiate, dit que l'accord du 2 mars 2000 sur l'épargne salariale au sein de la société LABORATOIRES 3M SANTE devenue la société 3M FRANCE, était contraire aux dispositions de ce texte, déclaré les demandes d'indemnisation des demandeurs recevables, condamné la société 3M FRANCE à verser à chaque salarié des dommages et intérêts pour violation du principe d'égalité de traitement et en application de l'article 1147 du Code civil, condamné la société 3M FRANCE à verser des dommages et intérêts au syndicat FO 3M SANTE sur le fondement de l'article L. 2132-3 du Code du travail, et condamné ladite société à verser une somme au titre de l'article 700 du Code de procédure civile à chaque salarié et au syndicat FO 3M SANTE,
AUX MOTIFS PROPRES QUE « l'accord d'épargne d'entreprise du 2 mars 200 [0] a prévu, en son article 6-1, que les versements de l'entreprise sont fixés à 100 % des versements volontaires effectués par les salariés cadres, à l'exclusion des primes d'intéressement et à l'exception des premiers 500 fr. pour lesquels l'abondement est fixé à 200 %, tandis que l'article 6-2 précise que les salariés non-cadres bénéficieront d'un abondement de 4 % des versements volontaires. L'article 14 de la loi numéro 2001-152 du 19 février 2001 a introduit à l'article L. 443-7 du code du travail l'alinéa suivant : « la modulation éventuelle des sommes versées par l'entreprise ne saurait résulter que de l'application de règles à caractère général, qui ne peuvent, en outre, en aucun cas avoir pour effet de rendre le rapport entre le versement de l'entreprise et celui du salarié ou de la personne visée au troisième alinéa de l'article L. 443-1 croissant avec la rémunération de ce dernier ». Il convient de tenir ici pour reproduites, comme particulièrement pertinentes, les considérations des premiers juges qui ont démontré que les dispositions de cet article présentent un caractère d'ordre public social en sorte qu'elles ne peuvent que recevoir une application immédiate dès son entrée en vigueur, alors qu'aucune disposition transitoire n'est prévue et que le législateur n'a pas entendu expressément réserver l'application de cet article aux salariés pouvant bénéficier du dispositif de l'épargne salariale. Les débats parlementaires qui ont précédé le vote de cette loi visaient à favoriser que la modulation mise en oeuvre permette de prévoir un taux d'abondement plus favorable pour les catégories professionnelles les moins bien rémunérés, permettant effectivement de traiter plus favorablement les ouvriers ou les employés que les cadres, dans le but d'améliorer la condition des salariés les moins favorisés. De même, les motifs visant à démontrer que l'article L 443-7 devenu l'article L 3332-12 du code du travail, en prévoyant la prohibition de tous les cas où il serait constaté l'existence d'un rapport croissant entre l'abondement et la rémunération du salarié, ont manifesté la volonté du législateur d'interdire toute possibilité pour un salarié percevant un salaire plus élevé qu'un autre de bénéficier d'un taux d'abondement supérieur, puisqu'il ne peut en aucun cas être croissant. Là encore, la cour doit reprendre à son compte les motifs des premiers juges qui ont constaté qu'il existait au sein de la société un rapport croissant entre l'abondement de l'entreprise et la rémunération des salariés en conséquence de quoi cette société avait commis une faute par la violation des dispositions impératives d'ordre public de l'article L3 1332-12 du code du travail dont les effets concernaient l'intégralité des salariés et non une partie d'entre eux en instaurant une modulation de l'abondement prohibée par ces dispositions. 2. sur le préjudice des salariés. Par des motifs tirés des dispositions de l'article 2224 du Code civil et de la loi du 17 juin 2008 le conseil des prud'hommes a estimé qu'il convenait de rejeter l'exception de prescription, en sorte que le délai de cinq ans n'est susceptible de s'appliquer qu'à compter du 19 juin 2008 et que les salariés pouvaient agir en responsabilité à l'encontre de la société jusqu'au 19 juin 2013 dès lors qu'à cette date le délai de 30 ans ne serait pas expiré. Sa démonstration sera reprise au compte de la cour. Les dispositions critiquées, doivent faire l'objet d'un examen pour vérifier concrètement la réalité et la pertinence des disparités existantes entre les cadres et les non-cadres en vérifiant, en particulier, que la différence de traitement a pour objet ou pour but de prendre en compte les spécificités de la situation des salariés relevant d'une catégorie déterminée, tenant notamment aux conditions d'exercer ses fonctions, à l'évolution des carrières ou aux modalités de rémunération. Seul le niveau moyen des rémunérations permet de constater s'il existe un rapport croissant entre les indices hiérarchiques et la rémunération et l'appréciation de la légalité de l'accord au regard de l'article L. 3332-12 ne peut avoir lieu qu'au niveau de l'entreprise. La grille de salaires de la convention collective de l'industrie pharmaceutique et les niveaux moyens de rémunération versée dans l'entreprise, qui sont communiquées actuellement lors des négociations annuelles obligatoires permettent de constater l'existence d'un rapport croissant et de manière particulièrement nette. En effet, pour les cadres, l'abondement augmente encore selon le niveau hiérarchique et donc avec le niveau de salaire. Par ses effets, l'accord entraîne une modulation croissante selon la rémunération des salariés. Jusqu'à l'année 2003, l'abondement semblait justifié principalement par l'exclusion de la prime de vacances pour les cadres, mais celle-ci a été versée de manière indifférenciée à tous les salariés à compter de cette année-là si bien qu'elle ne pouvait plus fonder les disparités anormales en assurant le maintien d'avantages dérogatoires pour les cadres au niveau du plan d'épargne entreprise. En outre, l'article précité prohibe strictement toute contrepartie de la durée de présence dans l'entreprise sous forme d'épargne salariale puisque l'interdiction de substituer l'abondement aux éléments de rémunération prohibe de rétribuer le temps de travail par le niveau de l'abondement. La réparation de la méconnaissance de l'égalité de traitement doit constituer dans le rétablissement de l'égalité l'allocation salariée défavorisée de dommages-intérêts correspondant à leur préjudice qui est équivalent à la perte d'une chance de n'avoir pas pu bénéficier d'un système de plans d'épargne entreprise aussi avantageux que celui mis en oeuvre pour les cadres. Par ailleurs, les salariés ont attendu huit ans pour agir • en justice et réparer la violation de l'égalité. Ce retard à agir les concerne seulement et la cour ne peut suivre dans ces évaluations les salariés qui aboutissent à un préjudice virtuel de 12333 €, alors que cette somme s'avère excessive pour compenser l'aléa subi. De manière subsidiaire, et avec un raisonnement parfaitement loyal, la société propose de retenir une somme de dommages-intérêts de 8. 688 € que la cour adoptera pour chaque salarié, mais de 5. 262 € pour Madame Nathalie Z... qui est restée moins longtemps au sein de la société. En outre chacun d'entre eux devra recevoir une somme de 200 € pour les frais de l'article 700 du code de procédure civile et le syndicat Force Ouvrière de la société, également intervenu à la procédure devant cette cour aux côtés des salariés, devra se voir allouer une somme de 500 € sur le même fondement, outre celle de 1000 € de dommages-intérêts, son intervention au débat s'avérant utile alors que le préjudice à l'intérêt collectif de la profession a existé et que de manière supplémentaire, ce syndicat avait intérêt à défendre devant la juridiction prud'homale, les motifs à cet égard des premiers juges étant tenus pour reproduits également » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « A-Sur l'application de la Loi n° 2001-152 du 19/ 02/ 2001, l'article 14 de la Loi n° 2001-152 du 19/ 02/ 2001 a introduit à l'article L. 443-7 du Code du travail, l'alinéa suivant : " La modulation éventuelle des sommes versées par l'entreprise ne saurait résulter que de l'application de règles à caractère général, qui ne peuvent, en outre, en aucun cas avoir pour effet de rendre le rapport entre le versement de l'entreprise et celui du salarié ou de la personne visée au troisième alinéa de l'article L. 443-1 croissant avec la rémunération de ce dernier. " ; que les contrats demeurent régis par la loi en vigueur au jour de leur conclusion ; que la société 3M FRANCE invoque l'antériorité de l'accord relatif à l'épargne salariale au regard de la Loi n° 2001-152 du 19/ 02/ 2001 afin de dénier son application au sein de l'entreprise ; qu'aux termes de l'article 6 du Code civil, on ne peut déroger aux lois qui intéressent l'ordre public ; que le contrat reste ainsi régi par la loi en vigueur au jour de sa conclusion sous réserve des lois d'ordre public ; que conformément aux principes généraux du droit du travail, l'ensemble des dispositions législatives ou réglementaires édictées dans le domaine du droit du travail présentent un caractère d'ordre public, ainsi que l'a considéré le Conseil d'Etat (Avis, Assemblée Générale, 22 mars 1973) ; que cette notion d'ordre public social commande tant le principe de faveur que le principe de l'application immédiate des dispositions de droit du travail sans qu'il soit nécessaire qu'elles prévoient cette application immédiate, et sauf report de la date d'entrée en vigueur expressément prévue par l'autorité normative ; que cette règle permet seule d'assurer le principe de sécurité juridique et d'égalité des employeurs et salariés afin d'éviter que lors de l'entrée en vigueur d'une loi comprenant des dispositions en matière du Code du travail, chaque entreprise dispose de sa propre appréciation du caractère d'ordre public ou non de chaque disposition de la loi nouvelle ; que les effets d'une loi comportant des dispositions d'ordre public social ne peuvent que recevoir une application immédiate dès son entrée en vigueur ; que le caractère d'ordre public d'une disposition ne dépend nullement de son application obligatoire ou facultative ; qu'en effet, le cadre juridique d'ordre public s'applique dès lors qu'un salarié entre dans son champ d'application ; que le moyen soulevé par la société 3M FRANCE sur ce point tend à confondre le caractère obligatoire d'une règle et son caractère d'ordre public qui prohibe toute dérogation ; que la Loi n° 2001-152 du 19/ 02/ 2001 ne comprend aucune disposition transitoire et le législateur n'a pas entendu expressément réservé l'application de l'article L. 443-7 du Code du travail aux salariés pouvant bénéficier du dispositif de l'épargne salariale en application d'accords conclus postérieurement à la date d'entrée en vigueur de la loi, ce qui se conçoit aisément au regard du principe d'égalité ; que le caractère d'ordre public de l'article L. 443-7 du Code du travail ne peut être valablement contesté au motif qu'il aurait pour effet de rendre contraire à l'ordre public social les règles relatives à l'intéressement et à la participation ; qu'une nouvelle fois, la société 3M FRANCE confond le caractère d'ordre public d'une disposition législative et les effets produits par celle-ci ; que le fait que l'article L. 443-7 du Code du travail prohibe la modulation éventuelle des sommes versées par l'entreprise au titre de l'épargne salariale qui aurait pour effet de rendre le rapport entre le versement de l'entreprise et celui du salarié croissant avec la rémunération de ce dernier, ne vaut que pour le dispositif d'épargne salariale ; que la qualification d'ordre public ne saurait conférer à cette règle le statut d'un principe général du droit applicable en toute matière ; que l'article 14 de la Loi n° 2001-152 du 19/ 02/ 2001 entre bien dans le domaine du droit du travail et revêt donc un caractère d'ordre public par son essence même ; qu'en outre, au regard des débats parlementaires, il est établi que le nouvel alinéa de l'article L. 443-7 du Code du travail visait à favoriser que la modulation mise en oeuvre permette de prévoir un taux d'abonde ment plus favorable pour les catégories professionnelles les moins bien rémunérées, permettant de traiter plus favorablement les ouvriers ou employés que les cadres ; que l'esprit de la disposition législative litigieuse est donc d'améliorer la condition des salariés les moins favorisés en leur permettant de bénéficier d'un taux d'abondement de l'employeur plus intéressant ; qu'au regard de ces éléments, il convient de constater que l'article 14 de la Loi n° 2001-152 du 19/ 02/ 2001 ayant introduit un alinéa 3 à l'article L. 443-7 du Code du travail, présente un caractère d'ordre public de sorte que ses effets étaient immédiatement applicables au sein des entreprises dès l'entrée en vigueur de la loi sans que l'existence d'accords antérieurs relatifs à l'épargne salariale ne puisse y faire obstacle ; B-Sur la violation de l'article L. 443-7 devenu L. 3332-12 du Code du travail, l'avis de l'URSSAF sur la validité de l'accord sur l'épargne salariale au sein de la société 3M FRANCE est indifférent à l'appréciation que la juridiction peut en faire ; qu'il y a lieu de rappeler que le Conseil de prud'hommes n'est liée par l'avis d'aucune administration ; que l'article L. 443-7 du Code du travail indique que la modulation éventuelle de l'abondement ne peut " en aucun cas avoir pour effet de rendre le rapport entre le versement de l'entreprise et celui du salarié croissant avec la rémunération de ce dernier ; qu'en prévoyant la prohibition de tout cas où il serait constaté l'existence d'un rapport croissant entre l'abondement et la rémunération du salarié, le législateur a sans ambiguïté souhaité interdire toute possibilité pour un salarié percevant un salaire plus élevé qu'un autre de bénéficier d'un taux d'abondement supérieur ; qu'ainsi, le taux d'abondement peut être décroissant ou égal en cas d'élévation dans la grille des rémunérations, il ne peut en aucun cas être croissant ; que l'article L. 443-7 du Code du travail n'interdit pas seulement l'existence de règles systématiques prévoyant un taux d'abondement plus élevé à proportion de la rémunération mais également tout cas où un salarié pourrait se trouver dans cette situation ; que le fait que le taux d'abondement des salariés non-cadres soit identique quelque soit le niveau de leur rémunération et que le taux d'abondement des salariés cadres soit également identique quelque soit le niveau de leur rémunération, est hors débat ; qu'en effet, la formulation générale de l'article L. 443-7 du Code du travail vise à prohiber tout rapport croissant entre l'abondement et la rémunération des salariés à l'intérieur d'une même entreprise et non seulement à l'intérieur d'une même catégorie professionnelle ; qu'il résulte des pièces produites aux débats qu'il existe au sein de la société 3M FRANCE des salariés cadres ayant une rémunération supérieure à des salariés non cadres tout en bénéficiant d'un taux d'abondement de l'entreprise de 100 % au lieu de 4 % pour ces derniers ; qu'il est donc établi qu'au sein de la société 3M FRANCE, il existe des cas où l'accord relatif à l'épargne salariale en vigueur aboutit à permettre l'existence d'un rapport croissant entre l'abondement de l'entreprise et la rémunération des salariés ; qu'en conséquence, la société 3M FRANCE n'a pas appliqué une disposition de manière différenciée entre les salariés qui aurait pu conduire à considérer qu'il avait été mis en oeuvre une inégalité de traitement dès lors que la modulation de l'abondement de l'entreprise est autorisée sous la seule réserve qu'elle ne doit pas aboutir à permettre l'existence d'un rapport croissant entre l'abondement de l'entreprise et la rémunération des salariés ; qu'en revanche, la société 3M FRANCE a commis une faute par la violation des dispositions impératives de l'article L. 443-7 devenu L. 3332-12 du Code du travail, dont les effets concernaient l'intégralité des salariés et non seulement une partie d'entre eux, en instaurant une modulation de l'abondement prohibée par ces dispositions ; C-Sur le préjudice, l'article 2224 du Code civil dispose que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que l'action des salariés ne visent nullement à obtenir un rappel des sommes dues au titre de l'abondement mais constitue une action en responsabilité contractuelle ; qu'antérieurement à la Loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, l'action en responsabilité contractuelle se prescrivait par trente ans et la loi nouvelle a abrégé ce délai à 5 ans ; qu'aux termes de l'article 26 de la Loi du 17/ 06/ 2008, les dispositions de la loi qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la présente loi, sans que la durée totale ne puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure ; qu'en conséquence, le délai de cinq ans était susceptible de s'appliquer à compter du 19/ 06/ 2008 sans que l'application des nouvelles dispositions ne puisse avoir pour effet de dépasser le délai de 30 ans ; qu'en l'espèce, le préjudice allégué le plus ancien remonte au 21/ 02/ 2001 ; qu'en application de la Loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, les salariés pouvait agir en responsabilité à l'encontre de la société 3M FRANCE jusqu'au 19/ 06/ 2013 dès lors qu'à cette date, le délai de 30 ans ne serait pas expiré ; que les demandes formulées par les salariés ne sont donc pas atteintes par la forclusion et seront déclarées recevables ; (…) D-Sur l'intervention du syndicat Force Ouvrière de la société LABORATOIRES 3M SANTÉ, l'article L. 411-11 devenu L. 2132-3 du Code du travail dispose que les syndicats peuvent devant toutes les juridictions exercer tous les droits réservés à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent ; qu'en l'espèce, il est établi que la société 3M FRANCE n'a pas appliqué immédiatement les dispositions de l'article L. 443-7 du code du travail résultant de la Loi n° 2001-152 du 19/ 02/ 2001 ; qu'il s'ensuit que l'entreprise a maintenu un accord relatif à l'épargne d'entreprise contraire à ces dispositions qui avaient pour but de favoriser les salariés les moins bien rémunérés ; que si les salariés n'ont pas subi de préjudice personnel direct du fait de la non-application immédiate de l'article L. 443-7 du Code du travail, celle-ci a causé un préjudice à l'intérêt collectif de la profession que le syndicat Force Ouvrière représente résultant de la distorsion existante entre les salariés de l'entreprise quant à l'abondement de l'employeur, contraire à l'article L. 443-7 du Code du travail depuis 2001 ; qu'en conséquence, il y a lieu de condamner la société 3M FRANCE à verser au syndicat Force Ouvrière la, somme de 1 000 Euros en réparation du préjudice causé à l'intérêt collectif »

1. ALORS QUE l'article L. 3332-12 du Code du travail, ancien article L. 443-7 alinéa 3, issu de l'article 14- III, 2° de la loi n° 2001-152 du 19 février 2001, selon lequel « la modulation éventuelle des sommes versées par l'entreprise ne saurait résulter que de l'application de règles à caractère général, qui ne peuvent, en outre, en aucun cas avoir pour effet de rendre le rapport entre le versement de l'entreprise et celui du salarié ou de la personne visée au troisième alinéa de l'article L. 443-1 croissant avec la rémunération de ce dernier », n'est pas applicable aux accords instituant un plan d'épargne entreprise conclus avant l'entrée en vigueur de la loi précitée du 19 février 2001 faute de prévision en ce sens du législateur et ne peut en tout cas rendre illicite une clause d'un tel accord licite au regard de la loi en vigueur au moment de sa conclusion ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé le texte susvisé, ensemble l'article 2 du Code civil ;
2. ALORS en tout état de cause QUE l'article L. 3332-12 du Code du travail, ancien article L. 443-7 alinéa 3, issu de la loi du 19 février 2001, prohibe seulement les formules de calcul de l'abondement de l'entreprise ayant pour effet de rendre le rapport entre le versement de l'entreprise et celui du salarié ou de la personne visée au troisième alinéa de l'article L 443-1 croissant avec la rémunération de ce dernier ; qu'en l'espèce, l'accord de PEE du 2 mars 2000 prévoit un abondement égal à 4 % des versements pour les non-cadres et à 100 % des versements pour les cadres et ne prévoit donc pas un rapport croissant avec la rémunération du salarié, un salarié cadre bénéficiant d'un abondement de 100 % de son versement et un non-cadre d'un abondement de 4 % de son versement quelque soit le montant de leurs salaires respectifs et en particulier même si le cadre perçoit une rémunération inférieure au non-cadre ; qu'en jugeant que cet accord était contraire à l'article L. 3332-12 du Code du travail, au prétexte qu'il existait dans l'entreprise des cadres ayant une rémunération supérieure à des non cadres et qu'il existait ainsi des cas où l'accord aboutissait à permettre l'existence d'un rapport croissant entre l'abondement et la rémunération des salariés, la cour d'appel a violé ce texte ;
3. ALORS QUE les juges du fond, tenus de motiver leur décision, ne peuvent statuer par voie de motif dubitatif ; qu'en affirmant que jusqu'à l'année 2003, l'abondement semblait justifié principalement par l'exclusion de la prime de vacances pour les cadres, la cour d'appel a statué par un motif dubitatif, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;
4. ALORS QUE les juges du fond doivent préciser l'origine des renseignements qui ont servi à motiver leur décision ; qu'en affirmant que jusqu'à l'année 2003, l'abondement semblait justifié principalement par l'exclusion de la prime de vacances pour les cadres, sans préciser l'origine de cette supputation, quand l'exposante contestait expressément les allégations des salariés sur ce point, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
5. ALORS QUE l'employeur faisait valoir que l'abondement supérieur accordé aux cadres dans le cadre de l'accord PEE du 2 mars 2000 constituait la contrepartie de la mise en place pour cette seule catégorie de personnel d'un forfait jours et d'un nombre de jours de RTT inférieur à ceux accordés aux salariés non-cadres, le tout en vertu d'un accord du décembre 1999 de réduction et d'aménagement du temps de travail ; qu'en se fondant, pour écarter cette justification, sur l'interdiction légale de substituer l'abondement de l'entreprise sur le PEE aux éléments de rémunération quand cette règle posée à l'article L. 443-7 alinéa 4 devenu L. 3332-13 du Code du travail, issue de la loi du 19 février 2001, n'était pas applicable à l'accord PEE du 2 mars 2000, la cour d'appel a violé le texte susvisé, l'article 2 du Code civil et le principe d'égalité traitement ;
6. ALORS en toute hypothèse QUE l'article L. 443-7 alinéa 4 devenu L. 3332-13 du Code du travail dispose que « les sommes versées par l'entreprise ne peuvent se substituer à aucun des éléments de rémunération, au sens de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, en vigueur dans l'entreprise au moment de la mise en place d'un plan mentionné au présent article ou qui deviennent obligatoires en vertu de règles légales ou contractuelles » ; que n'est pas contraire à ce texte l'institution d'un abondement supérieur pour les cadres en contrepartie de la mise en place pour cette seule catégorie de personnel d'un forfait jours et d'un nombre de jours de RTT inférieur à ceux accordés aux salariés non-cadres ; qu'en affirmant, pour écarter la raison avancée par l'employeur pour justifier la différence de traitement entre cadres et non-cadres quant au montant de l'abondement de l'entreprise au PEE, que le texte susvisé prohibe strictement toute contrepartie de la durée de présence dans l'entreprise sous forme d'épargne salariale puisque l'interdiction de substituer l'abondement aux éléments de rémunération prohibe de rétribuer le temps de travail par le niveau de l'abondement, quand aucune substitution de l'abondement à un élément de rémunération en vigueur ou devenu obligatoire n'était intervenue, la cour d'appel a violé le texte susvisé, ensemble le principe d'égalité de traitement.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré recevable la demande au titre de la contestation du motif économique des 38 salariés non protégés (Mme A... épouse X..., M. B..., Mme C..., Mme D..., Mme E..., Mme F... épouse G..., M. H..., M. I..., Mme J... épouse K..., Mme L..., Mme M..., Mme N... épouse O..., Mme P..., M. Q..., Mme R..., Mme S..., Mme T..., Mme U..., M. V..., Mme W... épouse XX..., Mme W..., Mme YY..., Mme ZZ..., M. AA..., M. BB..., Mme CC..., Mme DD... épouse EE..., Mme FF... épouse GG..., M. HH..., M. II..., Mme JJ... épouse KK..., M. LL..., Mme MM... épouse NN..., Mme OO..., M. PP..., M. QQ..., Mme RR..., Mme SS... épouse TT...), sursis à statuer sur les demandes des 5 salariés protégés (Mesdames UU..., VV..., YYY... et WW..., Monsieur XXX...) et invité ces 5 salariés à introduire l'action en appréciation de la légalité devant la juridiction administrative, dit que la rupture des contrats de travail des salariés non-protégés n'était pas fondée sur un motif économique au sens de l'article L. 1233-3 du Code du travail et condamné la société 3M FRANCE à leur payer des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
AUX MOTIFS ADOPTES QUE la fin de non-recevoir soulevée par la société 3M FRANCE s'agissant des salariés ayant souscrit à une convention de congé de mobilité se fonde sur l'article L. 1233-80 du Code du travail qui dispose que " l'acceptation par le salarié de la proposition de congé de mobilité emporte rupture du contrat de travail d'un commun accord des parties à l'issue du congé " ; que l'article L. 1231-4 du Code du travail, inséré dans les dispositions générales du Titre III du Livre Il de la 1ère partie du code du travail relatif à la rupture du contrat de travail, dispose que le salarié ne peut renoncer par avance au droit de se prévaloir des règles prévues au Titre III ; qu'aux termes de l'article L. 1233-2 du Code du travail figurant au sein du même Titre III du Livre Il de la 1ere partie du code du travail, tout licenciement pour motif économique doit être motivé et justifié par une cause réelle et sérieuse ; que l'article L. 1235-1 du Code du travail, auquel le salarié ne peut donc renoncer, dispose qu'il appartient au juge, en cas de litige, d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, au vu des éléments fournis par les parties ; que si un doute subsiste, il profite au salarié ; que l'article L. 1233-3 alinéa 1er du Code du travail définit le licenciement pour motif économique comme étant le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques ; que l'alinéa 2 dispose que les dispositions du chapitre du Code du travail relatif au licenciement pour motif économique sont applicables à toute rupture du contrat de travail à l'exclusion de la rupture conventionnelle visée aux articles L. 1237-11 et suivants, résultant de l'une des causes énoncées à l'alinéa 1er ; qu'il résulte ainsi de la rédaction de l'article L. 1233-3 du Code du travail que nonobstant la référence au licenciement pour motif économique, le législateur a entendu voir appliquer les mêmes dispositions à toute rupture du contrat de travail intervenant pour un motif économique correspondant à la définition légale ; qu'en effet, la loi prévoit expressément lorsqu'un mode de rupture du contrat de travail ne peut se voir appliquer les dispositions relatives au licenciement pour motif économique ; qu'ainsi, outre la précision de l'alinéa 2 de l'article L. 1233-3 du Code du travail, l'article L. 1237-16 mentionne que les dispositions ayant trait à la rupture conventionnelle du contrat de travail ne sont pas applicables aux accords collectifs de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences et aux plans de sauvegarde de l'emploi ; que les dispositions relatives au congé de mobilité sont insérées au sein de la section 6 du chapitre relatif au licenciement pour motif économique, intitulée " Accompagnement social et territorial des procédures de licenciement " ; que l'article L. 1233-77 du Code du travail prévoit que dans les entreprises mentionnées au premier alinéa de l'article L. 1233-71, un congé de mobilité peut être proposé au salarié par l'employeur qui a conclu un accord collectif relatif à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences ; que ce congé de mobilité a pour objet de favoriser le retour à un emploi stable par des mesures d'accompagnement, des actions de formation et des périodes de travail ; que l'article L. 1233-82 du Code du travail dispose que l'accord collectif relatif au congé de mobilité détermine les conditions et modalités de celui-ci et notamment " les indemnités de rupture garanties au salarié, qui ne peuvent être inférieures aux indemnités légales et conventionnelles dues en cas de licenciement pour motif économique " ; qu'en conséquence, le congé de mobilité est un mode de rupture du contrat de travail pour motif économique et se trouve soumis aux dispositions d'ordre public prévues au Titre III du Livre Il de la 1ere partie du Code du travail, et en particulier aux règles applicables au licenciement pour motif économique ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions législatives que le mode de rupture du contrat de travail d'un commun accord, ne doit pas être confondu avec son fondement caractérisé par l'existence d'un motif économique ; que la rupture du contrat de travail résultant de l'acceptation par le salarié d'une convention de congé de mobilité doit en conséquence être fondée sur une cause réelle et sérieuse résultant des motifs économiques que l'employeur est tenu d'énoncer par écrit ; qu'en application des articles L. 1233-3 et L. 1233-77 et suivants du Code du travail, si l'adhésion du salarié à une convention de congé de mobilité entraîne une rupture réputée intervenir d'un commun accord, elle ne le prive pas de la possibilité d'en contester le motif économique ; que force est de constater qu'en l'espèce, la société 3M FRANCE a bien mentionné dans les conventions de congé de mobilité qu'elles constituaient " une rupture d'un commun accord pour motif économique du contrat de travail, admettant ainsi que le motif économique était le fondement de ces ruptures des contrats et que le juge judiciaire pouvait en apprécier le caractère réel et sérieux ; que la fin de non-recevoir sera rejetée et les demandes des salariés ayant souscrit une convention de congé de mobilité seront déclarées recevables ; (…)
1. ALORS QUE l'acceptation par le salarié de la proposition de congé de mobilité faite par l'employeur en application d'un accord collectif relatif à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences emporte rupture du contrat de travail d'un commun accord des parties à l'issue du congé et le salarié n'est pas recevable à contester le motif économique de la rupture ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1, L. 1233-3 et L. 1233-77 à L. 1233-80 du Code du travail, ensemble l'article 1134 du Code civil ;
2. ALORS QUE l'exposante contestait expressément, dans ses conclusions d'appel, la recevabilité de la contestation par les salariés de la légitimité de la rupture de leur contrat de travail sur le fondement de la signature d'un protocole de rupture de commun accord dans le cadre d'un congé de mobilité (conclusions d'appel, p. 31 à 37) ainsi que, pour les salariés protégés, de l'existence d'une autorisation de licenciement (p. 37 à 42) et sollicitait dans le dispositif de ses conclusions (p. 62) la réformation du jugement sur ces points ; qu'en affirmant que la société sollicitait la confirmation du jugement sur les irrecevabilités (arrêt, p. 9, dernier §) et qu'elle concluait « au débouté des demandes adverses » sur le licenciement économique (arrêt, p. 10, § 7), la cour d'appel a dénaturé les conclusions de l'exposante, et violé l'article 4 du Code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la rupture des contrats de travail des 38 salariés non protégés (Mme A... épouse X..., M. B..., Mme C..., Mme D..., Mme E..., Mme F... épouse G..., M. H..., M. I..., Mme J... épouse K..., Mme L..., Mme M..., Mme N... épouse O..., Mme P..., M. Q..., Mme R..., Mme S..., Mme T..., Mme U..., M. V..., Mme W... épouse XX..., Mme W..., Mme YY..., Mme ZZ..., M. AA..., M. BB..., Mme CC..., Mme DD... épouse EE..., Mme FF... épouse GG..., M. HH..., M. II..., Mme JJ... épouse KK..., M. LL..., Mme MM... épouse NN..., Mme OO..., M. PP..., M. QQ..., Mme RR..., Mme SS... épouse TT...) n'était pas fondée sur un motif économique au sens de l'article L. 1233-3 du Code du travail et condamné la société 3M FRANCE à leur payer des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
AUX MOTIFS PROPRES QUE Le licenciement économique des 43 salariés est motivé ainsi : « la société s'est vue contrainte de procéder à une restructuration sur le site de Pithiviers liée à l'arrêt des activités de production de dispositif d'administration de médicaments pour les laboratoires pharmaceutiques (produits finis sur les formes de timbres thermiques, aérosols et comprimés). La mise en place de cette réorganisation a également conduit la société à procéder à une compression d'effectifs et dans ce cadre, à mettre en place un plan de sauvegarde de l'emploi. Cette réorganisation a été rendue nécessaire pour sauvegarder la compétitivité du secteur d'activité de ta fabrication de dispositif d'administration de médicaments. Pour rappel, le groupe 3M a quitté l'industrie pharmaceutique fin 2006 pour se recentrer sur le secteur d'activité de la fabrication de dispositif d'administration de médicaments, appelés DDS. Or les segments de marché sur lesquels le groupe intervient dans ce secteur d'activité apparaissent en forte baisse. Ainsi le marché des timbres thermiques connaît-il une baisse sensible en valeur et en volume due pour les timbres thermiques de nitroglycérine à l'émergence de nouvelles formes de libération des doses et à une concurrence significativement accrue, et pour les timbres thermiques d'oestradiol à une étude qui remet en question la sécurité à long terme des produits. De même, le marché des aérosols à gaz, pour lequel le groupe dispose d'un inhalateur dépassé par les aérosols à poudre est menacé par les génériques. Enfin, le marché des comprimés est extrêmement concurrentiel et ces produits représentent des volumes très faibles et en déclin continu. Au total, le chiffre d'affaires de la branche transdermique a baissé en moyenne de 13 % par an entre 2003 et 2007 et les perspectives futures font apparaître une décroissance moyenne de près de 4 % d'ici à 2013. La profitabilité de ce secteur d'activité remise en cause avec des niveaux de marge proches de 0, 1 % en 2013 alors que les scénarios économiques pessimistes planent pour l'année 2009, en raison d'un freinage brutal de l'économie américaine, marché de loin le plus important pour la division DOS puisque pratiquement tout le chiffre d'affaires y est réalisé (33 millions de dollars contre 800 000 S pour la zone Europe). Face aux difficultés rencontrées tant sur le marché des timbres thermiques que sur celui des aérosols à gaz et des comprimés, le groupe a mis en oeuvre depuis plusieurs années de nombreuses mesures pour tenter de sauvegarder sa compétitivité. Malheureusement, ces mesures se sont révélées insuffisantes pour redresser les ventes lesquelles continuent de baisser sensiblement et les résultats opérationnels continuent à se dégrader de manière continue. Pour rester compétitifs sur le secteur d'activité DDS, le groupe doit repositionner à moyen et à long terme ce secteur d'activité et orienter ses programmes de recherche et de développement vers des secteurs plus porteurs. Ce nécessaire repositionnement a conduit à devoir rationaliser très drastiquement ses sites de production en optimisant ses outils de fabrication et ses équipes de supports. Au vu de l'organisation de la production, des spécificités techniques et des capacités de production de l'ensemble des sites de la division DOS, l'arrêt de la fabrication de timbres thermiques, aérosols à gaz et comprimés du site du Pithiviers était la seule solution réellement envisageable sur un plan économique et industriel, en ce qu'elle n'engendrerait pas de coût de requalification de produits dans les autres sites, l'inverse n'étant pas vrai puisque le site de Pithiviers est celui sur lequel le nombre de productions qualifiées est le moindre. La société a donc été amenée à supprimer 109 postes de travail sur le site du Pithiviers pouvant conduire à des licenciements économiques dont le vôtre. » Le rapport APEX, demandé par le comité d'entreprise note que la société s'est fondée sur les seules données du site du Pithiviers pour évaluer la baisse du chiffre d'affaires des timbres thermiques alors que l'appréciation de la nécessité de sauvegarder la compétitivité ne pouvait se limiter à ce site de production mais devait se faire au sein du secteur d'activité du groupe auquel la société appartient. Par ailleurs, les données prospectives retenues dans le plan de réorganisation sont contredites par les données du plan stratégique du groupe concernant la branche DDS puisque le plan stratégique prévoyait une augmentation des ventes des timbres thermiques de 98 % à l'horizon 2013 et que pour ce rapport, l'écart entre les éléments s'explique par l'absence de prise en compte dans le plan de réorganisation des autres spécialités de la gamme et des nouveaux produits à venir à l'horizon 2013. Les premiers juges ont remarqué que la société s'était focalisée sur la production du site du Pithiviers sans s'efforcer d'effectuer une analyse globale au niveau de la branche DDS alors que seule l'existence d'une menace pesant sur la compétitivité du secteur d'activité pouvait éventuellement justifier la fermeture du site du Pithiviers et non l'inverse. Il s'ensuit que la société a eu la volonté non de sauvegarder sa compétitivité mais bien sa rentabilité. Le rapport de l'expertise comptable met encore en valeur la hausse de la profitabilité du groupe au cours du troisième trimestre 2008 puisqu'il a distribué plus de 120 millions d'euros de dividendes à ses actionnaires en 2009, en pleine période de réorganisation de son activité prétendument nécessitée par une menace sur la compétitivité. L'analyse des premiers juges s'avère particulièrement pertinente et doit être tenue pour reproduite ici alors qu'ils concluent également que la réorganisation était fondée sur une simple logique comptable et non sur une-appréciation objective et globale de la réalité de la menace pouvant peser sur le secteur d'activité du groupe auquel il appartenait. L'analyse des pièces produites démontrait en effet que l'activité d'entreprise dans le secteur d'activité des dispositifs d'administration de médicaments ne subissait aucune menace sérieuse sur la compétitivité de l'entreprise. Les conventions de congés de mobilité des salariés n'étaient donc pas justifiées par un motif économique constituant une cause réelle et sérieuse de rupture des contrats de travail et elles devront avoir des effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Tous les salariés avaient plus de deux ans d'ancienneté en conséquence de quoi les dommages-intérêts minimum auxquels ils peuvent prétendre sont de six mots de salaire en sorte que les sommes allouées en première instance sur cette base devront être confirmées ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE la nécessité de réorganiser une entreprise pour sauvegarder sa compétitivité implique qu'il existe une menace pesant sur la compétitivité du secteur d'activité du groupe auquel l'entreprise appartient ; que cette menace doit faire encourir un risque pour la survie de l'entreprise à plus ou moins long terme ; que la notion de compétitivité ne s'apprécie que dans un cadre concurrentiel ; que la compétitivité d'une entreprise demeure en sa capacité à produire des produits présentant des caractéristiques permettant de rivaliser efficacement avec des concurrents sur le même secteur d'activité ; qu'en l'espèce, la menace alléguée sur la compétitivité porte le secteur d'activité de fabrication de dispositifs d'administration de médicaments, dite branche DDS ; que la juridiction doit apprécier la nécessité de sauvegarder la compétitivité dans ce domaine d'activité ; que la société 3M FRANCE motivait les ruptures des contrats de travail par la baisse du marché des dispositifs d'administration de médicaments qu'elle produisait ; que cependant, il ne peut être déduit une menace sur la compétitivité de la baisse de la demande de tels produits ; que la compétitivité de la société 3M FRANCE doit en effet s'apprécier au regard de ses concurrents dans ce secteur d'activité, indifféremment de l'évolution de la demande ; qu'en effet, bien que la demande évolue à la baisse, l'entreprise peut augmenter ses parts de marché au regard de sa compétitivité liée aux qualités, prix et caractéristiques des biens vendus ; que la société 3M FRANCE ne justifie ni n'allègue que ses parts de marché sur le secteur des dispositifs d'administration de médicaments diminuaient de manière telle que sa compétitivité s'en trouvait menacée ; qu'en conséquence, le moyen tiré de la diminution de la demande globale sur ce marché n'est pas pertinent afin de démontrer la nécessité de sauvegarder la compétitivité du secteur d'activité ; que les demandeurs produisent aux débats un rapport d'expertise des projets de réorganisation au sein de la société 3M FRANCE, établi par la société d'expertise comptable APEX ; que s'agissant de la menace pesant sur la compétitivité de la branche DDS, les experts ont conclu : " 3- Le motif sous-tendant la mise en place du Plan de Sauvegarde de l'emploi (livre 1) est défini dans le projet et repose sur la sauvegarde de la compétitivité aux bornes du secteur d'activité DOS. Cependant, ce dernier ne contient pas de quantification ou de passerelle permettant d'aboutir à une volumétrie précise de postes supprimés. il n'explique pas pourquoi certains départements seront concernés (exemple : les fonctions support) ni en quoi la réorganisation va permettre de sauvegarder la compétitivité de la branche d'activité puisqu'aucun Business Plan aux bornes de DDS (après réorganisation) n'est présenté dans le livre II. Si c'est un choix de gestion qui prélude à cette opération, il ne répond pas, en l'état, à la question du fondement économique des licenciements projetés du point de vue du Code du travail. 4- Par ailleurs, le risque pesant sur la compétitivité n'est pas avéré. Le projet de réorganisation fait état de prévisions aux bornes de la branche DDS qui sont partielles ou qui contredisent le Plan stratégique émanant directement du Groupe. En effet, ce dernier-tout en tenant compte de la poursuite de l'activité sur le site de Pithiviers-escompte une croissance continue de l'activité jusqu'en 2013 et sur une amélioration du taux de marge contributive. La rationalisation proposée devrait donc permettre une amélioration de la compétitivité dans un contexte où prévisions de chiffre d'affaires et de profitabilité sont déjà favorables et devraient continuer de progresser. A ce titre, l'amélioration de la compétitivité, conformément à la jurisprudence, ne constitue pas un motif économique valable justifiant la mise en place d'un plan de sauvegarde de l'emploi. " ; que le rapport APEX note avec pertinence que la société 3M FRANCE s'est fondée sur les seules données du site de Pithiviers pour évaluer la baisse du chiffre d'affaires des timbres dermiques alors que l'appréciation de la nécessité de sauvegarder la compétitivité ne pouvait se limiter à un seul site de production mais devait se faire au sein du secteur d'activité du groupe auquel la société appartient ; que les données prospectives retenues dans le plan de réorganisation sont contredites par les données du plan stratégique du groupe concernant la branche DOS ; qu'ainsi, le plan stratégique prévoyait une augmentation des ventes des timbres dermiques de 98 % à l'horizon 2013 ; que selon le rapport APEX, l'écart entre les éléments s'explique par l'absence de prise en compte dans le plan de réorganisation des autres spécialités de la gamme et des nouveaux produits à venir à l'horizon 2013 ; que de même, le rapport APEX note l'écart important entre l'évolution du chiffre d'affaires retenu par le plan de réorganisation quant aux aérosols par rapport aux données considérablement plus optimistes du plan stratégique ; qu'aux termes du plan stratégique 3M, les ventes de DOS devaient augmenter sur la période de 2008 à 2013 de 14, 6 % par an s'agissant des timbres dermiques et de 4, 2 % par s'agissant des aérosols de sorte que l'évolution défavorable du chiffre d'affaires soutenue par la société 3M FRANCE est contredite par ses propres données stratégiques ; que ces éléments établissent que la société 3M FRANCE a d'une part entretenu une confusion entre la baisse provisoire de la demande sur le marché des dispositifs d'administration de médicaments et sa compétitivité au regard de l'activité des autres concurrents sur le même secteur de production, et d'autre part n'a pas porté une réelle appréciation sur la menace pesant sur la compétitivité au sein du secteur d'activité auquel la société appartient, mais s'est limitée à apprécier la " compétitivité " du site de Pithiviers ; que c'est ainsi que la société 3M FRANCE a pu motiver les conventions de congé de mobilité en mentionnant que " l'arrêt de la fabrication de timbres dermiques, aérosols à gaz et comprimés du site de Pithiviers était la seule solution réellement envisageable sur un plan économique et industriel, en ce qu'elle n'engendrerait pas de coûts de requalification de produits dans les autres sites ", entraînant la suppression de 1 09 postes sur le site de Pithiviers qui n'était pas le seul site de production dans la branche DDS ; qu'il apparaît que la société 3M FRANCE s'est focalisée sur la production du site de Pithiviers sans s'efforcer d'effectuer une analyse globale au niveau de la branche DOS alors que seule l'existence d'une menace pesant sur la compétitivité du secteur d'activité pouvait éventuellement justifier la fermeture du site de Pithiviers et non l'inverse ; que ces considérations peuvent alors conduire à s'interroger sur la volonté de la société 3M FRANCE non de sauvegarder sa compétitivité mais sa rentabilité ; qu'il y a lieu de noter que les motifs économiques visés dans les conventions de congé de mobilité font expressément référence à la baisse de la profitabilité et aux coûts engendrés par la fabrication de timbres dermiques, aérosols à gaz et comprimés si elle était maintenue sur le site de Pithiviers et non purement arrêtée sur celui-ci ; que le rapport APEX met quant à lui en exergue la hausse de la profitabilité du groupe 3M au cours du troisième trimestre 2008 et le fait que le pôle Health Care auquel la branche DDS appartient a contribué de façon importante à la progression du chiffre d'affaires ; qu'il résulte du projet de réorganisation de la société LABORATOIRES 3M devenue la société 3M FRANCE que le repositionnement de son activité consistait à se désinvestir de la production de timbres dermiques à base de nitroglycérine pour développer des timbres de phentanyl (p. 28 du projet) ; que l'entreprise exposait que le maintien de l'activité sur le site de Pithiviers ne permettait d'investir de manière adaptée dans la recherche et développement afin de développer de nouveaux produits lui permettant de rester compétitif sur son secteur d'activité (p. 32 du projet) ; que s'il appartient à la société 3M FRANCE d'effectuer des choix stratégiques et d'investissement, il y a lieu de constater que ce repositionnement était décidé alors même que la société 3M FRANCE n'était pas présente sur le marché des timbres de phentanyl et que son premier essai pour entrer sur ce marché a été un échec (p. 29 du projet) ; qu'ainsi, la société 3M FRANCE ne pouvait valablement évoquer une menace pesant sur sa compétitivité au sein de la branche DOS tout en opérant des choix la conduisant à effectuer des investissements importants pour tenter de percer de manière aléatoire sur un marché sur lequel elle n'était pas présente, et en arrêtant concomitamment une activité de fabrication de produits sur le site de Pithiviers dont la demande était certes déclinante mais dont les perspectives étaient favorables au regard du plan stratégique du groupe ; que la société 3M FRANCE explique également qu'elle a travaillé sur le développement de la technologie des micro-aiguilles " pour maintenir sa compétitivité " (p. 29 du projet) alors que les éléments exposés ensuite contredisent la réalité de cet objectif ; qu'en effet, la société 3M FRANCE indiquait " Potentiellement, en 2013, cette technologie pourrait devenir un axe de croissance pour le business " et " au cours des dix prochaines années, la division DOS espère que le chiffre d'affaires réalisé via cette technologie dépassera celui issu des timbres dermiques classiques " ; qu'en conséquence, il ne s'agissait nullement pour la société 3M FRANCE de sauvegarder une compétitivité dont la menace n'est pas établie mais d'axer sa production sur une technologie qui lui permettait d'''espérer''la réalisation d'un chiffre d'affaires supérieur à celui des timbres dermiques à l'horizon d'une dizaine d'années ; que la société 3M FRANCE a donc effectué une réorganisation fondée sur un espoir de gains plus élevés et sur un investissement dans un marché au sein duquel elle avait échoué, sans avoir le même espoir que le plan stratégique quant à l'évolution du chiffre d'affaires des biens produits sur le site de Pithiviers ; que la justification de la fermeture du site de Pithiviers afin de financer la recherche et développement de nouveaux produits dans le but de demeurer compétitif est battue en brèche par le fait que la société 3M FRANCE a distribué plus de 120 millions d'euros de dividendes à ses actionnaires en 2009, à savoir en pleine période de réorganisation de son activité prétendument nécessitée par une menace sur la compétitivité ; que la société 3M FRANCE prétend que ces dividendes ne résulte pas des résultats annuels de l'année 2009 mais d'une simple affectation comptable de sommes mises en réserve depuis de nombreuses années, démontrant ainsi qu'elle disposait largement de la capacité de financer ses investissements en recherche et développement sans qu'existe une quelconque menace pesant sur sa compétitivité du seul fait du maintien de l'activité sur le site de Pithiviers ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que la société LABORATOIRES 3M a effectué des choix stratégiques qu'il n'incombe pas à la juridiction d'apprécier ; que cependant, ces choix de réorganisation étaient fondés sur une simple logique comptable et non sur appréciation objective et globale de la réalité de la menace pouvant peser sur le secteur d'activité du groupe auquel elle appartient ; que l'analyse des pièces produites démontre que l'activité de l'entreprise dans le secteur d'activité des dispositifs d'administration de médicaments ne subissait aucune menace sérieuse sur la compétitivité de l'entreprise ; que si la société 3M FRANCE a effectué des choix en vue d'améliorer sa rentabilité, elle ne pouvait y procéder au détriment de ses salariés qui contribuent à sa prospérité ; qu'en conséquence, les conventions de congé de mobilité des salariés demandeurs n'étaient pas justifiés par un motif économique constituant une cause réelle et sérieuse de rupture des contrats de travail ; que ces ruptures de contrat ont donc les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
1. ALORS QUE la menace sur la compétitivité ne s'apprécie pas uniquement au regard de sa position par rapport à ses concurrents et la diminution de la demande sur les produits vendus peut constituer une menace sur la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient ; qu'en affirmant, par motifs adoptés, qu'il ne peut être déduit une menace sur la compétitivité de la baisse de la demande des produits vendus, que la compétitivité de la société 3M FRANCE doit s'apprécier au regard de ses concurrents dans ce secteur d'activité, indifféremment de l'évolution de la demande, que bien que la demande évolue à la baisse, l'entreprise peut augmenter ses parts de marché au regard de sa compétitivité liée aux qualités, prix et caractéristiques des biens vendus, que la société 3M FRANCE ne justifie ni n'allègue que ses parts de marché sur le secteur des dispositifs d'administration de médicaments diminuaient de manière telle que sa compétitivité s'en trouvait menacée et qu'en conséquence, le moyen tiré de la diminution de la demande globale sur ce marché n'est pas pertinent afin de démontrer la nécessité de sauvegarder la compétitivité du secteur d'activité, la cour d'appel a violé l'article L. 1233-3 du Code du travail ;
2. ALORS en tout état de cause QUE la société faisait valoir qu'il résulte de la note économique remise aux représentants du personnel qu'elle n'avait pas déduit la menace existant sur sa compétitivité de la seule évolution négative de la demande sur le marché considéré mais aussi de sa situation concurrentielle notamment au regard de la présence de concurrents situés dans des pays à faible coût de main d'oeuvre (conclusions d'appel, p. 56) ; qu'en adoptant le motif du conseil de prud'hommes selon lequel le moyen tiré de la diminution de la demande globale sur le marché n'était pas pertinent afin de démontrer la nécessité de sauvegarder la compétitivité du secteur d'activité des dispositifs d'administration de médicaments, sans s'expliquer sur ce point, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-3 du Code du travail ;

3. ALORS QUE dans son projet de réorganisation (notamment p. 26-27) et dans ses conclusions d'appel (notamment p. 51), l'employeur invoquait une baisse du chiffre d'affaire de l'ensemble du secteur d'activité « DDS » entier et non du seul site de Pithiviers et faisait d'ailleurs état de mesures de réduction d'effectifs déjà intervenues sur les autres sites de la division « DDS » dans le monde ; qu'en affirmant péremptoirement que la société se serait focalisée sur la production du site de Pithiviers sans s'efforcer d'effectuer une analyse globale au niveau de la branche DDS, sans s'expliquer sur ce point, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-3 du Code du travail ;
4. ALORS en outre QUE l'employeur soulignait que la prétendue contradiction entre la situation décrite par le plan de réorganisation et les données du plan stratégique, retenue par les premiers juges sur la base du rapport APEX de l'expert du comité d'établissement, résultait d'une erreur manifeste d'analyse commise par ce dernier dès lors que les chiffres figurant dans le premier document concernait la situation telle qu'elle se présentait pour les prochaines années sans réorganisation tandis que ceux définis par le plan stratégique à cinq ans tenaient compte de la réalisation de la mesure de réorganisation litigieuse (conclusions d'appel, p. 56) ; qu'en adoptant et reprenant les motifs des premiers juges relatifs à la prétendue contradiction existant entre les données du plan de réorganisation et celles du plan stratégique, sans s'expliquer sur ce point, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-3 du Code du travail ;
5. ALORS QUE le juge ne peut se substituer à l'employeur quant au choix qu'il a effectué dans la mise en oeuvre de la réorganisation ; qu'en retenant à l'appui de sa décision que le repositionnement décidé par la société 3M FRANCE sur les timbres de phentanyl était décidé alors même que la société 3M FRANCE n'était pas présente sur ce marché et que son premier essai pour y entrer sur ce marché avait été un échec et qu'ainsi, la société 3M FRANCE ne pouvait valablement évoquer une menace pesant sur sa compétitivité au sein de la branche DDS tout en opérant des choix la conduisant à effectuer des investissements importants pour tenter de percer de manière aléatoire sur un marché sur lequel elle n'était pas présente, et en arrêtant concomitamment une activité de fabrication de produits sur le site de Pithiviers dont la demande était certes déclinante mais dont les perspectives étaient favorables au regard du plan stratégique du groupe, la cour d'appel s'est immiscée dans le pouvoir de direction de l'employeur et a violé l'article L. 1233-3 du Code du travail ;
6. ALORS QUE la distribution de dividendes par la société employeur correspondant à des sommes mises en réserve depuis de nombreuses années ne permet pas d'exclure l'existence d'une menace pesant sur la compétitivité du secteur d'activité du groupe, a fortiori lorsque cette société exerçait plusieurs activités et non pas seulement celle relevant sur secteur d'activité concerné par la réorganisation ; qu'en l'espèce, l'exposante soulignait, preuve à l'appui, que la distribution de 120. 000. 000 € ne correspondait pas aux résultats de la société LABORATOIRES 3M SANTE pour 2009 mais d'une affectation comptable à la société 3M FRANCE de sommes mises en réserve depuis des années (conclusions d'appel, p. 57) ; qu'elle soulignait par ailleurs qu'elle exerçait d'autres activités ne relevant pas de la branche DDS (conclusions d'appel, p. 45-46) ; qu'en déduisant la hausse de la profitabilité du groupe au cours du troisième trimestre 2008 et l'absence de menace sur la compétitivité de la distribution de dividendes de plus de 120 millions d'euros de dividendes faite par la société LABORATOIRES 3M SANTE à ses actionnaires en 2009, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-3 du Code du travail.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR sursis à statuer sur les demandes des 5 salariés protégés (Mesdames UU..., VV..., YYY... et WW..., Monsieur XXX...) et invité ces 5 salariés à introduire l'action en appréciation de la légalité devant la juridiction administrative,
AUX MOTIFS ADOPTES QUE Vu la loi des 16 et 24 août et le décret du 7 fructidor an III ; qu'aux termes de l'article 49 du Code de procédure civile, toute juridiction saisie d'une demande de sa compétence connaît, même s'ils exigent l'interprétation d'un contrat, de tous les moyens de défense à l'exception de ceux qui soulèvent une question relevant de la compétence exclusive d'une autre juridiction ; que la rupture des contrats de travail de Madame Sabine UU..., Madame Marie-Christine VV..., Madame Mylène YYY..., Madame Catherine WW... et Monsieur Jean-François XXX... a été autorisée par l'inspecteur du travail ; qu'en conséquence le juge judiciaire ne peut apprécier l'existence d'un motif économique constituant une cause réelle et sérieuse de rupture du contrat ; que tant la motivation succincte des décisions administratives que les éléments produits aux débats sur l'existence d'un motif économique constituent un moyen sérieux de contestation de la légalité de celles-ci ; qu'il y a donc lieu de surseoir à statuer sur les demandes de Madame Sabine UU..., Madame Marie-Christine VV..., Madame Mylène YYY..., Madame Catherine WW... et Monsieur Jean-François XXX... jusqu'à la décision définitive du juge administratif de la question préjudicielle en appréciation de la légalité des autorisations administratives de rupture de leurs contrats de travail ; que le juge judiciaire n'ayant pas compétence pour saisir directement le juge administratif, il incombe aux demandeurs d'introduire l'action en appréciation de légalité devant la juridiction administrative ;
1. ALORS QUE l'autorisation de licenciement d'un salarié protégé interdit au juge judiciaire d'apprécier la cause réelle et sérieuse du licenciement fondé sur cette autorisation et que le juge peut seulement renvoyer au juge administratif le soin d'apprécier la légalité de la décision administrative si l'exception préjudicielle présente un caractère sérieux ; qu'en l'espèce, l'exposante, après avoir rappelé les exigences du juge administratif s'agissant de la motivation de l'autorisation de licenciement (p. 40), soulignait que les décisions administratives autorisant les licenciements de Monsieur XXX... ainsi que de Mesdames UU..., VV..., YYY... et WW... étaient suffisamment motivées, dès lors qu'elles visaient les textes légaux et règlementaires applicables ainsi que la procédure de licenciement collectif pour motif économique engagée le 5 décembre 2008, faisaient état de l'entretien préalable et de l'avis du comité d'établissement, mentionnaient le motif économique invoqué par l'employeur et constataient la réalité de celui-ci, relevaient l'effort entrepris par l'employeur pour le reclassement caractérisé par la formulation d'une proposition écrite, et constataient l'absence de tout lien entre le mandat de l'intéressé et la rupture de son contrat de travail d'un commun accord ; qu'en affirmant péremptoirement que la motivation succincte des décisions administratives constituait un moyen sérieux de contestation de la légalité de celles-ci, sans caractériser concrètement en quoi la motivation de ces décisions aurait été insuffisante, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de la loi des 16-24 août 1790, du décret du 16 fructidor An III et du principe de séparation des pouvoirs ;
2. ALORS QUE l'autorisation de licenciement d'un salarié protégé interdit au juge judiciaire d'apprécier la cause réelle et sérieuse du licenciement fondé sur cette autorisation et que le juge peut seulement renvoyer au juge administratif le soin d'apprécier la légalité de la décision administrative si l'exception préjudicielle présente un caractère sérieux ; que le caractère sérieux de l'exception ne peut se déduire de ce que la cause économique paraît contestable au juge judiciaire ; qu'en énonçant que les éléments produits aux débats sur l'existence d'un motif économique constituaient un moyen sérieux de contestation de la légalité des décisions d'autorisation de licenciement, la cour d'appel a violé la loi des août 1790, du décret du 16 fructidor An III et du principe de séparation des pouvoirs ;
3. ALORS en tout état de cause QUE l'arrêt ayant sursis à statuer sur les demandes des salariés protégés et invité ces salariés à introduire l'action en appréciation de la légalité de leurs autorisations de licenciement devant la juridiction administrative en se fondant notamment sur la circonstance que les éléments produits aux débats sur l'existence d'un motif économique constituaient un moyen sérieux de contestation de la légalité des décisions d'autorisation de licenciement, la cassation à intervenir sur troisième moyen, relatif à la cause économique de licenciement, entraînera, par voie de conséquence, la censure de l'arrêt sur ce point, en application de l'article 624 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-24440
Date de la décision : 21/09/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans, 10 juillet 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 21 sep. 2016, pourvoi n°13-24440


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:13.24440
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