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14/09/2016 | FRANCE | N°14-19238

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 14 septembre 2016, 14-19238


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 avril 2014), que Mme X..., engagée par la société de travail temporaire Ordinter, aux droits de laquelle vient Adecco, a été mise à la disposition de la société Minit France, en qualité de comptable dans le cadre d'une succession de missions d'intérim sur la période allant du 19 avril 1999 au 14 juin 1999 ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal de la salariée :
Attendu que la salariée

fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande en paiement d'une somme à...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 avril 2014), que Mme X..., engagée par la société de travail temporaire Ordinter, aux droits de laquelle vient Adecco, a été mise à la disposition de la société Minit France, en qualité de comptable dans le cadre d'une succession de missions d'intérim sur la période allant du 19 avril 1999 au 14 juin 1999 ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal de la salariée :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande en paiement d'une somme à titre d'indemnité compensatrice des pauses non prises, alors, selon le moyen :
1°/ que les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes des parties sans motiver leur décision par analyse des documents et éléments de preuve produits devant eux ; qu'en l'espèce, il ressortait des contrats de mission et des bulletins de salaire produits aux débats que la durée contractuelle quotidienne de travail de la salariée était de 39 heures et sa durée quotidienne de travail, de 8 heures 30 à 17 heures ; qu'aucun temps de pause n'était prévu ; qu'en retenant, pour débouter Mme X... de sa demande, que "… contrairement à ce que soutient Mme X..., la durée réelle hebdomadaire de son travail était de 37 heures 30 hors pause, alors qu'elle était rémunérée sur la base de 39 heures" sans préciser les éléments sur lesquels elle se fondait pour justifier sa décision la cour d'appel, qui a privé sa décision de motifs, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ qu'eu égard à la finalité qu'assigne aux temps de repos quotidiens la Directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail, il appartient à l'employeur de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d'exercer effectivement son droit à une pause rémunérée, et, en cas de contestation, de justifier qu'il a accompli à cette fin les diligences qui lui incombent légalement ; qu'à supposer que fût contractuellement prévue, au profit de Mme X..., un temps non travaillé rémunéré d'une heure et demie dans la semaine, il incombait à l'employeur de démontrer que la salariée avait été effectivement mise à même d'exercer quotidiennement son droit à une pause rémunérée de vingt minutes après six heures de travail ; qu'en se déterminant aux termes de motifs inopérants, dont ne résulte pas la preuve, par l'employeur, de l'effectivité du droit de la salariée à ce temps de pause quotidien et, en l'état de sa contestation, de la justification de ce qu'il avait accompli à cette fin les diligences qui lui incombaient légalement la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L.3121-33 du code du travail ;
Mais attendu que sous le couvert de griefs non fondés d'insuffisance de la motivation et de manque de base légale, le moyen ne tend qu'à remettre en cause le pouvoir souverain des éléments de fait et de preuve par les juges du fond qui ont constaté, par motifs propres et adoptés, que l'employeur avait accordé et rémunéré les temps de pause ;
Sur le second moyen du pourvoi principal de la salariée :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande en dommages-intérêts pour harcèlement moral et préjudice subi, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en se déterminant sans examiner dans leur ensemble les éléments produits par la salariée, et notamment l'attestation établie par son père dont ressortait une dégradation de son état de santé en lien avec ses conditions de travail, de nature à laisser présumer un harcèlement moral, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
2°/ que tenu de veiller à la santé et la sécurité des salariés, l'employeur manque à cette obligation de résultat en leur imposant des conditions de travail de nature à y porter atteinte ; qu'en l'espèce, Mme X... avait produit des éléments de nature à démontrer qu'elle s'était vu imposer au sein des sociétés Adecco et Minit France des conditions d'exécution et de rupture de son contrat de travail engendrant « un état de grande frustration, de stress et de fatigue » ayant effectivement dégradé son état de santé ; que la cour d'appel a constaté la réalité de cette dégradation ; qu'en la déboutant cependant de ses demandes de dommages-intérêts la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 4121-1 du code du travail ;
Mais attendu que, sous le couvert de griefs non fondés de violation de la loi et de défaut de base légale, le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine des juges du fond qui, après avoir examiné, dans leur ensemble, les faits invoqués par la salariée ont relevé que celle-ci ne rapportait pas la preuve de faits faisant présumer l'existence d'un harcèlement moral ;
Sur le pourvoi incident éventuel de la société Adecco :
Attendu que le rejet du pourvoi de la salariée rend sans objet le pourvoi incident de l'employeur ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze septembre deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits, au pourvoi principal, par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour Mme X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Mademoiselle X... de sa demande tendant à la condamnation des Sociétés Adecco et Minit France au paiement d'une somme de 21 648 € à titre d'indemnité compensatrice des pauses non prises ;
AUX MOTIFS QUE "ainsi que l'ont justement relevé les premiers juges et contrairement à ce que soutient Madame X..., la durée réelle hebdomadaire de son travail était de 37 heures 30 hors pause, alors qu'elle était rémunérée sur la base de 39 heures, de sorte que les pauses qu'il lui était effectivement possible de prendre étaient rémunérées ; que la décision entreprise sera en conséquence confirmée de ce chef" ;
1°) ALORS QUE les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes des parties sans motiver leur décision par analyse des documents et éléments de preuve produits devant eux ; qu'en l'espèce, il ressortait des contrats de mission et des bulletins de salaire produits aux débats que la durée contractuelle quotidienne de travail de la salariée était de 39 heures et sa durée quotidienne de travail, de 8 h 30 à 17 heures ; qu'aucun temps de pause n'était prévu ; qu'en retenant, pour débouter Mademoiselle X... de sa demande, que "… contrairement à ce que soutient Madame X..., la durée réelle hebdomadaire de son travail était de 37 heures 30 hors pause, alors qu'elle était rémunérée sur la base de 39 heures" sans préciser les éléments sur lesquels elle se fondait pour justifier sa décision la Cour d'appel, qui a privé sa décision de motifs, a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS en toute hypothèse QU' eu égard à la finalité qu'assigne aux temps de repos quotidiens la Directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail, il appartient à l'employeur de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d'exercer effectivement son droit à une pause rémunérée, et, en cas de contestation, de justifier qu'il a accompli à cette fin les diligences qui lui incombent légalement ; qu'à supposer que fût contractuellement prévue, au profit de Mademoiselle X..., un temps non travaillé rémunéré d'une heure et demie dans la semaine, il incombait à l'employeur de démontrer que la salariée avait été effectivement mise à même d'exercer quotidiennement son droit à une pause rémunérée de 20 minutes après six heures de travail ; qu'en se déterminant aux termes de motifs inopérants, dont ne résulte pas la preuve, par l'employeur, de l'effectivité du droit de la salariée à ce temps de pause quotidien et, en l'état de sa contestation, de la justification de ce qu'il avait accompli à cette fin les diligences qui lui incombaient légalement la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L.3121-33 du Code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté Mademoiselle X... de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral et préjudice subi ;
AUX MOTIFS QUE "s'agissant du préjudice résultant du harcèlement moral allégué, il y a lieu de constater qu'au-delà de la référence aux moqueries et à la méchanceté dont fait état Madame X..., cette dernière ne fournit pas à la cour d'éléments laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral à son encontre et ce, nonobstant la réalité de la dégradation de son état de santé (…) ;
QU'au surplus, s'agissant des congés payés qui n'auraient pas été proposés à Madame X..., il est justifié par la Société Adecco que les indemnités dues à ce titre ont effectivement été réglées, de sorte que la décision des premiers juges déboutant Madame X... de sa demande de dommages et intérêts sera confirmée" ;
1°) ALORS QU'en se déterminant sans examiner dans leur ensemble les éléments produits par la salariée, et notamment l'attestation établie par son père dont ressortait une dégradation de son état de santé en lien avec ses conditions de travail, de nature à laisser présumer un harcèlement moral, la Cour d'appel a violé les articles L.1152-1 et L.1154-1 du Code du travail ;
2°) ALORS en toute hypothèse QUE tenu de veiller à la santé et la sécurité des salariés, l'employeur manque à cette obligation de résultat en leur imposant des conditions de travail de nature à y porter atteinte ; qu'en l'espèce, Mademoiselle X... avait produit des éléments de nature à démontrer qu'elle s'était vu imposer au sein des Sociétés Adecco et Minit France des conditions d'exécution et de rupture de son contrat de travail engendrant " un état de grande frustration, de stress et de fatigue" ayant effectivement dégradé son état de santé ; que la Cour d'appel a constaté la réalité de cette dégradation ; qu'en la déboutant cependant de ses demandes de dommages et intérêts la Cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L.4121-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-19238
Date de la décision : 14/09/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 30 avril 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 14 sep. 2016, pourvoi n°14-19238


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.19238
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