LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la Caisse nationale suisse en cas d'accident et à l'office cantonal d'assurance invalidité du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. X..., Mme Y... épouse X..., la société Zurich et la société Assurances du crédit mutuel ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme Laetitia X... a été blessée dans un accident de la circulation dans lequel était impliqué le véhicule conduit par Mme Z..., assuré auprès de la société MAAF assurances ; que M. et Mme X..., agissant en leur qualité de représentants légaux de leur fille Laetitia X..., les ont fait assigner en réparation de ses préjudices, en présence de la Caisse nationale suisse en cas d'accident, de l'office cantonal d'assurance invalidité, de la société Zurich et de la société Assurances du crédit mutuel ;
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les premier et deuxième moyens annexés qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le troisième moyen ;
Vu l'article 1153 du code civil ;
Attendu que la créance du tiers payeur, dont le recouvrement est poursuivi par subrogation dans le droit d'action de la victime, n'est pas indemnitaire, mais porte sur le paiement d'une somme d'argent et produit intérêts du jour de la demande ;
Attendu que pour fixer à la date de son prononcé le point de départ des intérêts de retard sur la somme de 781 360,55 euros revenant à la Caisse nationale suisse en cas d'accident et sur la somme de 585 575,49 euros revenant à l'office cantonal d'assurance invalidité, l'arrêt retient qu'il ne sera pas fait droit à la demande de décompte d'intérêts antérieurement à la décision qui a pour objet de déterminer les créances des uns et des autres et notamment celles des tiers payeurs ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les demandes de paiement avaient été formées le 24 septembre 2009, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que les sommes allouées porteront intérêt au taux légal à compter du prononcé de l'arrêt, l'arrêt rendu le 9 octobre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi ;
Dit que les sommes allouées porteront intérêt au taux légal à compter du 24 septembre 2009 ;
Condamne Mme Z... et la société MAAF assurances aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit septembre deux mille seize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Haas, avocat aux Conseils, pour la Caisse nationale suisse en cas d'accident et l'office cantonal d'assurance invalidité
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR rejeté la demande de la Suva au titre des frais de santé futurs ;
AUX MOTIFS QUE la Suva expose avoir capitalisé un montant de 1.850 francs suisses qui « n'est pas exorbitant et parfaitement justifié », compte-tenu de l'état de la victime mais elle n'explicite pas quelle est la nature des soins ou frais ainsi pris en compte et les modalités de ce calcul ; qu'or l'expert judiciaire n'avait pas évoqué dans ses conclusions la nécessité de soins futurs, bien au contraire, il en écartait certains ; que cette réclamation ne sera pas admise car trop imprécise et non vérifiable par la cour d'appel quant à son bien fondé ;
ALORS, 1°), QUE les tiers payeurs sont recevables et bien fondés à demander le remboursement des dépenses de santé futures qui sont les frais médicaux et assimilés, même occasionnels mais médicalement prévisibles, rendus nécessaires par l'état pathologique de la victime après la consolidation ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si les conclusions du docteur A..., qui avait mis en évidence l'existence d'importantes séquelles neuropsychologiques en lien direct avec l'accident, ne faisaient pas ressortir la nécessité pour Mme X... de bénéficier d'un traitement et d'un suivi psychologique et psychiatrique dont la prise en charge par le tiers payeur suisse pouvait donner lieu à recours à l'encontre du tiers responsable et de son assureur au titre des dépenses de santé futures, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du principe de la réparation intégrale et des articles 93 du règlement (CEE) n° 1408/71 du 14 juin 1971 et 74 de la loi fédérale suisse du 6 octobre 2000.
ALORS, 2°), QU'en rejetant la demande au titre des dépenses de santé futures après avoir invité la Suva, au titre des dépenses de santé actuelles, à justifier les dépenses prises en charge jusqu'à la date de consolidation seulement, cependant que la Suva avait produit des décomptes justifiant la prise en charge de frais médicaux, directement liés à l'accident, après la date de consolidation, la cour d'appel a violé le principe de la réparation intégrale et des articles 93 du règlement (CEE) n° 1408/71 du 14 juin 1971 et 74 de la loi fédérale suisse du 6 octobre 2000.
DEUXIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR liquidé le préjudice patrimonial subi par Mme X... à la somme de 1.612.976,60 euros, après avoir fixé le poste de préjudice né de l'assistance d'une tierce personne à la somme de 24.351,55 euros et D'AVOIR condamné solidairement Mme Z... et la société Maaf assurances à payer à la Suva la somme de 781.360,55 euros sous déduction des provisions déjà versées et sous réserves des dépenses de santé actuelles ;
AUX MOTIFS QUE Mme X... rappelle que ce poste est lié à la perte d'autonomie de la victime qui reste atteinte, à la suite du fait dommageable, d'un déficit fonctionnel permanent la mettant dans l'obligation de recourir à un tiers pour l'assister dans les actes de la vie courante ; qu'elle se réfère à l'expertise du docteur A... qui indique qu'elle a des difficultés de mémoire, n'a pas conscience de la valeur de l'argent, ne s'étonnant pas de payer 90 euros un plateau de fruits, délaissant le ménage de sorte que quelqu'un doit intervenir deux heures tous les 15 jours ; qu'elle s'est montrée incapable de s'occuper d'un chaton ou a laissé mourir deux perruches par manque de soins ; que Mme X... dispose cependant d'une certaine autonomie pour préparer les repas, conduire, vivre en appartement même si le plus souvent elle est hébergée par son ami ; que l'expert médical qui n'a d'ailleurs été saisi d'aucun dire en la matière, n'a pas retenu la nécessité d'assistance d'une tierce personne ; qu'il convient également de préciser que les comportements décrits ci-dessus sont indemnisés au titre du déficit fonctionnel permanent grâce aux conclusions du docteur A... ; que tout au plus peuton admettre, ce qui ressort de ses constatations, qu'une aide-ménagère est nécessaire deux heures tous les quinze jours et donc 4 heures par mois sur la base de 12 euros de l'heure ; que cela représente une dépense annuelle de 48 euros x 12 euros x en rente viagère 42.277 = 24.351,55 euros (29.484,63 francs suisses) qui reviendront à la CNA-Suva laquelle a admis dans le cadre de la prise en charge de ce dossier de verser une allocation pour impotent d'un montant largement supérieur puisque de 234.558 francs suisses selon justificatif produit (pièce 8) ; qu'il n'appartient pas à la société Maaf de contester la prise en charge en soutenant que la prestation n'était pas due, les conditions d'attribution ayant nécessairement été appréciées par la Suva, selon le droit applicable alors que la société Maaf et Mme Z... n'en subissent aucun grief ;
ALORS QUE la réparation doit être intégrale ; qu'en application de ce principe, si le tiers responsable doit indemniser la victime de toutes les pertes qu'elle subit du fait de l'accident, il doit également l'indemniser de les toutes les dépenses qu'elle est amenée à faire consécutivement à l'accident ; qu'en fixant le préjudice patrimonial permanent de Mme X..., qui constituait l'assiette du recours des tiers payeurs suisses, sans rechercher, comme elle y était invitée, si Mme Z... et son assureur ne devaient pas être condamnés à prendre en charge les frais d'hébergement de Mme X... dans un établissement spécialisé dès lors que cette prise en charge avait été rendue nécessaire par les séquelles neuropsychologiques dont elle restait atteinte et dont elle avait constaté qu'elles étaient en rapport direct avec l'accident, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du principe de la réparation intégrale et des articles 93 du règlement (CEE) n° 1408/71 du 14 juin 1971 et 74 de la loi fédérale suisse du 6 octobre 2000.
TROISIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR dit que les sommes allouées à la Suva et à l'Office cantonal d'assurance invalidité porteront intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;
AUX MOTIFS QU'il ne sera pas fait droit à la demande de décompte d'intérêts au taux légal antérieurement à la présente décision, car c'est elle qui a pour objet de déterminer les créances des uns et des autres et notamment celles des tiers payeurs ;
ALORS QUE la créance du tiers payeur, dont le recouvrement est poursuivi par subrogation dans le droit d'action de la victime, n'est pas indemnitaire mais porte sur le paiement d'une somme d'argent et produit intérêts au jour de la demande ; qu'en considérant le contraire pour retenir que les sommes allouées au organismes sociaux suisses au titre de leur recours subrogatoire ne pourront produire intérêts qu'au jour du prononcé de sa décision et non au jour de leur demande en paiement, la cour d'appel a violé l'article 1153 du code civil.