La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/08/2016 | FRANCE | N°16-83318

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 10 août 2016, 16-83318


N° U 16-83.318 F-P+B
N° 4156

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix août deux mille seize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire ASCENSI, les observations de la société civile professionnelle SPINOSI et SUREAU, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LEMOINE ;
REJET du pourvoi formé par M. Mounir X..., contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon, en date du 3 mai 2016, qui, dans la procédure suivie contre

lui des chefs de vols qualifiés, dégradation par un moyen dangereux pour le...

N° U 16-83.318 F-P+B
N° 4156

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix août deux mille seize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire ASCENSI, les observations de la société civile professionnelle SPINOSI et SUREAU, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LEMOINE ;
REJET du pourvoi formé par M. Mounir X..., contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon, en date du 3 mai 2016, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs de vols qualifiés, dégradation par un moyen dangereux pour les personnes aggravée, tentative de meurtre aggravé, recel et association de malfaiteurs, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention le plaçant en détention provisoire ;
Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. X..., mis en accusation devant la cour d'assises du Rhône, par arrêt en date du 2 juillet 2014, a comparu le 8 avril 2016 devant le juge des libertés et de la détention en exécution d'un mandat d'arrêt délivré par le juge d'instruction en date du 26 février 2013 ; que le juge des libertés et de la détention a ordonné l'incarcération provisoire de l'intéressé pour une durée de quatre jours après que ce dernier a sollicité un délai pour préparer sa défense, en visant les articles 137, 144 et 145 du code de procédure pénale et motifs pris de ce que l'accusé n'avait aucune garantie de représentation ; que, par ordonnance en date du 11 avril 2016, le juge des libertés et de la détention a placé M. X... en détention provisoire ; que ce dernier a relevé appel de la décision ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 1, 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 7 de la directive n° 2012/13/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2012 relative au droit à l'information dans le cadre des procédures pénales, 135-2, 145, 591 et 593 du code de procédure pénale :
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la requête en annulation de l'ordonnance de placement en détention provisoire de M. X..., en date du 11 avril 2016, et a confirmé cette ordonnance ;
"aux motifs que sur le caractère incomplet du dossier ; que lors des débats devant la chambre de l'instruction figuraient, notamment, à la procédure : - la copie certifiée conforme du mandat d'arrêt délivré le 26 février 2013 par le juge d'instruction, - une copie de l'ordonnance de mise en accusation et de renvoi devant la cour d'assises du Rhône du 23 avril 2014, - la demande d'extradition du 16 mars 2015, - la lettre du garde des sceaux du 19 mars 2015 relative à la demande d'extradition de M. X...
- la transmission du garde des sceaux du 1er décembre 2015 au procureur général de Lyon faisant état de ce que l'extradition de M. X... avait été accordée par décret du 11 septembre 2015 du premier ministre du Royaume du Maroc, - le décret traduit en langue française, - un laisser passer délivré le 6 avril 2016 par le consulat de France à Rabat concernant M. X..., - un extrait du registre d'écrou du chef du bureau de l'exécution des peines de la délégation pénitentiaire du Royaume du Maroc du 7 avril 2016 concernant M. X... faisant état de son écrou le 13 mars 2015, - des pièces de l'administration française relatives à la remise de M. X..., - des procès-verbaux concernant l'arrivée à Roissy et à la prise en charge de M. X..., - des pièces du juge des libertés et de détention de Bobigny ordonnant que la personne remise soit conduite devant le juge des libertés et de la détention de Lyon, - des pièces officielles du Royaume du Maroc rédigées en langue arabe ; que la défense de M. X... a dit que lors de sa comparution devant le juge des libertés et de la détention de Lyon les 8 et 11 avril 2016 toutes ces pièces ne figuraient pas à la procédure et qu'en particulier ne figurait pas la traduction en langue française du décret du 11 septembre 2015 du premier ministre du Royaume du Maroc ayant accordé son extradition ; qu'il a, par ailleurs, dit que la copie de l'ordonnance de mise en accusation et de renvoi devant la cour d'assises du Rhône du 23 avril 2014 ne figurait pas au dossier et que la dite copie avait été transmise lors du débat contradictoire du 11 avril 2016 ; qu'il se déduit des dispositions de l'article 135-2 du code de procédure pénale, et en particulier de son alinéa 4, applicables à la procédure d'exécution des mandats d'arrêt postérieurement au règlement de l'information, que lorsque la personne faisant l'objet d'un mandat d'arrêt est découverte après le règlement de l'information, elle est présentée au juge des libertés et de détention qui peut, sur réquisitions du procureur de la République, soit la placer sous contrôle judiciaire, soit ordonner son placement en détention provisoire jusqu'à sa comparution devant la juridiction de jugement, par ordonnance motivée conformément aux dispositions de l'article 144 du code de procédure pénale, rendue à l'issue d'un débat contradictoire organisé conformément aux dispositions des quatrième à neuvième alinéas de l'article 145 du code de procédure pénale ; qu'il se déduit de cette dernière disposition que n'ont vocation à trouver application, lors du débat contradictoire organisé devant le juge des libertés et de la détention dans le cadre de la procédure d'exécution d'un mandat d'arrêt postérieurement au règlement de l'information, que les dispositions, des alinéas 4 à 9, de l'article 145 du code de procédure pénale à l'exception, des alinéas 1 à 3, et, notamment, de l'alinéa 2 qui prévoit que le juge des libertés et de la détention saisi par une ordonnance motivée du juge d'instruction tendant au placement en détention de la personne la fait comparaître devant lui et recueille ses observations "au vu des éléments du dossier" ; qu'il se déduit de l'application combinée de ces textes que dans le cadre d'un débat contradictoire en vue de l'exécution d'un mandat d'arrêt ramené à exécution postérieurement au règlement de l'information, que la personne présentée au juge des libertés et de la détention ne dispose pas du droit d'accéder à l'ensemble des pièces de l'information qui est clôturée, ce magistrat n'étant pas saisi par le juge d'instruction dans le cadre d'une information en cours mais dans le cadre d'une procédure sui generis ayant pour objet la seule opportunité de ramener à exécution un mandat d'arrêt antérieurement délivré ; que, par ailleurs, aucune disposition de la loi ne contraint le procureur de la République à mettre à disposition de la personne et de sa défense les pièces de l'information clôturée ; qu'en effet, dans ce cadre procédural, le juge des libertés et de la détention n'est pas saisi par le juge d'instruction en vue du placement en détention provisoire d'une personne mise en examen à l'encontre de laquelle il a dit qu'existaient des indices graves ou concordants d'avoir commis les faits dont il était saisi, mais par le procureur de la République à la suite d'une ordonnance ou d'un arrêt de mise en accusation ayant dit qu'existaient contre la personne des charges suffisantes d'avoir commis les faits ayant donné lieu à son renvoi devant la cour d'assises ; que le moyen tiré de l'absence dans la procédure des pièces de fond de l'instruction, alors que n'y figurait que l'ordonnance de mise en accusation du 23 avril 2014 dont Me Y... avait dit qu'il n'avait pas le temps d'en prendre connaissance, étant précisé que ladite ordonnance avait fait l'objet d'un appel ayant donné lieu à un arrêt de mise en accusation du 2 juillet 2014 lui-même ayant fait l'objet de pourvoi, est ainsi inopérant, étant surabondamment précisé que l'arrêt de mise en accusation du 2 juillet 2014 a confirmé l'ordonnance de mise en accusation du 23 avril 2014 ;
"1°) alors que les dispositions de l'article 135-2 du code de procédure pénale combinées à celles de l'article 145 du même code, telles qu'interprétées par la chambre de l'instruction, prévoient que la personne présentée au juge des libertés et de la détention peut être placée en détention provisoire jusqu'à sa comparution devant la juridiction de jugement sans bénéficier d'un débat contradictoire lui permettant ainsi qu'à son avocat d'accéder aux pièces du dossier portent atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, et plus précisément aux droits de la défense et au principe d'égalité devant la justice consacrés par les article 1, 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme de 1789 ; qu'ainsi, la déclaration d'inconstitutionnalité de ces dispositions qui interviendra privera de tout fondement l'arrêt attaqué ;
"2°) alors qu'aux termes de l'article 144 du code de procédure pénale, le juge des libertés et de la détention ne peut ordonner ou prolonger la détention provisoire qu'au regard des éléments précis et circonstanciés résultant de la procédure ; que la chambre de l'instruction a méconnu son office en s'abstenant de répondre au chef du mémoire tiré du caractère incomplet du dossier de la procédure mis à sa disposition aux motifs, inopérants, que le débat contradictoire en vue de l'exécution d'un mandat d'arrêt ramené à exécution postérieurement au règlement de l'information n'exige pas que la personne présentée au juge des libertés et de la détention dispose du droit d'accéder à l'ensemble des pièces de l'information qui est clôturée, "ce magistrat n'étant pas saisi par le juge d'instruction dans le cadre d'une information en cours mais dans le cadre d'une procédure sui generis ayant pour objet la seule opportunité de ramener à exécution un mandat d'arrêt antérieurement délivré" ;
"3°) alors qu'une procédure menée au titre de l'article 5, § 4, de la Convention devant la juridiction saisie d'un recours contre une détention doit être contradictoire et garantir l'"égalité des armes" entre les parties, à savoir le procureur et la personne détenue ; que l'égalité des armes n'est pas assurée si l'avocat se voit refuser l'accès aux pièces du dossier qui revêtent une importance essentielle pour une contestation efficace de la légalité de la détention de son client (CEDH, grande chambre, 9 juillet 2009, Mooren c. Allemagne) ; que la chambre de l'instruction ne pouvait, sans méconnaître ces exigences, rejeter le moyen tiré du caractère incomplet du dossier consulté au greffe du juge des libertés et de la détention aux motifs qu'aucune disposition de la loi ne contraint le procureur de la République à mettre à disposition de la personne et de sa défense les pièces de l'information clôturée ;
"4°) alors qu'aux termes de l'article 7 la directive du 22 mai 2012, lorsqu'une personne est arrêtée et détenue à n'importe quel stade de la procédure pénale, les États membres veillent à ce que les documents relatifs à l'affaire en question détenus par les autorités compétentes qui sont essentiels pour contester de manière effective conformément au droit national la légalité de l'arrestation ou de la détention soient mis à la disposition de la personne arrêtée ou de son avocat ; qu'en refusant d'annuler le débat contradictoire tenu sans que la défense ait pu accéder à l'ensemble des pièces du dossier, la chambre de l'instruction a aussi violé le droit de l'Union européenne" ;
Sur le moyen, pris en sa première branche :
Attendu que le moyen est devenu sans objet, la Cour de cassation ayant, par arrêt de ce jour, dit n'y avoir lieu à transmission de la question prioritaire de constitutionnalité posée par le demandeur à l'occasion du présent pourvoi ;
Sur le moyen, pris en sa deuxième branche :
Attendu qu'est irrecevable la prétention du prévenu à vérifier dans quelles conditions le juge prend connaissance des pièces du dossier de la procédure nécessaires pour fonder sa décision ;
Sur le moyen, pris en ses troisième et quatrième branches :
Attendu que, pour rejeter le moyen d'annulation de l'ordonnance de placement en détention provisoire, tiré de ce que M. X... et son avocat n'ont pu consulter le dossier de l'information, et confirmer l'ordonnance attaquée, la chambre de l'instruction prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu que, si c'est à tort que la chambre de l'instruction a énoncé que, dans le cadre d'un débat contradictoire en vue de l'exécution d'un mandat d'arrêt ramené à exécution postérieurement au règlement de l'information, la personne présentée à ce magistrat ne dispose pas du droit d'accéder à l'ensemble des pièces de l'information qui est clôturée, l'arrêt n'encourt pas pour autant la censure, dès lors que l'avocat du demandeur était en droit, dans le délai qui avait été accordé pour préparer la défense, de consulter le dossier s'il l'estimait utile pour défendre son client, et qu'il ne justifie pas avoir présenté une telle demande, non plus que s'être vu opposer un refus ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 137 à 144, 145, 591 et 593 du code de procédure pénale :
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la requête en annulation de l'ordonnance de placement en détention provisoire de M. X..., en date du 11 avril 2016, et a confirmé cette ordonnance ;
"aux motifs que, sur l'incompétence du juge des libertés et de la détention de Lyon, il résulte des arguments de la défense de M. X... que l'ordonnance d'incarcération provisoire délivrée le 8 avril 2016 par le juge des libertés et de détention du tribunal de grande instance de Lyon, motivée au visa de son absence de garanties de représentation et au visa de l'article 144 du code de procédure pénale, s'analysait implicitement comme une ordonnance de placement en détention provisoire ; que, toutefois l'ordonnance entreprise a été rendue par le juge des libertés et de détention après que M. X... ait fait connaître dans le cadre du débat contradictoire qu'il demandait un délai pour préparer sa défense ainsi qu'en fait foi le procès-verbal de débat contradictoire du 8 avril 2016 au terme duquel il a été porté à la connaissance de la personne qu'ayant sollicité un délai pour préparer sa défense elle faisait l'objet d'une ordonnance d'incarcération provisoire pour une durée de quatre jours ouvrables et qu'elle comparaîtrait devant le juge des libertés et de la détention le 11 avril 2016 à 11 h 30, le procès-verbal de débat contradictoire du 11 avril 2016 et l'ordonnance de placement en détention provisoire prise par le juge des libertés et de la détention à l'issue du dit débat contradictoire ; que le juge des libertés et de la détention était radicalement incompétent pour organiser un débat contradictoire le 8 avril 2016 et rendre une ordonnance de placement en détention provisoire et se devait de rendre une ordonnance d'incarcération provisoire dont la durée ne pouvait excéder quatre jours ouvrables ; qu'en visant à tort les dispositions de l'article 144 du code de procédure pénale et l'inexistence des garanties de représentation de l'appelant, le juge des libertés et de détention n'a pas pour autant modifié la nature intrinsèque de l'ordonnance d'incarcération provisoire prise légalement à la suite de la demande de la personne de pouvoir bénéficier d'un délai pour préparer sa défense ; que ce magistrat se devait avant l'expiration du délai de quatre jours ouvrables d'organiser le débat contradictoire prévu par la loi, ce qu'il a fait, et qu'il ne peut être affirmé qu'il était dépourvu de compétence pour le faire au motif spécieux que l'ordonnance d'incarcération provisoire n'aurait que l'apparence d'une ordonnance d'incarcération provisoire et constituerait implicitement une ordonnance de placement en détention provisoire ce qui interdirait que ce magistrat statue à nouveau ; que, sur le défaut d'impartialité du juge des libertés et de détention de Lyon, il résulte des arguments de la défense de M. X... que le juge des libertés et de la détention ayant ordonné le 11 avril 2016 son placement en détention provisoire ne pouvait être considéré comme un magistrat ayant présenté des garanties d'impartialité objective et subjective pour avoir le 8 avril 2016 rendu une ordonnance dite d'incarcération provisoire dans laquelle il avait dit que M. X... ne présentait pas de garanties de représentation ce qui constituait la manifestation d'une idée préconçue ; que les éventuelles garanties de représentation s'apprécient différemment en fonction des moments de la procédure ; que s'agissant de l'ordonnance de placement en détention provisoire du 11 avril 2016 ces garanties ont été appréciées par le juge des libertés et de la détention après la tenue d'un débat contradictoire au cours duquel l'accusé et son avocat ont été entendus en leurs observations ; que tel n'a pas été le cas à l'occasion de la procédure ayant donné lieu à l'ordonnance d'incarcération provisoire du 8 avril 2016 ; qu'au terme de l'ordonnance entreprise aucun élément n'avait été produit de nature à considérer que l'accusé disposait de garanties de représentation supérieures à celles dont il disposait le 8 avril 2016 n'ayant produit aucune pièce relative à sa domiciliation actuelle, que le fait que Me Y... ait soulevé lors du débat contradictoire le défaut d'impartialité du juge des libertés et de la détention n'empêchait ce magistrat de statuer alors qu'il devait rendre sa décision avant le 12 avril 2016 à 24 heures 00 temps qui permettait à Me Y... de saisir le premier président de la cour d'appel d'une requête en récusation de ce magistrat sur le fondement des articles 668 et suivants du code de procédure pénale, ce qu'il n'a pas fait, l'article 670 du code de procédure pénale permettant en cas d'urgence qu'il soit sursis à la procédure ; que sur le caractère incomplet du dossier ; que lors des débats devant la chambre de l'instruction figuraient, notamment, à la procédure : - la copie certifiée conforme du mandat d'arrêt délivré le 26 février 2013 par le juge d'instruction, - une copie de l'ordonnance de mise en accusation et de renvoi devant la cour d'assises du Rhône du 23 avril 2014, - la demande d'extradition du 16 mars 2015, - la lettre du garde des sceaux du 19 mars 2015 relative à la demande d'extradition de M. X..., - la transmission du garde des sceaux du 1er décembre 2015 au procureur général de Lyon faisant état de ce que l'extradition de M. X... avait été accordée par décret du 11 septembre 2015 du premier ministre du Royaume du Maroc, - le décret traduit en langue française, - un laisser passer délivré le 6 avril 2016 par le consulat de France à Rabat concernant M. X..., - un extrait du registre d'écrou du chef du bureau de l'exécution des peines de la délégation pénitentiaire du Royaume du Maroc du 7 avril 2016 concernant M. X... faisant état de son écrou le 13 mars 2015, - des pièces de l'administration française relatives à la remise de M. X..., - des procès-verbaux concernant l'arrivée à Roissy et à la prise en charge de M. X..., - des pièces du juge des libertés et de la détention de Bobigny ordonnant que la personne remise soit conduite devant le juge des libertés et de la détention de Lyon, - des pièces officielles du Royaume du Maroc rédigées en langue arabe ; que la défense de M. X... a dit que lors de sa comparution devant le juge des libertés et de la détention de Lyon les 8 et 11 avril 2016 toutes ces pièces ne figuraient pas à la procédure et qu'en particulier ne figurait pas la traduction en langue française du décret du 11 septembre 2015 du premier ministre du Royaume du Maroc ayant accordé son extradition ; qu'il a, par ailleurs, dit que la copie de l'ordonnance de mise en accusation et de renvoi devant la cour d'assises du Rhône du 23 avril 2014 ne figurait pas au dossier et que la dite copie avait été transmise lors du débat contradictoire du 11 avril 2016 ; qu'il se déduit des dispositions de l'article 135-2 du code de procédure pénale, et en particulier de son alinéa 4, applicables à la procédure d'exécution des mandats d'arrêt postérieurement au règlement de l'information, que lorsque la personne faisant l'objet d'un mandat d'arrêt est découverte après le règlement de l'information, elle est présentée au juge des libertés et de la détention qui peut, sur réquisitions du procureur de la République, soit la placer sous contrôle judiciaire, soit ordonner son placement en détention provisoire jusqu'à sa comparution devant la juridiction de jugement, par ordonnance motivée conformément aux dispositions de l'article 144 du code de procédure pénale, rendue à l'issue d'un débat contradictoire organisé conformément aux dispositions des quatrième à neuvième alinéas de l'article 145 du code de procédure pénale ; qu'il se déduit de cette dernière disposition que n'ont vocation à trouver application, lors du débat contradictoire organisé devant le juge des libertés et de la détention dans le cadre de la procédure d'exécution d'un mandat d'arrêt postérieurement au règlement de l'information, que les dispositions, des alinéas 4 à 9, de l'article 145 du code de procédure pénale à l'exception, des alinéas 1 à 3, et, notamment, de l'alinéa 2, qui prévoit que le juge des libertés et de la détention saisi par une ordonnance motivée du juge d'instruction tendant au placement en détention de la personne la fait comparaître devant lui et recueille ses observations "au vu des éléments du dossier" ; qu'il se déduit de l'application combinée de ces textes que dans le cadre d'un débat contradictoire en vue de l'exécution d'un mandat d'arrêt ramené à exécution postérieurement au règlement de l'information, que la personne présentée au juge des libertés et de la détention ne dispose pas du droit d'accéder à l'ensemble des pièces de l'information qui est clôturée, ce magistrat n'étant pas saisi par le juge d'instruction dans le cadre d'une information en cours mais dans le cadre d'une procédure sui generis ayant pour objet la seule opportunité de ramener à exécution un mandat d'arrêt antérieurement délivré ; que, par ailleurs, aucune disposition de la loi ne contraint le procureur de la République à mettre à disposition de la personne et de sa défense les pièces de l'information clôturée ; qu'en effet, dans ce cadre procédural, le juge des libertés et de la détention n'est pas saisi par le juge d'instruction en vue du placement en détention provisoire d'une personne mise en examen à l'encontre de laquelle il a dit qu'existaient des indices graves ou concordants d'avoir commis les faits dont il était saisi, mais par le procureur de la République à la suite d'une ordonnance ou d'un arrêt de mise en accusation ayant dit qu'existaient contre la personne des charges suffisantes d'avoir commis les faits ayant donné lieu à son renvoi devant la cour d'assises ; que le moyen tiré de l'absence dans la procédure des pièces de fond de l'instruction, alors que n'y figurait que l'ordonnance de mise en accusation du 23 avril 2014 dont Me Y... avait dit qu'il n'avait pas le temps d'en prendre connaissance, étant précisé que ladite ordonnance avait fait l'objet d'un appel ayant donné lieu à un arrêt de mise en accusation du 2 juillet 2014 lui-même ayant fait l'objet de pourvoi, est ainsi inopérant, étant surabondamment précisé que l'arrêt de mise en accusation du 2 juillet 2014 a confirmé l'ordonnance de mise en accusation du 23 avril 2014 ; que s'agissant du moyen tiré de l'absence dans la procédure de la décision d'extradition dont ni l'existence ni le contenu n'avaient pu être contrôlés par le juge des libertés et de la détention, ce magistrat n'ayant pu vérifier le respect de la règle de spécialité tel que figurant dans la Convention d'extradition entre la France et le Maroc du 18 avril 2008, alors, par ailleurs, que le décret d'extradition figurant au dossier, s'il s'agissait bien de cette décision, était rédigé en langue arabe, doit être rappelé que la contestation de la régularité de la procédure d'extradition obtenue par le gouvernement français est de la seule compétence de la chambre de l'instruction saisie par requête motivée de la personne extradée dans les dix jours de la notification à elle faite des dispositions de l'article 696-36 du code de procédure pénale et que ainsi lors de son déferrement devant le juge des libertés et de la détention ce magistrat est incompétent pour statuer sur des éventuelles irrégularités ou absence de pièces qui vicieraient ta procédure d'extradition ; que, par ailleurs, l'extradé ne peut arguer de nullité entachant la procédure suivie sur le territoire de l'Etat requis, les juridictions françaises étant dépourvues de compétence pour apprécier les conditions dans lesquelles sont intervenues à l'étranger l'arrestation et la remise d'une personne par les seules autorités étrangères agissant dans la plénitude de leur souveraineté ; que s'agissant du contrôle du principe de spécialité tel que rappelé par l'article 8 de la Convention franco-marocaine d'extradition, les pièces de la procédure qui figuraient au dossier lors de la présentation de M. X... au juge des libertés et de la détention permettaient à ce magistrat de déterminer que l'intéressé lui était déféré sur le fondement du mandat d'arrêt du 26 février 2013 délivré dans le cadre d'une information suivie contre lui des chefs de vol en bande organisée avec arme, de destruction en bande organisée par moyen dangereux, de tentative de meurtre aggravé, de recel en bande organisée et de participation à une association de malfaiteurs ayant donné lieu à une demande d'extradition pour ces faits ayant été accordée par le gouvernement marocain alors qu'était annexée aux procès-verbaux de notification de placement en rétention judiciaire de M. X... la copie d'une note du 19 mars 2015 du garde des sceaux faisant état de ce que l'intéressé avait été interpellé au Maroc le 10 mars 2015 dans le cadre du mandat d'arrêt du 26 février 2013 délivré par le juge d'instruction dans le cadre de cette affaire et que, par ailleurs, lors de son audition par les services de police à son arrivée à Roissy, l'intéressé a dit que sa remise à la France avait été faite avec son accord ; que s'agissant du moyen tiré de l'absence dans la procédure de tout élément relatif au respect du délai de quarante-cinq jours prévu par les dispositions de l'article 12, § 4, de la Convention d'extradition entre la France et le Maroc ainsi libellé : "En cas d'acceptation, les autorités des parties conviennent de la date et du lieu de la remise de la personne réclamée. La partie requise communique également à la partie requérante la durée de la détention subie par la personne réclamée en vue de son extradition. Si la personne réclamée n'est pas reçue dans un délai de quarante cinq jours à compter de la date fixée pour sa remise, elle doit être mise en liberté et la partie requise peut, par la suite, refuser son extradition pour les mêmes faits", il se déduit de cette disposition conventionnelle que son éventuelle application est de la seule compétence des autorités de la partie requise détenant sous écrou extraditionnel la personne réclamée ; que s'agissant du moyen tiré de la présence dans la procédure d'un mandat d'arrêt du 26 février 2013 certifié conforme à l'original dépourvu de la signature du juge d'instruction, le fait qu'il soit, certifié conforme à l'original atteste de son existence ;
"1°) alors qu'un même juge des libertés et de la détention ne peut pas rendre deux ordonnances de placement en détention provisoire portant sur les mêmes faits et la même personne ; qu'en l'espèce, l'ordonnance, en date du 8 avril 2016, qualifiée "d'incarcération provisoire" visant l'article 144 du code de procédure pénale et se prononçant sur les garanties de représentation du mis en examen constitue une ordonnance de placement en détention provisoire (pourvoi n°T 16-83317) ; qu'ainsi, en rendant une seconde ordonnance de placement en détention provisoire le 11 avril 2016 après une première, improprement qualifiée ordonnance d'incarcération provisoire, le juge des libertés et de la détention a excédé ses pouvoirs et méconnu son office qu'il appartenait à la chambre de l'instruction de constater ;
"2°) alors que l'exigence d'impartialité objective est méconnue, dès lors qu'il existe des raisons légitimes de craindre un défaut d'impartialité ou en considération d'appréhensions du requérant objectivement justifiées ; que, dès lors, la chambre de l'instruction ne pouvait confirmer l'ordonnance de placement en détention lorsque le magistrat qui l'a rendue avait, trois jours plus tôt, d'ores et déjà ordonné le placement en détention par une ordonnance qualifiée à tort d'incarcération provisoire, cette situation constituant une raison légitime de nature à faire craindre un défaut d'impartialité du magistrat" ;
Attendu que, pour rejeter le moyen d'annulation de l'ordonnance de placement en détention provisoire, tiré du défaut d'impartialité du juge des libertés et de la détention et de ce que ce magistrat, en rendant l'ordonnance d'incarcération provisoire, avait épuisé sa saisine, et confirmer l'ordonnance attaquée, l'arrêt relève, notamment, qu'en visant à tort les dispositions de l'article 144 du code de procédure pénale et l'inexistence des garanties de représentation de M. X..., le juge des libertés et de la détention n'a pas pour autant modifié la nature de l'ordonnance d'incarcération provisoire prise légalement à la suite de la demande de l'intéressé de pouvoir bénéficier d'un délai pour préparer sa défense et que ce magistrat se devait, avant l'expiration du délai de quatre jours ouvrables, d'organiser le débat contradictoire prévu par la loi et qu'il ne peut être affirmé qu'il était dépourvu de compétence pour le faire ; que les juges ajoutent que M. X... n'a pas fait usage de la possibilité d'obtenir le respect du devoir d'impartialité du juge des libertés et de la détention en récusant ce magistrat par application de l'article 668 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;
Qu'en effet, le défaut d'impartialité du juge des libertés et de la détention ne saurait se déduire du seul fait qu'il a rendu successivement à l'encontre de la personne qui lui est présentée une décision d'incarcération provisoire en vue de lui permettre de préparer sa défense dans le délai qu'elle a sollicité, puis une ordonnance de placement en détention provisoire ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Straehli, conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Ascensi, conseiller rapporteur, M. Fossier, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 16-83318
Date de la décision : 10/08/2016
Sens de l'arrêt : Qpc - non-lieu à renvoi au conseil constitutionnel
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITE - Code de procédure pénale - Articles 135-2 et 145 - Liberté individuelle - Droits de la défense - Principe d'égalité devant la justice - Caractère sérieux - Défaut - Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel


Références :

Sur le numéro 1 : article 144 du code de procédure pénale
Sur le numéro 2 : articles 5, § 4, et 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales
Sur le numéro 3 : article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon, 03 mai 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 10 aoû. 2016, pourvoi n°16-83318, Bull. crim.
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle

Composition du Tribunal
Président : M. Straehli (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat général : M. Lemoine
Rapporteur ?: M. Ascensi
Avocat(s) : SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 18/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:16.83318
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award