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12/07/2016 | FRANCE | N°15-21679

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 juillet 2016, 15-21679


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa cinquième branche :
Vu l'article L. 2324-2 du code du travail ;
Attendu, selon le jugement attaqué, qu'engagée en avril 2002 en qualité de coordinatrice de transport par l'Institution de gestion sociale des armées (Igesa), Mme X..., après avoir exercé ses fonctions au siège social de l'institution situé à Bastia, a été mutée le 1er janvier 2014 à "l'échelon central Paris, direction des vacances" ; que, par lettre du 25 décembre 2014, le syndicat professionnel CGT

des personnels de l'Igesa a informé l'employeur de la désignation de cette ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa cinquième branche :
Vu l'article L. 2324-2 du code du travail ;
Attendu, selon le jugement attaqué, qu'engagée en avril 2002 en qualité de coordinatrice de transport par l'Institution de gestion sociale des armées (Igesa), Mme X..., après avoir exercé ses fonctions au siège social de l'institution situé à Bastia, a été mutée le 1er janvier 2014 à "l'échelon central Paris, direction des vacances" ; que, par lettre du 25 décembre 2014, le syndicat professionnel CGT des personnels de l'Igesa a informé l'employeur de la désignation de cette salariée en qualité de représentant syndical au comité de l'établissement de l'antenne régionale Ile-de-France Nord ; qu'invoquant le fait que l'échelon central Paris était rattaché à l'établissement "siège" situé à Bastia, pour les élections professionnelles et non à l'établissement "antenne régionale Ile de France-Nord Est", l'Igesa a saisi le tribunal d'instance afin d'obtenir l'annulation de cette désignation ;
Attendu que, pour rejeter cette demande, le jugement énonce que si la salariée a été maintenue inscrite sur la liste électorale du siège social sis à Bastia, ce critère de rattachement paraît artificiel, dans la mesure où son lieu de travail est très éloigné géographiquement de Bastia et où les organigrammes versés aux débats ne permettent pas de vérifier la réalité du rattachement de son service à ce siège social, ledit service ne figurant apparemment sur aucun des organigrammes et que les simples références sur les bulletins de salaire sont indifférentes, qu'il paraît donc rationnel et légitime de rattacher le service de l'intéressée, sis à Paris à la communauté de travail ayant des intérêts propres que constitue indéniablement l'ARI Ile-de-France Nord-Est, que par ailleurs, il convient de noter que le texte de l'article L. 2324-2 du code du travail ne donne aucune précision sur le comité auquel un représentant peut être désigné et a dissocié l'élection de la désignation en supprimant la condition relative à l'existence d'élus, qu'ensuite, au vu de ses motifs, la loi du 5 mars 2014 a notamment pour but l'assouplissement des règles de désignation d'un représentant syndical, rendant possible sa désignation sur un périmètre différent de celui sur lequel est organisée l'élection, sur laquelle se fonde la mesure de sa représentativité, et ce afin de permettre la désignation du représentant syndical au plus près des salariés, qu'il apparaît donc que le principe de concordance des périmètres est écarté et que dès lors, une organisation syndicale représentative au niveau de l'entreprise ou de l'établissement peut désigner comme représentant au comité d'établissement n'importe quel salarié de l'entreprise dès lors qu'il appartient à une communauté de travail ayant un intérêt propre ;
Qu'en statuant ainsi, alors même qu'il constatait que l'échelon central Paris au sein duquel travaillait la salariée avait été rattaché à l'établissement "siège" pour les élections des représentants aux comités d'établissements, ce dont il se déduisait que l'intéressée ne pouvait être désignée en qualité de représentant syndical qu'au comité de cet établissement, le tribunal d'instance a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute l'Igesa de sa demande d'annulation de la désignation du 25 décembre 2014 de Mme X... en qualité de représentante syndicale au sein du comité de l'établissement de l'antenne régionale Ile-de-France Nord-Est, le jugement rendu le 26 juin 2015, entre les parties, par le tribunal d'instance de Villejuif ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Charenton-le-Pont ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour l'Institution de gestion sociale des armées
Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR débouté l'IGESA de sa requête en annulation de la désignation en date du 25 décembre 2014 de Madame Laurence X... en qualité de représentant syndical au comité d'établissement sur le site de l'Antenne Régionale IGESA Ile de France Nord Est ;
AUX MOTIFS QU' "en application de l'article L.2324-2 du Code du travail tel que modifié par la loi du 5 mars 2014 : " chaque organisation syndicale représentative dans l'entreprise ou l'établissement peut désigner un représentant syndical au comité. (…) Il est choisi parmi les membres du personnel de l'entreprise et doit remplir les conditions d'éligibilité au comité d'entreprise (…)" ;
QU' "en l'espèce, il n'est pas contesté que l'IGESA est divisée en 5 antennes régionales et 3 structures spécifiques dont le siège social fixé à Bastia, et qu'un comité d'établissement correspond à chacune de ces structures ; que si Madame Laurence X... a été maintenue inscrite sur la liste électorale du Siège Social sis à Bastia, ce critère de rattachement paraît artificiel, dans la mesure où son lieu de travail est très éloigné géographiquement de Bastia et où les organigrammes versés aux débats ne permettent pas de vérifier la réalité du rattachement de son service à ce siège social, ledit service ne figurant apparemment sur aucun des organigrammes ; que les simples références sur les bulletins de salaire sont indifférentes ; qu'il paraît donc rationnel et légitime de rattacher le service de Madame Laurence X... sis à Paris à la communauté de travail ayant des intérêts propres que constitue indéniablement l'ARI Ile de France Nord ;
QUE par ailleurs, il convient de noter que le texte de l'article L.2324-2 du Code du travail ne donne aucune précision sur le comité auquel un représentant peut être désigné et a dissocié l'élection de la désignation en supprimant la condition relative à l'existence d'élus ;
QU'ensuite, au vu de ses motifs, la loi du 5 mars 2014 a notamment pour but l'assouplissement des règles de désignation d'un représentant syndical, rendant possible sa désignation sur un périmètre différent de celui sur lequel est organisée l'élection, sur laquelle se fonde la mesure de sa représentativité, et ce afin de permettre la désignation du représentant syndical au plus près des salariés ; qu'il apparaît donc que le principe de concordance des périmètres est écarté et que dès lors, une organisation syndicale représentative au niveau de l'entreprise ou de l'établissement peut désigner comme représentant au comité d'établissement n'importe quel salarié de l'entreprise dès lors qu'il appartient à une communauté de travail ayant un intérêt propre ;
QU'il n'est nullement contesté que Madame X... est salariée de l'entreprise IGESA et que son lieu de travail se trouve géographiquement sur le site de l'ARI Ile de France Nord Est et non pas sur celui, très éloigné, du siège social en Corse ; que le Syndicat CGT pouvait donc légitimement la désigner en qualité de représentant syndical au sein du comité d'établissement de l'Antenne régionale Ile de France Nord Est ; que l'IGESA et donc déboutée de ses demandes d'annulation de la désignation, par le Syndicat CGT, de Madame X... es qualités de représentant syndical au sein du comité d'établissement de l'Antenne régionale Ile de France Nord Est" ;
1°) ALORS QU'en retenant que le rattachement de Madame X... à la liste électorale du comité d'établissement du siège "paraît artificiel" au motif que "…les organigrammes versés aux débats ne permettent pas de vérifier la réalité du rattachement de son service à ce siège social, ledit service ne figurant apparemment sur aucun des organigrammes " sans préciser à quel service avait été affectée Madame X..., le tribunal, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle tant sur une éventuelle dénaturation des organigrammes visés que sur le rattachement – ou non - de ce service à un établissement de l'IGESA, a privé sa décision de base légale au regard des articles L.2322-1, L.2324-2 du Code du travail, 1134 du Code civil ;
2°) ALORS en outre QU' à l'appui de sa contestation de la désignation de Madame Laurence X... comme déléguée syndicale au sein de l'ARI Ile de France Nord Est, l'IGESA avait fait valoir et démontré par la production du courrier du 31 décembre 2013 lui notifiant sa mutation que, le 1er janvier 2014, Madame Laurence X... avait été "… mutée à l'échelon central Paris, direction des Vacances (Pôle Vacances Loisirs – Info spectacles Paris)" ; que la "direction des vacances" figurait sur les deux organigrammes produits par l'IGESA comme une "direction opérationnelle" rattachée à la direction générale et non à une direction territoriale ; qu'en retenant à l'appui de sa décision que "si Madame Laurence X... a été maintenue inscrite sur la liste électorale du Siège Social sis à Bastia, ce critère de rattachement paraît artificiel, dans la mesure où son lieu de travail est très éloigné géographiquement de Bastia et où les organigrammes versés aux débats ne permettent pas de vérifier la réalité du rattachement de son service à ce siège social, ledit service ne figurant apparemment sur aucun des organigrammes" la Cour d'appel, qui a dénaturé les organigrammes produits, a violé l'article 1134 du Code civil ;
3°) ALORS encore QU'en statuant de la sorte, le tribunal a dénaturé par omission la lettre de l'IGESA du 31 décembre 2013 notifiant à Madame X... sa mutation au sein de "…l'échelon central Paris, direction des Vacances (Pôle Vacances Loisirs – Info spectacles Paris)", le protocole d'accord préélectoral du 8 janvier 2014 rattachant expressément "l'échelon central Paris" à l'établissement "siège social et VF La Marana" pour les élections professionnelles des 11 mars et 29 avril suivants et l'état récapitulatif produit par l'IGESA sur lequel "l'échelon central Activités Loisirs" figurait comme un site rattaché au CE du siège, lequel, regroupant tous les services centraux, incluait à la fois le siège social de Bastia et l'échelon central Paris ; qu'il a ainsi violé derechef l'article 1134 du Code civil ;
4°) ALORS subsidiairement QU'en se déterminant aux termes de motifs dont ne ressort nullement l'appartenance de Madame X..., salariée d'un service central, à la communauté régionale de travail de l'Antenne régionale Ile de France Nord Est, sinon par la constatation, insuffisante, de ce que son lieu de travail était situé en région parisienne, le Tribunal d'instance a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;
5°) ALORS QUE le représentant syndical au comité d'établissement est obligatoirement choisi parmi les membres de l'établissement auquel il appartient et doit remplir les conditions d'éligibilité au comité de cet établissement ; qu'il ressort des propres constatations du tribunal que tel n'était pas le cas de Madame X..., électrice et éligible au comité d'établissement du siège lors des dernières élections professionnelles en date des 11 mars et 29 avril 2014 ; qu'en retenant cependant à l'appui de sa décision "… que le texte de l'article L.2324-2 du Code du travail ne donne aucune précision sur le comité auquel un représentant peut être désigné et a dissocié l'élection de la désignation en supprimant la condition relative à l'existence d'élus…", le Tribunal d'instance a violé ce texte par refus d'application ;
6°) ALORS en toute hypothèse QU'il n'appartient pas au tribunal, saisi de la contestation de la désignation d'un représentant syndical au comité d'établissement, de modifier, sous prétexte de respecter "l'esprit de la loi" le périmètre des établissements fixé par les partenaires sociaux pour les dernières élections aux comités d'établissement ; qu'en l'espèce, l'IGESA avait, à l'appui de sa contestation, fait valoir et démontré par la production du courrier lui notifiant sa mutation que, le 1er janvier 2014, Madame Laurence X... avait été "… mutée à l'échelon central Paris, direction des Vacances (…)", et par la production du protocole d'accord préélectoral du 8 janvier 2014, que l'échelon central Paris était rattaché, pour les élections professionnelles, à l'établissement "siège social et VF La Marana" ; que Madame X... avait été présentée comme candidate par la CGT pour les élections de cet établissement et y avait recueilli plus de 10 % des suffrages ; qu'en décidant, pour valider sa désignation en qualité de représentant syndical au comité d'établissement de l'établissement régional ARI Ile de France Nord, que "si Madame Laurence X... a été maintenue inscrite sur la liste électorale du Siège Social sis à Bastia, ce critère de rattachement paraît artificiel, dans la mesure où son lieu de travail est très éloigné géographiquement de Bastia et où les organigrammes versés aux débats ne permettent pas de vérifier la réalité du rattachement de son service à ce siège social, ledit service ne figurant apparemment sur aucun des organigrammes", de sorte qu'il "… paraît … rationnel et légitime de rattacher le service de Madame Laurence X... sis à Paris à la communauté de travail ayant des intérêts propres que constitue indéniablement l'ARI Ile de France Nord" le tribunal, qui a modifié le périmètre des établissements de l'entreprise retenu par les partenaires sociaux pour les dernières élections, a violé les articles L.2322-1 et L.2324-2 du Code du travail ;
7°) ALORS encore QU'un syndicat ne peut désigner un représentant syndical dans un établissement entièrement distinct de celui dans lequel il l'a présenté aux dernières élections professionnelles, et dans lequel ce candidat a été reconnu représentatif ; qu'en l'espèce, l'IGESA avait fait valoir dans ses écritures et justifié que Madame Laurence X..., mutée le 1er janvier 2014 au sein de l'échelon central Paris, service central rattaché à ce titre par le protocole d'accord préélectoral à l'établissement "Siège et VF La Marana", avait été candidate présentée par la CGT aux élections professionnelles du comité d'entreprise de cet établissement du 11 mars 2014 et y avait recueilli plus de 10 % des suffrages ; que cette salariée ne pouvait dès lors être désignée représentant syndical au comité d'établissement d'un établissement régional entièrement distinct ; qu'en validant sa désignation au sein de l'ARI Ile de France Nord, motif pris que "le principe de concordance des périmètres est écarté et que, dès lors, une organisation syndicale représentative au niveau de l'entreprise ou de l'établissement peut désigner comme représentant au comité d'établissement n'importe quel salarié de l'entreprise dès lors qu'il appartient à une communauté de travail ayant des intérêts propres" sans répondre à ces écritures pertinentes, le tribunal, qui a privé sa décision de motifs, a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
8°) ALORS enfin et en toute hypothèse QU'il appartient aux organisations syndicales qui utilisent les facultés de désignation offertes par la loi d'apprécier si un salarié est en mesure d'accomplir sa mission syndicale au sein de son établissement d'affectation ; qu'en retenant, pour valider la désignation de Madame X..., salariée du service "échelon central Paris" dépendant comme l'ensemble des services centraux de l'établissement "Siège social et VF La Marana", en tant que représentant syndical au comité de l'établissement régional ARI Ile de France Nord Est auquel elle n'appartenait pas, que nonobstant son inscription sur les listes électorales du siège social, il lui "apparaissait rationnel et légitime" de la rattacher à une autre communauté de travail sans rechercher, comme l'y invitait l'IGESA si, en désignant Madame X... le 31 mars 2014 comme déléguée syndicale au sein de l'établissement "Siège social et VF La Marana", la CGT n'avait pas expressément manifesté qu'elle considérait que la salariée était en mesure d'accomplir sa mission syndicale au sein de cet établissement de sorte que, nonobstant l'annulation de cette désignation en raison du défaut de représentativité du syndicat désignataire, ce syndicat ne pouvait plus, par la suite, procéder à une nouvelle désignation de la même salariée dans un établissement entièrement distinct, et auquel elle n'était pas rattachée, le tribunal a privé sa décision base légale au regard de l'article L.2324-2 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-21679
Date de la décision : 12/07/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Villejuif, 26 juin 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 jui. 2016, pourvoi n°15-21679


Composition du Tribunal
Président : Mme Lambremon (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.21679
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