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30/06/2016 | FRANCE | N°15-16140

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 30 juin 2016, 15-16140


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 15 janvier 2015), que la société Top immobilier, maître d'ouvrage aujourd'hui en liquidation judiciaire, a conclu avec la société Appia Lorraine, aux droits de laquelle se sont succédé la société Eiffage travaux publics Est et, désormais, la société Transroute, un marché pour des travaux de voirie d'un lotissement ; que la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Lorraine (la CRCAM) a consenti à la soc

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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 15 janvier 2015), que la société Top immobilier, maître d'ouvrage aujourd'hui en liquidation judiciaire, a conclu avec la société Appia Lorraine, aux droits de laquelle se sont succédé la société Eiffage travaux publics Est et, désormais, la société Transroute, un marché pour des travaux de voirie d'un lotissement ; que la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Lorraine (la CRCAM) a consenti à la société Top immobilier une ouverture de crédit d'un million d'euros pour la réalisation des travaux ; que, le même jour, la banque a délivré à l'entreprise une attestation confirmant l'affectation du financement au règlement des travaux exécutés par la société Appia Lorraine pour un montant de 853 889,34 euros ; qu'en exécution de ces engagements, la CRCAM a payé à la société Appia Lorraine, après émission de quatre factures ayant donné lieu à bons à payer, une somme totale de 491 684,72 euros ; qu'une facture correspondant au solde des travaux de la société Appia Lorraine pour un montant de 332 705,28 euros n'a pas donné lieu au tirage d'un bon à payer par la société Top immobilier qui a, le 23 avril 2007, demandé à la CRCAM de procéder au remboursement de l'ouverture de crédit ; qu'impayée du solde de ses travaux, la société Eiffage travaux publics Est a assigné la CRCAM en paiement ;

Attendu que la CRCAM fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société Eiffage travaux publics une certaine somme au titre du solde des travaux ;

Mais attendu qu'ayant relevé que le contrat d'ouverture de crédit subordonnait la remise des fonds à la constitution des garanties par l'emprunteur et souverainement retenu que la CRCAM avait commis une faute en accordant le crédit spécifique partiel sans s'assurer que la société Top immobilier avait fourni à l'entreprise le cautionnement solidaire prévu par l'article 1799-1, alinéa 3, du code civil, la cour d'appel, qui n'a pas transféré à la banque les obligations mises à la charge du maître d'ouvrage par ce texte et devant laquelle il n'a pas été soutenu que la stipulation pour autrui en faveur de l'entreprise avait été révoquée avant que celui-ci ne déclare vouloir en profiter, a pu en déduire que la CRCAM devait appliquer le contrat en payant le solde des travaux financés ;

D'où il suit que le moyen, irrecevable comme nouveau et mélangé de fait et de droit en sa troisième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Lorraine aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Lorraine et la condamne à payer à la société Transroute une somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente juin deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Capron, avocat aux Conseils, pour la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Lorraine.

Le pourvoi fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR condamné la Crcam de Lorraine à payer à la société Eiffage travaux publics est une somme de 332 705 € 28, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 23 mai 2008 ;

AUX MOTIFS, en premier lieu, QU'« en application de l'article 1799-1 alinéa 3 du code civil, il appartenait à la société Appia Lorraine/snc Eiffage d'exiger une cautionnement par un établissement de crédit ou d'assurance, les sommes dues dépassant le seuil fixé par le décret du 30 juillet 1999 » (cf. arrêt attaqué, p. 7, 1er alinéa) ; que, « pour autant, il ressort de l'article 4 "réalisation du crédit – fonctionnement" du contrat de prêt conclu entre Top immobilier sàrl et le Crédit agricole que celui-ci ne devait mettre les fonds à la disposition de l'emprunteur, en l'espèce Top immobilier sàrl, qu'après réalisation effective de deux conditions : / – signature du contrat ; / – constitution des garanties » (cf. arrêt attaqué, p. 7, 2e alinéa) ; « qu'ainsi, le Crédit agricole, en accordant le prêt sollicité par Top immobilier sàrl, avant même de s'assurer que la deuxième condition, pourtant d'ordre public et figurant dans le contrat, était remplie, a failli à son obligation de vigilance, voire de vigilance renforcée eu égard à la somme en jeu, que la jurisprudence fait peser sur les établissements bancaires à raison du professionnalisme qui peut en être légitimement attendu » (cf. arrêt attaqué, p. 7, 3e alinéa) ; qu'« il convient de constater que la négligence reprochable au Crédit agricole vient en concours avec l'abstention de la société Top immobilier sàrl et ne le dispense pas de se soumettre aux obligations découlant de l'article 1799-1 du code civil » (cf. arrêt attaqué, p. 7, 4e alinéa) ;

1. ALORS QUE, dans le cas que prévoit l'article 1799-1, alinéa 3, du code civil, il appartient à l'entrepreneur d'exiger du maître de l'ouvrage, au besoin en suspendant l'exécution des travaux, la fourniture du cautionnement solidaire garantissant le paiement qui lui est dû ; qu'en faisant retomber sur le banquier qui a fourni un crédit spécifique partiel au maître de l'ouvrage, par le biais d'une prétendue obligation de vigilance renforcée, le soin de contraindre son cocontractant à la fourniture de ce cautionnement solidaire, la cour d'appel a violé l'article 1799-1, alinéa 3, du code civil ;

2. ALORS QUE l'article 4 du contrat d'ouverture de crédit qu'ont souscrit la Crcam de Lorraine et la société Top immobilier sàrl, vise les seules garanties que prévoit l'article 19 du même contrat, et non le cautionnement solidaire que vise l'article 1799-1, alinéa 3, du code civil ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1799-1, alinéa 3, du code civil ;

AUX MOTIFS, en second lieu, QU'« il résulte de l'article 1121 du code civil que la stipulation pour autrui doit s'analyser comme l'engagement pris par le promettant à l'initiative du stipulant à l'égard d'un tiers » (cf. arrêt attaqué, p. 9, 6e alinéa) ; que, « conformément aux exigences posées par l'article 1121 du code civil, il apparaît que l'acte d'engagement souscrit le 22 mai 2006 par la société Appia Lorraine/snc Eiffage se rattache incontestablement au contrat de crédit puisque tous deux concernent le même chantier : "Lotissement les Sapins : commune de Boulange" » (cf. arrêt attaqué, p. 10, 1er alinéa) ; qu'« il est tout autant dépourvu d'équivoque que la société Top immobilier sàrl a souscrit le crédit de 1 000 000 € pour financer les travaux de voirie effectués par la société Appia Lorraine/snc Eiffage d'une part, et que, d'autre part, le Crédit agricole avait bien l'intention de s'engager à réaliser une prestation envers Appia Lorraine/snc Eiffage, tiers au contrat » (cf. arrêt attaqué, p. 10, 2e alinéa) ; que « la cour relève que cette intention du Crédit agricole résulte clairement du contrat de prêt lui-même qui, comme l'a rappelé justement le tribunal de grande instance de Metz, prévoit dans l'ultime paragraphe de son article 5 que la banque effectue elle-même "les paiements aux entrepreneurs", mais aussi de l'attestation datée du 16 juin 2006 par laquelle le Crédit agricole certifiait que la société Top immobilier sàrl était titulaire d'un compte dans son établissement et y bénéficiait d'un financement de 1 000 000 € affecté à la réalisation d'un lotissement de trente parcelles à Boulange et à régler les travaux de vrd exécutés "par l'entreprise Appia Lorraine" » (cf. arrêt attaqué, p. 10, 3e alinéa) ; que « cette attestation conforte l'analyse selon laquelle le bénéficiaire était désigné au 16 juin 2006, c'est-à-dire avant même que la stipulation pour autrui ait produit ses effets » (cf. arrêt attaqué, p. 10, 4e alinéa) ; que « la cour constate enfin que le droit du bénéficiaire la société Appia Lorraine/snc Eiffage, envers le promettant, le Crédit agricole, tire sa source de l'alinéa 3 de l'article 5 du contrat de prêt qu'il faut entendre, contrairement à l'interprétation qu'en fait le Crédit agricole, comme l'engagement de celui-ci de payer le maître d'oeuvre bénéficiaire de bons à payer » (cf. arrêt attaqué, p. 10, 5e alinéa) ; « qu'en conséquence, il convient de dire que les conditions requises par la loi pour une stipulation pour autrui sont remplies et que les premiers juges ont donné une qualification juridique exacte aux relations entre Top immobilier sàrl, le Crédit agricole et la société Appia Lorraine/snc Eiffage » (cf. arrêt attaqué, p. 10, 6e alinéa) ;

ALORS QUE la stipulation pour autrui peut toujours être révoquée par le stipulant, hormis le cas où le bénéficiaire l'a rendue irrévocable en déclarant vouloir en profiter ; qu'en s'abstenant de justifier que la société Appia Lorraine, ou son ayant droit, la société Eiffage travaux publics est, aurait déclaré vouloir profiter de la stipulation pour autrui dont elle serait bénéficiaire avant la date à laquelle la Crcam de Lorraine et la société Top immobilier sàrl ont résilié, le 23 avril 2007, la convention d'ouverture de crédit qui, d'après elle, la contiendrait, ce qui nécessairement a emporté révocation de cette prétendue stipulation pour autrui, la cour d'appel a violé l'article 1121 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 15-16140
Date de la décision : 30/06/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Metz, 15 janvier 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 30 jui. 2016, pourvoi n°15-16140


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Monod, Colin et Stoclet, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.16140
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