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14/06/2016 | FRANCE | N°14-17032

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 14 juin 2016, 14-17032


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé par la société STC transport-services, aux droits de laquelle est venue la société Chevallier Sud, été victime le 1er février 2008 d'un accident du travail ; qu'à l'issue du second examen médical du 5 janvier 2010, le médecin du travail a indiqué qu'il était inapte à son poste ; que le salarié a été licencié le 26 février 2010 pour inaptitude et impossibilité de reclassement ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statu

er par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé, qui n'est manifestem...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé par la société STC transport-services, aux droits de laquelle est venue la société Chevallier Sud, été victime le 1er février 2008 d'un accident du travail ; qu'à l'issue du second examen médical du 5 janvier 2010, le médecin du travail a indiqué qu'il était inapte à son poste ; que le salarié a été licencié le 26 février 2010 pour inaptitude et impossibilité de reclassement ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le second moyen :
Vu les articles L. 1226-10 et L. 1226-15 du code du travail ;
Attendu que pour dire que l'employeur a procédé à des recherches d'un poste de reclassement suffisamment loyales, sérieuses et exhaustives et juger que le licenciement du 26 février 2010 du salarié était fondé sur une cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que le médecin du travail a indiqué le 25 février 2010 : « j'ai pris note de la description du poste de la tournée 240 et sites de livraison. Cette tournée n'est pas tout à fait idéale. Les livraisons de magasin avec déchargement sur la route ne posent pas de problème, celles se faisant en sas sont plus délicates à réaliser de par la manutention qu'elles nécessitent par transpalette à main (plans inclinés, parfois en dévers, avec sol plus ou moins irrégulier tel que cela existe pour le magasin de Vauvert par exemple). J'ai bien pris note que vous n'étiez pas maître d'oeuvre, ni dans le choix des magasins de la tournée, ni dans le choix de la marchandise à livrer. L'état de santé du salarié n'est pas complètement compatible avec ce type de tournée, mais les contre indications partielles ne portent que sur une partie de celles-ci. En conclusion, son état ne permet pas de donner une aptitude totale et sans réserve à ce jour sur cette tournée, Si vous souhaitez avoir plus de précision, je pense que seul un essai sur quelques rotations, sous réserve de l'acceptation totale de l'intéressé pourrait lever certaines interrogations et peut-être étendre ou réduire l'étendue de l'aptitude... » et que les échanges entre l'employeur et le service de santé au travail démontrent que les aptitudes ou restrictions qui devaient présider aux recherches de reclassement ont été envisagées ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans vérifier si l'essai préconisé par le médecin du travail avait été effectué, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en ce qu'il déboute M. X... de ses demandes, fondées sur le manquement de l'employeur à l'obligation de résultat, au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 11 mars 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Condamne la société Chevallier Sud aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Chevallier Sud et la condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze juin deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le premier moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la consultation des délégués du personnel sur les propositions de reclassement au titre du licenciement de Monsieur X... était régulière et d'AVOIR en conséquence débouté Monsieur X... de ses demandes de dommages et intérêts au titre de l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement.
AUX MOTIFS QUE à l'issue des visites de reprises des 16 novembre 2009, 21 décembre 2009 et 5 janvier 2010, le médecin du travail déclarait Monsieur X... "Inapte à la reprise du travail à son poste dans la mesure où un bâchage débâchage est nécessaire. Une mutation sur un poste de chauffeur ne comportant pas de telles contraintes est possible. Utilisation d'un transpalette possible" ; Le cahier de consultation des délégués du personnel atteste que ces derniers ont été consultés sur le reclassement envisagé de Monsieur X... ; par jugement avant dire droit du 16 février 2012, le conseil de prud'hommes d'Orange avait ordonné la comparution de témoins et le jugement déféré relève que Monsieur Y..., délégué du personnel, a confirmé sous serment que cette consultation avait bien eu lieu. Il y a lieu d'en conclure que les délégués du personnel ont bien été consultés les 25 janvier et 1er février 2010.
ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QUE ATTENDU QUE Sur la demande de dommages et intérêts pour défaut de consultation des délègues ; Vu les articles L 1226-10 , R 4624-31 et suivants du code du travail ; le code du travail prévoit que l'employeur doit consulter les délégués du personnel sur le reclassement du salarié inapte avant de lui proposer un nouvel emploi ; cette consultation doit intervenir en cas de licenciement avant l'engagement de la procédure ; le demandeur certifie qui il n'y a pas eu de - réunion des délégués du personnel qui se serait penché pour avis et consultation sur l'inaptitude de Mr X... avec a l'appui de ses dires les témoignages de Mr Y... et Carbonnel délégués du personnel de la Société Chevallier SUD... ; le conseil constate que le défendeur verse aux débats le registre de réunions du 25 janvier et 1er Février 2010 qui atteste le contraire ; le conseil dans sa sagesse a procédé à une audition de témoins et sachant ; l'audition a permis au conseil de se faire un avis éclairé et de conclure que les témoignages sous serment de Mr Y... étaient contradictoires avec leurs témoignages fournis aux débats ! ; Que l'original du registre des réunions démontre parfaitement que la question de l'inaptitude de Mr X... a été à l'ordre du jour des réunions du 25 janvier et 1er février 2010 et que le sujet a été débattu ; il serait inéquitable de faire droit à cette demande de dommage et intérêts.
ALORS QUE, la consultation des délégués du personnel au titre des postes de reclassement d'un salarié inapte doit intervenir avant le déclenchement de la procédure de licenciement ; que le déclenchement de la procédure de licenciement pour impossibilité de reclassement consécutif à une inaptitude avant consultation des délégués du personnel prive le licenciement consécutif de toute cause réelle et sérieuse ; que pour dire que la consultation des délégués du personnel relativement au reclassement du salarié avait été régulière, la Cour d'appel, suivant en cela le Conseil de prud'hommes, a considéré que les délégués du personnel avaient été consultés les 25 janvier et 1er février 2010 ; que le salarié soutenait que la procédure de licenciement avait été initiée le jour même de la consultation des délégués du personnel, soit le 1er février 2010, date à laquelle il avait été avisé de l'impossibilité de reclassement ; Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors même qu'elle avait elle-même constaté que la consultation des délégués du personnel était intervenue le 1er février, soir le même jour que le déclenchement de la procédure de licenciement, la Cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé les dispositions des articles L. 1226-10 et L. 1226-15 du Code du travail.
Qu'à tout le moins, en statuant ainsi, sans rechercher, comme l'y invitait pourtant le salarié, si la consultation des délégués du personnel était intervenue après le déclenchement de la procédure de licenciement, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 1226-10 et L. 1226-15 du Code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le second moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que l'employeur avait rempli son obligation de reclassement de sorte que le licenciement du Monsieur X... reposait sur une cause réelle et sérieuse et d'AVOIR en conséquence débouté le salarié de ses demandes de dommages et intérêts au titre de l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement ainsi que ses demandes de dommages et intérêts au titre de son préjudice moral.
AUX MOTIFS QUE à l'issue des visites de reprises des 16 novembre 2009, 21 décembre 2009 et 5 janvier 2010, le médecin du travail déclarait Monsieur X... "Inapte à la reprise du travail à son poste dans la mesure où un bâchage débâchage est nécessaire. Une mutation sur un poste de chauffeur ne comportant pas de telles contraintes est possible. Utilisation d'un transpalette possible" ; La lettre de licenciement est suffisamment motivée et fait état de l'inaptitude de Monsieur X... a reprendre son emploi dans les conditions antérieures et de la nécessité d'adapter son poste ; Les échanges ultérieurs entre l'employeur et le service de santé au travail démontrent que les aptitudes ou restrictions qui devaient présider aux recherches de reclassement ont été envisagées ; La société CHEVALLIER SUD a sollicité les autres sociétés du groupe lesquelles ont répondu négativement ; Un poste de conducteur a été identifié à La Farlède et soumis pour examen au médecin du travail qui considérait le 1er février 2010 que ce poste était incompatible avec l'état de santé de l'intéressé ; La société CHEVALLIER SUD se rapprochait de la société TLF afin que cette dernière assure la diffusion auprès de ses adhérents d'une recherche d'affectation de Monsieur X... ; Enfin, le médecin du travail était sollicité pour étudier in situ les possibilités d'aménagement de poste pour arriver au constat suivant le 25 10 février 2010 :"j'ai pris note de la description du poste de la tournée 240 et sites de livraison. Cette tournée n'est pas tout à fait idéale. Les livraisons de magasin avec déchargement sur la route ne posent pas de problème, celles se faisant en sas sont plus délicates à réaliser de par la manutention qu'elles nécessitent par transpalette à main (plans inclinés, parfois en dévers, avec sol plus ou moins irrégulier tel que cela existe pour le magasin de Vauvert par exemple). J'ai bien pris note que vous n'étiez pas maître d'oeuvre, ni dans le choix des magasins de la tournée, ni dans le choix de la marchandise à livrer. L'état de santé de M. X... n'est pas complètement compatible avec ce type de tournée, mais les contre indications partielles ne portent que sur une partie de celles-ci. En conclusion, son état ne permet pas de donner une aptitude totale et sans réserve à ce jour sur cette tournée, Si vous souhaitez avoir plus de précision, je pense que seul un essai sur quelques rotations, sous réserve de l'acceptation totale de l'intéressé pourrait lever certaines interrogations et peutêtre étendre ou réduire l'étendue de l'aptitude... "Si l'employeur a bien interrogé le médecin du travail sur la possibilité d'affecter Monsieur X... sur un poste à Miramas, le salarié reproche à la société CHEVALLIER SUD d'avoir négligé de saisir le médecin du travail sur la possibilité de le muter sur un poste à Salon de Provence. Or, Monsieur X... ne fournit aucun précision sur la nature et l'existence même dudit poste ; Les recherches en vue de procéder au reclassement de Monsieur X... apparaissent donc suffisamment loyales, sérieuses et exhaustives, il ne peut être reproché à l'employeur d'avoir manqué à ses obligations en ce domaine ; Il convient tant pour les motifs qui précèdent que ceux non contraires des premiers juges de confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré ; L'équité n'impose pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en l'espèce.
ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QUE ATTENDU QUE Le code du travail prévoit que l'entreprise doit faire tout ce qui est en son pouvoir pour reclasser un salarié inapte à son poste dans l'entreprise ; l'entreprise et la médecine du travail ont procédé à la recherche de nombreuses solutions pour adapter un poste compatible avec l'état de santé de Mr X... ; la lettre de licenciement invoque de façon particulièrement détaillée les raisons qui ont conduit l'entreprise à prononcer' le licenciement du demandeur ; le défendeur a également sollicité les conseils et l'expertise du GMSI qui est « la santé au travail » et dont la fonction a évolué avec la réforme . La santé au travail a 1'obligation d'avoir dans son sein tous les experts nécessaires au reclassement ; De plus le nouveau fonctionnement des « ex médecine du travail est paritaire « Employeur et les 5 syndicats représentatifs » ; Malheureusement aucune solution de reclassement n a été trouvée pour le cas de Mr X... ; au regard des pièces versées aux débats, il apparaît que l'entreprise Chevallier Sud n avait d'autres possibilité que de licencier Mr X... pour inaptitude après la recherche de poste libre à l'extérieur de l'entreprise Chevallier Sud ; le conseil constate qu'il n y avait pas d autre solution et que Je licenciement est bien justifié ; Dommages et intérêts pour les préjudice moral ; Vu les articles L 1152-1 et suivants du code du travail ; Mr X... prêtant avoir subi un préjudice moral par les conditions de son licenciement et en particulier par rapport à l'impossibilité de son reclassement ; le défendeur a parfaitement respecté les différentes législations actuellement en vigueur. Il verse aux débats une recherche riche de tentatives de reclassements et l'avis et investigation de « la santé au travail « ex médecine du travail ; le défendeur a une obligation de moyens et non de résultats ; il convient de débouter le demandeur de cette demande.
ALORS QUE, les conclusions écrites de la médecine du travail ne concernent que l'aptitude du salarié et ne dispensent pas l'employeur de rechercher une possibilité de reclassement au sein de l'entreprise au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que la mutation, la transformation ou l'aménagement de poste ; que les conclusions écrites de la médecine du travail ne valent pas à elles seules preuve de l'impossibilité dans laquelle se trouve l'employeur de reclasser le salarié ; qu'en se contentant de se référer aux conclusions du médecin du travail, sans s'assurer de l'impossibilité de reclassement dans le cadre de ces préconisations, la Cour d'appel a statué par des motifs inopérants qui n'étaient pas de nature à démontrer que l'employeur avait respecté ses obligations, violant ainsi les articles L. 1226-10 du Code du travail.
ALORS EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE, le juge est tenu de tirer les conséquences qui s'évincent de ses propres constatations ; que l'employeur doit, lors de la procédure de reclassement, de prendre en considération les préconisations de la médecine du travail ; qu'en l'espèce, le salarié soutenait qu'en dépit d'un avis médical qui préconisait qu'il effectue des essais sur un poste au reclassement relevant de sa compétence, l'employeur l'avait licencié sans aucunement lui faire effectuer les essais préconisés par la médecine du travail ; qu'en disant que l'employeur avait respecté son obligation de reclassement et qu'en conséquence le licenciement du salarié reposait sur une cause réelle et sérieuse après avoir textuellement cité l'avis de la médecine du travail qui préconisait un poste différent du poste initial avec essai sans constater que ledit essai ait été réalisé, la Cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article L. 1226-10 du Code du travail.
ET ALORS encore QU'en se contentant d'affirmer que le salarié n'apportait aucune précision sur la nature et l'existence d'un poste à Salon de Provence, quand il appartient à l'employeur de démontrer qu'il a recherché loyalement un poste de reclassement, la Cour d'appel a renversé la charge de la preuve et violé les articles L 1226-1 du Code du travail et 1315 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-17032
Date de la décision : 14/06/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 11 mars 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 14 jui. 2016, pourvoi n°14-17032


Composition du Tribunal
Président : M. Chollet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.17032
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