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08/06/2016 | FRANCE | N°14-16978

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 08 juin 2016, 14-16978


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 1er décembre 2003, M. X... a été engagé en qualité de capitaine de navire par la société Compagnie régionale guadeloupéenne de transports maritime (CRGTM) ; que le 2 décembre 2008, le capitaine a fait l'objet d'une mise à pied conservatoire avec convocation à un entretien préalable à un éventuel licenciement ; que le 11 décembre 2008, le salarié a saisi un tribunal mixte de commerce de demandes en paiement de diverses sommes ; qu'il a été licencié pour cause

réelle et sérieuse le 26 décembre 2008 ;
Sur les premier, deuxième, troisi...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 1er décembre 2003, M. X... a été engagé en qualité de capitaine de navire par la société Compagnie régionale guadeloupéenne de transports maritime (CRGTM) ; que le 2 décembre 2008, le capitaine a fait l'objet d'une mise à pied conservatoire avec convocation à un entretien préalable à un éventuel licenciement ; que le 11 décembre 2008, le salarié a saisi un tribunal mixte de commerce de demandes en paiement de diverses sommes ; qu'il a été licencié pour cause réelle et sérieuse le 26 décembre 2008 ;
Sur les premier, deuxième, troisième et quatrième moyens :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le cinquième moyen :
Vu les articles L. 1232-6, L. 1234-1 et L. 1235-1 du code du travail ;
Attendu que pour décider que le licenciement du salarié ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a examiné certains des motifs de licenciement mentionnés dans la lettre de licenciement ;
Qu'en se déterminant ainsi, alors qu'il lui appartenait d'examiner l'ensemble des griefs énoncés dans cette lettre et notamment celui tiré de la disparition d'une palette d'une valeur de 5 000 euros, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse et en ce qu'il condamne la société CRGTM à payer à M. X... la somme de 83 375 euros à titre de dommages-intérêts à ce titre, l'arrêt rendu le 24 février 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit juin deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société CRGTM
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, d'AVOIR condamné la société CRGTM au paiement d'une somme de 8.202,60 euros à titre d'indemnité de repas sur le fondement de l'article 72 du code de travail maritime ;
AUX MOTIFS QU'« aux termes de l'article 72 du code du travail maritime, les marins ont droit à la nourriture ou à une allocation équivalente pendant toute la durée de l'inscription au rôle d'équipage, sans que le texte ne distingue, entre les périodes d'embarquement et des périodes de congé repos, le rôle d'équipage constituant l'acte authentique de constitution de l'armement qui ne prend fin qu'avec le désarmement et l'expiration des contrats de travail de marins, sans se confondre avec le rôle de "bord", lequel se réduit à une liste d'équipage ; qu'en l'espèce, le principe de l'octroi de cette prime de nourriture n'est pas contesté par la CRGTM gui prétend l'avoir réglée sous la forme d'une prime de panier mais qui conteste le montant réclamé par l'appelant pour être irrecevable pour partie, s'agissant d'une modification de la réclamation initiale, et non fondé pour le surplus faute de stipulation conventionnelle entre les parties ; qu'à cet égard, d'une part, ce montant est identique à celui réclamé devant le premier juge ; que d'autre part, au regard des observations de l'employeur, la prime ne concerne pas les périodes de congé repos mais seulement les jours de présence de M X... sur le bateau dont il a la charge ; que c'est par conséquent à juste titre que ce dernier réclame le paiement de cette prime pour un mois entier et pour l'ensemble de sa période de présence au sein de la CRGTM du 1er janvier 2004 au 28 février 2009 ; qu'au vu des sommes perçues sur la période considérée et de la valeur réelle applicable de cette prime de nourriture journalière sur la base de 30 jours, il y a lieu de condamner la CRGTM à payer la somme de 8202,60 € ; que la décision déférée sera infirmée de ce chef » ;
1°) ALORS QUE le juge, qui est tenu par les termes du litige tels qu'ils se trouvent fixés par les conclusions respectives des parties, ne peut dénaturer celles-ci ; qu'en condamnant la société CRGTM au paiement d'un rappel de primes de nourriture journalière à hauteur des sommes réclamées par M. X..., au motif que l'employeur aurait lui-même admis que la prime qu'il lui versait mensuellement à ce titre ne couvrait pas les jours non travaillés, quand la société soutenait exactement le contraire dans ses conclusions d'appel (p.15) puisqu'elle faisait valoir que « la fixité de la prime qui ne varie pas selon qu'il y a plus ou moins de jours travaillés d'un mois à l'autre ou que le capitaine X... est en congés ou en repos » ce qui garantissait son paiement y compris pendant les jours de repos, la cour d'appel qui a dénaturé les termes clairs et précis des conclusions d'appel de l'employeur, a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; qu'en établissant le montant des condamnations de l'employeur au titre des indemnités de repas qui lui étaient dues, par référence à « la valeur réelle applicable de cette prime de nourriture journalière », sans préciser quel était le montant de cette valeur réelle de référence, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°) ALORS, A TOUT LE MOINS, QU'en statuant de la sorte, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 72 du code du travail maritime ;
4°) ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en condamnant la société CRGTM au titre de la prime journalière de nourriture à hauteur des montants réclamés par le salarié sans avoir répondu au moyen de ses conclusions d'appel (p.15) qui contestait la base de calcul retenue par le salarié et dont il ne justifiait pas le fondement, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, d'AVOIR condamné la société CRGTM au paiement d'une somme de 12.700,59 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires ;
AUX MOTIFS QUE « Le contrat de travail de M. X... est régi par les dispositions de l'article 104 du code du travail maritime, qui excluent l'application au capitaine des dispositions des articles 26 à 30 relatives à la durée du travail, notamment celles concernant les heures supplémentaires ; que cependant, aux termes de la convention n°180 de l'OIT sur la durée du travail des gens de mer et les effectifs des navires, ratifiée le 27 avril 2004, en ses articles 3, 4 et 5, d'application directe en droit interne, et à laquelle se réfère l'appelant en se prévalant expressément de la jurisprudence en faisant application, la durée du travail pour les gens de mer comme pour les autres travailleurs est en principe de huit heures par jour avec un jour de repos par semaine plus le repos correspondant aux jours fériés ; que par conséquent, par application de l'article 18-1 de cette convention, à compter du 27 octobre 2004, date d'échéance des 6 mois postérieure à la date de ratification de cette convention, ainsi que le rappelle expressément la publication de ce texte au journal officiel, M. X... est fondé à réclamer le paiement des heures supplémentaires qu'il démontre avoir accomplies sur la base, à tout le moins, en l'absence de spécification contractuelle et de convention collective, du montant alors reconnu aux marins employés par la CRGTM ; que cependant, il résulte des pièces produites qu'une partie des heures supplémentaires était habituellement réglée, au sein de cette entreprise, au moyen d'un repos compensateur supplémentaire, légalement possible au sein de ce type d'entreprise en vertu des articles 26-1 du code du travail maritime, et L. 212-5 et L. 212-5-1 du code du travail alors applicables ; qu'au vu des bulletins de salaire de M. X..., et compte tenu de l'observation ci-dessus relative à la prise en compte d'une partie des heures supplémentaires au titre d'un repos compensateur supplémentaire, il y a lieu d'allouer la somme de 12.700,59 euros pour 616 heures supplémentaires au titre des années 2005 à 2007 ; qu'en revanche, il y a lieu de rejeter toute somme au titre de l'année 2004, M. X... étant en congé à compter du 18 octobre à fin décembre 2004 ; que pour la période postérieure à novembre 2007, il y a lieu de déclarer la demande irrecevable s'agissant d'une demande nouvelle présentée pour la première fois devant la cour ne statuant s en matière prud'homale ; que la décision déférée sera infirmée de ce chef et qu'il y sera ajouté » ;
1°) ALORS QU'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'en affirmant, de manière péremptoire, que M. X... « est fondé à réclamer le paiement des heures supplémentaires qu'il démontre avoir accomplies » sans avoir constaté, ni même au demeurant vérifié, que le salarié avait produit des éléments de fait suffisants pour étayer sa demande, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3171-4 du code du travail ;
2°) ALORS QU'en statuant de la sorte, sans avoir même constaté que M. X... versait aux débats un simple décompte des heures de travail qu'il prétendait avoir accompli quand il s'agissait là, a minima, d'une constatation nécessaire pour lui permettre de retenir que des heures supplémentaires avaient été accomplies, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3171-4 du code du travail ;
3°) ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE le décret n°2005-305 du 31 mars 2005, sur la réglementation relative au temps de travail des marins, précise, d'une part, en ses articles 1er et 14 que le recours aux heures supplémentaires doit toujours découler des « nécessités du service à bord » et relève « d'une décision du capitaine » et, d'autre part, en son article 17, que l'ensemble des heures supplémentaires effectuées par le personnel à bord, que ce soient les marins ou le capitaine, doit être inscrit sur le tableau de service à bord qui est « tenu par le capitaine » et mis à la disposition de l'inspecteur du travail maritime, ce dont il résulte que le capitaine est, à bord du navire, le seul à pouvoir décider des heures supplémentaires qui devront être accomplies sur le navire, y compris pour lui-même, lesquelles doivent, quotidiennement, être inscrites par ses soins sur le carnet de bord ; que dès lors en condamnant la société CRGTM au paiement d'un rappel d'heures supplémentaires sans rechercher si, comme le soutenait la Société CRGTM dans ses conclusions d'appel (p. 21), elle ne justifiait pas, au regard des mentions du tableau de service de bord, que M. X..., qui était le seul à pouvoir décider des heures supplémentaires et à pouvoir les inscrire sur le tableau de bord, n'avait pas été rémunéré pour l'ensemble des heures supplémentaires qu'il avait effectuées ou à tout le moins déclarées, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3171-4 du code du travail, ensemble les articles 1er, 14 et 17 du décret n° n°2005-305 du 31 mars 2005, sur la réglementation relative au temps de travail des marins.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, d'AVOIR condamné la société CRGTM au paiement d'une somme de 16.695,84 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé sur le fondement de l'article L. 8223-1 du code du travail ;
AUX MOTIFS QU'« aux termes de l'article L. 8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de formalités prévues à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli ; qu'en l'espèce, la distorsion, relevée ci-dessus à l'issue de la rupture du contrat de travail liant la CRGTM et M. X..., entre le cadre légal et sa mise en oeuvre partielle ou inappropriée pendant plusieurs années, caractérise la dissimulation volontaire légalement requise ; qu'en réparation, par application de l'article L. 8223-1 du code précité, compte tenu de la rectification nécessaire du dernier salaire brut mensuel sur la base de 169 heures, seule applicable, il y a lieu d'allouer à M. X... la somme de 2782,64 € x 6 = 16 695,84 € ; que la décision déférée sera infirmée de ce chef » ;
1°) ALORS QUE la cassation qui ne manquera pas d'intervenir sur le deuxième moyen en ce qu'il critique le chef de dispositif de l'arrêt attaqué qui a condamné la société CRGTM en paiement d'heures supplémentaires emportera, par voie de conséquence et en application de l'article 625 du code de procédure civile, la cassation de l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné la société CRGTM pour délit de travail dissimulé ;
2°) ALORS QUE la dissimulation d'emploi n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a mentionné, intentionnellement, sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui effectué, le seul fait, pour celui-ci, de ne pas avoir respecté ses obligations légales en matière de paiement d'heures supplémentaires ne permettant pas à lui seul de caractériser l'élément intentionnel ; que la cour d'appel, qui a jugé que le délit était constitué puisque la société CGRGTM n'avait pas respecté ses obligations en matière de paiement des heures supplémentaires, a violé les articles L. 8221-5 et L. 8223-1 du code du travail ;
3°) ALORS EN OUTRE QU'en statuant de la sorte sans avoir aucunement recherché si la mauvaise exécution, par l'employeur, de ses obligations, avait été ou non intentionnelle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 8221-5 et L. 8223-1 du code du travail.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, d'AVOIR jugé que M. X... avait été victime de harcèlement moral et d'AVOIR condamné la société CRGTM au paiement d'une somme de 10.000 euros de dommages-intérêts à ce titre ;
AUX MOTIFS QU' « aux termes de l'article L1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'aux termes de l'article L1154-1 du même code, lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3, le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ; qu'au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que le juge forme sa conviction après avoir ordonné en cas de besoin, toutes les mesures d' instruction qu'il estime utiles ; qu'en l'espèce, M. X... produit diverses lettres, effectivement remises le 14 octobre 2008 à l'administration des affaires maritimes de Guadeloupe, mettant en cause les conditions de voyage ou de transport de marchandises et les règles de sécurité qui en résultent en raison des conditions d'établissement du rôle de l'équipage, de son remplacement à la barre du navire Gwo-Ka ou de l'affectation d'un mécanicien non breveté ou encore de la tentative d'imposition de chargement au-delà du tonnage autorisé pour le navire qu'il commandait ; que cependant, il ne rapporte pas la preuve de la remise de ces courriers à son employeur au moment de la date alléguée de leur commission, caractérisant le litige les opposant et, par conséquent, la présomption de harcèlement qui en résulterait. Aucune mention non plus n'apparaît dans le journal de bord ; que par ailleurs, il justifie de l'envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception signée le 22 janvier 2008 à son employeur, la CRGTM, mais pas de son contenu qui serait relatif à des manquements à des règles de sécurité imputable à ce dernier ; que s'agissant de la mise à pied prononcée à son encontre et des conséquences sur son état de santé, leur examen ne peut se distinguer de celui de la procédure de licenciement à laquelle elle est liée ; qu'en revanche, le non-paiement des heures supplémentaires, dont le protocole d'accord signé par l'employeur avec les autres salariés démontre qu'il s'agit d'une pratique systématique de l'employeur de s'exonérer de ses obligations légales, entraînant une dégradation des conditions de travail et susceptible de comporter une incidence sur l'avenir professionnel de M. X..., et d'ailleurs comme sur celui des autres salariés, établissent l'existence d'agissements caractérisant la présomption de harcèlement ; qu'il en est de même de la remise pour enregistrement d'un contrat de travail prétendument signé par M. X... à l'administration des affaires maritimes ; que la cour constate a cet égard que l'employeur ne peut renverser l'existence de cette présomption ; qu'infirmant la décision déférée, en réparation du préjudice subi il y a lieu d'allouer la somme de 10 000 € à M, X... » ;
1°) ALORS QUE la cassation qui ne manquera pas d'intervenir sur le premier moyen en ce qu'il critique le chef de dispositif de l'arrêt attaqué qui a condamné la société CRGTM en paiement d'heures supplémentaires emportera, par voie de conséquence et en application de l'article 625 du code de procédure civile, la cassation de l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné la société CRGTM pour le harcèlement moral dont la présomption aurait été établie en raison du non-paiement de l'ensemble des heures supplémentaires effectuées par le salarié ;
2°) ALORS QUE le seul manquement de l'employeur à ses obligations contractuelles ne peut jamais suffire, à lui seul, à établir une dégradation des conditions de travail du salarié et donc, une présomption de harcèlement moral ; qu'en déduisant du non-paiement, par la société CRGTM, d'une partie des heures supplémentaires, une dégradation des conditions de travail de tous les marins et donc, également de celles de M. X..., sans avoir caractérisé, au-delà de la seule violation par l'employeur de ses obligations en matière de paiement de salaire, les éléments de fait de nature à établir un risque potentiel ou avéré sur les conditions de travail de M. X..., la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
3°) ALORS QUE le harcèlement suppose des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits du salarié et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que le seul fait de remettre, pour enregistrement, à l'administration des affaires maritimes, un contrat de travail qui ne comporterait pas la signature authentique du salarié, qui constitue un fait isolé, ne peut suffire à établir une présomption de harcèlement moral ; que la cour d'appel, qui a retenu l'inverse, a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
4°) ALORS, EN OUTRE, QU'en statuant de la sorte sans avoir relevé le moindre élément susceptible d'établir, ou à tout le moins de faire présumer que la remise aux affaires maritimes dudit contrat avait eu pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail du salarié et/ou avait porté atteinte à ses droits et à sa santé, altéré sa santé physique ou morale et compromis son avenir professionnel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail.
CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, d'AVOIR jugé que le licenciement de M. X... était sans cause réelle et sérieuse et d'AVOIR condamné la société CRGTM à lui verser la somme de 83.375 euros de dommages-intérêts à ce titre ;
AUX MOTIFS QUE « Aux termes de l'article 109 du code du travail maritime, l'armateur peut toujours congédier le capitaine, sauf dommagesintérêts en cas de renvoi injustifié ; que sur la forme , aux termes de l'article premier de la convention collective nationale officiers du 30 septembre 1948, celle-ci s'applique à toutes les entreprises de navigation, à l'exception de celles ne possédant que des navires de moins de 250 tonneaux de jauge brute ; qu'en l'espèce, il est établi que la jauge brute du navire Gwo-Ka dépendant de la CRGTM ainsi que celle des navires Carib Désir et Transud sur lesquels M. X... à exercer des commandements n'excèdent pas les 250 tonneaux requis ci-dessus ; que dans ces conditions, l'article 38 de cette convention ne peut trouver à s'appliquer à l'occasion de la mise en oeuvre de toute procédure de licenciement concernant un capitaine ; que le moyen sera par conséquent rejeté ; que par ailleurs, il n'est pas contesté que la procédure de licenciement mise en place par l'employeur est conforme aux dispositions requises par le code du travail en pareil cas ; que sur le fond, les griefs reprochés à M. X... s'articulent d'une part sur sa qualité de mandataire de l'armateur dans les rapports avec la clientèle, d'autre part sur celle de capitaine au titre d'un échouement le 17 novembre 2008 et, enfin, du rapport déjà évoqué ci-dessus remis le 14 octobre 2008 à l'administration d'affaires maritimes qui a adressé le 20 novembre 2008 une lettre de demande d'observations à la CRGTM ; que tout d'abord, la cour constate qu'à l'occasion d'un premier manquement dans le cadre de la représentation de l'armateur dans les rapports avec les clients destinataires des marchandises transportées, ce dernier avait adressé un avertissement à son capitaine le 6 juillet 2006 ; qu'en revanche, la cour observe que les reproches de même nature adressés à celui-ci lors de son licenciement n'ont fait l'objet d'aucune observation de la part de l'armateur à M. X... au fur et à mesure de leurs rapports par les clients, reconnaissant ainsi le caractère bénin et sans conséquence dans les relations commerciales entretenues avec ces derniers ; que cet ensemble de faits ne sera pas dès lors considéré comme constitutif d'une cause réelle et sérieuse ; qu'ensuite, l'analyse des pièces, le journal de bord, qui fait foi jusqu'à preuve contraire, le rapport du mécanicien et l'expertise commise par l'armateur, relatives à l'échouement qui serait survenu le 17 novembre 2008, imputé à M. X... et contesté par ce dernier, en démontre l'inexistence ; qu'en effet, il est établi que, suite à l'arrêt accidentel des moteurs du navire, d'une part, celui-ci a poursuivi sur son erre, ce qui signifie clairement qu'il ne s'est pas arrêté, d'autre part, qu'il a rien heurté, l'expert ne relevant aucune trace'sur la coque et le mécanicien de l'évoquant même pas, d'autre part qu'il a continué sa course, dès que le mécanicien, informé de l'arrêt des moteurs par le commandant de bord, M. X... eut rejoint son poste et procédé à leur remise en route, et qu'il a rejoint son port de destination sans ambages ; que ce fait ne sera pas dès lors considéré comme constitutif d'une cause réelle et sérieuse ; que la cour relève enfin que ces éléments prétendument fautifs n'ont été opposés qu'à la suite de la lettre adressée le 20 novembre 2008 par M. X... à l'administration des affaires maritimes le 14 octobre 2008 se plaignant d'agissements de son employeur, lettre constitutive du 3e ordre de fait caractérisant selon ce dernier la déloyauté fautive du salarié ; que la cour rappelle à cet égard qu'aux termes de l'article L.1152-2 du même code, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de, qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés ; que dès lors, même si les faits relatés n'avaient pas été retenus ci-dessus, ils ne peuvent en aucun cas constituer un prétendu manquement à un devoir de loyauté du salarié vis-à-vis de son employeur, ce salarié bénéficiant d'une immunité légale ; que ce fait ne sera pas non plus considéré comme constitutif d'une cause réelle et sérieuse ; que par conséquent, le licenciement de M. X... soit être analysé comme étant sans cause réelle ni sérieuse ; que la décision déférée sera infirmée de ce chef » ;
1°) ALORS QUE lorsque la lettre de licenciement contient plusieurs griefs, il appartient au juge d'examiner chacun d'eux afin de vérifier si, pris ensemble ou isolément, ils justifient le licenciement ; qu'en jugeant le licenciement de M. X... sans cause réelle et sérieuse sans avoir examiné le grief, énoncé dans la lettre de licenciement, tenant à la disparition d'une palette, dont il devait assurer le transport, d'une valeur de 5.000 euros, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-6, L. 1234-1 et L. 1235-1 du code du travail ;
2°) ALORS QUE le juge doit indiquer l'origine et la nature des renseignements qui lui permettent de fonder sa décision ; qu'en décidant d'écarter le grief de la lettre de licenciement tenant à l'attitude inadaptée de M. X... à l'égard de la clientèle, au motif que l'employeur ne lui avait jamais adressé aucune observation, antérieurement, « au fur et à mesure des rapports par les clients » sur l'attitude de son capitaine, quand il ne résultait d'aucune des pièces produites aux débats, que la société CRGTM aurait reçu, avant 2008, des rapports de plusieurs clients faisant état d'un comportement similaire de M. X..., la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE la contradiction de motifs équivaut à une absence de motif ; que pour dire que le grief tenant aux insultes que M. X... avait proférées à l'égard de deux clientes de la société CRGTM était injustifié, la cour d'appel ne pouvait, sans se contredire, retenir, d'une part, que son attitude à l'égard de la clientèle n'avait jamais fait l'objet d'aucune observation de la part de l'employeur, tout en constatant, d'autre part, que pour des faits similaires, il s'était déjà vu notifier un avertissement le 6 juillet 2006 ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°) ALORS QUE commet une faute justifiant son licenciement disciplinaire, le salarié qui, de mauvaise foi, dénonce faussement et en toute connaissance de cause, de prétendus manquements de l'employeur à la réglementation applicable à son activité principale, et fait ainsi courir le risque à son employeur de se voir imposer une interdiction d'exercice ou d'exploitation ; qu'en affirmant que M. X... ne pouvait se voir reprocher la dénonciation de faits de harcèlement quand il était imputé à celui-ci, non d'avoir porté à la connaissance des affaires maritimes de tels faits, mais d'avoir faussement indiqué à celles-ci que la Société CRGTM violerait les lois et règlements afférents à la sécurité des navires et aux conditions de travail des marins, ce qui était totalement étranger à un éventuel harcèlement moral du salarié, la cour d'appel, qui a statué par des motifs inopérants, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
5°) ALORS QUE lorsque l'employeur reproche au salarié des faits de dénonciation mensongère, les juges du fond sont tenus de rechercher, d'une part, si les faits dénoncés l'ont été faussement et, d'autre part, si le salarié a, de mauvaise foi, dénoncé des faits qu'il savait ne pas être exacts ; qu'en écartant le grief de dénonciation mensongère, contenu dans la lettre de licenciement, sans avoir recherché si, comme la société CRGTM le soutenait dans ses conclusions d'appel, l'absence de suite donnée à cette dénonciation après enquête de la direction des affaires maritimes n'en démontrait pas la fausseté et si le signalement n'avait pas été fait de toute mauvaise foi par M. X... qui cherchait ainsi à porter atteinte à la réputation et à l'activité de son employeur, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-16978
Date de la décision : 08/06/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Basse-Terre, 24 février 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 08 jui. 2016, pourvoi n°14-16978


Composition du Tribunal
Président : Mme Vallée (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.16978
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