LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le second moyen :
Vu les articles L. 651-5, alinéa 1er, du code de la sécurité sociale et 302 bis ZB du code général des impôts dans leur rédaction issue respectivement des lois n° 2010-1594 du 20 décembre 2010 et 2010-1657 du 29 décembre 2010, applicable à la date d'exigibilité de la contribution litigieuse ;
Attendu qu'aux termes du premier de ces textes, les sociétés et entreprises assujetties à la contribution sociale de solidarité sont tenues d'indiquer à l'organisme chargé du recouvrement de cette contribution le montant de leur chiffre d'affaires global déclaré à l'administration fiscale, calculé hors taxes sur le chiffre d'affaires et taxes assimilées ; que la taxe d'aménagement du territoire instituée par le second texte, à la charge des concessionnaires d'autoroutes, est assise sur le nombre de kilomètres parcourus par les usagers d'autoroutes et appartient à la catégorie des taxes sur le chiffre d'affaires et taxes assimilées ainsi qu'il résulte de l'intitulé du titre II du livre premier de ce code, dans lequel est insérée cette disposition ; qu'il ressort de la combinaison de ces textes que les sommes versées au titre de cette taxe sont exclues de l'assiette de la contribution sociale de solidarité ;
Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, qu'à la suite d'un contrôle d'assiette, la Caisse nationale du Régime social des indépendants-participations extérieures (la Caisse) a réintégré dans l'assiette de la contribution sociale de solidarité due par la société Arcour (la société), au titre de l'année 2011, le montant de la taxe d'aménagement du territoire que celle-ci avait acquittée et déduite du chiffre d'affaires global déclaré à l'administration fiscale, tel qu'elle l'avait communiqué à la Caisse ;
Attendu que, pour rejeter ce recours, le jugement retient que la taxe d'aménagement du territoire n'est pas assimilée, par le code général des impôts, à la taxe sur la valeur ajoutée ;
Qu'en statuant ainsi, le tribunal a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 9 février 2015, entre les parties, par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Nanterre ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Versailles ;
Condamne la Caisse nationale du Régime social des indépendants aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la Caisse nationale du Régime social des indépendants-participations extérieures et la condamne à payer à la société Arcour la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six mai deux mille seize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat aux Conseils, pour la société Arcour
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR dit que le recours de la Société ARCOUR était mal fondé, d'AVOIR dit que la procédure était régulière, d'AVOIR confirmé le redressement au titre de la contribution sociale de solidarité des sociétés pour l'année 2011.
AUX MOTIFS QUE « Sur la validité de la procédure de redressement. Attendu que la lettre d'observations est régie par les dispositions de l'article L.651-5-1 du Code de la sécurité sociale aux termes duquel : « L'organisme de recouvrement ayant constaté une inexactitude, une insuffisance, une omission ou une dissimulation dans les éléments servant au calcul de la contribution notifie au redevable, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, un document mentionnant l'objet des opérations de contrôle, les documents consultés, la période vérifiée, le mode de calcul et le montant de la rectification envisagée » ; Qu'en l'espèce, la Caisse par lettre du 12 mars 2013 a demandé à la société ARCOUR d'expliquer la distorsion (1 879 591€) observée entre le chiffre d'affaires déclaré à la Caisse et celui communiqué par l'administration fiscale ; que la société ARCOUR a précisé par courriel du 15 avril 2013 que l'écart correspondait à la taxe d'aménagement du territoire pesant sur les concessionnaires d'autoroutes, qu'elle avait déduite de son chiffre d'affaires pour constituer l'assiette de la C3S, explication que la Caisse a rejeté en précisant que seules les taxes spéciales, perçues en addition à la TVA et recouvrées selon les mêmes règles pouvaient être déduites du chiffre d'affaires à déclarer pour le chiffrage de la C3S, le redressement envisagé s'établissant à 3 007€ à la suite de la réincorporation de la taxe indûment déduite ; Qu'il en résulte que la société ARCOUR avait connaissance de la motivation et du quantum du redressement ; Que l'absence de la mise en demeure préalable prévue à l'article L.244-2 du Code de la sécurité sociale, admise par la Caisse, n'a causé aucun grief à la société cotisante dès lors que d'une part la Caisse n'a engagé aucune action de recouvrement s'étant contentée d'informer la société par lettre du 3 juin 2013 de la possibilité de saisir le présent tribunal et que d'autre part aucune forclusion n'était encourue ni n'est discutée dans le présent litige ; Que cet argument ne saurait en conséquence prospérer et est écarté » :
ALORS, D'UNE PART, QUE par application de l'article L. 244-2 du code de la sécurité sociale toute action aux fins de recouvrement de cotisations de sécurité sociale doit être précédée, à peine de nullité, de l'envoi d'une mise en demeure adressée au redevable ; que seule constitue la décision de redressement la mise en demeure notifiée à l'employeur ; que selon l'article L. 651-7 du même code, « les sociétés et entreprises assujetties à la contribution sociale de solidarité sont soumises aux dispositions des articles L. 133-1, L. 133-3, L. 244-1 à L. 244-5, L. 244-7, L. 244-9 et L. 244-11 à L. 244-14 » ; que par application combinée des articles L. 651-7 et L. 244-2, le redressement infligé par la caisse de RSI à un cotisant au titre de la contribution sociale de solidarité doit en conséquence être précédé de l'envoi d'une lettre de mise en demeure adressée par lettre recommandée ; que l'omission de cette formalité substantielle, destinée à assurer le caractère contradictoire du contrôle et donc la sauvegarde des droits de la défense, entraîne la nullité du redressement sans qu'un grief causé par cette irrégularité n'ait à être établi ; qu'en décidant néanmoins de « confirm er le redressement au titre de la contribution sociale de solidarité des sociétés pour l'année 2011 » alors qu'il ressort de ses propres constatations « l'absence de la mise en demeure préalable prévue à l'article L.244-2 du code », le tribunal des affaires de sécurité sociale a violé les articles L. 244-2, L. 651-1, L. 651-5-1 et L. 651-7 du code de la sécurité sociale ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'en vertu de l'article L. 651-5-1 du code de la sécurité sociale la lettre d'observations adressée par la caisse de RSI à l'employeur au titre du redressement portant sur la contribution sociale de solidarité doit mentionner les observations faites au cours du contrôle assorties de l'indication de la nature, du mode de calcul et du montant des redressements envisagés ; qu'en retenant que la lettre d'observations adressée le 29 avril 2013 à la société était régulière cependant qu'elle ne précisait pas le mode de calcul des redressements envisagés, le tribunal des affaires de sécurité sociale a violé le texte susvisé.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR dit que le recours de la Société ARCOUR était mal fondé, d'AVOIR confirmé le redressement au titre de la contribution sociale de solidarité des sociétés pour l'année 2011, et d'AVOIR débouté la Société ARCOUR de sa demande tendant à ce qu'il soit dit que la taxe d'aménagement du territoire due par la société ARCOUR SA n'entrait pas dans l'assiette de la contribution sociale de solidarité des sociétés ;
AUX MOTIFS QUE « II / - Sur le poste de redressement. Attendu que l'assiette de la C3S est constituée par le chiffre d'affaires entrant dans le champ d'application des taxes sur le chiffre d'affaires, c'est-à-dire par l'addition des sommes déclarées en vue de la liquidation et du reversement de la TVA au Trésor Public, qu'elles soient imposables ou exonérées ; Que la taxe d'aménagement du Territoire (TAT) n'est pas assimilée à la TVA par l'article 302 bis ZB du Code général des impôts ; qu'elle est calculée sur le nombre de kilomètres parcourus par les usagers et n'est pas assise sur le prix d'un bien ou d'un service ; qu'elle est fixée selon un tarif forfaitaire et non selon un taux, comme en matière de TVA ; qu'elle n'est pas perçue en addition à la TVA et ne peut être considérée comme une taxe assimilée que le redevable peut déduire de son chiffre d'affaires ; que l'administration fiscale n'en admet d'ailleurs pas la déduction pour l'établissement du chiffre d'affaires hors taxes ; Que la société ARCOUR a procédé indûment à la déduction de cette taxe pour la définition de l'assiette de la C3S dont elle était redevable au titre de. l'année 2011 ; Que le redressement sera confirmé »
ALORS QUE selon l'article L. 651-5 du code de la sécurité sociale « les sociétés et entreprises assujetties à la contribution sociale de solidarité sont tenues d'indiquer annuellement à l'organisme chargé du recouvrement de cette contribution le montant de leur chiffre d'affaires global déclaré à l'administration fiscale, calculé hors taxes sur le chiffre d'affaires et taxes assimilées » ; que la taxe due par les concessionnaires d'autoroutes, prévue par l'article 302 bis ZB du code général des impôts, rentre précisément dans la catégorie des « taxes sur le chiffre d'affaires et taxes assimilées » au regard de la nomenclature du code général des impôts visée au Titre II de la Première partie du livre 1er de ce code ; que cette taxe d'aménagement du territoire payée par les concessionnaires d'autoroutes ne rentre donc pas dans l'assiette de calcul de la contribution sociale de solidarité ; qu'en retenant le contraire, le tribunal des affaires de sécurité sociale a violé les articles L. 651-5 alinéa 1er du code de la sécurité et 302 bis ZB du code général des impôts.