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25/05/2016 | FRANCE | N°14-22242;14-25770

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 25 mai 2016, 14-22242 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° R 14-22.242,et A 14-25.770 ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 3121-3 du code du travail ;
Attendu, selon les arrêts attaqués, que M. X..., salarié de la société Smart France, a saisi la juridiction prud'homale d'une demande tendant à obtenir une contrepartie aux temps d'habillage et de déshabillage correspondant à vingt minutes par jour travaillé ;
Attendu que pour condamner l'employeur au paiement dune somme au titre de la contrepartie aux temps

d'habillage et de déshabillage, l'arrêt retient que les temps passés dans le...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° R 14-22.242,et A 14-25.770 ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 3121-3 du code du travail ;
Attendu, selon les arrêts attaqués, que M. X..., salarié de la société Smart France, a saisi la juridiction prud'homale d'une demande tendant à obtenir une contrepartie aux temps d'habillage et de déshabillage correspondant à vingt minutes par jour travaillé ;
Attendu que pour condamner l'employeur au paiement dune somme au titre de la contrepartie aux temps d'habillage et de déshabillage, l'arrêt retient que les temps passés dans les vestiaires ne servent pas seulement à enlever et mettre les vêtements, mais sont aussi des temps de communication d'information qui sont utiles à la bonne marche de l'entreprise, la durée de vingt minutes quotidienne sera retenue ;
Qu'en statuant ainsi, en prenant en compte des temps consacrés à des tâches, autres que l'habillage ou le déshabillage, dont elle n'a pas constaté le caractère nécessaire ou obligatoire, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et attendu qu'en application de l'article 625 du code de procédure civile, la cassation à intervenir de l'arrêt rendu le 10 juin 2014 entre la société Smart France et M. X..., entraîne, par voie de conséquence la cassation de l'arrêt du 14 octobre 2014 fixant ce montant à 6 461,12 euros bruts ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils condamnent la société Smart France à payer à M. X... la somme de 6 461,12 euros à titre de contrepartie aux temps d'habillage et de déshabillage, les arrêts rendus le 10 juin 2014 et le 14 octobre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Metz ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts partiellement cassés ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq mai deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour la société Smart France, demanderesse au pourvoi n° R 14-22.242.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit qu'une contrepartie aux temps d'habillage et de déshabillage est due par la Société Smart France à Monsieur X..., correspondant à 20 minutes par jour travaillé, condamné la Société Smart France à verser à ce salarié une indemnité de 850 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS propres QUE "C'est par des motifs pertinents et sérieux que la cour adopte que les premiers juges ont considéré que, en méconnaissance des dispositions de l'article L.3121-3 du Code du travail, la SAS Smart France n'a accordé aucune contrepartie aux temps d'habillage et de déshabillage effectués chaque jour de travail par Monsieur X... ; qu'en effet les avantages dont la SAS Smart France fait état bénéficient à d'autres salariés que ceux de l'atelier de peinture ou ne sont pas de nature à pouvoir être considérés comme des contreparties à la contrainte de l'habillage et déshabillage sur place ; que la production, par la SAS Smart France, d'un seul jugement divergent du Conseil de prud'hommes de Forbach, rendu le 23 octobre 2013, sans départage, ne saurait remettre en cause la pertinence des arguments développés par les premiers juges dans le présent litige ; que six jugements antérieurs, datés du 24 juin 2013 dans des affaires opposant les salariés à la SAS Smart France sur la question de la contrepartie aux opérations d'habillage et déshabillage confirment la position du conseil soutenue par la cour (…)" (arrêt p.7 in fine alinéas 3 et 4) ;
ET AUX MOTIFS adoptés QU'"Aux termes de l'article L.121-4 devenu l'article L.3121-3 du Code du travail, lorsque le port d'une tenue de travail est imposé par les dispositions législatives ou règlementaires, par des clauses conventionnelles, le règlement intérieur ou le contrat de travail et que l'habillage et le déshabillage doivent être réalisés dans l'entreprise ou sur le lieu de travail, le temps nécessaire aux opérations d'habillage et de déshabillage fait l'objet de contreparties, soit sous forme de repos, soit sous forme financière, devant être déterminées par convention ou accord collectif de travail ou, à défaut, par le contrat de travail, sans préjudice des clauses des conventions collectives de branche, d'entreprise ou d'établissement, des usages ou des stipulations du contrat de travail assimilant ces temps d'habillage et de déshabillage à du temps de travail effectif ;
QU'à titre liminaire, il sera noté qu'il n'est pas contesté par les parties que le port de la tenue de travail pour les salariés de l'établissement Paintshop, soit l'établissement de peinture de la SAS Smart France, est imposé par le règlement intérieur pour des raisons tenant à la qualité du travail, l'hygiène et la sécurité et est détaillé dans un écrit intitulé : "les vêtements de travail au Paintshop de Smart France" indiquant que dès le 10 juillet 2006, les vêtements de travail ne doivent en aucun cas quitter l'enceinte du Paintshop : le lavage à domicile est interdit et lors des déplacements en dehors de l'enceinte du Paintshop, le passage au vestiaire est obligatoire, y compris pour les chaussures de sécurité ; que par ailleurs il sera rappelé qu'il appartient à l'employeur, débiteur de l'obligation, de rapporter la preuve, soit des contreparties accordées, soit de ce qu'il a rémunéré ces temps comme du travail effectif ;
QU'en l'espèce, la SAS Smart France s'appuie sur l'accord d'entreprise sur l'aménagement du temps de travail et les rémunérations conclu le 13 juillet 2000 et sur l'accord de substitution du 31 mars 2006 à effet au 1er juillet 2006 expliquant que la contrepartie est octroyée à travers la prime de performance individuelle, puis la prime de poste ; qu'il sera cependant noté que cet accord d'entreprise du 13 juillet 2000 qui prévoit certes un article 10 intitulé "temps d'habillage et de déshabillage" est cependant très flou sur les contreparties octroyées qui consistent, selon cet accord, en : - maintien du mode de calcul de la prime d'ancienneté, - prise en charge par l'employeur à 100 % des cotisations mutuelle/prévoyance pour la fraction "personne isolée" dès le 1er janvier 2001, - augmentation des indemnités de transport de 0,40 à 0,65 francs/km, - et en partie, le versement d'une prime de performance individuelle dont le paiement intervient avec effet rétroactif à compter du 1er janvier 2000 ;
QU'aucune de ces modalités n'apparaît ainsi comme spécifique aux salariés de l'atelier peinture et ne saurait s'analyser comme une contrepartie financière ou de repos de l'obligation qui est faite aux salariés de cet atelier de revêtir une tenue de travail ; qu'au demeurant, l'intitulé même de "prime de performance" montre à l'évidence que ce qui est recherché à travers cette prime est une meilleure productivité et non une contrepartie financière au port imposé d'une tenue de travail ;
QUE par ailleurs, l'accord dit "de substitution" de 2006 ne traite pas non plus de manière spécifique de la contrepartie financière à octroyer aux salariés de l'établissement peinture de Smart France qui doivent porter une tenue de travail et ne fait que substituer une prime dite "de poste" à la prime dite "de performance" ; qu'il sera enfin noté que l'accord intitulé "accord d'établissement sur la compensation du temps d'habillage et de déshabillage de l'établissement Paintshop" du 9 septembre 2008 n'a pas pu s'appliquer en raison du droit d'opposition de deux syndicats et ne sera donc pas pris en compte ; qu'ainsi, à défaut de preuve de contreparties financières ou de repos apportée par l'employeur, il appartient à ce conseil de prud'homal de déterminer les compensations liées au caractère obligatoire du port d'une tenue de travail dues par la SAS Smart France au salarié (…)" (jugement p.4 in fine, p.5) ;
ET AUX MOTIFS propres QU'"à hauteur d'appel, Monsieur X... porte sa demande au titre de cette contrepartie à la somme de 4 832,25 euros, soit jusqu'au 1er avril 2014 ; que ce montant est calculé sur la base de 20 minutes par jour pour les temps d'habillage et de déshabillage, durée contestée par l'appelante ; que les premiers juges ont retenu 10 minutes par jour ; que la S.A.S. Smart France expose qu'elle a fait chronométrer par un huissier le temps réellement nécessaire à ces opérations, et que cette opération a montré qu'un salarié met 1'59''08 pour revêtir sa tenue de travail et 1'23'06 pour revêtir sa tenue de ville ; que la S.A.S. Smart France précise que ce chronométrage s'est effectuée à l'entrée et à la sortie des vestiaires ; qu'elle ajoute que le vestiaire est distant d'une quinzaine mètres de l'atelier, soit trente mètres aller-retour ; qu'un salarié parcourt en moyenne un à deux mètres par seconde et donc que les 10 minutes retenues par le premier juge représentent une durée excessive, d'autant plus les 20 minutes réclamées par Monsieur X... ;
QUE cependant, la mesure faite par l'huissier ne peut être retenue, chaque salarié ayant son rythme propre, en fonction de ses particularités physiologiques ; que le décompte du temps d'habillage-déshabillage ne peut se faire que par une moyenne raisonnable ; qu'il est constant que la tenue de travail portée par les salariés de l'atelier de peinture ne peut être emportée à domicile pour y être lavée ; que l'entreprise se charge de cette opération ; que cela implique que les salariés doivent récupérer leur tenue de travail avant de passer au vestiaire, ce que soutient Monsieur X..., sans être contredit ; que Monsieur X... ajoute que le temps passé pour rejoindre le poste de travail dépend de l'endroit où se trouve ce poste ; que revêtus de la tenue de travail, les salariés doivent, avant d'arriver à l'atelier, déposer leur repas au réfectoire, car aucun aliment ne doit entrer dans l'atelier ; qu'il précise également que les conducteurs de cabine sont tenus de revêtir une tenue spécifique après avoir passé un sas de pressurisation et que pour eux les opérations d'habillage-déshabillage se font plus souvent dans la journée ;
QUE compte tenu de ces éléments, et du fait que les temps passés dans les vestiaires ne servent pas seulement à enlever et mettre des vêtements mais sont aussi des temps de communication d'informations qui sont utiles à la bonne marche de l'entreprise, la durée de 20 minutes quotidiennes demandées par Monsieur X... sera retenue (…)" (arrêt p.7 in fine, p.8 alinéas 1 et 2) ;
1°) ALORS QU' en soulevant d'office, sans rouvrir les débats pour permettre aux parties de s'en expliquer, le moyen pris de ce que les "temps passés dans les vestiaires" ne sont pas uniquement des temps d'habillage et déshabillage mais également "… des temps de communication d'informations qui sont utiles à la bonne marche de l'entreprise" devant être rémunérés comme tels, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS subsidiairement QUE lorsque les opérations d'habillage et déshabillage sont obligatoires et doivent être réalisées dans l'entreprise, l'employeur est tenu d'octroyer au salarié une contrepartie du "temps nécessaire" à ces opérations ; qu'en condamnant la Société Smart France à verser à Monsieur X... une rémunération correspondant à 20 minutes par jour travaillé "…compte tenu du fait que les temps passés dans les vestiaires ne servent pas seulement à enlever et mettre des vêtements mais sont aussi des temps de communication d'informations qui sont utiles à la bonne marche de l'entreprise…" la Cour d'appel, qui a mis à la charge de l'employeur la rémunération de temps étrangers aux opérations d'habillage et déshabillage, a violé l'article L.3121-3 du Code du travail ;
3°) ET ALORS très subsidiairement QUE la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer à ses occupations personnelles ; qu'en condamnant l'employeur à rémunérer des "…temps passés dans les vestiaires…" non consacrés à l'habillage ou au déshabillage, mais comme "…temps de communication d'informations…utiles à la bonne marche de l'entreprise" sans rechercher si cette communication, non imposée par l'employeur, était nécessaire et effective et quelle en était la durée exacte, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.3121-1 du Code du travail.Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour la société Smart France, demanderesse au pourvoi n° A 14-25.770.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la Société Smart France à verser à Monsieur Jean-Luc X... la somme de 6 461,12 € bruts à titre de contrepartie des temps d'habillage et de déshabillage ;
AUX MOTIFS QUE "par son arrêt du 10 juin 2014, la cour a attribué à Monsieur Jean-Luc X... un temps correspondant à 20 minutes par jour travaillé en contrepartie aux temps d'habillage et de déshabillage et n'a réservé à statuer que sur le montant dû à ce titre, en invitant préalablement les parties à calculer la somme due à Monsieur X..., son taux horaire et le nombre de jours de travail effectif n'étant pas suffisamment précisés ; qu'hormis sur la somme de 10,74 € tenant à une rectification du nombre effectif de jours travaillés par Monsieur X..., la SAS Smart France n'a pas émis de contestation sur le calcul de la somme de 6 473,96 € réclamée ; qu'il convient de la condamner à lui payer la somme de 6 461,12 € bruts de ce chef" ;
ALORS QUE la cassation qui interviendra sur le pourvoi (n° R.14-22 242) formé par la Société Smart France contre l'arrêt du 10 juin 2014 ayant "dit qu'une contrepartie aux temps d'habillage et de déshabillage est attribuée à Monsieur X..., correspondant à 20 minutes par jour travaillé" emportera par voie de conséquence celle de l'arrêt fixant ce montant à 6 461,22 € bruts, qui lui est uni par un lien de dépendance nécessaire.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-22242;14-25770
Date de la décision : 25/05/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Metz, 14 octobre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 25 mai. 2016, pourvoi n°14-22242;14-25770


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Carbonnier, SCP Boré et Salve de Bruneton

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.22242
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