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24/05/2016 | FRANCE | N°15-20168

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 24 mai 2016, 15-20168


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon le jugement attaqué, que le syndicat Avenir Sopra Steria a désigné, par courrier électronique du 4 mars 2015, Mme X... en qualité de représentant de section syndicale de l'établissement Manhattan de la société Sopra Steria Group ; que la société a saisi le tribunal d'instance d'une contestation de cette désignation ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident du syndicat :
Attendu que les dispositions critiquées par le moyen ne figurent pas dans le dispositif de l'arrêt ; que le moyen

est irrecevable ;
Mais sur le pourvoi principal de la société :
Vu l...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon le jugement attaqué, que le syndicat Avenir Sopra Steria a désigné, par courrier électronique du 4 mars 2015, Mme X... en qualité de représentant de section syndicale de l'établissement Manhattan de la société Sopra Steria Group ; que la société a saisi le tribunal d'instance d'une contestation de cette désignation ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident du syndicat :
Attendu que les dispositions critiquées par le moyen ne figurent pas dans le dispositif de l'arrêt ; que le moyen est irrecevable ;
Mais sur le pourvoi principal de la société :
Vu l'article L. 2143-3, alinéa 4, du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 ;
Attendu que, selon ce texte, la désignation d'un délégué syndical peut intervenir au sein de l'établissement regroupant des salariés placés sous la direction d'un représentant de l'employeur et constituant une communauté de travail ayant des intérêts propres, susceptibles de générer des revendications communes et spécifiques ;
Attendu que, pour dire que l'établissement de Manhattan constitue un établissement distinct sur le périmètre duquel peut être désigné un représentant de la section syndicale, le jugement énonce que le site de Manhattan constitue un établissement distinct dans le cadre de l'élection des délégués du personnel et que la société n'apporte pas la preuve que les critères qui avaient permis cet établissement distinct ne seraient plus réunis ;
Qu'en statuant ainsi, le tribunal a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi incident du syndicat Avenir Sopra Steria ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que l'établissement de Manhattan constitue un établissement sur le périmètre duquel peut être désigné un représentant de section syndicale, le jugement rendu le 8 juin 2015, entre les parties, par le tribunal d'instance de Courbevoie ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Puteaux ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mai deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Capron, avocat aux Conseils, pour la société Sopra Steria Group, demanderesse au pourvoi principal
Le pourvoi fait grief au jugement attaqué D'AVOIR dit que l'établissement de Manhattan constitue un établissement sur le périmètre duquel peut être désigné un représentant de section syndicale ;
AUX MOTIFS QUE « l'article L. 2142-1-1 du code du travail dispose que chaque syndicat qui constitue, conformément à l'article L. 2142-1 du code du travail, une section syndicale au sein de l'entreprise ou de l'établissement d'au moins 50 salariés peut, s'il n'est pas représentatif dans l'entreprise ou l'établissement, désigner un représentant de la section pour le représenter au sein de l'entreprise ou de l'établissement. / L'article L. 2143-3 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi du 5 mars 2014, dispose que la désignation d'un délégué syndical peut intervenir au sein de l'établissement regroupant des salariés placés sous la direction d'un représentant de l'employeur et constituant une communauté de travail ayant des intérêts propres, susceptibles de générer des revendications communes et spécifiques. / Le cadre de désignation d'un délégué syndical ou d'un représentant de section syndicale est nécessairement le même, dès lors que la seule condition distinctive dans la désignation de ces institutions est le caractère représentatif ou non du syndicat (cour de cassation, Soc. 14 décembre 2010). / Avant la loi du 5 mars 2014 et suite à la loi du 20 août 2008, la jurisprudence de la cour de cassation a unifié les périmètres des élections du comité d'entreprise et du délégué syndical (cour de cassation, Soc. 18 mai 2011). / Il résulte du rapport fait au nom de la commission des affaires sociales sur le projet de loi relatif à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale par M. Jean-Patrick Y..., député, que l'ajout du quatrième alinéa de l'article L. 2143-3 du code du travail est destiné à redéfinir le périmètre de désignation des délégués syndicaux, afin que celui-ci soit le plus proche possible es salariés. / Il précise que le texte proposé s'éloigne volontairement de la jurisprudence, afin de permettre la désignation d'un délégué syndical sur un périmètre différent de celui sur lequel est organisée l'élection sur laquelle se fonde la mesure de l'audience, pour permettre, comme l'indique l'étude compact, "une désignation du délégué syndical au plus près du salarié". / Il indique que l'objectif est bien d'ouvrir la possibilité de désigner des délégués syndicaux au niveau de mise en place des délégués du personnel, c'est-à-dire au plus près du terrain, cette possibilité étant jusqu'alors conditionnée à l'existence d'un accord prévoyant explicitement la désignation de délégués syndicaux sur un périmètre plus restreint que le périmètre de désignation du comité d'entreprise ou du comité d'établissement. Par ailleurs, il se réfère à la jurisprudence de la cour de cassation du 29 janvier 2003 et du 24 avril 2003 en utilisant indistinctement les termes "revendications" et "réclamations". / En l'espèce, le site de Manhattan constitue un établissement distinct dans le cadre de l'élection des délégués du personnel et la société Sopra Steria group n'apporte pas la preuve que les critères qui avaient permis cet établissement distinct ne seraient plus remplis. / Par conséquent un représentant de section syndicale peut être désigné sur le périmètre de l'établissement de Manhattan » (cf., jugement attaqué, p. 2 et 3) ;
ALORS QUE, de première part, aux termes des dispositions combinées des articles L. 2142-1-1 et L. 2143-3 du code du travail, dans leur rédaction postérieure à la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014, la désignation d'un représentant de section syndicale ne peut intervenir dans un établissement que si celui-ci constitue un établissement distinct regroupant des salariés placés sous la direction d'un représentant de l'employeur et constituant une communauté de travail ayant des intérêts propres, susceptibles de générer des revendications communes et spécifiques ; que la circonstance qu'un établissement constitue un établissement distinct pour l'élection des délégués du personnel ne caractérise pas que cet établissement constitue un établissement distinct pour la désignation de représentants de section syndicale ; qu'en énonçant, dès lors, pour dire que l'établissement de Manhattan constitue un établissement sur le périmètre duquel peut être désigné un représentant de section syndicale, que le site de Manhattan constitue un établissement distinct dans le cadre de l'élection des délégués du personnel, sans relever que ce site regroupait des salariés placés sous la direction d'un représentant de l'employeur et constituait une communauté de travail ayant des intérêts propres, susceptibles de générer des revendications communes et spécifiques, le tribunal d'instance a violé les dispositions des articles L. 2142-1-1et L. 2143-3 du code du travail, dans leur rédaction postérieure à la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 ;
ALORS QUE, de deuxième part, les juges du fond ne peuvent motiver leurs décisions par une simple affirmation ; qu'en se bornant à affirmer, pour dire que l'établissement de Manhattan constitue un établissement sur le périmètre duquel peut être désigné un représentant de section syndicale, que le site de Manhattan constitue un établissement distinct dans le cadre de l'élection des délégués du personnel, sans justifier autrement, par un raisonnement quelconque ou par la référence à un élément de preuve, sa décision quant au caractère d'établissement distinct du site de Manhattan dans le cadre de l'élection des délégués du personnel, le tribunal d'instance a violé les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS QUE, de troisième part, il appartient à celui qui se prévaut du caractère distinct d'un établissement d'en apporter la preuve ; qu'en énonçant, par conséquent, pour dire que l'établissement de Manhattan constitue un établissement sur le périmètre duquel peut être désigné un représentant de section syndicale, que la société Sopra Steria group n'apporte pas la preuve que les critères qui avaient permis que le site de Manhattan soit regardé comme un établissement distinct dans le cadre de l'élection des délégués du personnel ne seraient plus remplis, le tribunal d'instance a inversé la charge de la preuve et a violé les dispositions de l'article 1315 du code civil, ensemble les dispositions des articles L. 2142-1-1et L. 2143-3 du code du travail, dans leur rédaction postérieure à la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-20168
Date de la décision : 24/05/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Analyses

SYNDICAT PROFESSIONNEL - Section syndicale - Représentant - Désignation - Cadre de la désignation - Etablissement - Etablissements distincts au sein de l'entreprise - Appréciation - Appréciation déduite du cadre de l'élection des délégués du personnel - Limites

REPRESENTATION DES SALARIES - Représentant de la section syndicale - Désignation - Cadre de la désignation - Etablissement distinct - Appréciation - Appréciation limitée à la désignation en cause - Portée REPRESENTATION DES SALARIES - Délégué syndical - Désignation - Cadre de la désignation - Etablissement distinct - Définition - Portée

Selon l'article L. 2143-3, alinéa 4, du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014, la désignation d'un délégué syndical peut intervenir au sein de l'établissement regroupant des salariés placés sous la direction d'un représentant de l'employeur et constituant une communauté de travail ayant des intérêts propres, susceptibles de générer des revendications communes et spécifiques. Viole ces dispositions le jugement qui, pour valider la désignation d'un représentant syndical au sein d'un établissement, retient que cet établissement constitue un établissement distinct dans le cadre de l'élection des délégués du personnel


Références :

article L. 2143-3, alinéa 4, du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Courbevoie, 08 juin 2015

Sur les critères d'appréciation de l'établissement distinct, en tant que cadre de la désignation du délégué syndical, à rapprocher :Soc., 14 novembre 2012, pourvoi n° 11-25433, Bull. 2012, V, n° 290 (cassation)

arrêt cité.Sur le principe selon lequel l'existence d'un établissement distinct pour la désignation d'un délégué syndical ne peut se déduire de l'organisation d'élections de délégués du personnel dans le même cadre géographique, à rapprocher :Soc., 16 janvier 1985, pourvoi n° 84-60564, Bull. 1985, V, n° 38 (cassation)

arrêt cité ;Soc., 7 février 1990, pourvoi n° 89-60977, Bull. 1990, V, n° 54 (cassation)


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 24 mai. 2016, pourvoi n°15-20168, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Lambremon (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat général : M. Petitprez
Rapporteur ?: Mme Salomon
Avocat(s) : SCP Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 01/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.20168
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