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18/05/2016 | FRANCE | N°15-82302

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 18 mai 2016, 15-82302


Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Maurice X..., partie civile,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 2-4, en date du 17 mars 2015, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 28 juin 2011, n° 10-82. 947), dans la procédure suivie contre M. Moktar Z...du chef de blessures involontaires, a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 22 mars 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Guého, conseiller rapport

eur, Mme Dreifuss-Netter, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Guich...

Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Maurice X..., partie civile,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 2-4, en date du 17 mars 2015, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 28 juin 2011, n° 10-82. 947), dans la procédure suivie contre M. Moktar Z...du chef de blessures involontaires, a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 22 mars 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Guého, conseiller rapporteur, Mme Dreifuss-Netter, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire GUÉHO, les observations de la société civile professionnelle RICHARD, de la société civile professionnelle ODENT et POULET et de la société civile professionnelle MEIER-BOURDEAU et LÉCUYER, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LEMOINE ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme, 27 et 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite, 1382 du code civil, 29 et 31 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, 609 et 593 du code de procédure pénale, défaut de base légale et excès de pouvoirs négatifs ;
" en ce que l'arrêt attaqué, après avoir condamné M. Moktar Z...à payer à l'agent judiciaire de l'Etat la somme de 217 885, 67 euros au titre de la rente d'invalidité capitalisée, a décidé qu'il y avait lieu d'imputer cette somme sur les postes de perte de gains professionnels futurs après consolidation et déficit fonctionnel permanent et que seule la somme de 46 202, 33 euros demeurait acquise à M. X... au titre du poste de préjudice du déficit fonctionnel permanent ;
" aux motifs qu'il n'y a plus à statuer que sur le préjudice économique de M. X... et sur le recours de l'Etat au titre de la rente versée à M. X..., c'est à dire sur les dispositions du jugement rendu par le tribunal correctionnel de Fontainebleau le 17 janvier 2014 ; que par aussi intelligente que soit l'argumentation de M. X..., sur l'imputation de la créance de l'Etat, elle ne peut être destinée qu'à la juridiction régulatrice ; que la présente cour retient que dans la mesure où son montant excède celui des pertes de revenus et l'incidence professionnelle, la rente d'invalidité répare nécessairement le poste du déficit fonctionnel permanent ; que sur les perspectives de carrières de M. X..., il exerçait les fonctions de capitaine de police lors de l'accident ; qu'il a été nommé commandant avec effet rétroactif au 15 mai 2007, soit quinze jours avant l'accident ; que né le 11 juillet 1952, il avait 44 ans ; qu'une des questions à résoudre pour évaluer son préjudice concerne sa perspective de carrière, c'est à dire la nomination à un emploi fonctionnel ; que selon le rapport d'expertise qui n'est pas discuté sur ce point, l'obtention d'un emploi fonctionnel intervient au choix pour 1 200 sur un effectif global de 3 400 commandants de police ; que la retraite intervient à 55 ans ; que M. X... pouvait y prétendre à compter de mai 1998 ; qu'il avait donc environ neuf années pour parvenir à un emploi fonctionnel ; que placé en congé maladie, il n'a pas bénéficié de cet avantage ; que la notation de M. X... le plaçait parmi les bons éléments mais pas parmi les premiers ; que l'expert retient que M. X... pouvait atteindre cet emploi fonctionnel à compter de 2004 ; que l'accès à un emploi fonctionnel constituait une probabilité pour M. X... et il a perdu une chance de l'obtenir ; qu'en 2004, M. X... était âgé de 52 ans ; que selon les hypothèses, il aurait pu obtenir cet emploi plus tôt, plus tard ou jamais ; que l'hypothèse retenue par l'expert correspond à une perte de chance raisonnable ; qu'il faut aussi apprécier parmi les revenus, ceux qui doivent être pris en compte ; que sur la perte de gains professionnels actuels, perte avant consolidation, le recours de l'agent judiciaire de l'Etat doit s'exercer poste par poste ; que cette imputation interdit le raisonnement de l'agent judiciaire de l'Etat, qui demande d'imputer indistinctement la pension d'invalidité la perte de gains professionnels actuels et la perte de gains professionnels futurs ; que l'expert établit que de mai à septembre 2004, M. X... a perçu 13 783, 46 euros alors qu'il pouvait espérer 14 324, 21 euros en prenant en compte la chance de parvenir à un emploi fonctionnel ; qu'il faut confirmer le jugement en ce qu'il a retenu une perte de 795 euros en sus des 175 794 et 62 896, soit 238 690 euros payés par l'Etat au titre du maintien du traitement ; que ces pertes viennent en supplément de ce qui est alloué à l'Etat représenté par l'agent judiciaire de l'Etat ; que sur la perte de gains professionnels futurs à compter de la date de consolidation, l'expert écarte à juste titre les sommes versées par l'Etat au titre de l'assistance à tierce personne ; que M. X... bénéficie de deux autres sources de revenus versés par son employeur, la pension principale avec majoration pour enfants et la rente d'invalidité versée du fait de l'accident ; que l'expert propose deux hypothèses :- la prise en compte de la seule pension pour un préjudice de 176 088 euros ;- la prise en compte de la pension et de la rente d'invalidité pour un préjudice subsistant de 17 037 euros ; que personne ne détermine le total des gains perçus par M. X... et le total de ceux qu'il aurait dû percevoir si l'accident ne s'était pas produit ; que l'expert exprime la différence dans chacune des deux hypothèses ; que les calculs joints en annexe cumulent les préjudices actualisés année par année, sans permettre clairement de déterminer les deux montants globaux qui permettraient de vérifier ces différences ; que dans le corps de son rapport, l'expert retient trois périodes et chiffre selon les deux hypothèses :- du 1er septembre 2004 au 1er août 2007 : 41 197 euros dans la première hypothèse et 13 940 euros dans la deuxième hypothèse,- du 1er août 2007 au 31décembre 2011 : 25 529 euros dans la première hypothèse, pas de préjudice dans la seconde hypothèse,- à partir du 31 décembre 2011 : 100 500 euros dans la première hypothèse, pas de préjudice dans la seconde hypothèse ; que, cependant, le résultat global de la seconde hypothèse est faux ; qu'en effet, pour les deux dernières périodes du 1er août 2007 au 31 décembre 2011, l'expert retient qu'il n'y a pas de préjudice parce que le montant des sommes perçues ou à percevoir est supérieur à ce que M. X... aurait dû percevoir en l'absence d'accident ; que, cependant, il ne déduit pas ces sommes pour parvenir au préjudice global, alors que la détermination de ce préjudice global supposerait que les sommes en positif et en négatif soient compensées ; que dans les tableaux de référence, c'est un montant de 0 qui est indiqué pour ces années, ce qui ne permet pas de refaire les calculs ; qu'on peut aussi relever que les additions des montants déterminés pour chaque période ne dégagent pas les résultats énoncés par l'expert pour la totalité ; que selon la consultation des tableaux joints, cette différence doit être attribuée à une actualisation ; que le calcul du préjudice avant recours de l'agent judiciaire de l'Etat suppose que l'on ne prenne en compte que la pension en excluant la rente d'invalidité ; que le montant déterminé par l'expert n'est contesté par l'agent judiciaire de l'Etat que pour une différence de choix d'indice ; que celui retenu par l'expert constitue une juste appréciation des éléments de la cause ; que la cour retient donc 176 088 euros conformément à la demande de M. X... ; que, cependant, l'agent judiciaire de l'Etat ne retient que 175 794 euros et la différence bénéficiera à M. X... ; que la créance de l'Etat au titre de la rente est capitalisée par celui-ci à 217 885, 67 euros, capitalisation qu'il faut admettre ; qu'il n'est pas contesté que la rente d'invalidité est versée en raison de l'accident ; qu'elle est visée aux articles 29 de la loi du 5 juillet 1985 et 1er de l'ordonnance du 7 janvier 1959 ; qu'elle fait donc partie des revenus dont bénéficie M. X... en raison de l'accident et l'Etat bénéficie du recours à l'encontre du tiers responsable ; qu'il faut la prendre en compte ; que le montant du préjudice soumis à ce recours comprend le préjudice résultant de la perte de revenus déterminée par l'expert augmenté de l'indemnisation du déficit fonctionnel permanent soit 176 088 + 88 000 = 264 088 euros ; qu'il est rappelé que le montant de 88 000 euros fixé par le tribunal correctionnel de Fontainebleau le 27 juin 2008 a été confirmé par la cour et que la cassation n'a pas affecté cette fixation ; que la créance de l'Etat s'élève à 217 885, 67 euros ; que la différence de 46 202, 33 euros revient à M. X... ;

" 1°) alors que le juge ne peut légalement refuser d'exercer la plénitude des pouvoirs que la loi lui confère ; que la juridiction de renvoi dispose de la plénitude de juridiction pour statuer en fait et en droit sur la cause, dans les limites de la cassation prononcée ; qu'en déboutant M. X... de sa demande tendant à voir juger que le recours du tiers payeur ne pouvait s'exercer sur le poste de préjudice du déficit fonctionnel permanent, motif pris que pour aussi intelligente que fût son argumentation sur l'imputation de la créance de l'Etat, elle ne pouvait être destinée qu'à la juridiction régulatrice, refusant ainsi d'apprécier la pertinence de l'argumentation avancée par M. X..., bien qu'elle ait été investie de la plénitude de juridiction pour statuer en fait et en droit dans les limites de la cassation, la cour d'appel, qui a refusé d'exercer les pouvoirs dont elle était investie, a exposé sa décision à la censure de la Cour de cassation ;
" 2°) alors que les recours subrogatoires des tiers payeurs s'exercent poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'elles ont pris en charge, à l'exclusion des préjudices à caractère personnel ; que le tiers payeur ne peut exercer son recours sur un poste de préjudice personnel que s'il établit qu'il a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant ce poste de préjudice de manière incontestable ; qu'en décidant, néanmoins, que lorsque son montant excède celui des pertes de revenus et l'incidence professionnelle, la rente d'invalidité répare nécessairement le poste du déficit fonctionnel permanent, pour en déduire que le montant du préjudice de M. X... soumis au recours de l'agent judiciaire de l'Etat comprenait la perte de revenus augmentée du déficit fonctionnel permanent, sans avoir constaté que le tiers payeur avait démontré qu'il avait servi à M. X... une prestation indemnisant de manière incontestable le poste de préjudice exclusivement personnel du déficit fonctionnel permanent, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision et exposé sa décision à la cassation " ;
Attendu que le moyen, qui reproche à la cour de renvoi d'avoir statué en conformité de la doctrine de l'arrêt qui l'avait saisie, est irrecevable ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
FIXE à 2000 euros la somme globale que M. X... devra payer à M. Z...et à la société Axa France au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix-huit mai deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 15-82302
Date de la décision : 18/05/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 17 mars 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 18 mai. 2016, pourvoi n°15-82302


Composition du Tribunal
Président : M. Guérin (président)
Avocat(s) : SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, SCP Odent et Poulet, SCP Richard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.82302
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