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11/05/2016 | FRANCE | N°14-26990

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 11 mai 2016, 14-26990


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 14 octobre 1996 en qualité d'ingénieur technico commercial par la société Medtronic France ; que son contrat de travail comportait une clause rédigée en ces termes : « l'employée est chargée de vendre et promouvoir la gamme de produits distribués par la Division (ou tous autres produits qui pourraient être adjoints à cette gamme par Medtronic) dans la région Est de la France

(départements 54-57-55-52-10-51) ; toutefois la définition de ce secteur pourra ê...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 14 octobre 1996 en qualité d'ingénieur technico commercial par la société Medtronic France ; que son contrat de travail comportait une clause rédigée en ces termes : « l'employée est chargée de vendre et promouvoir la gamme de produits distribués par la Division (ou tous autres produits qui pourraient être adjoints à cette gamme par Medtronic) dans la région Est de la France (départements 54-57-55-52-10-51) ; toutefois la définition de ce secteur pourra être revue et modifiée par Medtronic en fonction de sa politique commerciale » ; que, par courriel du 7 octobre 2010, la direction a informé la salariée d'une modification de son champ géographique d'activité ; que cette dernière a pris acte de la rupture de son contrat de travail et a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que, pour juger que la prise d'acte produisait les effets d'une démission, l'arrêt retient que la modification du champ d'activité n'entraînait pas celle de la rémunération ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait relevé que la modification du secteur géographique d'activité de la salariée entraînait une redéfinition des objectifs de vente sur lesquels était calculée la rémunération variable, ce dont il résultait qu'elle avait une incidence sur cet élément de salaire et que le contrat de travail avait été unilatéralement modifié par l'employeur, la cour d'appel, à qui il appartenait dès lors d'apprécier si ce manquement avait empêché la poursuite du contrat de travail, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que la prise d'acte produit les effets d'une démission et rejette les demandes à ce titre, l'arrêt rendu le 24 septembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Metz ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;
Condamne la société Medtronic France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 3 000 euros à Mme X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze mai deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour Mme X....
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Mme Anne X... de ses demandes tendant au paiement d'une indemnité de licenciement, d'une indemnité compensatrice de préavis et des congés payés y afférents, et d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
AUX MOTIFS QUE la prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur empêchant la poursuite du contrat de travail ; qu'il appartient au salarié de rapporter la preuve des griefs allégués à l'encontre de l'employeur ; qu'en l'espèce, selon le contrat de travail conclu le 14 octobre 1996, Anne X... a été engagée en qualité d'ingénieur technico-commercial au sein de la division Brady (pacemakers) afin de " vendre et promouvoir la gamme de produits distribués par cette division (ou tous autres produits qui pourraient être adjoints à cette gamme par Medtronic) dans la région Est de la France (départements 54-57-55-52-10-51) " moyennant un salaire de base mensuel, majoré d'une prime d'ancienneté à partir de la troisième année et d'une rémunération variable appelée " incentive ", le contrat stipulant que la définition du secteur pourrait être revue et modifiée par Medtronic en fonction de sa politique commerciale ; qu'il est constant qu'en fait, l'activité d'Anne X... portait sur la vente et la promotion des pacemakers mais aussi des défibrillateurs relevant de la division Tachy ; que suivant un avenant du 31 juillet 2008, la rémunération annuelle brute d'Anne X... a été portée à 81 639, 97 euros, prime d'ancienneté incluse, l'avenant prévoyant qu'il s'y ajoutait une rémunération variable " incentive " calculée sur la base des objectifs et du plan d'incentive annuels révisés au début de chaque année fiscale (1er mai-30 avril) et que cette rémunération variable représenterait 35 % de la rémunération annuelle à 100 % d'atteinte des objectifs ; que par mail du 7 octobre 2010, la direction a confirmé à Anne X... " la nouvelle distribution des centres sur l'est de la France qui sera effective début Q3 ", laquelle lui avait été présentée la veille, cette nouvelle distribution consistant à confier à un ingénieur technicocommercial tous les centres Brady/ Tachy, à une autre une zone Brady et à Anne X... une zone également exclusivement Brady portant sur des établissements de soins situés à Troyes (10), Romilly sur Seine (10), Saint-Dizier (52), Nancy (54), à savoir la polyclinique Gentilly et la clinique Saint André, Bar-le-Duc (55), Verdun (55), Dijon (21), Beaune (21), Chenove (21), Chaumont (52), Langres (52) et Semur en Auxois (21) alors qu'il n'est pas contesté que jusqu'alors, elle prospectait au CHU de Nancy, à la polyclinique Gentilly, dans trois établissement de Metz (57) dont le CHR, dans deux établissements à Thionville (57) dont le CHR, à Troyes, à Romilly, à Saint-Dizier, à Bar-le-Duc et à Verdun ; que par lettre du 20 octobre 2010, Anne X..., qui est domiciliée à Fleury, près de Metz, a demandé à son employeur de lui faire connaître les raisons de cette nouvelle distribution qui, selon elle, réduisait ses responsabilités et son rayon d'action commerciale de 3 millions d'euros à moins de 1, 5 millions, s'est inquiétée des déplacements quotidiens engendrés par celle-ci au regard de son rendement commercial et de sa vie personnelle et familiale et a également demandé à son employeur les garanties qu'il était en mesure de lui offrir pour maintenir sa rémunération ; que le 29 octobre 2010, la responsable des ressources humaines a notamment répondu à Anne X... qu'elle bénéficiait d'une autonomie d'organisation de ses déplacements, que la société Medtronic France était ouverte à toute discussion si la nouvelle attribution lui posait une difficulté au regard de sa vie personnelle, que les primes étaient calculées non pas sur la base d'un commissionnement sur le chiffre d'affaires du secteur mais sur l'atteinte du budget prévisionnel des ventes et que chaque changement d'attribution de centres faisait l'objet d'une adaptation du logiciel de primes de sorte que ses chances de gain restaient identiques ; qu'après qu'Anne X... a été arrêtée pour maladie du 19 octobre 2010 au 13 janvier 2011, elle a, par lettre du 14 janvier 2011, pris acte de la rupture de son contrat de travail ; qu'Anne X... soutient en premier lieu que son secteur d'activité constituait un élément essentiel de son contrat de travail et, partant, ne pouvait être modifié sans son accord ; mais que contrairement à ce que prétend l'intimée, la détermination du secteur d'activité d'un salarié exerçant des fonctions commerciales n'est pas en soi un élément du contrat de travail ; qu'en l'espèce, il convient de relever que le contrat de travail liant les parties autorisait l'employeur à modifier la définition du secteur géographique attribué à Anne X... ; qu'il se déduit de cette stipulation claire et précise que la définition dudit secteur n'a pas été contractualisée, peu important dès lors les développements de l'intimée tenant au fait qu'elle aurait clairement exprimé sa volonté concernant son lieu de travail en refusant d'abord un poste au sein de Medtronic France basé sur la région dijonnaise et que l'employeur en aurait tenu compte en lui proposant ensuite un secteur centré sur Metz ; que c'est à tort en outre qu'Anne X... analyse ladite stipulation en une clause de mobilité qui serait nulle faute de précision dés lors que cette clause permettait seulement à l'employeur de modifier ce qu'il était entendu par région est de la France et non pas d'envoyer la salariée prospecter dans une autre région du monde comme elle le prétend ; que dès lors, une telle clause est valable, sous réserve, notamment, qu'elle ne puisse autoriser l'employeur à modifier unilatéralement la rémunération contractuelle du salarié, ce qui sera examiné ci-après ; qu'Anne X... soutient ensuite que son nouveau secteur n'est pas fixé dans la même zone géographique que précédemment ; qu'il convient de constater que la nouvelle distribution des centres ne modifiait pas les départements prospectés par Anne X... par rapport à ceux listés dans le contrat de travail sauf en ce qu'elle ne devait plus intervenir dans des centres situés en Moselle (57) et qu'elle était chargée de centres situés en Côte d'Or (21) ; qu'en adjoignant à Anne X... ce dernier département et en lui retirant de fait les centres qu'elle visitait jusqu'alors en Moselle, la société Medtronic France n'a fait qu'appliquer les stipulations contractuelles qui l'autorisaient à modifier la définition du secteur géographique confié à Anne X..., les départements qui restaient inchangés (10 52, 54, 55) et la Côte d'Or relevant bien, pris dans leur ensemble, de la région est de la France ; que s'il est vrai que cette nouvelle répartition des centres imposait globalement à Anne X... des temps de trajet plus longs depuis son domicile par rapport aux centres qu'elle visitait auparavant, cette circonstance est en soi indifférente au regard du contrat lui-même dès lors que celui-ci n'énumérait pas des centres à prospecter mais se bornait à prévoir une zone de prospection et les départements auxquels elle correspondait, étant à nouveau rappelé que l'employeur était autorisé à modifier cette définition ; qu'ainsi, au regard de la zone de prospection, la nouvelle distribution des centres ne constituait pas une modification du contrat de travail ; qu'Anne X... argue également d'une répercussion sur sa vie personnelle liée à la modification litigieuse ; qu'ainsi que cela a déjà été relevé, la nouvelle distribution des centres rallongeait les temps de trajet globaux de l'intéressée depuis son domicile, le centre le plus éloigné dans l'ancien secteur étant situé à environ 250 kilomètres de son domicile alors que celui le plus éloigné dans la nouvelle répartition était situé à un peu plus de 350 kilomètres de son domicile ; que néanmoins, il convient de souligner que l'itinérance est le propre de fonctions commerciales telles qu'Anne X... les exerçait ; qu'en outre, l'augmentation des temps de trajet n'était pas telle qu'elle le prétend. En effet, le décompte que l'intimée produit, consistant à additionner la distance séparant chaque centre qui lui était confié de son domicile, n'apparaît pas correspondre à sa manière d'organiser son travail puisqu'il résulte de ses conclusions qu'elle démarchait au cours d'une même journée plusieurs centres peu éloignés les uns des autres ou positionnés dans la même direction et qu'elle avait l'intention de continuer de la sorte ; que par ailleurs, la seule référence au nombre de centres localisés en Côte d'Or sans qu'Anne X... justifie et s'explique sur le rythme et la durée moyenne des visites qu'elle opérait dans les centres est insuffisante à démontrer la nécessité dans laquelle elle se serait trouvée de dormir hors de son domicile, ni même la fréquence à laquelle elle aurait dû le faire, étant souligné en outre qu'Anne X... n'a de fait jamais expérimenté son secteur modifié dès lors qu'il est constant que quelques jours à peine après l'annonce de la nouvelle répartition des centres, elle a été arrêtée pour maladie de manière ininterrompue jusqu'à la fin de son contrat de travail ; qu'en définitive, elle ne justifie pas de manière précise des sujétions liées à son activité professionnelle telle qu'elle l'exerçait jusqu'au mois d'octobre 2010 et de celles supplémentaires qu'impliquait cette nouvelle répartition ; qu'en tout état de cause, elle n'établit, ni même ne décrit ses conditions concrètes de vie personnelle et familiale ; qu'en conséquence, elle ne caractérise pas une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie personnelle et familiale alors qu'en l'absence d'une telle atteinte et à défaut de tout autre élément justifiant d'une modification du contrat de travail, la nouvelle distribution des centres relève du pouvoir de direction de l'employeur ; qu'Anne X... fait également état d'un impact de la modification de son secteur sur sa rémunération, invoquant à ce titre que le secteur qu'elle couvrait jusqu'alors représentait environ 3 millions d'euros alors que celui qui lui était confié réduisait son rayon d'action commerciale à 1, 5 millions d'euros ; mais qu'il résulte du contrat de travail, de l'avenant et du plan d'incentive qui est versé aux débats par la société Medtronic mais aussi du plan de primes produit par Anne X... que le calcul de la rémunération variable prévue dans le contrat de travail et l'avenant, appelée incentive, se faisait sur la base de ce qui était réalisé par rapport à un objectif prédéfini et ne consistait pas en un commissionnement sur le chiffre d'affaires du secteur de sorte que ladite rémunération variable dépendait du niveau d'atteinte de l'objectif ; qu'il ressort du mail de Mathilde Z... produit par l'appelante et il n'est d'ailleurs pas contesté par Anne X... qu'un objectif était déterminé pour chaque centre en début d'année fiscale sur la base de données objectives liées notamment au nombre d'unités vendues dans chaque centre, l'objectif de l'ingénieur technicocommercial étant égal à la somme des objectifs des centres lui étant affectés ; et que selon le plan d'incentive fourni, une atteinte de 80 % de l'objectif ouvrait droit à 50 % du bonus, une atteinte de 100 % de l'objectif à 100 % du bonus et une atteinte de 130 % de l'objectif à 300 % du bonus ; qu'ainsi, c'est à juste titre que l'appelante fait valoir qu'au regard de ce mode de calcul de la rémunération variable, la nouvelle répartition était en elle-même sans effet sur la rémunération de l'intéressée prévue dans le contrat de travail et l'avenant ; qu'Anne X... prétend que l'employeur ne lui a pas proposé la réaffectation des objectifs en rapport à son nouveau secteur d'activité si bien que l'ancien plan d'objectifs est resté en vigueur tout en étant devenu irréalisable compte tenu de l'amputation de certains centres et de l'extension du secteur ; qu'elle se plaint aussi de ce qu'étant nouvelle arrivante sur un secteur qu'elle ne connaissait pas, elle aurait dû bénéficier d'une garantie de prime à 100 % pendant le temps nécessaire à la prise de connaissance du secteur, ainsi qu'il est mentionné la plupart du temps dans le contrat de travail des commerciaux lors de leur arrivée ; que cependant, l'allégation d'Anne X... sur l'absence de réaffectation des objectifs n'est corroborée par aucun élément alors que selon le mail de Mathilde Z... ci-dessus visé, la nouvelle distribution des centres s'est accompagnée d'une « rebascule » de l'objectif du centre à l'ingénieur technico-commercial en charge de ce centre ; que par ailleurs, le plan de primes de la société Medtronic produit par Anne X... elle-même envisage l'hypothèse de changements de situation professionnelle et mentionne à ce titre : " Les changements de situation (mobilités internes et promotions) doivent en principe intervenir au début d'un trimestre fiscal. En règle générale : Si changement en cours de quarter : SIP est calculé sur la base des résultats dans l'ancienne BU ou l'ancienne fonction, pour le quarter en cours lors du transfert du collaborateur et le quarter entier suivant. Pour le second quarter entier dans la nouvelle fonction : SIP est garanti à 100 % plafonné. Troisième quarter entier dans la nouvelle fonction : SIP calculé sur la base des résultats dans la nouvelle BU ou nouvelle fonction. Toutefois, il peut être prévu par avenant un mode de calcul distinct de la règle générale définie ci-dessus, et dans ce cas, il figure dans l'avenant de la personne transférée " ; que ce plan définit ainsi les règles transitoires à appliquer en matière de primes en cas de changement de situation et une garantie pendant un certain temps, étant précisé que ce plan stipule par ailleurs pour les nouveaux collaborateurs qu'" ils peuvent bénéficier d'une garantie de prime cappée, à 100 % maximum, sur le quarter en cours lors de leur arrivée, voire également sur le quarter entier suivant " ; qu'Anne X... ne démontre pas que l'employeur n'a pas mis en oeuvre ces règles prévues en cas de changement de situation ou entendait se soustraire à celles-ci, lesquelles déterminaient les objectifs chronologiquement applicables et la garantie due ; que les reproches qu'elle formule à ces titres n'apparaissent donc pas fondés ; qu'Anne X... prétend encore qu'à la suite d'un accord avec l'employeur, elle percevait une commission et non une prime d'objectifs en raison des ventes qu'elle réalisait avec le CHU de Nancy et le CHR Metz Thionville et que lesdites commissions lui ont nécessairement été supprimées dès lors qu'elle ne pouvait plus visiter ces centres ; qu'au soutien de cette affirmation, elle produit un mail qui lui a été adressé le 10 mars 2010 contenant un récapitulatif des ventes AFS pour son secteur en 2009 (soit 0 en 2009) et au début de l'année 2010 (soit pour un montant de 2 914, 92 euros à ce titre) et indiquant que le taux de commission était de 1, 15 % sur ces ventes avec la précision que le montant de la prime était plafonné à 1/ 4 de son incentive annuel contractuel ; que ce document confirme donc qu'outre la rémunération variable prévue dans son contrat de travail et son avenant qui dépendait de l'atteinte d'un objectif, il avait été convenu entre les parties d'une rémunération variable sous la forme d'une commission sur la vente de certains produits ; que toutefois, ce seul élément ne prouve pas que les produits générant ces commissions ne pouvaient être vendus que sur le CHU de Nancy et le CH R de Metz Thionville et ne pouvaient pas l'être sur les centres qui ont été affectés à Anne X... à la suite de la nouvelle répartition ; qu'en outre, selon le document en cause, la prime AFS d'Anne X... à la fin février 2010 représentait 34 euros alors que le salaire mensuel brut moyen de la salariée s'est élevé entre janvier et octobre 2010 à 9 227, 57 euros ; et qu'Anne X... ne produit aucun élément de nature à établir qu'elle a effectivement perçu, avant ou après le mois de février 2010, une prime plus élevée au titre de ces ventes, ni même qu'elle n'a jamais perçu une autre prime AFS ; qu'il s'ensuit qu'Anne X... ne justifie pas de la réalité de la privation de cette commission liée à la nouvelle distribution des centres de sorte qu'une modification du contrat de travail n'est pas à ce titre non plus caractérisée ; que de surcroît, quand bien même cette nouvelle répartition ne lui aurait plus permis de vendre les produits en cause, la perte de cette prime n'aurait pas constitué, au regard du montant justifié dont elle a bénéficié de ce chef, un manquement suffisamment grave de l'employeur empêchant la poursuite du contrat de travail ; que pour conclure à la modification de son contrat de travail, Anne X... soutient encore qu'en lui retirant l'activité tachy, l'employeur a appauvri ses tâches et diminué ses responsabilités ; qu'il est vrai que les centres attribués à Anne X... dans le cadre de la nouvelle distribution relevaient uniquement du marché des pacemakers (Brady) alors qu'auparavant, elle était également chargée de la vente des défibrillateurs (Tachy) ; mais qu'ainsi que le fait valoir la société Medtronic, il s'agissait dans l'un et l'autre cas de développer une activité commerciale consistant à prospecter des clients et à leur présenter des produits ; qu'il convient de relever en outre que les différences techniques entre les deux types de matériels alléguées par Anne X... et le fait qu'ils nécessiteraient des connaissances ou un savoir-faire distincts pour l'ingénieur technico-commercial en charge de les promouvoir ne sont étayés par aucun élément versé aux débats et ne sont au demeurant nullement explicités par l'intéressée ; que par ailleurs, il est constant qu'à l'époque, Anne X... ne disposait pas de la certification lui permettant de participer en salle opératoire à la pose de défibrillateurs de sorte que la perte du marché Tachy ne l'a pas privée de l'aspect chirurgical pouvant être lié à l'activité Tachy ; qu'Anne X... prétend néanmoins que pour l'activité Tachy, il lui était demandé d'organiser des formations et de participer à la mise en place ou à la réalisation d'études techniques ou de cas cliniques ; que si l'intimée produit des conventions entre des médecins du CHR de Metz ou du CHU de Nancy et la société Medtronic portant sur des formations, des évaluations ou des collaborations scientifiques, rien ne démontre que ce type de conventions ne concernait que l'activité Tachy, ni qu'il ne pouvait être passé avec des praticiens relevant des centres constituant le secteur d'Anne X... après la nouvelle répartition des centres ; qu'en outre, les éléments produits ne permettent pas de déterminer le degré d'implication d'Anne X... dans ces conventions où cette dernière n'est pas personnellement désignée, étant seulement avéré qu'Anne X... a été sollicitée en 2007, au même titre que d'autres ingénieurs technico-commerciaux, pour présenter une étude à des médecins et recueillir leurs éventuelles demandes de contrat ; que dès lors, il apparaît que la nouvelle répartition des centres a entraîné pour Anne X... une simple modification partielle de ses tâches sans que la diminution des responsabilités invoquée par la salariée soit prouvée ; qu'Anne X... n'est donc pas non plus fondée à invoquer une modification de son contrat de travail à ce titre ; qu'enfin, la modification du contrat de travail n'ayant pas été retenue, il importe de rappeler que l'employeur est présumé de bonne foi dans l'exercice de son pouvoir de direction et que la charge de la preuve de l'éventuel abus de droit ou détournement de pouvoir incombe au salarié ; qu'en l'espèce, dès le mail du 7 octobre 2010 confirmant la nouvelle distribution des centres sur l'est de la France, l'employeur a justifié sa décision par le fait que sur les centres " Brady only ", les parts de marché de Medtronic France étaient supérieures à la moyenne nationale en unités, que sur les centres " Brady/ Tachy ", la situation de Medtronic France en parts de marché en revenu était inférieure à la moyenne nationale aussi bien en brady qu'en tachy et que la performance était très faible en sondes ; qu'aussi l'employeur indiquait que le but de sa décision était de renforcer ses positions sur les zones de faiblesse en confiant à chacun une mission plus focalisée dans le domaine où il était le plus performant ; qu'il précisait qu'un ingénieur technico-commercial aurait ainsi pour mission de développer la position dans les centres Brady Tachy en utilisant sa bonne connaissance des réseaux et sa compétence technique, l'intéressé ayant assuré un support bloc dans son activité précédente, et que Carmen Garcia et Anne X... étaient chacune chargée d'un secteur Brady avec pour objectif de capitaliser leur bonne position Brady qu'elles avaient su atteindre et de se concentrer sur la stratégie sondes afin de repositionner Medtronic à une meilleure place ; que par la suite, la société Medtronic France a toujours continué à justifier la nouvelle répartition des centres par ces éléments, indiquant dans ses conclusions que son analyse des parts de marché a été faite par une société de conseil de stratégie ; que certes, ainsi que le relève l'intimée, l'appelante ne verse pas aux débats le rapport réalisé par cette société, ni une quelconque analyse de marchés ; que toutefois, Anne X... ne produit elle-même aucun élément de nature à contredire les indications ci-dessus rappelées fournies par Medtronic concernant ses parts de marché entre les centres " Brady only " et " Brady/ Tachy " et le marché des sondes, le fait qu'Anne X... ait été félicitée le 8 juillet 2010 pour sa progression en parts de marché en tachy et en brady sur les deux premiers trimestres n'excluant pas le bien-fondé des données avancées par Medtronic France tenant notamment à la moins bonne position de Medtronic France par rapport à la moyenne nationale sur les centres " Brady/ Tachy " de l'est ; qu'en outre, Anne X... ne verse pas non plus aux débats d'élément contredisant la compétence technique de la personne choisie par l'employeur pour les centres ‘ ‘ Brady Tachy " et, en particulier, le fait qu'elle avait assuré un support bloc dans son activité précédente ; qu'il convient par ailleurs de souligner que la réorganisation litigieuse n'a pas concerné qu'Anne X... mais l'ensemble de l'est de la France et, notamment, Carmen Y..., ingénieur technico-commercial sur cette région, laquelle a aussi été chargée de centres qu'elle ne prospectait pas auparavant ; que certes, dans une attestation, celle-ci indique qu'à sa question posée au cours de la réunion du 6 octobre 2010 où la nouvelle distribution des centres a été présentée, question destinée à connaître les raisons pour lesquelles des centres de Metz et Thionville ne restaient pas confiés à Anne X... qui habitait Metz mais lui étaient attribués alors qu'elle-même habitait dans les Vosges, il lui a été répondu qu'il n'y avait pas de raison qu'une seule d'entre elles fasse beaucoup de kilomètres ; que toutefois, cette attestation est particulièrement imprécise en ce qu'elle ne fait état que d'une réponse à une question posée sans évoquer l'intégralité de ce qui a été dit lors de cette réunion et en ce qu'elle n'indique même pas la personne qui aurait formulé cette réponse ; qu'elle n'est donc pas probante ; qu'enfin, en l'absence de modification du contrat de travail, les difficultés économiques supposées de Medtronic France telles qu'elles sont invoquées par Anne X... sont indifférentes, étant de surcroît observé que les notes produites par celle-ci, non datées, apparaissent en réalité postérieures à la réorganisation contestée puisqu'elles font état d'une performance inférieure aux objectifs depuis le début de l'année 2011 et du revenu du troisième trimestre de l'année fiscale 2011 ; qu'en conséquence, il n'est établi aucun abus ou détournement dans l'exercice par l'employeur de son pouvoir de direction ; qu'il s'ensuit qu'Anne X... ne rapporte pas la preuve du manquement de l'employeur justifiant sa prise d'acte de rupture du contrat de travail, laquelle produit dès lors les effets d'une démission ; que le jugement doit donc être infirmé en ce sens ; que, sur les conséquences financières de la prise d'acte, la prise d'acte produisant les effets d'une démission, Anne X... doit être déboutée de ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité compensatrice de préavis, d'indemnité compensatrice des congés payés afférents et d'indemnité de licenciement ; que le jugement sera également infirmé de ces chefs ; qu'il doit également l'être en ce qu'il a condamné la société Medtronic France à rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage versées à Anne X... dans la limite de trois mois sur le fondement de l'article L 1235-4 du code du travail.

ALORS QUE la détermination du secteur d'activité est un élément essentiel du contrat liant les parties et que la modification unilatérale d'une telle clause, refusée par le salarié, rend la rupture invoquée par le salarié imputable à l'employeur ; qu'en affirmant, de manière générale, que « la détermination du secteur d'activité d'un salarié exerçant des fonctions commerciales n'est pas en soi un élément du contrat de travail » quand il résultait de ses propres constatations que le contrat de travail de Mme Anne X... définissait le secteur géographique qui lui était attribué et listait à ce titre six départements, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil.
ET ALORS QU'une clause de mobilité doit définir de façon précise sa zone géographique d'application et ne peut conférer à l'employeur le pouvoir d'en étendre unilatéralement la portée ; qu'en opposant à la salariée une clause selon laquelle la définition du secteur convenu entre les parties pourrait être revue et modifiée par l'employeur en fonction de sa politique commerciale, sans autre précision, la cour d'appel a de nouveau violé l'article 1134 du code civil.
QU'en outre, en affirmant que la clause selon laquelle la définition du secteur convenu entre les parties pourrait être revue et modifiée par l'employeur en fonction de sa politique commerciale permettait uniquement à l'employeur de modifier ce qu'il entendait par région est de la France, la cour d'appel a dénaturé ladite clause en violation de l'article 1134 du code civil.
ALORS de surcroît QUE Mme Anne X... soutenait dans ses écritures d'appel, et produisait les pièces propres à le démontrer, que l'employeur luimême reconnaissait lui-même que la zone désormais attribuée couvrait la région Centre Est non plus seulement la région Est, en sorte qu'il ne pouvait en toute hypothèse se prévaloir d'une simple redéfinition de la région Est ; qu'en laissant sans réponse ce moyen déterminant des écritures d'appel de la salariée, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.
ALORS en tout cas QUE la mise en oeuvre de la clause contractuelle ne peut porter une atteinte au droit du salarié à une vie personnelle et familiale qui ne serait pas justifiée par la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché ; que Mme Anne X... exposait que les centres qui lui avaient été retirés étaient éloignés de 5 à 56 kms de son domicile et nécessitaient de 15 à 37 minutes de trajet, cependant que les centres nouvellement attribués étaient éloignés de 56 à 306 kms et nécessitaient de 37 minutes à 2h45 de trajet ; que cet allongement considérable des temps de trajet était nécessairement de nature à influer sur le temps consacré par la salariée à sa vie personnelle et familiale sur le détail de laquelle elle n'était pas tenue de renseigner son employeur ; qu'en reprochant à Mme Anne X... de ne pas décrire ses conditions concrètes de vie personnelle et familiale, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil.
ET ALORS QUE la modification du secteur d'activité de nature à affecter la rémunération du salarié, emporte modification du contrat de travail que l'employeur ne peut imposer ; qu'ayant constaté la modification du secteur d'activité imposée à la salariée, la cour d'appel ne pouvait écarter la modification de son contrat de travail sans rechercher si cette modification de secteur n'était pas de nature à affecter la rémunération de la salariée ; qu'en se bornant à reprocher à la salariée de ne pas démontrer l'incidence sur sa rémunération de la modification de son secteur d'activité, la cour d'appel qui a refusé de procéder à la recherche qui lui incombait n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1134 du code civil.
QUE surtout, en se bornant à reprocher à la salariée de ne pas démontrer l'incidence sur sa rémunération de la modification de son secteur d'activité, quand il appartenait à l'employeur, qui détermine les conditions de travail de la salariée, d'établir quelles étaient ces conditions, la cour d'appel qui a fait peser sur la seule salariée la charge de la preuve des conditions d'exercice de son contrat de travail, a violé l'article 1315 du code civil.
ALORS en tout cas QU'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que pour l'année au cours de laquelle la modification litigieuse était intervenue et au titre de laquelle des objectifs avaient été convenus par les parties en début d'exercice, la nouvelle affectation de la salariée emportait modification desdits objectifs et en conséquence de sa rémunération ; qu'en écartant la modification de la rémunération après avoir constaté qu'au titre de l'année en cours, l'employeur prétendait opérer une « rebascule » de l'objectif du centre à la salariée, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l'article 1134 du code civil.
ALORS encore QU'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que les activités relevant de la division tachy avaient été intégralement retirées à Mme Anne X... ; qu'en reprochant à cette dernière de ne pas démontrer que les responsabilités afférentes à cette activité ne pouvaient perdurer dans le cadre de la seule activité brady qui lui était désormais confiée quand il appartenait à l'employeur, qui détermine les conditions de travail de la salariée, d'établir quelles étaient ces conditions, la cour d'appel qui a fait peser sur la seule salariée la charge de la preuve des conditions d'exercice de son contrat de travail, a violé l'article 1315 du code civil.
ET ALORS en toute hypothèse QUE si l'employeur peut, dans l'exercice de son pouvoir de direction, procéder au changement des conditions de travail de ses salariés, il ne peut pour autant procéder à un tel changement avec une légèreté blâmable, ni abuser de son pouvoir de direction, ni encore détourner ce pouvoir à des fins autres que l'intérêt de l'entreprise ; que Mme Anne X... produisait aux débats l'attestation d'une salariée, Mme Carmen Y..., qui s'était vu confier certains centres qui avaient été retirés à Mme Anne X... quand cela n'était de l'intérêt ni de l'une ni de l'autre, attestation dont il résultait que l'employeur avait justifié cette décision par la volonté de faire faire beaucoup de kilomètres à l'une et l'autre des salariés, volonté manifestement étrangère à l'intérêt de l'entreprise ; que Mme Carmen Y... précisait que ces propos lui avaient été tenus lors d'une réunion organisée le 6 octobre 2010 à Strasbourg en présence de deux membres de la direction et de Mme Anne X... et dont l'objet était la redistribution des secteurs ; qu'en affirmant que cette attestation aurait été « particulièrement imprécise » quand cette attestation était tout au contraire très précise quant aux faits dont il était attesté, la cour d'appel l'a dénaturée en violation de l'article 1134 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-26990
Date de la décision : 11/05/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Metz, 24 septembre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 11 mai. 2016, pourvoi n°14-26990


Composition du Tribunal
Président : Mme Vallée (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.26990
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