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04/05/2016 | FRANCE | N°15-11136

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 04 mai 2016, 15-11136


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 29 octobre 2014), que la société Rhodanienne de transit a confié une mission complète pour la réhabilitation d'un bâtiment industriel et le réaménagement et la construction de bureaux à M. X..., architecte, qui s'est adjoint deux bureaux d'études, la société Economie 80, économiste de la construction et rédacteur des pièces contractuelles, et la société Bielec ; que le lot désamiantage, couverture, barda

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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 29 octobre 2014), que la société Rhodanienne de transit a confié une mission complète pour la réhabilitation d'un bâtiment industriel et le réaménagement et la construction de bureaux à M. X..., architecte, qui s'est adjoint deux bureaux d'études, la société Economie 80, économiste de la construction et rédacteur des pièces contractuelles, et la société Bielec ; que le lot désamiantage, couverture, bardage, étanchéité a été confié à la société SMAC Acéroid, le lot plomberie à la société Lucas et le lot menuiseries intérieures sous-plafond à la société OTB ; que les travaux ont été réceptionnés avec réserves le 21 février 2006 ; que, se prévalant de désordres, la société Rhodanienne de transit a, après expertise, assigné M. X... et la MAF en indemnisation de ses préjudices ; qu'un jugement du 30 juin 2011 a condamné M. X... et la MAF à payer à la société Rhodanienne de transit diverses sommes ; qu'après avoir réglé ces condamnations, M. X... et la MAF ont assigné en garantie les divers intervenants ;

Attendu que M. X... et la MAF font grief à l'arrêt de rejeter leurs recours en garantie ;

Mais attendu qu'ayant relevé que M. X... et la MAF fondaient exclusivement leur argumentation sur les conclusions du rapport d'expertise litigieux, entérinées par le jugement du 30 juin 2011, et, sans dénaturation, qu'ils n'invoquaient, à l'appui de leurs prétentions, aucun autre élément de preuve, de sorte que ce rapport, dont l'inopposabilité était soulevée, constituait le fondement exclusif de l'appréciation des faits, la cour d'appel a pu retenir qu'en l'absence de tout autre élément de preuve de nature à corroborer ledit rapport, il y avait lieu de le déclarer inopposable à l'ensemble des défendeurs ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... et la MAF aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre mai deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour M. X... et la société Mutuelle des architectes français.

Le moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. Pascal X... et la Mutuelle des Architectes Français de leurs recours en garantie après avoir déclaré le rapport d'expertise de Monsieur Y... inopposable aux défendeurs ;

Aux motifs que « les appelants reprochent essentiellement au premier juge de les avoir déboutés de leurs demandes formées à l'encontre des intervenants à l'acte de construire et à leurs assureurs de garantie décennale, en considérant que le rapport d'expertise Y... invoqué à l'appui de leur demande, leur était inopposable.
Aux termes de l'article 16 du Code de procédure civile: "Le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement".
S'agissant d'un rapport d'expertise, il est constant que, pour être opposable à des tiers, ceux-ci doivent avoir été appelés aux opérations d'expertise afin de faire valoir leurs arguments. A défaut, les parties doivent avoir été mises en mesure, dans le cadre de la procédure, de discuter de manière contradictoire des conclusions du rapport d'expertise, mais le juge ne peut se fonder exclusivement sur un tel rapport.
En l'espèce, Pascal X... et la Mutuelle des Architectes Français fondent leur action à l'encontre des sociétés ayant participé à l'acte de construire et leurs assureurs de responsabilité décennale, sur le terrain de la responsabilité délictuelle.
Ils versent aux débats, à l'appui de leurs demandes,
- les contrats de construction et comptes rendus de chantier,
- le rapport d'expertise de Monsieur Y..., missionné par ordonnance de référé du tribunal de grande instance de Rouen du 11 juin 2009, rendu le 5 mars 2010,
- le jugement du tribunal de grande instance de Rouen du 30 juin 2011, condamnant Pascal X... et la Mutuelle des Architectes Français sur la base de ce rapport à indemniser la société Rhodanienne de Transit au titre de la garantie décennale.
II ressort du rapport d'expertise judiciaire Y... que seuls Pascal X..., la Mutuelle des Architectes Français, et la société Rhodanienne de Transit ont été parties aux opérations d'expertise. De même, il ressort du jugement du 30 juin 2011 que seuls étaient parties au procès Pascal X..., la Mutuelle des Architectes Français et la société Rhodanienne de Transit et que la condamnation intervenue repose entièrement sur les conclusions de l'expertise.

Ainsi, aucun des intimés n'a été assigné dans la procédure devant le juge des référés, ni n'a été appelé ou représenté lors des opérations d'expertise. Ils ont donc été privés de la possibilité de formuler des observations techniques et de fait auprès de l'expert. Ils n'ont pas davantage été appelés à l'instance principale au fond devant le tribunal de grande instance de Rouen afin de débattre contradictoirement des éléments recueillis par l'expert et de ses conclusions.
Dans la présente instance, les appelants fondent exclusivement leur argumentation sur les conclusions du rapport d'expertise litigieux, adoptées par le tribunal de grande instance de Rouen dans sa décision du 30 juin 2011. Pascal X... et la Mutuelle des Architectes Français n'invoquent, à l'appui de leurs prétentions, aucun autre élément de preuve, de telle sorte que ce rapport constitue le fondement exclusif de l'appréciation des faits, en l'absence de tout autre élément de preuve de nature à corroborer ledit rapport, il y a lieu de le déclarer inopposable à l'ensemble des intimés. Dès lors, la décision entreprise sera confirmée de ce chef » (arrêt p.8 et 9) ;

Alors que, d'une part, le juge peut condamner une partie en se fondant exclusivement sur un rapport d'expertise judiciaire non contradictoire à l'égard de cette partie dès lors que le rapport a été versé aux débats et soumis à la discussion contradictoire des parties ; qu'en l'espèce, à l'appui de leurs recours en garantie, M. X... et la Mutuelle des Architectes Français se sont fondés sur le rapport d'expertise judiciaire de M. Y..., qu'ils ont régulièrement produit ; que pour rejeter ce recours, la cour d'appel a retenu qu'elle ne pouvait se fonder exclusivement sur cet élément de preuve car les défendeurs n'avaient pas été appelés ni représentés aux opérations d'expertise ; qu'elle a ainsi violé les articles 1382 du Code civil et 16 du code de procédure civile ;

Alors que, d'autre part et à titre subsidiaire, M. X... et la Mutuelle des Architectes Français ont, à l'appui de leur recours en garantie, invoqué d'autres pièces que le rapport d'expertise de M. Y... ; qu'en retenant qu'ils fondaient exclusivement leur argumentation sur les conclusions de ce rapport, la cour d'appel a dénaturé leurs conclusions, violant ainsi l'article 1134 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 15-11136
Date de la décision : 04/05/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 29 octobre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 04 mai. 2016, pourvoi n°15-11136


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Boulloche, SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, SCP Odent et Poulet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.11136
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