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03/05/2016 | FRANCE | N°16-81163

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 03 mai 2016, 16-81163


Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Hmayak Y...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, en date du 10 février 2016, qui sur renvoi après cassation (Crim., 6 janvier 2016, n° 15-86. 299), dans la procédure d'extradition suivie contre lui à la demande du gouvernement arménien, a émis un avis favorable ;

Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 3, 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, 12 et 13 de la Convention européenne d'extradition du

13 décembre 1957, préliminaire, 696-13, 591 et 593 du code de procédure pénale ;...

Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Hmayak Y...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, en date du 10 février 2016, qui sur renvoi après cassation (Crim., 6 janvier 2016, n° 15-86. 299), dans la procédure d'extradition suivie contre lui à la demande du gouvernement arménien, a émis un avis favorable ;

Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 3, 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, 12 et 13 de la Convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957, préliminaire, 696-13, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que la chambre de l'instruction, aux énonciations que « le président a interrogé l'intéressé qui a répondu aux diverses interpellations à lui adressées », a émis un avis favorable à l'extradition de M. Y... vers l'Arménie ;
" alors qu'en matière d'extradition, les débats devant la chambre de l'instruction s'ouvrent par un interrogatoire dont il est dressé procès-verbal ; qu'en l'espèce, la chambre de l'instruction, qui s'est abstenue de constater expressément qu'il avait été dressé procès-verbal de l'interrogatoire du demandeur, a méconnu les dispositions susvisées et, partant, a privé son arrêt des conditions essentielles de son existence légale " ;
Attendu qu'il résulte des mentions de l'arrêt et des pièces de la procédure que la chambre de l'instruction a procédé à l'interrogatoire de la personne réclamée dans les conditions prévues par l'article 696-13 du code de procédure pénale ;
Que le moyen, qui manque en fait, ne peut qu'être écarté ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 3, 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, 12 et 13 de la Convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957, préliminaire, 696-4, 7°, 696-8, 696-15, 695-30, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que la chambre de l'instruction a, sur renvoi après cassation, émis un avis favorable à l'extradition de M. Y... vers l'Arménie ;
" aux motifs que, sur la notification des pièces, contrairement à ce qui est soutenu les autorités judiciaires arméniennes, conformément à l'article 12 de la Convention européenne d'extradition, et aux dispositions de l'article 898-8 du code de procédure pénale, ont transmis les pièces aux autorités françaises en original et traduites en français, notamment le mandat d'arrêt, en date du 21 février 2014, et ce par la voie diplomatique ; que, sur les circonstances de l'infraction, les faits sont ainsi décrits par les autorités judiciaires requérantes ; que, dans le cadre de la réalisation des stupéfiants de grande quantité, M. Stepan
Z...
, fils d'Artavazd s'est préalablement entendu avec sa connaissance, M. Y..., habitant à Marseille (France) ; que, par la suite en début de l'an 2013 dans le quartier sud-ouest de la ville d'Erevan, proche de l'Eglise à Surb Erordutyun (Saint-Trinité) et d'après leur accord il a inégalement obtenu de ce dernier des stupéfiants : quatre cents comprimés de Subutex contenant une grande quantité de Buprenorphine envoyées de la France en Arménie dans des circonstances encore non clarifiées ; qu'ensuite, dans le but de la réalisation, durant la période de la mi-octobre au 26 décembre 2013 il s'est mis en accord avec M. Armen A...(fils d'Albert), son cousin du côté paternel, accusé de l'établissement pénitentiaire de Kosh, afin de réaliser deux cents comprimés de Subutex contenant une grande quantité de Buprénorphine et quatre-vingt-dix comprimés de Subutex contenant une grande quantité de Buprénorphine à des clients envoyés à travers M. Armen A...et à l'aide de Mme Zoya B...(fille de Seryozha), la mère de ce dernier ; que, le 26 décembre 2013 vers 10 heures 30, M. Stepan
Z...
a confié à M. Razmik C..., fils de Manvel, de garder trente comprimés de Subutex contenant une grande quantité de Buprénorphine et le soir, vers 20 heures, proche à son lieu de travail, au complexe d'hôtel Continental après avoir reçu les comprimés susmentionnées il a transmis les vingt comprimés contenant 0. 16 gr de Buprénorphine au mineur Hrachya D..., fils d'Arsen par la commande de M. Armen A...; que le reste, les dix comprimés contenant 0. 08 gr de Buprénorphine, Une l'a pas pu réalisera l'aide de Mme Zoya B...dans des circonstances indépendantes de sa volonté, car il a été arrêté par les policiers au département général de la lutte contre le crime organisé de la police de la République d'Arménie ; que pendant sa fouille corporelle on lui a confisqué dix comprimés des stupéfiants susmentionnés ; que, d'une part, il n'appartient pas à la chambre de l'instruction de caractériser les éléments constitutifs de l'infraction ; que, d'autre part, la description ci-dessus faite par les autorités judiciaires arméniennes des faits et des infractions reprochées est suffisamment précise ; que, sur le lieu de perpétration de l'infraction ; que les infractions retenues par les autorités judiciaires arméniennes sont " la commercialisation illégale ou de la préparation des drogues, des substances stupéfiantes et leurs précurseurs ou leur commercialisation illégale... et contrebande de drogues ; que cette commercialisation, à la supposer établie, a été effectuée en Arménie, et non en France ; qu'il en est de même du délit de contrebande retenu ; qu'en conséquence les dispositions de l'article 696-4 du code de procédure pénale ne sont pas applicables en l'espèce ; qu'au surplus, l'article 7 de la Convention européenne d'extradition, en date du 13 décembre 1957, qui régit les relations extraditionnelles entre la France et l'Arménie dispose que " la partie requise pourra refuser d'extrader l'individu à raison d'une infraction, qui selon sa législation a été commise en tout ou partie sur son territoire ou en un lieu assimilé à son territoire " ; qu'il ne s'agit donc que d'une simple faculté ; que ces faits ne font pas l'objet de poursuites en cours en France ; que, sur la violation affirmée de la convention européenne des droits de l'homme, d'une part, la production par la défense de quatre décisions de la Cour européenne, condamnant l'Arménie n'est pas significative, dans la mesure où deux d'entre elles concernent le droit à l'objection de conscience, et à une indemnisation en cas d'erreur judiciaire ; que les autres arrêts produits concernent d'autre pays tels que la Roumanie où le Royaume-Uni ; que, si ce dernier arrêt (2 mars 2010 affaire E...et F... contre Royaume-Uni) fait état indirectement de l'Arménie pour n'avoir pas ratifié le protocole n° 13 de la convention relatif à la peine de mort, il est indiqué que ce pays avait aboli de facto la peine de mort ; qu'en outre la peine encourue par M. Y... est une peine de prison ; que, d'autre part, s'agissant du résumé du rapport du " comité anti torture du conseil de l'Europe " s'il est fait état en avril 2013, de mauvais traitements physiques ou psychologiques, et usage excessif de la force par la polies, les mauvais traitements allégués pourraient être assimilés à de la torture, avec des lésions compatibles avec les allégations de mauvais traitements, ledit comité notait cependant en janvier 2015 qu'il reconnaissait les efforts déployés par les autorités arméniennes pour améliorer le système d'examen des cas de mauvais traitements potentiels infligés par la police et saluait la création d'un organe d'enquête indépendant, dit " service d'enquête spécial " ; que la production d'articles de journaux et, notamment, " les nouvelles d'Arménie magazine " relatifs à la corruption des juges arméniens, est sans lien avec l'article 3 ; que, cependant, la lecture de ce magazine sur internet révèle, le 27 janvier 2018, que l'Arménie dispose d'un défenseur des droits de l'homme élu par l'assemblée nationale d'Arménie ; qu'il résulte également des documents produits que les condamnations de l'Arménie par la Cour européenne n'apparaissent pas significatives, car peu nombreuses au regard des autres pays, certes plus peuplés, tels que la Turquie, la Russie, l'Ukraine, la Pologne, la Roumanie, la Grèce et la France ; qu'en outre il apparaît également que le recours à la maltraitance, voire à la torture concerneraient surtout des événements survenus en Arménie en mars 2008, soit, il y a presque sept ans, qu'il n'est ainsi nullement établi qu'en cas de remise aux autorités Arméniennes, M. Y... serait soumis à la torture ou à des peines, traitements inhumains ou dégradants ; qu'également par les pièces produites, le requérant n'établit pas qu'il sera jugé par un tribunal n'assurant pas tes garanties fondamentales de procédure et de protection des droits de la défense ; qu'en effet la seule production d'un article de journal faisant état de la corruption des juges Arméniens, apparaît très insuffisant pour établir cette affirmation ; que, sur l'état de santé de M. Hmavak Y...; que, contrairement à ce qui est soutenu, l'état de santé de l'appelant n'est pas tel, s'agissant d'un syndrome dépressif, avec trouble de la personnalité, suivi par le même médecin psychiatre depuis plusieurs années, sans aucune hospitalisation justifiée dans un établissement psychiatrique, qu'il ne puisse être soigné en Arménie, qu'il résulte d'un certificat médical, en date du 28 juillet 2015, que le requérant " présentait une pathologie bipolaire sur un versant dépressif mal équilibré avec risque de passage à l'acte et capable de vite décompenser ; qu'il nécessite un suivi médical régulier " ; qu'un dernier certificat médical, en date du 26 novembre 2015 relevait cependant qu'il " ne serait pas stabilisé complètement, malgré le traitement médicamenteux ", ce qui semble être une amélioration certaine de son état de santé, que les seuls documents produits par la défense, concernant les conditions de détention dans les prisons arméniennes concernent deux détenus condamnés à perpétuité, ce qui n'est pas le cas de M. Y..., d'un ancien ministre qui aurait été " battu " en prison en 2010, et d'un article de presse qu'il convient d'examiner avec circonspection ; qu'il n'est nullement établi que la remise de l'intéressé est susceptible d'entraîner des conséquences d'une gravité exceptionnelle, compte tenu de son état de santé ; que, sur l'atteinte alléguée à la vie privée et familiale, d'une part, si une décision d'extradition est susceptible de porter atteinte au respect de la vie familiale et privée au sens de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, cette atteinte trouve, en principe sa justification dans la nature même de la procédure d'extradition, qui est de permettre, dans l'intérêt de l'ordre public, et sous les conditions fixées par les conditions qui la régissent, tant le jugement hors de France de personnes qui sont poursuivies à l'étranger pour des crimes ou des délits eux-mêmes commis hors de France, que l'exécution, par tes mêmes personnes, des condamnations pénales prononcées contre elles à l'étranger pour de tels crimes ou délits ; que, d'autre part, M. Y... reconnaît à l'audience qu'il est en situation irrégulière sur le territoire national ; que, par conséquent, il ne peut travailler régulièrement ; qu'il en est de même de son épouse, également en situation irrégulière ; que la défense ne peut soutenir avec quelque pertinence, que cette dernière de par sa nationalité Ukrainienne ne pourrait s'installer en Arménie, pays certes lié à la fédération de Russie par un passé commun, mais désormais indépendant ; qu'ainsi le couple pourrait s'installer en Arménie avec leur jeune enfant commun ; qu'il importe peu que d'autres membres de la famille résident en France ; qu'en conséquence, l'extradition n'est pas de nature à porter une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; qu'il n'est pas allégué que les infractions visées présentent un caractère politique ; qu'il n'apparaît pas que la demande d'extradition, motivée pour des infractions de droit commun, ait été présentée aux fins de poursuivre l'intéressé pour des considérations de race, de religion, de nationalité ou d'opinions politiques ou que sa situation risque d'être aggravée pour l'une ou l'autre de ces raisons ; que les faits visés constituent des infractions punies par la loi française et sont sanctionnés par des peines dont la durée correspond aux dispositions de l'article 696-3 du code de procédure pénale et à la condition de taux fixé par l'article 2, § 1, de l'annexe portant les réserves de la France lors de la ratification de la Convention Européenne d'extradition ; que la prescription de l'action publique n'est pas acquise d'après les législations, soit de la partie requérante, soit de la partie requise ; que les infractions reprochées ne sont pas amnistiées tant dans l'état requis que dans l'état requérant ; que M. Y... a reconnu être la personne désignée dans les pièces de justice jointes à la demande d'extradition et a déclaré ne pas consentir à son extradition et ne pas renoncer à la règle de la spécialité ; que les conditions légales de l'extradition étant remplies et l'avis prévu à l'article 696-14 du code de procédure pénale ayant été donné à l'extradable par le président de la chambre de l'instruction, il convient donc de donner acte à M. Y... de ses déclarations et d'émettre un avis favorable à la demande d'extradition ;
" 1°) alors que l'extradition n'est pas accordée lorsque les crimes ou délits ont été commis sur le territoire de la République ; que, dès lors, a privé son arrêt des conditions essentielles de son existence légale, la chambre de l'instruction qui constatait que les infractions retenues sont la commercialisation illégale ou la préparation des drogues et que cette commercialisation a été effectuée en Arménie sans répondre au chef péremptoire du mémoire qui soulignait que le demandeur n'avait jamais quitté la France au moment des faits qui lui étaient reprochés ;
" 2°) alors que l'extradition n'est pas accordée lorsque la personne réclamée serait jugée dans l'Etat requérant par un tribunal n'assurant pas les garanties fondamentales de procédure et de protection des droits de la défense ; qu'en l'espèce, la chambre de l'instruction ne pouvait, sans priver son arrêt des conditions essentielles de son existence légale, se borner à dire non transposables à l'espèce les documents produits par la défense sans rechercher, concrètement au regard des faits prétendument commis par le demandeur et de sa situation propre, s'il pouvait bénéficier, dans les faits, des garanties fondamentales de procédure et de la protection des droits de la défense ;
" 3°) alors que l'interdiction des traitements inhumains s'oppose à l'extradition d'une personne souffrant de troubles mentaux ; que, dès lors, a privé son arrêt des conditions essentielles de son existence légale la chambre de l'instruction qui s'est bornée à énoncer, de manière péremptoire, que le dernier certificat médical indiquant que l'état de santé du demandeur n'était pas stabilisé marquait une « amélioration certaine de son état de santé » (sic) sans rechercher, au regard de l'ensemble des pièces produites révélant un syndrome dépressif lourd et de la situation concrète des centres de détention en Arménie, si l'extradition de M. Y... vers ce pays serait compatible avec son état de santé ;
" " 3°) alors que toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, les ingérences dans l'exercice de ce droit devant être proportionnées au but recherché ; qu'en l'espèce, a privé son arrêt des conditions essentielles de son existence légale, la chambre de l'instruction, qui s'est contentée de relever la situation irrégulière du demandeur et de son épouse sur le territoire français et leur possibilité d'installation en Arménie, sans examiner la situation du demandeur au regard de la demande d'asile politique déposée en France par son épouse de nationalité ukrainienne et de sa qualité de père d'un jeune enfant né en France " ;
Attendu qu'en prononçant par les motifs repris au moyen, d'où il résulte que la chambre de l'instruction a répondu aux arguments péremptoires du mémoire, l'arrêt satisfait, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale, sans méconnaître les dispositions conventionnelles invoquées ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt, a été rendu par une chambre de l'instruction compétente et composée conformément à la loi, et que la procédure est régulière ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Bellenger, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 16-81163
Date de la décision : 03/05/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 10 février 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 03 mai. 2016, pourvoi n°16-81163


Composition du Tribunal
Président : M. Guérin (président)
Avocat(s) : SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:16.81163
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