La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/04/2016 | FRANCE | N°14-12965

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 14 avril 2016, 14-12965


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur les demandes de mise hors de cause :
Dit n'y avoir lieu à mettre hors de cause les sociétés Adecco, Adecco venant aux droits de la société Adia, et la société Interaction ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que MM. X... et Y...ont été recrutés par les entreprises de travail temporaire Adecco et Adia, ainsi, pour le second nommé, que par l'entreprise de travail temporaire Interaction, qui leur ont confié des missions pour intervenir en qualité d'agent de production au sein de la société Visteon syst

èmes intérieurs (activité de fabrication d'équipements pour l'automobile) ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur les demandes de mise hors de cause :
Dit n'y avoir lieu à mettre hors de cause les sociétés Adecco, Adecco venant aux droits de la société Adia, et la société Interaction ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que MM. X... et Y...ont été recrutés par les entreprises de travail temporaire Adecco et Adia, ainsi, pour le second nommé, que par l'entreprise de travail temporaire Interaction, qui leur ont confié des missions pour intervenir en qualité d'agent de production au sein de la société Visteon systèmes intérieurs (activité de fabrication d'équipements pour l'automobile) ; que M. X... a effectué, à partir du 21 avril 2008, vingt-quatre missions de travail temporaire proposées par ces agences, et M. Y...trente-quatre missions à partir du 3 mars 2008, le motif du recours à leurs services étant le plus souvent un accroissement temporaire d'activité ; qu'aucune mission ne leur étant plus donnée, respectivement à compter du 30 août 2010 et du 30 juillet 2010, ils ont chacun saisi la juridiction prud'homale pour obtenir la requalification de l'ensemble des contrats de travail temporaire en un seul contrat conclu au profit de la société Visteon systèmes intérieurs, et obtenir diverses indemnités, faisant appeler en la cause les sociétés de travail temporaire ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Visteon systèmes intérieurs fait grief à l'arrêt d'ordonner la requalification des contrats de missions en contrat à durée indéterminée et de la condamner à payer à chacun des salariés diverses sommes à titre de rappel de salaire, d'indemnité de congés payés sur le rappel de salaire, d'indemnité de requalification, de dire que la rupture des relations contractuelles s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et sans respect de la procédure, de la condamner à verser à chacun des salariés diverses sommes au titre de la rupture, et de lui ordonner le remboursement à Pôle emploi des allocations perçues par les salariés dans la limite de six mois alors, selon le moyen :
1°/ qu'en application de l'article L. 1251-5 du code du travail, l'entreprise utilisatrice ne peut recourir au travail temporaire pour pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise et faire face à un besoin structurel de main-d'oeuvre ; qu'il en résulte que l'employeur peut avoir recours au travail temporaire pour des tâches qui, bien que liées à l'activité normale et permanente de l'entreprise, présentent un caractère imprévisible et temporaire, de sorte qu'elles ne traduisent pas un besoin structurel de main d'oeuvre ; qu'en se bornant à relever « qu'en réalité, il apparaît que les contrats ont été majoritairement conclus pour pourvoir à l'activité normale et permanente de l'entreprise qui est la fabrication d'équipements intérieurs pour l'industrie automobile, l'examen des pièces produites démontrant aussi que les salariés concernés par le présent litige ont toujours accompli une tâche de production en qualité d'ouvriers opérateurs », sans rechercher si les contrats de mission n'avaient pas été conclus en vue de la réalisation de tâches présentant un caractère temporaire et imprévisible, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard de l'article L. 1251-5 du code du travail ;
2°/ que l'accroissement temporaire d'activité visé par l'article L. 1251-6 du code du travail peut résulter d'une surcharge non exceptionnelle de l'activité habituellement exercée dans l'entreprise, à condition que cette surcharge soit limitée dans le temps et que sa survenance ne soit pas précisément déterminable à l'avance ; qu'en constatant que la société VSI, qui ne s'était pas bornée à invoquer l'existence d'un accroissement temporaire d'activité, avait spécifié, pour chacune des missions, les évènements imprévisibles justifiant le recours au travail temporaire et leur caractère limité dans le temps, et en retenant néanmoins que l'employeur ne justifiait pas que de surcroîts d'activité l'autorisant à recourir aux contrats de mission, la cour d'appel a violé l'article L. 1251-6 du code du travail ;
Mais attendu qu'il appartient à l'employeur de rapporter la preuve d'un accroissement temporaire de l'activité justifiant le recours au travail temporaire ; que la possibilité donnée à l'entreprise utilisatrice de recourir à des missions successives avec le même salarié, soit pour remplacer un ou des salariés absents ou dont le contrat de travail est suspendu, soit pour faire face à un accroissement temporaire de son activité, ne peut avoir pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à son activité normale et permanente ;
Et attendu qu'appréciant la valeur et la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis sans être tenue de s'expliquer sur ceux qu'elle décidait d'écarter, la cour d'appel a constaté que les motifs invoqués par l'entreprise utilisatrice au titre d'un accroissement temporaire d'activité étaient soit vagues, soit, lorsqu'ils étaient précis, non justifiés, et que les salariés ont toujours accompli une tâche de production en qualité d'ouvriers opérateurs, ce dont il résultait qu'il avait été recouru au travail temporaire pour faire face à un besoin structurel de main d'oeuvre et que les emplois qu'occupaient les salariés étaient liés durablement à l'activité normale et permanente de l'entreprise ; qu'elle a, par ces motifs, légalement justifié sa décision ;
Sur le second moyen, pris en ses deux premières branches :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen ci-après annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le second moyen, pris en sa troisième branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour condamner, par confirmation du jugement, la société Visteon systèmes intérieurs à verser à chacun des salariés, à titre de rappel de salaire et d'indemnité de congés payés sur rappel de salaire, des sommes calculées en incluant les primes d'habillage et de panier, l'arrêt retient que l'employeur conteste les montants de rappels de salaire et de congés payés afférents, accordés aux salariés en soutenant que d'une part rien dans le jugement ne lui permet de connaître à quoi correspondent ces salaires ou le mode de calcul adopté par le conseil, et d'autre part que les salariés n'établissent pas avoir été à sa disposition pendant les périodes d'intermission, que les salariés ne travaillaient que cinq jours par semaine et ne pourraient donc être rémunérés que pour les jours ouvrés où ils n'ont pas travaillé ; que les salariés répliquent que pendant toute la durée de la relation de travail, ils n'ont pu, étant à la disposition permanente de l'entreprise utilisatrice, travailler pour aucune autre société puisqu'ils ne connaissaient les dates des missions qu'au fur et à mesure qu'ils les effectuaient ; que tant le rythme des contrats conclus que les certificats de travail établis par les agences de travail temporaires démontrent que les salariés ont été à la disposition permanente de l'employeur, notamment parce que les contrats comportaient les mentions « terme précis avancé * ou reporté* », que donc le calcul du conseil basé sur un salaire mensuel de 1 501, 48 euros doit être confirmé ;
Qu'en statuant ainsi sans répondre aux conclusions de la société Visteon systèmes intérieurs qui soutenait que les primes d'habillage et de panier ne pouvaient être incluses dans la base de calcul des rappels de salaire compte tenu des conditions particulières auxquelles était subordonné le versement de ces primes, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Visteon systèmes intérieurs à payer à chacun des salariés des sommes à titre de rappel de salaire et d'indemnité de congés payés sur rappel de salaire dont la base de calcul inclut les primes d'habillage et de panier, l'arrêt rendu le 22 janvier 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze avril deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Lévis, avocat aux Conseils, pour la société Visteon systèmes intérieurs.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR dit que la société VSI avait recouru illicitement au travail temporaire, ordonné la requalification des contrats de missions en contrat à durée indéterminée et, par conséquent, condamné la société VSI à verser à titre de rappel de salaire, les sommes de 9. 999, 51 euros à M. X... et 10. 748, 47 euros à M.
Y...
, au titre de l'indemnité de congés payés sur le rappel de salaire, les sommes de 999, 95 euros à M. X... et 1. 074, 85 euros à M.
Y...
, au titre de l'indemnité de requalification, la somme de 1. 501, 48 à chacun des salariés et d'AVOIR, en conséquence, dit que la rupture des relations contractuelles s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et sans respect de la procédure et, par conséquent, condamné la société VSI à verser au titre de l'indemnité de préavis, la somme de 3. 002, 96 euros à chacun des salariés, au titre de l'indemnité de congés payés sur l'indemnité de préavis, la somme de 300, 30 euros à chacun, au titre de l'indemnité légale de licenciement, les sommes de 675, 67 euros à M. X... et 726, 63 euros à M.
Y...
, à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, les sommes de 10. 971, 75 euros à M. X... et 11. 445, 49 euros à M.
Y...
, et d'AVOIR ordonné à la société VSI le remboursement à Pôle emploi des allocations perçues par les salariés dans la limite de six mois ;
AUX MOTIFS QUE le conseil de prud'hommes après avoir analysé de façon détaillée les contrats de travail conclus par chacun des salariés a retenu que si, à quelques exceptions près, notamment pour M.
Y...
, qui avait parfois été amené à remplacer des travailleurs absents, ils avaient été pour la plupart conclus pour des motifs d'accroissement d'activité liés aux évènements suivants : pour M. X..., passage A 500 véhicules X7, augmentation du stock sécurité A 1200 BPD, constitution du stock sécurité suite à la panne carrousel et semaine 10 et 11, augmentation des volumes sur le DAD, réajustement des stocks externes, passage du stock à jour réel chez le stockiste, augmentation du stock sécu, stock mini A 1800 PDB ; et pour Monsieur
Y...
, création stock BDO cuir pour polydesign, augmentation des volumes chez PSA, passage à 500 véhicules X7, passage du stock sécurité à trois jours, passage du stock sécurité à 1200 véhicules, action conservatoire mise en place suite des mérites semaine 12, action conservatoire mise en place à la demande de PSA, remise à niveau du stock externe, augmentation de stocks sécu, action conservatoire mise en place suite à des rebuts assemblage, le multi sourcing des gaineurs ; que si le recours à des contrats à durée déterminée ou de mission a pu être admis dans l'industrie automobile comme le soutient l'appelante, c'est toujours en lien avec une augmentation spécifique de production liée à un événement particulier, les commandes, plus ou moins fluctuantes des constructeurs ne pouvant avoir d'incidence sur le fonctionnement permanent de l'entreprise et lui permettre d'avoir un salariat directement dépendant de ces commandes, d'autant que, comme l'appelante le fait observer dans ses conclusions, elle a des marchés négociés ou renégociés avec les constructeurs sur un nombre minimum de pièces à produire ; que de même, certains évènements, s'ils peuvent diminuer le nombre de commandes, comme par exemple les évènements survenus au Japon en 2011, le tremblement de terre et raz de marée, qui ont ralenti la production de la société Peugeot, ne peuvent être réglés par des recours au travail temporaire, qui n'est au contraire possible que pour des surcoûts d'activité, d'autres mécanismes existants pour de tels cas ; que donc et pour pouvoir recourir valablement au travail temporaire et intérimaire, l'employeur doit, contrat par contrat, caractériser le motif précis du recours au travail temporaire et en justifier ; que tel n'est pas le cas en l'espèce puisque, le plus souvent sont invoqués des motifs vagues, comme la reconstitution de stocks, et que quand un motif plus précis est invoqué, la société VSI n'en justifie pas, comme l'a retenu le conseil ; qu'ainsi quand elle invoque pour M. X... un accroissement d'activité temporaire lié à la reprise de planches refusées par PSA, ou pour M.
Y...
, un accroissement d'activité lié à la reprise du stock suite au problème de façade passager, elle ne produit aucun élément justificatif ; que si elle invoque, par contre, principalement dans ses écritures des diminutions de commandes pour justifier, non pas le recours à un contrat spécifique, mais le principe même d'un fonctionnement basé essentiellement sur du personnel temporaire et donc plus souple, les salariés rappellent à juste titre, que le code du travail n'admet pas, en dehors la notion de contrat d'usage qui n'est pas applicable en l'espèce puisque strictement limitée par l'article D. 1251-1 du code du travail, un tel motif de recours au travail temporaire ; qu'en réalité, il apparaît que les contrats ont été majoritairement conclus pour pourvoir à l'activité normale et permanente de l'entreprise qui est la fabrication d'équipements intérieurs pour l'industrie automobile, l'examen des pièces produites démontrant aussi que les salariés concernés par le présent litige ont toujours accompli une tâche de production en qualité d'ouvriers opérateurs ; que dès lors le jugement sera confirmé en ce qu'il a considéré qu'il y avait lieu à requalification des multiples contrats des deux salariés en un seul contrat à durée indéterminée pour chacun d'eux, même s'ils ont pu occasionnellement être embauchés pour remplacer des salariés absents, puisque ces embauches se sont insérées entre des contrats irrégulièrement conclus pour accroissement d'activité ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE sur les motifs de recours, tout au long de leurs multiples missions à l'usine VISTEON SYSTEMES INTERIEURS, Messieurs X... et Y..., malgré les variétés de situations invoquées sur leurs contrats de mission, affirment avoir occupé toujours le même poste dans l'usine et effectué les mêmes tâches ; que pour sa part, la société VISTEON SYSTEMES INTERIEURS affirme que son activité est soumise à des variations cycliques de production liées à des événements non prévisibles comme la sortie d'un nouveau véhicule, l'arrêt de la fabrication d'un autre, les difficultés économiques d'un fournisseur, l'augmentation de rebuts, la nécessité de prendre des pièces dans un stock, la crise économique... ; que sauf à affirmer qu'il suffit qu'un motif d'accroissement temporaire d'activité soit inscrit au contrat de travail pour en justifier, la société VISTEON SYSTEMES INTERIEURS ne produit aucun élément à l'appui de ses explications, pas plus qu'elle ne démontre le caractère temporaire des événements invoqués sur les contrats ; que l'existence d'un accroissement temporaire d'activité doit être justifiée par des faits objectifs, réels et vérifiables ; qu'à aucun moment la société VISTEON SYSTEMS INTERIEUR ne donne d'explication sur la signification exacte des motifs invoqués, ce qui les rend invérifiables ; que le tableau (pièce 4) fourni par la société VISTEON SYSTEMS INTERIEURS n'amène aucune réponse et ne repose sur aucun élément de preuve ; qu'en conséquence, l'accroissement temporaire d'activité au titre duquel Messieurs X... et Y... ont été mis à disposition de la société VISTEON SYSTEMS INTERIEURS n'est pas justifié ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE, sur la licéité du recours aux contrats de mission, pour l'année 2008, 47 opérateurs ou agents de production ont été engagés en contrat à durée indéterminée ; que seuls 20 d'entre eux seraient encore en poste, selon le registre unique du personnel ; qu'en 2009, sur les 20 entrées comptabilisées, on note 6 stagiaires, 7 contrats de professionnalisation, 4 apprentis, 1 ingénieur, 1 secrétaire en contrat à durée déterminée et 1 seul contrat à durée indéterminée : un directeur de site ; qu'à la fin 2010, le nombre de sorties est de 386 ; que l'effectif de salariés permanents serait d'environ 250 personnes ; que s'agissant des catégories d'ouvriers des mêmes qualifications que Messieurs X... et Y..., pour l'année 2003, 146 personnes ont été engagées dont 69 ouvriers ; que pour ces 69 ouvriers, 2 sont sortis en 2003, 4 en 2004, 5 en 2005, 6 en 2006, 3 en 2007 et en 2008, 8 en 2009, 4 en 2010 et 3 en 2011, soit 38 départs des 69 engagés en 2003 ; qu'il en resterait 31 actuellement, qu'en 2006, 2009 et 2010, aucun opérateur n'a été engagé ; que le registre unique du personnel fait apparaître un plan de sauvegarde de l'emploi en septembre 2009, un plan de départs volontaires en décembre 2010 et février 2011 ; qu'on verra que ces plans successifs n'ont pas eu pour effet de limiter les volumes de travailleurs temporaires ; qu'au contraire, les fins de contrats à durée déterminée montrent que toutes les formes d'emplois précaires ont été utilisées ; que de 2008 à 2010, Messieurs X... et Y... n'étaient pas les seuls intérimaires employées à l'usine VISTEON SYSTEMES INTERIEUR ; que la société INTERACTION n'a pas jugé utile de fournir au Conseil un registre unique du personnel conforme à ses attentes ; qu'en effet, ce document donne les entrées sur 4 mois d'activité non consécutifs ; que les informations fournies n'intègrent même pas tous les contrats de M. Y... conclus entre mars 2008 et mars 2009 ; que les précisions fournies par les sociétés INTERACTION, ADECCO et ADIA démontrent, comparé avec la situation de l'emploi que le Conseil a pu reconstituer, qu'à mesure que le recrutement de salariés permanents de production se réduisait jusqu'à attendre le niveau zéro, le recours au travail temporaire explosait ; que l'absence de recrutement, totale dans le cas VISTEON SYSTEMS INTERIEUR, de personnel de production indique " l'institutionnalisation " d'un système basé sur le recours massif et quasi exclusif du travail temporaire ; que l'activité normale et permanente de la société VISTEON SYSTEMS INTERIEUR est, par nature, fluctuante selon les besoins de ses clients ; que la société VISTEON SYSTEMS INTERIEUR ne peut se prévaloir d'un accord tacite des autorités de contrôle du travail exprimé par leur silence pour justifier le système mis en place pas plus qu'elle ne saurait invoquer les obligations qui incombent à un sous-traitant vis-à-vis d'un donneur d'ordre, quand bien même il s'agit du groupe PSA ou RENAULT ; que la société VISTEON SYSTEMS INTERIEUR a recouru illicitement au travail temporaire en pourvoyant durablement les emplois de production liés à son activité normale et permanente ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE, sur les demandes de requalification, la société VISTEON SYSTEMS INTERIEUR a violé les dispositions de l'article L. 1251-5 du code du travail sur le principe du recours au contrat de travail temporaire et celles de l'article L. 1251-6 sur le cas de recours d'accroissement temporaire d'activité pour en faire un système organisé de production ; que Messieurs X... et Y... sont donc fondés à demander la requalification de leurs contrats ; que la succession de ces contrats a entraîné, uniquement au regard des seuls besoins de la société VISTEON SYSTEMS INTERIEUR, des périodes d'interruption de l'activité des salariés qui ne dépendaient pas de leur volonté mais de celle de l'utilisatrice ; que, tant M. X... que M. Y..., ne connaissaient leurs dates de début de mission qu'au fur et à mesure qu'ils les effectuaient, tout comme leur fin de mission, puisque, outre l'application du délai de souplesse prévu par l'article L. 1251-30 du code du travail, les dates de prorogations de contrats attestent de l'incertitude dans laquelle ils se trouvaient à la fin de chaque mission ; qu'ils devaient donc se tenir à la disposition de la société utilisatrice ; que dans ces conditions, il leur était impossible de s'engager, pendant les périodes d'inactivité imposées par la société VISTEON SYSTEMS INTERIEUR, auprès d'un autre employeur ; que le décompte des rappels de salaire est, contrairement aux allégations de la société VISTEON SYSTEMS INTERIEUR, parfaitement justifié à partir des bulletins de salaire établis par les entreprises de travail temporaire ; que les demandes à hauteur de 9999, 51 euros pour M. X... et de 10748, 47 euros pour M. Y... sont donc parfaitement fondées ; que le Conseil a ordonné la requalification des contrats de travail temporaire en un contrat de travail à durée indéterminée ; que cela a pour conséquence que la cessation de l'emploi s'analyse en un licenciement sans cause réelle ni sérieuse et sans que la procédure ait été respectée ;
1/ ALORS, d'une part, QU'en application de l'article L. 1251-5 du code du travail, l'entreprise utilisatrice ne peut recourir au travail temporaire pour pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise et faire face à un besoin structurel de main-d'oeuvre ; qu'il en résulte que l'employeur peut avoir recours au travail temporaire pour des tâches qui, bien que liées à l'activité normale et permanente de l'entreprise, présentent un caractère imprévisible et temporaire, de sorte qu'elles ne traduisent pas un besoin structurel de main d'oeuvre ; qu'en se bornant à relever « qu'en réalité, il apparaît que les contrats ont été majoritairement conclus pour pourvoir à l'activité normale et permanente de l'entreprise qui est la fabrication d'équipements intérieurs pour l'industrie automobile, l'examen des pièces produites démontrant aussi que les salariés concernés par le présent litige ont toujours accompli une tâche de production en qualité d'ouvriers opérateurs », sans rechercher si les contrats de mission n'avaient pas été conclus en vue de la réalisation de tâches présentant un caractère temporaire et imprévisible, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard de l'article L. 1251-5 du code du travail ;
2/ ALORS, d'autre part, QUE l'accroissement temporaire d'activité visé par l'article L. 1251-6 du code du travail peut résulter d'une surcharge non exceptionnelle de l'activité habituellement exercée dans l'entreprise, à condition que cette surcharge soit limitée dans le temps et que sa survenance ne soit pas précisément déterminable à l'avance ; qu'en constatant que la société VSI, qui ne s'était pas bornée à invoquer l'existence d'un accroissement temporaire d'activité, avait spécifié, pour chacune des missions, les évènements imprévisibles justifiant le recours au travail temporaire et leur caractère limité dans le temps, et en retenant néanmoins que l'employeur ne justifiait pas que de surcroîts d'activité l'autorisant à recourir aux contrats de mission, la cour d'appel a violé l'article L. 1251-6 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société VSI à verser, à titre de rappel de salaire, les sommes de 9. 999, 51 euros à M. X... et 10. 748, 47 euros à M.
Y...
et au titre de l'indemnité de congés payés sur rappel de salaire, les sommes de 999, 95 euros à M. X... et 1. 074, 85 euros à M.
Y...
;
AUX MOTIFS QUE tant le rythme des contrats conclus que les certificats de travail établis par les agences de travail temporaires, agences qui ont manifestement changé en fonction de la volonté de la société appelante de recourir ou non à l'une d'elles, démontrent que les salariés ont été à la disposition permanente de l'employeur, notamment parce que les contrats comportaient les mentions « terme précis avancé* ou reporté* » ; que donc le calcul du conseil basé sur un salaire mensuel de 1. 501, 48 euros doit être confirmé ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE le conseil a jugé que les contrats de mission de Messieurs X... et Y... devaient être requalifiés en un contrat de travail à durée indéterminée ; que la succession de ces contrats a entraîné, uniquement au regard des seuls besoins de la société VISTEON SYSTEMS INTERIEUR, des périodes d'interruption de l'activité des salariés qui ne dépendaient pas de leur volonté mais de celle de l'utilisatrice ; qu'il ressort des calendriers de travail que les périodes d'inemploi des demandeurs étaient uniquement contingentées par l'utilisatrice ; que cette dernière ne saurait se prévaloir du respect de la règle du délai de carence qui serait bien la seule prescription de la législation sur le travail temporaire qu'elle appliquerait ; qu'en effet, les périodes non travaillées ne correspondent absolument pas à ce qu'aurait du être le respect de ces délais ; que d'autre part, il ressort des observations du conseil que, tant M. X... que M. Y..., ne connaissaient leurs dates de début de mission qu'au fur et à mesure qu'ils les effectuaient, tout comme leur fin de mission, puisque, outre l'application du délai de souplesse prévu par l'article L. 1251-30 du code du travail, les dates de prorogations de contrats attestent de l'incertitude dans laquelle ils se trouvaient à la fin de chaque mission ; qu'ils devaient donc se tenir à la disposition de la société utilisatrice ; que dans ces conditions, il leur était impossible de s'engager, pendant les périodes d'inactivité imposées par la société VISTEON SYSTEMS INTERIEUR, auprès d'un autre employeur ; que vérification faite par le conseil, le décompte des rappels de salaire est, contrairement aux allégations de la société VISTEON SYSTEMS INTERIEUR, parfaitement justifié à partir des bulletins de salaire établis par les entreprises de travail temporaire ; que les demandes à hauteur de 9999, 51 euros pour M. X... et de 10748, 47 euros pour M. Y... sont donc parfaitement fondées ; que Messieurs X... et Y... ont droit à une indemnité de congés payés sur leur rappel de salaire ;
1/ ALORS, en premier lieu, QUE le travailleur temporaire engagé par plusieurs contrats de mission et dont le contrat est requalifié en contrat à durée indéterminée le liant à l'entreprise utilisatrice ne peut prétendre à un rappel de salaire au titre des périodes non travaillées entre plusieurs missions que s'il s'est tenu à la disposition de l'entreprise pendant ces périodes pour effectuer un travail ; qu'en affirmant péremptoirement qu'il était impossible pour MM. X... et Y... de s'engager, pendant les périodes d'inactivité, auprès d'un autre employeur, sans rechercher si, dans les faits, les salariés avaient été au service d'autres employeurs pendant les périodes non travaillées, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil ;
2/ ALORS, en deuxième lieu, QU'en statuant comme elle l'a fait, par des motifs inopérants tirés de la communication tardive des dates de début et de fin de mission, sans rechercher si, dans les faits, les salariés avaient été au service d'autres employeurs pendant les périodes non travaillées, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil ;
3/ ALORS, subsidiairement, QU'en ne répondant pas aux conclusions de l'employeur faisant valoir que les primes d'habillage et de panier ne pouvaient être intégrées dans la base de calcul des rappels de salaire dès lors qu'elles étaient versées en contrepartie d'un temps effectif d'habillage ou pour indemniser les sujétions particulières auxquelles sont soumis certains salariés, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4/ ALORS, en toute hypothèse, QU'en retenant que les rappels de salaire devaient être calculés sur la base d'un montant comprenant les primes d'habillage et de panier, sans rechercher les conditions auxquelles le versement de ces primes était soumis, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-12965
Date de la décision : 14/04/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 22 janvier 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 14 avr. 2016, pourvoi n°14-12965


Composition du Tribunal
Président : M. Ludet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boutet-Hourdeaux, SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Marc Lévis, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.12965
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award