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05/04/2016 | FRANCE | N°14-19621

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 05 avril 2016, 14-19621


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que les 27 août et 13 décembre 2000, Mme X... (la caution) s'est rendue caution solidaire envers la société Banque populaire de Bourgogne Franche-Comté (la banque) des engagements souscrits par M. Y... ; que ce dernier ayant été mis en redressement puis liquidation judiciaires les 7 avril 2003 et 18 novembre 2004, la banque a déclaré ses créances, puis a assigné la caution en paiement ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la caution fait grief à l'arrêt de reje

ter sa demande d'annulation du cautionnement du 13 décembre 2000 alors, sel...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que les 27 août et 13 décembre 2000, Mme X... (la caution) s'est rendue caution solidaire envers la société Banque populaire de Bourgogne Franche-Comté (la banque) des engagements souscrits par M. Y... ; que ce dernier ayant été mis en redressement puis liquidation judiciaires les 7 avril 2003 et 18 novembre 2004, la banque a déclaré ses créances, puis a assigné la caution en paiement ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la caution fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande d'annulation du cautionnement du 13 décembre 2000 alors, selon le moyen, que le juge doit, en toutes circonstances, faire respecter et respecter lui-même le principe de la contradiction ; que dès lors, en soulevant d'office le moyen selon lequel elle n'était pas saisie de la demande en nullité de la caution du second cautionnement, faute d'avoir été exposée par cette dernière dans le dispositif de ses conclusions d'appel, sans avoir, au préalable, invité les parties à présenter leurs observations sur ce point, la cour d'appel a violé les articles 16 du code de procédure civile et 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu que c'est à bon droit que, tenue, en application des dispositions de l'article 954, alinéa 2, du code de procédure civile, de statuer sur les seules prétentions énoncées au dispositif des conclusions, la cour d'appel a décidé, sans avoir à inviter les parties à s'en expliquer, qu'elle n'était pas saisie d'une demande d'annulation du cautionnement litigieux ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le deuxième moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 1147 du code civil ;
Attendu que pour rejeter la demande de Mme X... de dommages-intérêts pour manquement, par la banque, à son devoir de mise en garde, l'arrêt retient que son statut de commerçante lui confère la qualité de caution avertie ;
Qu'en se déterminant par de tels motifs, impropres à établir que la caution était avertie, ce qu'elle ne pouvait déduire de sa seule qualité de commerçante, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
Et sur le troisième moyen :
Vu l'article L. 313-22 du code monétaire et financier ;
Attendu que pour rejeter partiellement la demande de Mme X... de déchéance des intérêts échus, l'arrêt retient qu'aucune circonstance ne permettant de douter de l'envoi effectif de l'information annuelle délivrée par la banque à la caution, il y a lieu de considérer que la banque a satisfait à son obligation d'information au titre des années 2000 à 2003 ;
Qu'en se déterminant par de tels motifs, impropres à justifier de l'accomplissement des formalités prévues par le texte susvisé, dès lors que la seule production de la copie d'une lettre ne suffit pas à justifier de son envoi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 avril 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Besançon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon ;
Condamne la société Banque populaire de Bourgogne Franche-Comté aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq avril deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils, pour Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Mme Annick X... fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement l'ayant déboutée de sa demande tendant à voir déclarer nul le cautionnement en date du 13 décembre 2000 ;
AUX MOTIFS QUE force est de constater que Mme Annick X..., qui développe à nouveau dans les motifs de ses écritures, le moyen, écarté par le premier juge, tiré de la nullité de l'acte de cautionnement daté du 13 décembre 2000 en ce que celui-ci, antidaté, aurait été signé avant la conclusion du contrat principal de prêt, ne conclut pas en ce sens dans son dispositif, dans lequel elle se limite à réitérer sa demande en paiement de dommages et intérêts sur le fondement de la responsabilité encourue par la banque pour manquement à son devoir de mise en garde ; que la cour n'est pas saisie d'une demande en nullité du second cautionnement ;
ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire respecter et respecter lui-même le principe de la contradiction ; que dès lors, en soulevant d'office le moyen selon lequel elle n'était pas saisie de la demande en nullité de Mme X... du second cautionnement, faute d'avoir été exposée par cette dernière dans le dispositif de ses conclusions d'appel, sans avoir, au préalable, invité les parties à présenter leurs observations sur ce point, la cour d'appel a violé les articles 16 du code de procédure civile et 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Mme Annick X... fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement l'ayant déboutée de sa demande tendant à voir dire que la banque populaire de Bourgogne et de Franche-Comté avait commis une faute en ne déférant pas à son obligation d'information et de conseil à son égard et à la condamner à lui verser la somme globale de 27.000 euros à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE Mme Annick X..., commerçante, s'est portée caution solidaire de M. François Y... lui-même commerçant en chaussures à Langres, d'abord à hauteur de 175.000FF pour tous engagements du débiteur principal envers la banque alors dénommée Banque populaire de Franche-Comté, du Maçonnais et de l'Ain, selon acte du 27 août 2000, ensuite à hauteur de 120.000FF au titre d'un prêt d'équipement de 100.000FF consenti le 13 décembre 2000 par le même établissement ; que le débiteur principal a été déclaré en redressement judiciaire par jugement du 7 avril 2003, puis en liquidation judiciaire par jugement du 18 novembre 2004, et que la créance de la banque a été admise par ordonnance du 11 avril 2007 ; que le statut de commerçante de Mme Annick X... lui confère la qualité de caution avertie, sauf à ce que celle-ci démontre – ce qu'elle ne fait pas – qu'en réalité elle n'exerçait pas une activité commerciale ou qu'elle aurait encore manqué d'expérience et/ou de formation dans ce domaine ; que dans ces conditions, la banque n'était pas tenue à son égard d'un devoir de mise en garde quelconque, sauf à ce que la caution avertie démontre que cet établissement détenait, sur ses facultés contributives et les chances de succès de l'opération cautionnée, des renseignements dont elle-même ne disposait pas ; qu'en exigeant de la BPFPC que celle-ci établisse avoir étudié la faisabilité du projet de M. François Y... pour lui communiquer ces informations avant de recueillir son engagement de caution, Mme Annick X... renverse la charge de la preuve ; qu'il n'est au demeurant pas sans intérêt de noter que, selon la BPBFC qui n'a pas été démentie sur ce point, Mme Annick X... a elle-même apporté 125.000 FF pour l'achat du fonds de commerce exploité par M. François Y... ;
1°) ALORS QUE la seule circonstance que la caution ait la qualité de commerçant est impropre à établir qu'elle est avertie ; que dès lors, en énonçant, pour dire que la banque n'était tenue à l'égard de Mme X... d'aucun devoir de mise en garde et débouter cette dernière de sa demande de dommages et intérêts, que son statut de commerçante lui conférait la qualité de caution avertie, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;
2°) ALORS QU'il appartient au créancier d'établir que la caution peut être considérée comme avertie et qu'il n'est tenu à son égard d'aucun devoir de mise en garde ; qu'en retenant, pour dire que la banque n'était tenue à l'égard de Mme X... d'aucun devoir de mise en garde et débouter cette dernière de sa demande de dommages et intérêts, que Mme X..., commerçante, ne démontrait pas qu'en réalité, elle n'exerçait pas d'activité commerciale ou qu'elle aurait manqué d'expérience et/ou de formation dans ce domaine, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a ainsi violé les article 1315 et 1147 du code civil ;
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Mme Annick X... fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement l'ayant déboutée partiellement de sa demande tendant à voir prononcer la déchéance des intérêts échus, frais et pénalités sur les sommes réclamées par la Banque populaire de Bourgogne Franche-Comté et d'avoir uniquement prononcé la déchéance du droit aux intérêts contractuels de cette dernière à compter du 1er janvier 2004 jusqu'à la date du prononcé du jugement et de l'avoir en conséquence condamnée à payer à la Banque populaire de Bourgogne et Franche-Comté en deniers ou quittances valables les sommes de 16.582,03€ au titre de son cautionnement donné le 27 août 2000, couvrant tous engagements souscrits par M. Y... et de 6.096,16€ au titre de son cautionnement donné le 13 décembre 2000, du prêt souscrit par M. François Y... à la même date et dit que ces condamnations porteraient intérêts au taux légal à compter du 25 mai 2011, date de l'assignation ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE le jugement sera confirmé en ce qui concerne la déchéance des intérêts prononcée par le premier juge à compter du 1er janvier 2004 par des motifs que la cour adopte et qui conduisent à considérer que contrairement à ce que soutient Mme Annick X..., l'information annuelle prévue par l'article L. 313-22 du code monétaire et financier lui a été délivrée au titre des années 2000 à 2003 ; que la BPBFC, qui n'a pas relevé appel incident, acquiesce à la déchéance précitée, ainsi qu'aux montants retenus par le tribunal de grande instance de Besançon, à savoir 7.654,60€ au titre du prêt Credirect et 16.582,03€ au titre du cautionnement omnibus ; que ce dernier montant résulte de l'imputation des versements mensuels de 100€ effectués par Mme Annick X..., d'octobre 2004 à mars 2011, sur la somme de 24.182,03€, correspondant à la créance admise par le juge-commissaire au titre du solde des comptes de M. François Y... ; que dans la mesure où cette somme a été arrêtée à la date de la liquidation judiciaire et n'a pas porté intérêts ensuite, la déchéance des intérêts à compter du 1er janvier 2004 est sans emport ; qu'en revanche, le courrier adressé à Mme Annick X... par la BPBFC le 16 mars 2004 révèle qu'au 31 décembre 2003, le capital restant dû sur le prêt du 13 décembre 2000 était de 6.696,16€ ; que c'est ce montant, compte tenu de la déchéance des intérêts à partir du 1er janvier 2004, qui est dû par Mme Annick X... de ce chef, étant observé que rien n'établit que le montant de 7.654,60€ figurant sur l'ordonnance d'admission au juge-commissaire relative à ce prêt correspond au capital restant dû – bien au contraire au vu du tableau d'amortissement qui ne mentionne pas le chiffre de 50.210,88FF (7.654,60€) ; que les montants dus par Mme Annick X... portent intérêts au taux légal depuis le 25 mai 2011, date de l'assignation valant mise en demeure ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE l'article L. 313-22 du code monétaire et financier dispose que « les établissements de crédit ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, sont tenus au plus tard avant le 31 mars de chaque année de faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation bénéficiant de la caution, ainsi que le terme de cet engagement. Si l'engagement est à durée indéterminée, ils rappellent la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée. Le défaut d'accomplissement de la formalité prévue à l'alinéa précédent emporte, dans les rapports entre la caution et l'établissement tenu à cette formalité, déchéance des intérêt échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information. Les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapports entre la caution et l'établissement, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette » ; qu'en l'espèce, la banque verse au débat les justificatifs de l'information donnée à Mme X... par des lettres d'information conformes aux prescriptions légales les 14 février 2001 au titre du détail des engagements garantis au 31 décembre 2000, 13 mars 2002 au titre du détail des engagements garantis au 31 décembre 2001, 14 mars 2003 au titre du détail des engagements garantis au 31 décembre 2002, 16 mars 2004 au titre du détail des engagements garantis au 31 décembre 2003 ; que la loi n'imposant pas à l'établissement financier la charge de la preuve de la réception de l'information mais seulement celle de l'envoi de celle-ci et aucune circonstance, dans la présente affaire, ne permettant pas de douter de l'envoi effectif de l'information annuelle délivrée par la banque à la caution, il y a lieu de considérer que la banque a satisfait à son obligation d'information au titre des années 2000 à 2003 ; qu'en revanche, l'article L. 313-22 du code monétaire et financier ne posant pas d'autre limite à l'obligation d'information annuelle de la caution que celle de l'extinction de la dette garantie, à défaut pour la banque de rapporter la preuve de la délivrance de l'information exigée par la loi postérieurement au 31 décembre 2003, celle-ci est déchue du droit aux intérêts contractuels à compter du 1er janvier 2004 et jusqu'au prononcé du jugement alors que, même l'assignation dans le cadre de la présente instance ne peut être considérée comme l'information requise de l'établissement financier en ce que celle-ci ne reprend pas rigoureusement le détail du principal et intérêts, commissions, frais et accessoires exigibles au 31 décembre de l'année écoulée, tel qu'exigé par l'article L. 313-22 du code monétaire et financier ; qu'il ressort de l'application de cette sanction à compter du 1er janvier 2004 que la créance résultant du solde débiteur du compte courant se monte à 16.582,03€ étant précisé que la banque a imputé les règlements effectués par Mme X... entre septembre 2004 et mars 2011 directement sur le principal, sans intérêts, que les créances porteront seulement intérêts au taux légal à compter de l'assignation, soit le 25 mai 2011, au regard de l'article 1153 du code civil et compte tenu des demandes de la banque quant au point de départ du calcul des intérêts ; que les condamnations seront prononcées en deniers ou quittances valables pour tenir compte des éventuels règlements intervenus postérieurement à la délivrance de l'assignation, en cours de procédure ;
ALORS QU'il appartient à l'établissement de crédit de prouver qu'il a effectivement adressé à la caution avant le 31 décembre de chaque année les informations relatives notamment au montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation bénéficiant de la caution ; que dès lors, en énonçant, pour dire que la banque avait satisfait son obligation d'information au titre des années 2000 à 2003, qu'aucune circonstance ne permettait de douter de l'envoi effectif de l'information annuelle délivrée par la banque à la caution, la cour d'appel qui a ainsi fait peser la charge de la preuve sur la caution a violé les articles 1315 du code civil et L. 313-22 du code monétaire et financier.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 14-19621
Date de la décision : 05/04/2016
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Besançon, 02 avril 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 05 avr. 2016, pourvoi n°14-19621


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.19621
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