La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/03/2016 | FRANCE | N°15-81512

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 22 mars 2016, 15-81512


Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Pascal X...,- La société Groupama Loire Bretagne, partie intervenante,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 2-8, en date du 17 février 2015, qui, pour blessures involontaires par conducteur de véhicule terrestre à moteur et violation délibérée d'une obligation de sécurité ou de prudence, a condamné le premier à 900 euros d'amende et un mois de suspension du permis de conduire, et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 2 février 2016 où étaient pré

sents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M...

Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Pascal X...,- La société Groupama Loire Bretagne, partie intervenante,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 2-8, en date du 17 février 2015, qui, pour blessures involontaires par conducteur de véhicule terrestre à moteur et violation délibérée d'une obligation de sécurité ou de prudence, a condamné le premier à 900 euros d'amende et un mois de suspension du permis de conduire, et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 2 février 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Schneider, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de Mme le conseiller SCHNEIDER, les observations de la société civile professionnelle DIDIER et PINET, de la société civile professionnelle LYON-CAEN et THIRIEZ, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LEMOINE ;
Vu les mémoires en demande et en défense et les observations complémentaires produits ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 222-19 et 222-20-1 du code pénal, L. 232-2 et R. 411-26 du code de la route, 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et des articles préliminaire, 388, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de base légale ;

" en ce que l'arrêt a déclaré M. X... coupable des faits de blessures involontaires avec incapacité n'excédant pas trois mois par conducteur de véhicule terrestre à moteur et violation manifestement délibérée d'une obligation de sécurité ou de prudence, à savoir l'interdiction de tourner à gauche, a condamné le prévenu au paiement d'une amende, à titre de peine complémentaire, a prononcé la suspension du permis de conduire de M. X... pour une durée d'un mois, et a prononcé sur les intérêts civils ;
" aux motifs propres que, sur l'action publique, sur la culpabilité, il résulte suffisamment des divers éléments de la procédure d'enquête diligentée sur le mode préliminaire, que les faits reprochés à M. X..., sous l'exacte qualification de blessures involontaires, commises par conducteur d'un véhicule terrestre à moteur, et par violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, au préjudice de M. E...
Y..., en lui ainsi ayant valu de subir une incapacité totale de travail (ITT) n'excédant pas trois mois, soit en l'espèce quatre-vingt jours, se trouvent dûment établis en leur matérialité, du moins en leur principe, sinon toutefois quant à la seule nature de l'obligation particulière, n'en restant toutefois pas moins avoir fait l'objet d'une violation manifestement délibérée par le prévenu ; que les faits imputés à M. X... ne consistent rien moins qu'en le délit de blessures involontaires, commis par le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur, ayant entraîné, au préjudice de M. Y..., une ITT n'excédant pas trois mois, et avec, en outre, cette circonstance aggravante que ladite infraction a en l'espèce été perpétrée moyennant la violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement ; qu'or, il s'évince des éléments de la cause, soit au vu de la procédure d'accident diligentée, que M. X..., ayant circulé, le 2 février 2012, rue Paul Bert, à Villeneuve-le-Roi, à bord de son véhicule Renault Clio, devait entreprendre, une fois parvenu à hauteur de l'intersection formée par cette voie avec l'avenue Le Foll, et alors même qu'il était débiteur de la priorité due à cet axe, après avoir franchi le signal STOP implanté à cet effet, de tourner sur sa gauche, en étant passé devant un véhicule Renault Clio, conduit par Mme Carole Z..., épouse A..., l'ayant en effet laissé effectuer une telle manoeuvre, lorsqu'il heurtait la motocyclette pilotée par M. Y..., qui, après avoir lui-même remonté une file de véhicules arrêtés ou ayant évolué à faible allure, survenait derrière la voiture de Mme A..., sans que le prévenu fût, dès lors, parvenu à l'éviter ; qu'il apparaît ainsi, et comme le retenait à juste titre le tribunal, qu'il est établi, et au demeurant incontesté, que M. X..., une fois arrivé à hauteur du croisement entre la rue Paul Bert, où il circulait, et l'avenue Le Foll, s'était engagé sur cette dernière en ayant sciemment entrepris de tourner sur sa gauche, alors même qu'il savait pertinemment que, ce faisant, il méconnaissait délibérément l'interdiction de tourner à gauche s'étant bien pourtant imposée à lui, et matérialisée par une signalisation tant verticale, soit un panneau d'interdiction de tourner à gauche, qu'horizontale, à savoir une ligne continue, sans que la seule circonstance que Mme A... ait certes pu lui céder le passage, ait néanmoins jamais pu lui permettre de s'affranchir en rien d'une telle interdiction, ce qui le constitue assurément en faute, et caractérise, bien plus, la circonstance aggravante du délit de blessures involontaires par conducteur d'un véhicule terrestre à moteur, prise de la violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement ; qu'il en est d'autant plus sûrement ainsi que l'intéressé devait lui-même admettre avoir fait le choix de tourner sur sa gauche, au mépris de cette interdiction dont il reconnaît avait alors eu une parfaite connaissance, et ce, afin de gagner du temps, car en ayant par là-même évité des encombrements qu'il savait avoir autrement rencontrés s'il avait, comme cela lui était seulement autorisé, tourné sur sa droite, après avoir quitté le STOP ; qu'il s'évince, dès lors, des propres déclarations du prévenu lui-même qu'il y a effectivement lieu de procéder par voie de requalification, toutefois, très partielle, car au seul titre des modalités propres à permettre de caractériser la circonstance aggravante précitée du délit reproché à M. X..., soit de l'unique chef de la teneur de l'obligation particulière de sécurité ou de prudence dont la violation manifestement délibérée lui est reprochée, pour lui être en effet à tort imputée, dans les termes de la prévention, au visa erronément pris du non-respect du signal STOP, afin de dire que le prévenu s'est en réalité rendu coupable, sinon toutefois, du franchissement d'une ligne continue, ni même davantage de circulation en sens interdit, du moins de la violation manifestement délibérée de l'interdiction de tourner à gauche dont il savait pertinemment, pour en être d'ailleurs lui-même expressément convenu, qu'elle s'imposait à lui, s'analysant dès lors, en soi, en une faute délibérée, et constituant d'ailleurs une contravention autonome, de deuxième classe, prévue et réprimée par l'article R. 411-26 du code de la route, à savoir l'inobservation de la signalisation routière imposant une direction, tant il est vrai que le franchissement de la ligne continue et, partant, la circulation, de très courte durée, en sens interdit, soit le strict temps nécessaire pour la franchir, ne sont jamais en l'occurrence que les suites nécessaires et immédiates de la violation de cette seule interdiction de tourner à gauche, dont la ligne continue ne constitue très précisément, ensemble, avec le panneau proscrivant une telle manoeuvre, que les éléments de signalisation, celle-ci, verticale, et celle-là, horizontale, propres à matérialiser une telle interdiction, faute d'avoir en effet aucune autre vocation ; que, pour autant, et alors même que le délit imputé à M. X..., et pour le surplus très exactement qualifié, car, dès lors, à l'issue de cette très partielle requalification, n'intéressant en effet jamais, au regard des mêmes faits reprochés, que la seule nature de l'obligation particulière de sécurité ou de prudence délibérément violée, n'en reste pas moins caractérisé, sous cette seule mais unique réserve, en l'ensemble de ses éléments constitutifs, que le jugement sera confirmé, sauf dans la limite et à l'issue de cette requalification, quant à la déclaration de la culpabilité de M. X..., d'ores et déjà exactement consacrée, fût-ce donc sous cette seule réserve, parle tribunal ; que, sur les peines, il convient certes d'avoir égard à la nature et à la gravité intrinsèque de tels faits, outre à l'étendue de leurs conséquences dommageables, mais de prendre aussi en compte la personnalité de leur auteur ; qu'or, il apparaît que celle-ci, n'étant déjà notamment entachée par aucun antécédent judiciaire, ne revêt pas autrement le moindre caractère défavorable, au vu du surplus des éléments recueillis au cours de la procédure d'enquête, puis devant le tribunal, et ensuite auprès de la cour, rendant en effet, en leur ensemble, bien plutôt compte d'une insertion socio-professionnelle stable et satisfaisante ; que, dans ces conditions, la décision déférée sera également confirmée, s'agissant des peines, tant principale, d'amende, d'un montant de 900 euros, que, complémentaire, de suspension de son permis de conduire, pour une durée, étant, somme toute, déjà très raisonnablement limitée à un mois, en leur ensemble exactement infligées, en répression, par le premier juge, apparaissant en effet à la cour appropriées, car en tous points adaptées aux circonstances de la cause ; qu'en revanche, il sera ajouté au jugement pour faire, par ailleurs, droit à la demande d'exclusion de la mention de cette condamnation au bulletin n° 2 de son casier judiciaire, afin d'éviter d'obérer la situation du condamné, et, tout particulièrement, son avenir professionnel, à raison de semblables faits, dont il y a en effet tout lieu de raisonnablement penser qu'ils resteront isolés ;
" aux motifs éventuellement adoptés que, sur l'action publique, à l'audience, M. X... confirme sa relation des faits ; que le procureur de la République requiert une peine de 2 000 euros d'amende et de quatre mois de suspension du permis de conduire ; que l'avocat de M. X... plaide la relaxe en faisant valoir que le véhicule de son client avait terminé sa manoeuvre de tourner à gauche et roulait normalement sur sa voie de circulation de l'avenue Le Foll lorsqu'il a été heurté de face par la moto conduite par M. Y... ; qu'à titre subsidiaire, il sollicite l'indulgence du tribunal au vu de la situation de son client ; qu'il indique que M. X... est sans emploi, perçoit l'aide au retour à l'emploi d'un montant de 1 800 euros par mois, a deux enfants à charge et, dans le cadre d'un projet professionnel, vient de créer une société spécialisée dans la pose de menuiserie qui nécessite le permis de conduire ; qu'en tout état de cause, il demande que le tribunal ne prononce pas de suspension du permis de conduire et exclut la condamnation du bulletin numéro 2 du casier judiciaire ; que cela étant, en présence de deux versions contradictoires, il convient de se reporter aux éléments objectifs du dossier ; qu'or, il est établi et non contesté que M. X..., arrivé au croisement de la rue Paul Bert sur laquelle il circulait et de l'avenue Le Foll, s'est engagé dans l'avenue Le Foll en tournant à gauche malgré une interdiction de tourner à gauche matérialisée par un panneau et une ligne blanche continue séparant les voies de circulation de l'avenue Le Foll ; que c'est donc en toute connaissance de cause et de façon délibérée que M. X... s'est affranchi de l'interdiction qui lui était imposée ; que le fait que le véhicule du témoin lui cédait le passage n'autorisait nullement M. X... à effectuer la manoeuvre interdite ; qu'il n'est pas démontré, notamment à le lecture du témoignage d'une autre conductrice sans lien avec l'une des deux parties, que M. Y... qui, certes, remontait la file de voitures, avait franchi la ligne blanche continue ; que, par ailleurs, le témoignage cette même conductrice démontre que M. X... a effectué sa manoeuvre assez rapidement, ce qui se comprend dès lors que ce conducteur violait une interdiction, était donc susceptible d'être verbalisé, et représentait une certaine gêne pour le véhicule du témoin arrivant de sa gauche et un danger pour les véhicules venant de sa droite ; qu'ainsi, la manoeuvre de M. X... a pu surprendre le motard en raison de sa rapidité, même si elle était terminée au moment de la collision ; que, si la manoeuvre d'inter filage de M. Y... présentait un certain risque, il n'en demeure pas moins que le motard pouvait légitimement croire évoluer en toute sécurité dès lors, d'une part, que sa voie de circulation était prioritaire en raison du STOP qui s'imposait aux usagers venant de la rue Paul Bert située sur sa droite et, d'autre part, que l'interdiction de tourner à gauche depuis la rue Paul Bert impliquait qu'aucun conducteur n'était censé couper la route du motocycliste ; que la violation délibérée de l'interdiction de tourner à gauche par Pascal X... est donc la cause exclusive de l'accident ; que M. X... sera, en conséquence, déclaré coupable des faits qui lui sont reprochés ; que la sanction doit prendre en compte la gravité de la faute, ses conséquences et son caractère délibéré mais aussi les éléments de personnalité du prévenu ; qu'au regard de l'ensemble de ces circonstances, M. X... sera condamné à une amende de 900 euros et à une suspension de son permis de conduire qui, au regard de l'ancienneté des faits et de la situation sociale de l'intéressé, sera limitée à un mois ;
" 1°) alors que les juges du fond ne peuvent substituer des faits distincts à ceux de la prévention, à moins que le prévenu accepte d'être jugé sur ces faits nouveaux ; qu'en déclarant M. X... coupable des faits de blessures involontaires par conducteur de véhicule terrestre à moteur et violation manifestement délibérée d'une obligation de sécurité ou de prudence, à savoir l'interdiction de tourner à gauche, cependant, que dans la prévention, il était énoncé que M. X... avait violé de façon manifestement délibérée l'obligation de céder le passage à un véhicule circulant sur une autre route, à une intersection indiquée par un signal STOP, sans avoir constaté l'accord exprès de M. X... pour être jugé pour des faits autres que ceux objet des poursuites, la circonstance qu'il s'évinçait des déclarations du prévenu qu'il avait effectivement violé une interdiction de tourner à gauche n'étant pas constitutive d'un tel accord, les juges du fond ont méconnu le sens et la portée des textes susvisés ;
" 2°) alors qu'en énonçant avoir procédé à une requalification portant uniquement sur la circonstance aggravante du délit de blessures involontaires reproché à M. X..., cependant qu'en déclarant M. X... coupable des faits de blessures involontaires par conducteur de véhicule terrestre à moteur et violation manifestement délibérée d'une obligation de sécurité ou de prudence, en l'espèce l'interdiction de tourner à gauche, lorsqu'il était poursuivi pour blessures involontaires et pour avoir violé de façon manifestement délibérée l'obligation de céder le passage à un véhicule circulant sur une autre route, à une intersection indiquée par un signal STOP, les juges du fond ont, en imputant au prévenu la violation d'une interdiction de tourner à gauche, caractérisé aussi un des éléments constitutifs du délit de blessures involontaires, à savoir l'imprudence, la négligence ou le manquement à une obligation législative ou réglementaire de prudence ou de sécurité prévu par l'article 222-19 du code pénal, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des textes susvisés ;
" 3°) alors qu'en ne caractérisant pas la maladresse, l'imprudence, la négligence ou le manquement à une obligation législative ou réglementaire de prudence ou de sécurité prévu par l'article 222-19 du code pénal commise par M. X..., la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés " ;
Attendu que M. X... a été cité devant le tribunal correctionnel pour avoir, à l'occasion de la conduite d'un véhicule terrestre à moteur et par violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, en l'espèce l'omission de céder le passage à un véhicule circulant sur une autre route à une intersection indiquée par un signal d'arrêt absolu, involontairement causé une incapacité de travail d'une durée inférieure à trois mois, sur la personne de M. Y... ; que le tribunal a déclaré M. X... coupable ; que ce dernier et le ministère public ont interjeté appel ;
Attendu que, pour confirmer la déclaration de culpabilité, la cour d'appel, après avoir recueilli les observations de M. X..., analysé les circonstances de l'accident, et constaté, comme l'avait retenu le tribunal que M. X... avait méconnu l'interdiction de tourner à gauche, a procédé à la requalification partielle des faits reprochés, en modifiant la nature de la violation de l'obligation particulière de sécurité ou de prudence reprochée à M. X..., par substitution de l'omission de céder le passage à un véhicule circulant sur une autre route à une intersection indiquée par un signal d'arrêt absolu par le non-respect de l'interdiction de tourner à gauche ;

Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors que, d'une part, il appartenait à la cour d'appel de rechercher toute autre violation manifestement délibérée d'une obligation de sécurité et de prudence entrant dans les prévisions de l'article 222-20-1, 1° du code pénal, et d'autre part que, contrairement à ce qui est allégué aucune atteinte n'a été portée aux droits de la défense, la qualification retenue ayant été mise dans les débats devant les premiers juges, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 1 et 4 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, 222-19 et 222-20-1 du code pénal, L. 232-2, R. 411-26 et R. 412-19 du code de la route, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de base légale et insuffisance de motifs ;

" en ce que l'arrêt a, sur les intérêts civils, déclaré recevable la constitution de partie civile de M. Y..., déclaré M. X... entièrement responsable du préjudice subi par M. Y..., ordonné une expertise, condamné M. X... à payer à M. Y... la somme de 10 000 euros à titre d'indemnité provisionnelle, la somme de 3 856, 86 euros en réparation du préjudice matériel, sursis à statuer sur les demandes formulées en réparation du préjudice corporel, déclaré la société Euro dommages assurances recevable en son intervention et condamné M. X... à payer à cette société la somme de 95, 68 euros, en réparation des débours de cette société exposés du chef du préjudice matériel, déclaré l'arrêt opposable à la société Groupama Loire Bretagne et commun à la caisse primaire d'assurance maladie du Val-de-Marne ;
" aux motifs propres que, sur les actions civiles, seul ouvre droit à réparation le préjudice étant directement né de l'infraction poursuivie ; qu'or, alors même qu'il est constant que M. Y... a en l'espèce personnellement subi un dommage certain et en relation causale directe avec les faits dont le prévenu s'est vu déclarer à bon droit coupable ; que la décision déférée mérite confirmation quant à la réception de la constitution de la partie civile de la victime ; que, dans la mesure même où il n'est, en définitive, pas davantage démontré à hauteur d'appel que devant le tribunal, au vu notamment, par-delà les propres déclarations effectuées par M. Y... lui-même, se défendant d'avoir, alors qu'il remontait la file de véhicules présents devant lui, pour autant franchi la ligne continue qu'il n'a, tout au plus et à l'en croire, que chevauchée, en ayant pu rouler dessus mais sans l'avoir méconnue, des termes relativement imprécis de la déposition recueillie auprès de Mme A..., entendue comme témoin, comme en l'absence, de surcroît, de tout élément tangible et objectif, ne résultant pas davantage de la configuration en lieux que, par ailleurs, du surplus des circonstances ayant présidé au déroulement de l'accident, permettant de retenir une quelconque faute de la victime dans la survenance de celui-ci, n'étant en effet ainsi et dès lors imputable qu'au seul et exclusif manquement délibéré à ses obligations, susvisées, sciemment commis par M. X... dans la conduite de son propre véhicule ; que celui-ci, ayant par suite été déclaré à juste titre entièrement responsable des conséquences dommageables de cet accident, ne saurait, pas plus que son assureur, prospérer à voir tout au contraire consacrer un quelconque partage de responsabilité avec M. Y... ; que le tribunal devait au demeurant fort justement énoncer, à cet égard, qu'il n'est aucunement démontré que la victime ait franchi la ligne continue en ayant remonté la file de véhicules, non sans avoir également retenu, toujours à bon escient, que la déposition de Mme A... permettait d'établir que la manoeuvre interdite, et sciemment entreprise par M. X..., avait été effectuée rapidement par ses soins, ce qui se conçoit d'ailleurs d'autant mieux que son auteur savait pertinemment violer ainsi une interdiction, et s'être, de surcroît, par là-même exposé à une éventuelle verbalisation, cependant, qu'il constituait encore une gêne pour le véhicule de Mme A..., étant arrivé sur sa gauche, tout comme un danger pour les véhicules arrivant de sa droite, ce qui explique que sa manoeuvre ait pu surprendre les autres usagers, et notamment le motard, M. Y..., en raison de son caractère interdit et de la rapidité de son exécution, y compris même si celle-ci était achevée, ou en voie de l'être, au moment de la collision ; que le jugement énonce aussi, à bon droit, que, si la manoeuvre, ayant par ailleurs consisté, pour le motard victime, à remonter une file de véhicules, revêtait, par sa nature même, un certain danger, il n'en reste pas moins, outre qu'elle n'était pas interdite, tant il n'est pas démontré qu'elle ait été commise en ayant franchi la ligne continue, que son auteur pouvait aussi et fort légitimement penser évoluer en toute sécurité, sachant que sa voie de circulation était prioritaire, en raison de la présence du signal STOP sur la rue Paul Bert, adjacente, et que la manoeuvre pour tourner à gauche était précisément interdite aux usagers débouchant de cette rue, après avoir marqué le STOP, tant et si bien que nul n'était raisonnablement censé venir lui couper ainsi la route ; qu'en définitive, au regard de l'ensemble de ces éléments, le tribunal était dès lors fondé à retenir, en l'absence par ailleurs, et pour les motifs précédemment énoncés, de tout élément objectif comme du moindre commencement de preuve tangible susceptible d'avoir pu militer dans le sens d'une quelconque faute autrement commise par le motocycliste, que la violation délibérée par M. X... de l'interdiction de tourner à gauche, s'étant assurément imposée à lui, constituait, à elle seule, la cause exclusive de l'accident ; que le jugement sera donc confirmé pour avoir par suite consacré la responsabilité exclusive de M. X... dans la survenance de l'accident, et déclaré celui-ci tenu d'en réparer les entières conséquences dommageables, eu égard aux dispositions de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 applicable en la cause ; que, dès lors, la confirmation de la décision de première instance s'impose encore du chef de la condamnation de M. X... à payer à M. Y... la somme de 3 856, 86 euros, à titre de dommages-intérêts, du chef, et pour solde, de son préjudice matériel, étant en effet, en cet état, dûment justifiée, tant dans son principe qu'en son quantum, par les productions, de même que pour avoir ordonné, avant dire droit au fond, sur la liquidation de son préjudice corporel, une expertise médicale de la victime, confiée à M. Yves B..., docteur, outre en ce qu'elle a condamné M. X... à lui payer une indemnité provisionnelle d'un montant exactement arbitré à hauteur d'une somme de 10 000 euros, restant en effet d'actualité, sans donc avoir lieu d'être, en l'état, modifiée, et sursis à statuer sur la liquidation du préjudice corporel de la victime, tout en ayant par suite alors renvoyé l'affaire, sur les intérêts civils, à l'audience du 27 juin 2014, à 9 heures 15, devant la 13e chambre du tribunal correctionnel de Créteil ; qu'il convient en revanche d'infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes présentées par la société Euro dommages assurances, assureur de la partie civile, intervenant pour le compte de la société Enterprise insurance company P, afin, statuant à nouveau, de déclarer cet assureur recevable en son intervention et de condamner par suite M. X... à lui payer la somme de 95, 68 euros, étant en effet dûment justifiée au vu des pièces versées aux débats, outre, y ajoutant, une indemnité qui sera arbitrée, en équité et au regard de la situation économique respective des parties, à la somme de 500 euros, ensemble au titre des deux degrés de juridiction ; qu'il convient également d'ordonner le renvoi de la cause et des parties devant le tribunal correctionnel de Créteil, pour suite de la procédure restant pour le surplus pendante auprès de cette juridiction sur les intérêts civils ; que le présent arrêt sera enfin déclaré opposable à la société Groupama Loire Bretagne, assureur de M. X..., partie intervenante appelante, et commun à la caisse primaire d'assurance maladie du Val-de-Marne, en tant que partie intervenante intimée ;
" aux motifs éventuellement adoptés que, sur l'action civile, M. Y... se constitue partie civile et réclame :- la condamnation solidaire de M. X... et de son assureur la société Groupama Loire Atlantique au paiement de la somme de 3 856, 86 euros en réparation de son préjudice matériel ;- la nomination d'un expert avec mission de décrire les blessures résultant de l'accident ;- la condamnation solidaire de M. X... et de son assureur la société Groupama Loire Atlantique au paiement d'une provision de 15 000 euros à valoir sur la réparation définitive de son préjudice ;- la condamnation solidaire de M. X... et de son assureur, la société Groupama Loire Atlantique, au paiement à la société Euro dommages assurances intervenant pour le compte de la société Enterprise insurance company P de la somme de 95, 68 euros en réparation de son préjudice matériel ;- la condamnation solidaire de M. X... et de son assureur la société Groupama Loire Atlantique au paiement à la société Euro dommages assurances intervenant pour le compte de la société Enterprise insurance company P de la somme de 1 500 euros en application de l'article 475-1 du code de procédure pénale ; que, par lettre du 6 septembre 2013, la caisse primaire d'assurance maladie du Val-de-Marne indique ne pas intervenir à l'instance ; qu'aucune faute n'étant relevée à l'encontre de M. Y... au regard des éléments de fait relevés ci-dessus, M. X... sera condamné à réparer intégralement les conséquences dommageables des faits, en application de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 ; que la demande en réparation du préjudice matériel est justifiée en son principe et en son montant par les pièces versées au dossier ; qu'en application des articles 2 et 388-3 du code de procédure pénale, le tribunal correctionnel statuant sur intérêts civils ne peut condamner que le seul auteur de l'infraction à indemniser le dommage subi par la victime, et doit simplement déclarer le jugement opposable à l'assureur régulièrement appelé dans la cause ; qu'en conséquence, M. X... sera condamné à verser à Mme Y... la somme de 3 856, 86 euros en réparation de son préjudice matériel ; que les pièces médicales du dossier démontrent qu'une expertise est nécessaire pour une juste et fidèle appréciation de la nature et de l'étendue du préjudice de M. Y... ; que, dans l'attente du dépôt du rapport de l'expert, il sera sursis à statuer sur la réparation du préjudice corporel de M. Y... ; qu'une provision doit permettre à une victime de percevoir une avance significative sur l'indemnisation à venir de son dommage pour faire face à la durée de la procédure, tout en étant préservée du risque d'avoir à restituer un trop perçu lors de l'évaluation définitive de son préjudice ; que les séquelles prévisibles de M. Y... au vu des conclusions provisoires de M. C..., docteur, conduisent à fixer le montant de cette provision à 10 000 euros ;

" 1°) alors que la faute commise par le conducteur du véhicule terrestre à moteur a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages qu'il a subis ; que lorsque des lignes longitudinales continues axiales ou séparatives de voies de circulation sont apposées sur la chaussée, elles interdisent aux conducteurs leur franchissement ou leur chevauchement ; qu'en énonçant que M. Y... n'avait pas commis de faute dans la conduite de sa motocyclette, après avoir pourtant relevé que celui-ci avait chevauché une ligne continue, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des textes susvisés ;
" 2°) alors qu'en ne faisant pas état de circonstances factuelles susceptibles de retirer son caractère fautif au chevauchement par M. Y... de la ligne continue, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés ;
" 3°) alors qu'en énonçant qu'il n'était pas prouvé que M. Y... avait franchi la ligne continue en remontant la file des véhicules qui le précédaient, sans se prononcer, d'une part, sur le témoignage de Mme A... qui attestait que la motocyclette de M. Y... et l'automobile de M. X... avaient « fait un tête à tête », d'autre part, sur le schéma réalisé par la police judiciaire dont il ressortait que tous les débris des véhicules de M. D... et de M. Y... se trouvaient sur une voie de circulation qui n'était pas celle de ce dernier, toutes circonstances tendant à démontrer que M. Y... avait franchi la ligne continue et changé de voie de circulation au moment de l'accident, la cour d'appel n'a pas suffisamment motivé sa décision et méconnu le sens et la portée des textes susvisés ;
" 4°) alors que la faute commise par le conducteur du véhicule terrestre à moteur a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages qu'il a subis ; qu'en énonçant que M. Y... n'avait pas commis de faute dans la conduite de sa motocyclette, après avoir pourtant relevé que sa manoeuvre au moment de l'accident, à savoir remonter la file des véhicules qui le précédaient, présentait, « par sa nature même, un certain danger », ce dont il résultait que M. Y... avait commis une faute d'imprudence, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a méconnu le sens et la portée des textes susvisés ;
" 5°) alors que la faute commise par le conducteur du véhicule terrestre à moteur a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages qu'il a subis ; qu'en énonçant que M. Y... n'avait pas commis de faute dans la conduite de sa motocyclette, après avoir pourtant relevé que sa manoeuvre au moment de l'accident, à savoir remonter la file de véhicules, présentait, « par sa nature même, un certain danger », sans rechercher si, dès lors, M. Y... n'avait pas commis une faute d'imprudence, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes précités ;
" 6°) alors que la faute de la victime ayant contribué à la réalisation de son préjudice doit être appréciée en faisant abstraction du comportement de l'autre conducteur du véhicule impliqué dans l'accident ; qu'à supposer que la cour d'appel ait jugé qu'en tout état de cause, une éventuelle faute de M. Y... n'aurait pas eu pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages qu'il a subis, en statuant de la sorte par la considération que « la violation délibérée par M. X... de l'interdiction de tourner à gauche (¿) constituait, à elle seule, la cause exclusive de l'accident », la cour d'appel, qui a, ce faisant, apprécié la faute de la victime au regard du comportement du conducteur de l'autre véhicule impliqué, a méconnu le sens et l'objet des textes susvisés " ;
Attendu que pour dire M. X... tenu à réparation intégrale, la cour d'appel énonce qu'il n'est pas établi que M. Y... ait franchi la ligne continue, que, si la manoeuvre, ayant consisté pour le motard à remonter la file de véhicules revêtait par sa nature même un certain danger, elle n'était pas interdite et que son auteur pouvait légitiment penser évoluer en toute sécurité, sachant que sa voie était prioritaire en raison de la présence d'un signal d'arrêt absolu situé à l'intersection ; que la violation délibérée par M. X... de tourner à gauche constituait à elle seule la cause exclusive de l'accident ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, d'où il résulte qu'aucune faute ne peut être imputée à la victime et abstraction faite de l'appréciation surabondante portée sur le comportement fautif de l'autre conducteur impliqué dans l'accident, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen, qui revient à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être accueilli ;
Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation des articles 388-3, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt a condamné M. X... à payer à la société Euro dommages assurances la somme de 95, 68 euros, en réparation des débours de cette société exposés du chef du préjudice matériel ;
" aux motifs propres que, sur les actions civiles, il convient d'infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes présentées par Euro dommages assurances, assureur de la partie civile, intervenant pour le compte d'Enterprise insurance company P, afin, statuant à nouveau, de déclarer cet assureur recevable en son intervention et de condamner par suite M. X... à lui payer la somme de 95, 68 euros, étant en effet dûment justifiée au vu des pièces versées aux débats ;
" alors que l'intervention volontaire ou forcée de l'assureur à l'instance pénale n'a d'autre effet que de lui rendre opposable la décision rendue sur les intérêts civils ; qu'en condamnant M. X... à payer à la société Euro dommages assurances, intervenante et qui se présentait comme l'assureur « responsabilité civile automobile » de M. Y..., une certaine somme en réparation de ses débours exposés du chef du préjudice matériel, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des textes susvisés " ;
Attendu que pour condamner M. X... à payer à la société Eurodommages assurances, assureur de la victime, la somme de 95, 68 euros en réparation des débours exposés du chef du préjudice matériel, la cour d'appel prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors qu'en application de l'article 388-1 du code de procédure pénale, en cas de poursuite pour blessures involontaires, l'assureur de toute personne ayant subi un dommage quelconque à l'occasion de cette infraction, est recevable, après avoir indemnisé l'assuré et dans la mesure de cette indemnisation, à intervenir à l'instance pour demander le remboursement des sommes versées, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
FIXE à 3 000 euros la somme globale que M. X... et la société Groupama Loire Bretagne devront payer à M. Y... et à la société Euro dommages assurances au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-deux mars deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 15-81512
Date de la décision : 22/03/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 17 février 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 22 mar. 2016, pourvoi n°15-81512


Composition du Tribunal
Président : M. Guérin (président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.81512
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award