LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 3 de la loi du 6 juillet 1989 dans sa rédaction antérieure à la loi du 24 mars 2014, ensemble l'article 1731 du code civil ;
Attendu qu'un état des lieux, établi contradictoirement par les parties lors de la remise et de la restitution des clés ou, à défaut, par huissier de justice, à l'initiative de la partie la plus diligente et à frais partagés par moitié, est joint au contrat ; que, lorsque l'état des lieux doit être établi par huissier de justice, les parties en sont avisées par lui au moins sept jours à l'avance par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ; qu'à défaut d'état des lieux, la présomption établie par l'article 1731 du code civil ne peut être invoquée par celle des parties qui a fait obstacle à l'établissement de l'état des lieux ;
Attendu, selon le jugement attaqué rendu en dernier ressort (juridiction de proximité de Fontainebleau, 14 janvier 2014), que, le 15 septembre 2007, Mme X... et M. Y... ont pris à bail un logement appartenant à M. et Mme Z... ; qu'après avoir restitué les lieux, le 31 janvier 2013, ils ont assigné les bailleurs en restitution du dépôt de garantie ; que M. et Mme Z... se sont opposés à cette demande en invoquant des désordres locatifs ;
Attendu que, pour accueillir la demande des preneurs, le jugement retient que le constat non contradictoire dressé par un huissier de justice le 4 février 2013 est inopposable aux locataires et qu'il sera fait application des dispositions de l'article 1731 du code civil, les lieux étant réputés avoir été restitués en bon état ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le caractère non contradictoire de l'état des lieux de sortie n'interdisait pas au bailleur d'invoquer l'existence de désordres locatifs et sans examiner ce document régulièrement versé aux débats et soumis à la libre discussion des parties, la juridiction de proximité a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 14 janvier 2014, entre les parties, par la juridiction de proximité de Fontainebleau ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant la juridiction de proximité de Melun ;
Condamne Mme X... et M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme X... et M. Y... à payer à M. et Mme Z... la somme globale de 2 000 euros ; rejette la demande de Mme X... et de M. Y... ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mars deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Tiffreau, Marlange et de La Burgade, avocat aux Conseils, pour M. et Mme Z...
Le moyen fait grief au jugement attaqué D'AVOIR condamné les époux Z... à payer à Madame X... et Monsieur Y... les sommes de 1400 ¿ avec intérêts au taux légal, 1000 ¿ pour troubles de jouissance, 1000 ¿ pour préjudice moral, et débouté les époux Z... de leurs demandes reconventionnelles,
AUX MOTIFS QUE « (¿) l'article 22 de la Loi du 6 JUILLET 1989 prévoit, dans sa rédaction antérieure à la Loi du 8 FEVRIER 2008, le versement par les locataires entrants d'un dépôt de garantie égal à deux mois de loyer, ladite Loi réduisant le dépôt de garantie à un mois de loyer ne s'appliquant qu'aux baux conclus à compter du 9 FEVRIER 2008 En l'espèce, le contrat de bail ayant été conclu le 15 SEPTEMBRE 2007, MONSIEUR PIERRE Z... et MADAME ANNE-MARIE Z... étaient donc bien fondés à demander le paiement d'un dépôt de garantie de 1 400 ¿, soit deux mois de loyer.L'article 3 de la Loi du 6 JUILLET dispose que, si l'état des lieux d'entrée ou de sortie ne peut pas être établi contradictoirement, il l'est, sur l'initiative de la partie la plus diligente, par un huissier de justice à frais partagés entre le propriétaire et le locataire. En ce cas, les parties en sont avisées par l'huissier au moins 7 jours à l'avance, par lettre recommandée avec avis de réception.En l'espèce, les parties sont en contradiction quant à l'imputabilité du défaut d'établissement d'un état des lieux contradictoire de sortie.Cependant, il ressort du texte susvisé que si MONSIEUR PIERRE Z... et MADAME ANNE-MARIE Z... avaient effectivement intérêt à faire dresser un constat par un huissier de justice, ils étaient dans l'obligation de convoquer leurs anciens locataires, ce qu'ils ont omis de faire.Le constat non contradictoire dressé le 4 FEVRIER 2013 ne leur est donc pas opposable, et il sera fait application des dispositions de l'article 1731 du Code civil, les lieux étant réputés avoir été restitués en bon état.Au surplus, même si le constat du 4 FEVRIER 2013 pouvait être pris en compte, force est de constater que MONSIEUR PIERRE Z... et MADAME ANNE-MARIE Z... ne demandent pas à leurs anciens locataires le paiement des réparations qu'ils allèguent avoir été dans l'obligation d'effectuer, avec compensation avec le dépôt de garantie, puisqu'ils se contentent de demander le débouté des prétentions des demandeurs (¿) »,
ALORS QUE 1°), si l'état des lieux ne peut être établi amiablement et contradictoirement, il l'est, sur l'initiative de la partie la plus diligente, par un huissier de justice ; que si le constat d'huissier est versé aux débats, il appartient au juge de l'examiner pour apprécier l'état des lieux à la sortie des locataires ; qu'en affirmant en l'espèce que le constat d'huissier non contradictoire dressé le 4 février 2013 à l'initiative des époux Z... n'était pas opposable aux locataires et en considérant en conséquence que « les lieux ét(aient) réputés avoir été restitués en bon état » par application des dispositions de l'article 1731 du Code civil, la juridiction de proximité, qui a ainsi refusé d'examiner le constat d'huissier susvisé, pourtant régulièrement versé aux débats et soumis à la libre discussion des parties, a violé les articles 15, 16 et 132 du Code de procédure civile, 1353 et 1731 du Code civil, 3 de la loi du 6 juillet 1989,
ALORS QUE 2°), le dépôt de garantie est restitué dans un délai maximal de deux mois à compter de la restitution des clés par le locataire, déduction faite, le cas échéant, des sommes restant dues au bailleur et des sommes dont celui-ci pourrait être tenu, aux lieu et place du locataire, sous réserve qu'elles soient dûment justifiées ; qu'en condamnant les époux Z... à restituer le dépôt de garantie, aux motifs qu'ils ne demandaient pas à leurs anciens locataire « le paiement des réparations qu'ils allèguent avoir été dans l'obligation d'effectuer, avec compensation avec le dépôt de garantie », sans rechercher, comme elle y était invitée, si les locaux loués présentaient des dégradations telles que les bailleurs étaient fondés à retenir la totalité du dépôt de garantie, la juridiction de proximité a privé sa décision de base légale au regard de l'article 22 de la loi du 6 juillet 1989.