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16/03/2016 | FRANCE | N°15-12493

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 mars 2016, 15-12493


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X...a été engagée à compter du 1er juillet 1998 par M. Y... ; que par suite de la procédure de divorce, l'intéressée a saisi le 15 septembre 2011 la juridiction prud'homale de demandes aux fins d'obtenir un rappel de salaire et de voir prononcer la rupture aux torts de son employeur ; que par courrier en date du 3 février 2012, la salariée a reçu ses documents de fin de contrat ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spéci

alement motivée sur le moyen annexé qui n'est manifestement pas de natu...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X...a été engagée à compter du 1er juillet 1998 par M. Y... ; que par suite de la procédure de divorce, l'intéressée a saisi le 15 septembre 2011 la juridiction prud'homale de demandes aux fins d'obtenir un rappel de salaire et de voir prononcer la rupture aux torts de son employeur ; que par courrier en date du 3 février 2012, la salariée a reçu ses documents de fin de contrat ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 12 du code de procédure civile ;
Attendu que, pour rejeter la demande de la salariée en dommages-intérêts au titre de la rupture du contrat de travail, l'arrêt retient qu'au soutien de sa demande, la salariée n'a produit aucune lettre, message, attestation de témoins rapportant une conversation ou tout autre document rendant compte de sa volonté de rompre son contrat de travail en raison de manquements de son employeur et à tout le moins d'éclairer la cour sur les circonstances dans lesquelles le contrat de travail a été rompu, que la prise d'acte ne peut emporter les conséquences d'un licenciement que dans l'hypothèse où elle est justifiée par des manquements de l'employeur imposant la rupture du contrat de travail, que la salariée n'a pas rapporté la preuve des manquements qu'elle allègue à savoir le défaut de paiement des salaires puisque la preuve contraire est rapportée, qu'elle soutient qu'il ne lui était plus fourni de travail mais ne conteste pas qu'elle ne s'y rendait plus alors qu'il est justifié de ce qu'elle continuait à être payée, que dans ces conditions, la prise d'acte ne peut emporter d'autres effets que ceux d'une démission ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la saisine du conseil de prud'hommes par un salarié pour voir juger que la rupture intervenue est imputable à l'attitude fautive de l'employeur ne peut être assimilée à une prise d'acte, la cour d'appel, à laquelle il appartenait de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables, a méconnu son office et violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que la prise d'acte de Mme X... s'analyse en une démission, l'arrêt rendu le 28 janvier 2014, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Y... à payer la somme de 3 000 euros à Mme X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize mars deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Madame Carmen X..., épouse Y..., salariée, de sa demande de condamnation de Monsieur Georges Y..., employeur, au paiement de la somme de 82 920 ¿ d'arriéré de salaire, outre trois mois postérieurs à la saisine du conseil de prud'hommes en dehors des mois de novembre et décembre 2011 ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'il n'est pas contesté que M. Y..., médecin dermatologue, a embauché son épouse le 1er juillet 1998 afin qu'elle accomplisse un temps partiel dans son cabinet médical ; que cependant, M. Y... indique que son épouse a cessé de travailler au cabinet à compter de la naissance de leur fils en 2003, ce qui coïncide avec l'embauche d'une secrétaire médicale à mi-temps à compter du mois de janvier 2003, Madame Brigitte Z...; qu'il ajoute que pour autant, il avait continué à payer les salaires et les charges et à déclarer son épouse afin qu'elle se constitue une retraite, ce dont attestent les pièces comptables versées en procédure pour les années 2006 à 2009 et les mois de novembre et décembre 2010 ; que les bulletins de salaire portent mentions du paiement par chèque, et d'une rémunération brute mensuelle qui s'établissait en dernier lieu à 1 382, 57 ¿ ; que cependant en réalité, le règlement était effectué en espèces, ce qui n'est pas prohibé, le montant des rémunérations nettes n'excédant pas 1 500 ¿ ; que Monsieur André A..., expert-comptable et commissaire aux comptes, atteste le 17 octobre 2011 de ce que Mme X... était employée en qualité de secrétaire de direction, et que le paiement de ces rémunérations en espèces était porté dans la comptabilité du Dr Y... ; que cette attestation, qui n'entend pas rapporter la preuve d'un paiement, mais d'un procédé, est précisément corroborée par les pièces comptables qui ont été produites ; que la cour a effectué le rapprochement du compte caisse du Dr
Y...
sur lequel apparaissent chaque mois le versement d'espèces sous la mention « espèces Y... Carmen » et les bulletins de salaire qu'a produits Mme X..., et a pu constater, en procédant par sondages : que la somme de 1 025, 62 ¿ nets mentionnée au bulletin de salaire du mois d'avril 2006 est bien portée à la ligne correspondante du compte caisse ; que de même, les sondages de l'année 2007 permettent de vérifier que la somme de 1 026, 14 ¿ nets portés sur le bulletin de salaire du mois de juin 2007 est inscrite au compte caisse du Dr
Y...
pour le même montant ; qu'il en est de même pour la somme de 1 054, 90 ¿ nets mentionnés au bulletin de salaire du mois d'août 2007, pour la somme de 1 054, 94 ¿ mentionnés sur le bulletin de salaire de décembre 2008, la somme de 1 054, 94 ¿ portée au salaire du juin 2009, et la somme de 1 074, 77 ¿ portée au salaire de décembre 2010 ; que les mêmes constatations sont faires pour l'année 2011 ainsi que pour le bulletin de salaire d'avril 2011, la somme de 1 074, 77 ¿ étant mentionnée dans le journal de caisse du Dr
Y...
; qu'il est donc démontré l'existence de versements en espèces à périodicité mensuelle au profit de Mme Y..., née X... dont le montant correspond aux sommes portées en net sur les bulletins de salaire qui lui étaient remis, ou dont à tout le moins elle disposait librement, puisque c'est elle qui les a produits dans le cadre de la procédure prud'homale ; que par ailleurs, les déclarations de revenus du couple pour les années 2003, 2004, 2005, 2007, 2009, 2010 et 2011, mentionnent des revenus pour le conjoint, Mme X... au titre des salaires et assimilés dont les montants sont compatibles avec les salaires qu'elle a perçus, ses revenus annuels à ce titre s'établissant en dernier lieu pour l'année 2010 à 13 191 ¿, ce qui correspond à une rémunération moyenne mensuelle de 1 099, 25 ¿ ; que l'ensemble de ces éléments permet de dire que la preuve du paiement des salaires est rapportée au moins jusqu'en décembre 2011 ; que dès lors, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme X... de sa demande de ce chef ;
ET AUX MOTIFS RÉPUTÉS ADOPTÉS QUE les éléments comptables fournis par M. Y... attestent du paiement des salaires de Mme Y... ; que la preuve du non-paiement des salaires n'est pas suffisamment rapportée ;
1) ALORS D'UNE PART QUE l'employeur qui prétend avoir payé le salaire en espèces doit le prouver par quittances ; qu'en déboutant la salariée de sa demande de paiement aux motifs inopérants qu'on retrouvait dans le compte caisse de l'employeur les montants mentionnés dans les bulletins de salaire, ce qui n'en prouvait pas le versement, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil ;
2) ALORS D'AUTRE PART QUE les arrêts qui ne sont pas motivés sont déclarés nuls, et que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; qu'en retenant comme preuve du paiement du salaire les déclarations de revenus du ménage, constitué de l'employeur et de la salariée, sans répondre aux conclusions de celle-ci faisant valoir que c'était son mari qui les remplissait, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3) ALORS AU DEMEURANT QUE l'examen des comptes et déclarations du salarié ne supplée pas à la preuve du paiement du salaire incombant à l'employeur ; qu'en se fondant sur des motifs inopérants tirés des déclarations de revenus du ménage formé de la salariée et de l'employeur, la cour d'appel a derechef violé l'article 1315 du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Madame Carmen X..., épouse Y..., salariée, de sa demande de condamnation de Monsieur Georges Y..., employeur, au paiement de la somme de 17 000 ¿ à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'au soutien de sa demande, Mme X... a produit de la jurisprudence, mais aucune pièce telle que lettre, message, attestation de témoins rapportant une conversation ou tout autre document rendant compte de sa volonté de rompre son contrat de travail en raison de manquements de son « employeur » et à tout le moins d'éclairer la cour sur ses circonstances dans lesquelles le contrat de travail a été rompu ; que la cour constate que dans ce contexte particulier d'une relation salariale entre époux dans le cadre d'une activité libérale, le jugement de divorce rendu par le tribunal de grande instance de Grasse le 9 septembre 2013 ne fait aucune référence à des salaires impayés, et qu'aucun des griefs exposés par Mme X... ne se réfère à la relation de travail avec son époux ; que, le 23 janvier 2012, M. Y... a remis à Mme X... un reçu pour solde de tout compte ainsi qu'un certificat de travail, une attestation Pôle emploi arrêtée au salaire du mois de janvier 2012, qui porte mention d'une absence du 1re janvier 2012 au 23 janvier 2012, date de la rupture des relations contractuelles ; que le motif de rupture renseigné sur l'attestation Pôle emploi est le suivant : « prise d'acte » ; que la prise d'acte de la rupture ne peut emporter les conséquences d'un licenciement que dans l'hypothèse où elle est justifiée par des manquements de l'employeur imposant la rupture de la relation de travail ; qu'en l'espèce, Mme X... n'a pas rapporté la preuve des manquements qu'elle allègue savoir : le défaut de paiement de ses salaires, puisque la preuve contraire est rapportée par M. Y... ; qu'elle soutient qu'il ne lui était plus fourni aucun travail, mais ne conteste pas qu'elle ne se rendait plus à son travail alors qu'il est justifié de ce qu'elle continuait à être payée ; que dans ces conditions, la prise d'acte de la rupture ne peut emporter d'autres effets que ceux d'une démission, et le jugement déféré sera confirmé sur ce point, et sur autres dispositions relatives à l'indemnité de procédure ;
ET AUX MOTIFS RÉPUTÉS ADOPTÉS QU'il y a eu dépôt de la procédure de prise d'acte de la rupture ; qu'il apparaît que le secrétariat du cabinet est assuré par une salariée à temps plein depuis 2007 ; que la demanderesse ne se rendait plus sur son lieu de travail ; que le conseil de prud'hommes dit que la rupture du contrat de travail s'analyse en une démission ; qu'il convient par conséquent de débouter Mme Y... de sa demande de dommages et intérêts ;
1) ALORS QUE le juge doit donner aux faits dont il est saisi leur exacte qualification ; que, pour rejeter la demande de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, la cour d'appel a retenu la qualification de « prise d'acte » portée par l'employeur sur l'attestation destinée à Pôle emploi et a jugé que la salariée ne démontrait pas l'existence d'un manquement de l'employeur aux obligations découlant du contrat de travail ; qu'en statuant ainsi, tout en constatant l'absence de manifestation d'une volonté de rompre de la part de la salariée, de sorte que la rupture s'analysait en un licenciement, la cour d'appel a violé l'article 12 du code de procédure civile ;
2) ALORS AU DEMEURANT QUE l'absence du salarié ne dispense pas l'employeur d'engager la procédure de licenciement ; qu'ayant constaté que la salariée ne se rendait plus à son travail, en la déboutant de sa demande indemnitaire de rupture aux motifs inopérants que son salaire aurait continué à lui être versé, la cour d'appel a violé les articles L 1232-1, L 1232-6, L 1235-1 et L 1235-3 du code du travail ;
3) ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE la cassation du chef du dispositif de l'arrêt déboutant la salariée de sa demande de paiement de salaire annulera par voie de conséquence celui par lequel la cour d'appel l'a également déboutée des conséquences de sa prise d'acte de la rupture du contrat de travail, par application de l'article 624 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-12493
Date de la décision : 16/03/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 28 janvier 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 mar. 2016, pourvoi n°15-12493


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (président)
Avocat(s) : SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin, SCP de Chaisemartin et Courjon

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.12493
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