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16/02/2016 | FRANCE | N°14-26247

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 16 février 2016, 14-26247


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 2 de la loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que les sociétés Datex Martinique et Datex restauration ont pour activité la préparation de repas qu'elles livrent et servent, ensuite, dans des établissements scolaires ; qu'estimant que celle-ci constituait une activité de production, l'administration des douanes leur a notifié une infraction de manoeuvre ayant eu pour résultat de les faire bénéficier indûment d'une exonération de

l'octroi de mer au titre des années 2007 à 2010 ; qu'après avis de mise en rec...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 2 de la loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que les sociétés Datex Martinique et Datex restauration ont pour activité la préparation de repas qu'elles livrent et servent, ensuite, dans des établissements scolaires ; qu'estimant que celle-ci constituait une activité de production, l'administration des douanes leur a notifié une infraction de manoeuvre ayant eu pour résultat de les faire bénéficier indûment d'une exonération de l'octroi de mer au titre des années 2007 à 2010 ; qu'après avis de mise en recouvrement et rejet de leurs contestations, les deux sociétés ont saisi le tribunal d'instance afin d'être déchargées de cette imposition ;
Attendu que, pour accueillir cette demande, l'arrêt retient que les deux sociétés exercent une activité de restauration collective comprenant la préparation des repas à consommer et leur acheminement sur les lieux où elles les servent ou distribuent selon des modalités pratiques passant par la fourniture, à ceux qui les consomment ou commandent, de services accessoires ; qu'il en déduit qu'elles exercent, non pas une activité de production mais une activité de fourniture de prestations de restauration collective les excluant de l'assujettissement à l'octroi de mer ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans analyser l'activité de préparation des repas en cause ni préciser en quoi celle-ci ne comportait aucune opération de production ou transformation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 juillet 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Fort-de-France ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France, autrement composée ;
Condamne les sociétés Datex Martinique et Datex restauration aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize février deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour le directeur général des douanes et droits indirects et l'administration des douanes et droits indirects de Martinique
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR constaté que les activités développées par les sociétés DATEX RESTAURATION et DATEX MARTINIQUE ne relèvent pas d'activités de production, mais de prestations de services, d'AVOIR constaté que les dispositions relatives à l'octroi de mer et à l'octroi de mer régional ne sont pas applicables à ces deux sociétés, d'AVOIR annulé les décisions prises les 21 et 24 juin 2010 par la direction interrégionale des douanes Antilles-Guyane et les avis de mise en recouvrement du 25 juin 2010 qui en découlent, adressées à ces deux sociétés, d'AVOIR condamné la direction générale des douanes et droits indirects de la Martinique à rembourser les frais occasionnés à ces deux sociétés par la constitution de garanties et d'AVOIR rejeté toutes les demandes formées par l'administration des douanes et droits indirects en cause d'appel ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE, selon l'article 1er, 2° de la loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004 relative à l'octroi de mer, « dans les régions de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique, de Mayotte ou de La Réunion sont soumises à une taxe dénommée octroi de mer : 1° l'importation de marchandises ; 2° les livraisons de biens faites à titre onéreux par des personnes qui y exercent des activités de production ; la livraison d'un bien s'entend du transfert du pouvoir de disposer d'un bien meuble corporel comme un propriétaire » ; que selon l'article 2 de cette même loi, « toute personne qui exerce de manière indépendante une activité de production dans les régions de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique, de Mayotte ou de La Réunion est assujettie à l'octroi de mer, quels que soient son statut juridique et sa situation au regard des autres impôts. Sont considérés comme des activités de production les opérations de fabrication, de transformation ou de rénovation de biens meubles corporels, ainsi que les opérations agricoles et extractives » ; que la société DATEX RESTAURATION est une société à responsabilité limitée immatriculée au registre du commerce et des sociétés de FORT-DE-FRANCE le 27 avril 1994 ayant pour activité principale celle d'«autres services de restauration » selon la nomenclature des activités françaises (NAF) établie par l'INSEE ; que la société DATEX MARTINIQUE est une société à responsabilité limitée immatriculée au registre du commerce et des sociétés de FORT-DEFRANCE le 2 mars 1999 ayant elle aussi pour activité principale celle d'« autres services de restauration » ; qu'il n'est pas contesté que la société DATEX MARTINIQUE et la société DATEX RESTAURATION ont ainsi des activités identiques les conduisant à fabriquer des repas qu'elles servent dans des restaurants ou cantines d'établissements scolaires ; que le premier juge a constaté que les activités des deux sociétés devaient être qualifiées de prestations de services et non d'activités de production au sens des articles 1er et 2 de la loi du 2 juillet 2004 après avoir relevé que leur activité de fabrication et de fourniture de repas dans le cadre des cantines scolaires étant subordonnées à leur activité de prestation de service fondamentale constituée par le service à table ou dans le cadre de « self-services », elles ne pouvaient être divisibles et constituaient, pour sa majeure partie, une activité de services ; que convenant que les prestations de service sont par principe exclues de la loi sur l'octroi de mer, l'administration des douanes et droits indirects soutient que c'est à tort que le tribunal d'instance a considéré que l'intégralité des opérations réalisées par la société DATEX MARTINIQUE et la société DATEX RESTAURATION constituait une prestation de service ne pouvant donner lieu à taxation au titre de l'octroi de mer ; qu'en cause d'appel, sans être contredite par l'administration des douanes et droits indirects, la société DATEX MARTINIQUE et la société DATEX RESTAURATION détaillent leur activité comme composée, d'une part, de la préparation des repas qu'elles servent à des usagers du service public de restauration scolaire et, d'autre part, de la fourniture de services annexes tels l'encaissement de la participation des parents d'élèves, l'acheminement des repas dans les réfectoires ou le service à table et l'animation des réfectoires ; qu'en application de la loi n°2004-639 du 2 juillet 2004, sont soumises à l'octroi de mer les livraisons de biens faits à titre onéreux par les seules personnes exerçant, dans les régions d'outre-mer, de manière indépendante, des activités de production ; qu'il en résulte que seules sont assujetties à l'octroi de mer les personnes qui exercent des activités de production, la loi considérant que sont des activités de production les opérations de fabrication, de transformation ou de rénovation de biens meubles corporels, ainsi que les opérations agricoles et extractives ; que sont dès lors exclues de l'octroi de mer les prestations de services ; que la Cour relève qu'il est établi que la société DATEX MARTINIQUE et la société DATEX RESTAURATION exercent l'une et l'autre une activité de restauration collective comprenant nécessairement la préparation des repas à consommer et leur acheminement sur les lieux dans lesquels elles les servent ou distribuent selon des modalités pratiques passant par la fourniture, à ceux qui les consomment ou commandent, de services accessoires ; que la Cour en déduit que, ce faisant, la société DATEX MARTINIQUE et la société DATEX RESTAURATION exercent, non pas une activité de production, mais une activité de fourniture de prestations de services de restauration collective les excluant de l'assujettissement à l'octroi de mer ; que, pour ces motifs, la Cour approuve le jugement déféré qu'elle confirme en toutes ses dispositions ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE l'article 1er de la loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004 prévoit que dans les régions de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique et de la Réunion, sont soumises à la taxe octroi de mer : - l'importation de marchandises, - les livraisons de biens faites à titre onéreux par des personnes qui y exercent des activités de production ; que la livraison d'un bien s'entend du transfert du pouvoir de disposer d'un bien meuble corporel comme un propriétaire ; que l'article 2 de la même loi indique que doivent être considérées comme des activités de production les opérations de fabrication, transformation ou de rénovation de biens meubles corporels ; que l'article 6 du décret d'application n° 2004-1550 du 30 décembre 2004 précise, pour l'application du 2° de l'article 6 de la loi du 2 juillet 2004, que sont considérés comme matières premières, les produits qui s'incorporent dans un processus de fabrication d'un produit fini ou semi-fini et/ou qui font l'objet d'une transformation ou d'une ouvraison substantielle ainsi que les fournitures et autres approvisionnements qui concourent au processus de fabrication ; qu'à titre préliminaire, il convient de relever que l'activité principale développée par chacune des deux sociétés demanderesses, dont la qualification est contestée, est la suivante : - dans le cadre d'une délégation de service public ou d'un marché public de prestation de service, - fourniture des repas dans le cadre des cantines scolaires, - élaboration des menus, - confection et assemblage des produits alimentaires, - acheminement des repas dans les réfectoires, - service à table et animation des réfectoires, - formation des agents communaux, - équipement en matériel et petits matériels des réfectoires, - construction de cuisine centrale, entretien, maintenance de ces cuisines ; que les demanderesses se prévalent de la classification APE pour justifier de ce que leur activité serait une activité de prestation de services ; que, toutefois, la classification sous un code APE n'est pas, à elle seule, de nature à exclure l'exercice d'une activité de production ; qu'il peut tout au plus s'agir d'un indice ; que la même observation s'impose d'une part pour la qualification retenue par le droit administratif en général, la législation applicable en matière de transparence des prix, les règles applicables à la TVA ; qu'en l'espèce, il y a lieu d'observer la proportion prise par la transformation des produits dans l'intégralité de la prestation fournie par les sociétés en cause, d'une part, et leur caractère dissociable de la simple revente et de la prestation de service, d'autre part ; qu'ainsi, la fourniture de repas dans le cadre des cantines scolaires peut être décomposée comme suit : - création, construction de cuisine centrale, entretien, maintenance de ces cuisines, -équipement en matériel et petits matériels des réfectoires, - formation des agents communaux, - élaboration de menus au vu de critères diététiques et d'un budget pré-établi, - confection et assemblage de certains des produits alimentaires servis, - acheminement des repas dans les réfectoires, - service à table et animation des réfectoires ; qu'en l'espèce, il est constant que : - les postes relatifs à la confection et l'assemblage de certains des produits alimentaires servis et l'acheminement des repas dans les réfectoires correspond à la « livraison de biens faites à titre onéreux (dans le cadre d'une) activité de production », - certains produits sont servis sans aucune transformation et ne relèvent donc pas de l'octroi de mer, - toutes les autres prestations relèvent de la pure prestation de services ; que dans ces conditions, la question qui se pose est celle de la divisibilité de l'activité des deux sociétés DATEX, d'une part, et dans la négative, de l'activité prépondérante de nature à qualifier son activité ; que le processus ci-dessus détaillé met en exergue que, même si, dans l'acception la plus courante, le rôle des sociétés demanderesses est la fabrication et la fourniture de repas dans le cadre des cantines scolaires, il n'en demeure pas moins que cette activité est totalement subordonnée aux autres ; qu'en effet, ces prestations ne sauraient exister indépendamment de cuisines centrales et des réfectoires, de leur entretien et de leur maintenance, de la prestation de service fondamentale que constitue le service, tant à table que dans le cadre de « self-services » ; que, dans ces conditions, il serait spécieux de considérer l'activité en cause de divisible et l'on doit relever que la majeure partie de l'activité est une activité de services ; que, dès lors, il convient de constater que les activités des sociétés demanderesses doivent être qualifiées de prestations de services et non d'activité de production au sens des articles 1er et 2 de la loi du 2 juillet 2004 et en conséquence de relever que c'est à tort que l'administration des douanes les a verbalisées et d'annuler chacune des décisions entreprises ; qu'il sera ordonné le remboursement des frais occasionnés par la constitution de garanties, conformément à l'article 348 du Code des douanes ;
1°) ALORS QUE, dans les régions de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique, de Mayotte ou de La Réunion, toute activité de production, même exercée à titre secondaire ou accessoire, doit être soumise à l'octroi de mer ; qu'en considérant que les sociétés DATEX RESTAURATION et DATEX MARTINIQUE ne devraient pas être assujetties à l'octroi de mer en ce que la préparation des repas à consommer et leur acheminement sur les lieux dans lesquels elles les servent ou distribuent seraient nécessairement comprises dans leur activité de fourniture de prestations de services de restauration collective exemptée d'octroi de mer, quand cette activité de production de repas devait être en elle-même soumise à cet impôt, indépendamment du fait qu'elle n'aurait été que l'accessoire d'une activité de prestation de services, la Cour d'appel a violé les articles 1er et 2 de la loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004 ;
2°) ALORS QU'en toute hypothèse, constitue une activité de production soumise à l'octroi de mer dans les régions de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique, de Mayotte ou de La Réunion, toute opération de transformation de biens meubles corporels, ce qui est le cas lorsque l'état d'un produit est changé en un autre état par modification de ses propriétés ; qu'en considérant que l'activité des sociétés DATEX RESTAURATION et DATEX MARTINIQUE consistant dans la préparation des repas à consommer constituerait, non pas une activité de production, mais une activité de prestation de services, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si la cuisson des aliments composant ces repas, permettant de transformer les propriétés de matières premières pour en faire des produits finis consommables, ne constituait pas une opération de transformation de biens meubles corporels, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1er et 2 de la loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 14-26247
Date de la décision : 16/02/2016
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Fort-de-France, 29 juillet 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 16 fév. 2016, pourvoi n°14-26247


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.26247
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