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10/02/2016 | FRANCE | N°14-14325

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 février 2016, 14-14325


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la société Transports Veynat (la société), le 2 juin 2003, en qualité de chauffeur routier ; qu'il a été placé en arrêt de travail, à compter du 14 juin 2010 ; qu'à l'issue d'une seconde visite, le médecin du travail a conclu, le 19 janvier 2011, à son inaptitude au poste de chauffeur poids lourds au siège de l'entreprise, à Tresses (33), et à son aptitude à la conduite de poids lourds ; que la société lui a proposé, le 10 février 2011, un

changement d'affectation sur deux autres de ses sites, à Achicourt (62) ou M...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la société Transports Veynat (la société), le 2 juin 2003, en qualité de chauffeur routier ; qu'il a été placé en arrêt de travail, à compter du 14 juin 2010 ; qu'à l'issue d'une seconde visite, le médecin du travail a conclu, le 19 janvier 2011, à son inaptitude au poste de chauffeur poids lourds au siège de l'entreprise, à Tresses (33), et à son aptitude à la conduite de poids lourds ; que la société lui a proposé, le 10 février 2011, un changement d'affectation sur deux autres de ses sites, à Achicourt (62) ou Mérignac (16), refusé par le salarié ; qu'elle l'a informé, le 8 mars 2011, de son rattachement au site de Mérignac et l'a licencié, le 5 avril 2011, pour refus de cette nouvelle affectation ;
Sur le premier moyen :
Vu les articles L. 1226-2 et L. 1226-4 du code du travail ;
Attendu que, pour débouter le salarié de ses demandes en paiement à titre de reprise du paiement du salaire et de dommages-intérêts pour rupture abusive, l'arrêt, après avoir écarté l'origine professionnelle de l'inaptitude, retient que l'avis émis par le médecin du travail n'est pas un avis d'inaptitude totale à tout poste dans l'entreprise mais est un avis d'inaptitude limité à un poste au siège de l'entreprise, le médecin du travail confirmant d'ailleurs, dans une lettre du 24 février 2011, " qu'un autre poste de chauffeur PL sur un autre établissement ou sur une autre filiale de la société pourrait convenir ", que le salarié n'ayant pas été déclaré inapte, l'employeur n'était pas tenu de mettre en oeuvre une procédure de licenciement dans les conditions prescrites par l'article L. 1226-2 du code du travail et que la discussion autour de la légitimité du refus de reclassement est donc sans objet ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le refus par un salarié déclaré inapte à son poste d'une proposition de reclassement n'implique pas, à lui seul, le respect par l'employeur de son obligation de reclassement et qu'il appartient à ce dernier, quelle que soit la position prise alors par le salarié, de tirer les conséquences de ce refus soit en formulant de nouvelles propositions de reclassement, soit en procédant au licenciement de l'intéressé au motif de l'impossibilité de reclassement, la cour d'appel, dont il résultait de ses constatations que le salarié avait été déclaré inapte à son poste, a violé les textes susvisés ;
Et sur le second moyen :
Vu les articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil ;
Attendu qu'une clause de mobilité doit définir de façon précise sa zone géographique d'application et ne peut conférer à l'employeur le pouvoir d'en étendre unilatéralement la portée ou limiter le pouvoir d'appréciation du juge ;
Attendu que, pour dire le licenciement justifié, l'arrêt retient notamment que c'est sans méconnaître la loi et faisant un usage non abusif de son pouvoir de direction que la société a proposé au salarié un changement d'affectation soit à Achicourt, dans le Pas-de-Calais, soit à Mérignac près d'Angoulême, le contrat de travail prévoyant que son poste est basé à Tresses et que tout changement de lieu habituel de rattachement nécessité par l'organisation du service et la bonne marche de l'entreprise ne saurait être considéré comme une modification substantielle du contrat de travail, que, de plus, son emploi est un emploi de conducteur poids lourds grand routier, impliquant des déplacements sur tout le territoire national et en Belgique, au point que le lieu d'affectation n'a que peu d'incidence sur l'emploi et ne constitue pas une modification du contrat de travail, qu'en refusant pour convenances personnelles de rejoindre son poste à Mérignac, et en s'absentant pour ce seul motif et donc sans motif valable de son travail, le salarié a commis un acte d'insubordination qui constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que la clause ne comportait aucune définition de sa zone géographique d'application, la cour d'appel, qui, pour apprécier la caractère sérieux du licenciement, a fait application d'une clause nulle, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de ses demandes tendant à voir condamner la société au paiement d'une somme au titre de la reprise du paiement du salaire, en application de l'article L. 1226-4 du code du travail et dit que son licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 21 janvier 2014, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Condamne la société Transports Veynat aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Transports Veynat et la condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix février deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté monsieur X... de ses demandes tendant à voir condamner la société Transports Veynat au paiement de la somme de 3. 756, 48 euros bruts au titre de la reprise du paiement du salaire, en application de l'article L. 1226-4 du code du travail et d'AVOIR dit que le licenciement de monsieur X... reposait sur une cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE l'article L. 1226-2 du code du travail prévoit notamment que lorsque le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait antérieurement à ses arrêts de travail, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités ; que cette proposition doit prendre en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise ; que l'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail ; qu'en l'espèce, après deux visites de reprise, le 4 janvier 2011 et le 19 janvier 2011, le médecin du travail a conclu à l'inaptitude de M. X... au poste de chauffeur poids-lourds, au siège de l'entreprise à Tresses en Gironde mais l'a déclaré « apte à la conduite de poids-lourds » ; qu'il s'ensuit que l'avis émis par le médecin du travail n'est pas un avis d'inaptitude totale à tout poste dans l'entreprise mais est un avis d'inaptitude limité à un poste au siège de l'entreprise à Tresses en Gironde ; que le médecin du travail confirme d'ailleurs, dans une lettre du 24 février 2011, qu'un autre poste de chauffeur PL sur un autre établissement ou sur une autre filiale de la société pourrait convenir ; que s'il est acquis qu'il existait des difficultés relationnelles entre le salarié et des membres de la direction de l'entreprise au siège de Tresses, aucun élément du dossier ne permet de considérer que l'état dépressif de monsieur X... en est la conséquence et qu'il est consécutif à un accident du travail ; que le salarié n'ayant pas été déclaré inapte, l'employeur n'était pas tenu de mettre en oeuvre une procédure de licenciement dans les conditions prescrites par l'article L. 1226-2 du code du travail ; que la consultation des délégués de personnel n'était pas requise, bien qu'ayant été néanmoins effectuée le 28 février 2011, lors d'une réunion exceptionnelle, ceux-ci s'étant déclarés dans l'impossibilité de proposer une solution pouvant permettre de sortir de ce blocage et ainsi d'éviter la rupture du contrat de travail de monsieur X... ; que la discussion autour de la légitimité du refus de reclassement est donc sans objet au cas d'espèce ; que c'est sans méconnaître la loi et faisant un usage non abusif de son pouvoir de direction que la société Transports Veynat a proposé à monsieur X... le 10 février 2011 un changement d'affectation soit à Achicourt dans le Pas de Calais, soit à Mérignac près d'Angoulême ; que le contrat de travail de monsieur X... prévoit en effet dans son article 6 : que le poste de monsieur X... est basé à Tresses ; que tout changement de lieu habituel de rattachement nécessité par l'organisation du service et la bonne marche de l'entreprise ne saurait être considéré comme une modification substantielle du contrat de travail ; que, de plus, l'emploi de monsieur X... est un emploi de conducteur poids-lourds grand routier, impliquant des déplacements sur tout le territoire national et en Belgique, au point que le lieu d'affectation n'a que peu d'incidence sur l'emploi ; qu'il est précisé, par les témoignages du responsable du site de Mérignac et du responsable des ressources humaines de l'entreprise, lesquels sont les mieux à même d'éclairer la Cour sur les usages en vigueur dans l'entreprise, que les chauffeurs sont autorisés à garder au besoin les véhicules chez eux le week-end en fonction de l'activité du début de semaine ; que le changement d'affectation de monsieur X..., du site de Tresses (33) vers celui de Mérignac (16) n'a en conséquence que peu d'incidence sur son emploi et ne constitue pas une modification du contrat de travail ; que la proposition de l'employeur, d'affecter monsieur X... sur le poste de Mérignac a été refusée par le salarié, au motif (lettre du 10 février 2011) que sa conjointe travaille à Agen et qu'il vient de faire construire à Feugarolles (47) et qu'il lui est dès lors impossible d'envisager un changement de domicile ; qu'en refusant pour convenances personnelles de rejoindre son poste à Mérignac, et en s'absentant pour ce seul motif et donc sans motif valable de son travail, monsieur X... a commis un acte d'insubordination qui constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement ; que le jugement déféré mérite confirmation en ce qu'il a dit le licenciement justifié et a débouté le salarié de ses demandes en paiement d'indemnité de rupture, tant pour non-respect de la procédure de licenciement pour inaptitude, que pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'en matière d'inaptitude, le médecin du travail est seul compétent ; que l'avis d'inaptitude du médecin du travail doit reposer sur 2 avis établis à 2 semaines d'intervalle ; que le Conseil relève que le 2ème avis du médecin du travail, s'il évoque l'inaptitude partielle du salarié pour le site de Tresses, conclut cependant à son aptitude à la conduite de poids-lourds ; qu'il s'ensuit que le salarié ne saurait être déclaré totalement inapte à son emploi de chauffeur routier et que la réglementation liée à une inaptitude physique ne s'applique pas en l'espèce ; que la modification de l'affectation administrative, surtout si elle est prévue dans le contrat de travail et se trouve dans un rayon d'action raisonnable au regard de l'emploi tenu, ne saurait constituer une modification d'un élément important du contrat de travail que le salarié pourrait refuser sans porter atteinte au pouvoir de direction de l'employeur ; qu'en refusant les diverses propositions de l'employeur et en ne donnant pas suite à la mise en demeure de celui-ci, monsieur Juan-Pedro X... a refusé de se soumettre au pouvoir de direction de celui-ci ; que ce type de comportement est constitutif d'une faute justifiant un licenciement ; qu'en conséquence, le Conseil confirmera que le licenciement de monsieur Juan Pedro X... repose sur une cause réelle et sérieuse ;
1°) ALORS QU'aux termes de l'article L. 1226-2 du code du travail, lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou à un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, en prenant en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté qu'après deux visites de reprise, le médecin du travail avait conclu à l'inaptitude de monsieur X... à son poste de chauffeur poids-lourds au siège de l'entreprise à Tresses en Gironde, tout en indiquant que le salarié était apte à la conduite de poids-lourds ; qu'en estimant néanmoins que le salarié n'avait pas été déclaré inapte et que l'employeur n'était pas tenu de mettre en oeuvre la procédure de reclassement prévue par l'article L. 1226-2 du code du travail, quand il résultait de ses constatations que l'avis du médecin du travail s'analysait en un avis d'inaptitude au poste précédemment occupé par le salarié, la cour d'appel a violé le texte précité ;
2°) ALORS QU'en cas d'inaptitude, même partielle, du salarié à reprendre le poste de travail qu'il occupait précédemment, l'employeur est tenu de mettre en oeuvre l'obligation de reclassement prévue par l'article L. 1226-2 du code du travail ; qu'en relevant que le second avis du médecin du travail évoquait l'inaptitude partielle du salarié pour en déduire que la règlementation en matière de reclassement liée à l'inaptitude ne s'appliquait pas, la cour d'appel a violé l'article L. 1226-2 du code du travail ;
3°) ALORS QUE ne peut constituer en soi une cause réelle et sérieuse de licenciement le refus par le salarié du poste de reclassement proposé par l'employeur en application de l'article L. 1226-2 du code du travail lorsque la proposition de reclassement emporte modification du contrat de travail ou des conditions de travail ; qu'il appartient à l'employeur de tirer les conséquences du refus du salarié soit en formulant de nouvelles propositions de reclassement, soit en procédant au licenciement de l'intéressé aux motifs de l'inaptitude et de l'impossibilité du reclassement ; qu'en estimant, pour dire que le licenciement de monsieur X... reposait sur une cause réelle et sérieuse, qu'en refusant pour convenances personnelles de rejoindre son poste à Mérignac et en s'absentant pour ce seul motif de son travail, le salarié avait commis un acte d'insubordination, quand le changement d'affectation de monsieur X... du site de Tresses vers celui de Merignac, à la suite de l'avis d'inaptitude du médecin du travail, constituait une proposition de reclassement que le salarié était en droit de refuser, la cour d'appel a violé l'article L. 1226-2 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de monsieur X... reposait sur une cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE c'est sans méconnaître la loi et faisant un usage non abusif de son pouvoir de direction que la société Transports Veynat a proposé à monsieur X... le 10 février 2011 un changement d'affectation soit à Achicourt dans le Pas de Calais, soit à Mérignac près d'Angoulême ; que le contrat de travail de monsieur X... prévoit en effet dans son article 6 : que le poste de monsieur X... est basé à Tresses ; que tout changement de lieu habituel de rattachement nécessité par l'organisation du service et la bonne marche de l'entreprise ne saurait être considéré comme une modification substantielle du contrat de travail ; que, de plus, l'emploi de monsieur X... est un emploi de conducteur poids-lourds grand routier, impliquant des déplacements sur tout le territoire national et en Belgique, au point que le lieu d'affectation n'a que peu d'incidence sur l'emploi ; qu'il est précisé par les témoignages du responsable du site de Mérignac et du responsable des ressources humaines de l'entreprise, lesquels sont les mieux à même d'éclairer la Cour sur les usages en vigueur dans l'entreprise, que les chauffeurs sont autorisés à garder au besoin les véhicules chez eux le week-end en fonction de l'activité du début de semaine ; que le changement d'affectation de monsieur X..., du site de Tresses (33) vers celui de Mérignac (16) n'a en conséquence que peu d'incidence sur son emploi et ne constitue pas une modification du contrat de travail ; que la proposition de l'employeur, d'affecter monsieur X... sur le poste de Mérignac a été refusée par le salarié, au motif (lettre du 10 février 2011) que sa conjointe travaille à Agen et qu'il vient de faire construire à Feugarolles (47) et qu'il lui est dès lors impossible d'envisager un changement de domicile ; qu'en refusant pour convenances personnelles de rejoindre son poste à Mérignac, et en s'absentant pour ce seul motif et donc sans motif valable de son travail, monsieur X... a commis un acte d'insubordination qui constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement ; que le jugement déféré mérite confirmation en ce qu'il a dit le licenciement justifié et a débouté le salarié de ses demandes en paiement d'indemnité de rupture, tant pour non-respect de la procédure de licenciement pour inaptitude, que pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE la modification de l'affectation administrative, surtout si elle est prévue dans le contrat de travail et se trouve dans un rayon d'action raisonnable au regard de l'emploi tenu, ne saurait constituer une modification d'un élément important du contrat de travail que le salarié pourrait refuser sans porter atteinte au pouvoir de direction de l'employeur ; qu'en refusant les diverses propositions de l'employeur et en ne donnant pas suite à la mise en demeure de celui-ci, monsieur Juan-Pedro X... a refusé de se soumettre au pouvoir de direction de celui-ci ; que ce type de comportement est constitutif d'une faute justifiant un licenciement ; qu'en conséquence, le Conseil confirmera que le licenciement de monsieur Juan Pedro X... repose sur une cause réelle et sérieuse ;
1°) ALORS QU'une clause de mobilité doit, sous peine de nullité, définir de façon précise sa zone géographique d'application ; que, pour dire que le changement d'affectation de monsieur X... de Tresses à Mérignac, soit à plus de 118 kilomètres de distance, constituait un simple changement des conditions de travail, la cour d'appel a relevé que le contrat de travail stipulait en son article 6 que « tout changement de lieu habituel de rattachement nécessité par l'organisation du service et la bonne marche de l'entreprise ne saurait être considéré comme une modification substantielle du contrat de travail » ; qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations que la clause de mobilité stipulée dans le contrat de travail de monsieur X... ne définissait pas de façon précise sa zone géographique d'application, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L. 1232-1 du code du travail ;
2°) ALORS QUE, dans ses conclusions d'appel, monsieur X... faisait valoir que son contrat de travail stipulait que « lors de ses périodes de non activité (repos ou congés), Juan X... devra laisser le matériel sur le parc de la société des Transports Veynat à Tresses et rentrera à son domicile par ses propres moyens et à ses frais » et qu'une telle clause lui imposait ainsi de ne pas habiter à une distance déraisonnable de son lieu d'affectation (conclusions d'appel, page 6) ; qu'il faisait, par ailleurs valoir que la possibilité pour certains chauffeurs de garder leur véhicule le week-end était conditionné à l'activité du début de semaine (page 7) ; que pour retenir que le changement d'affectation de monsieur X... de Tresses à Mérignac, soit à plus de 118 kilomètres de distance, constituait un simple changement des conditions de travail, la cour d'appel a retenu que le lieu d'affectation pour un conducteur poids-lourds grand routier, impliquant des déplacements sur tout le territoire national et en Belgique, n'avait que peu d'incidence sur son emploi, en se bornant à constater que, selon les usages en vigueur dans l'entreprise, les chauffeurs sont autorisés à garder au besoin les véhicules chez eux le week-end en fonction de l'activité du début de semaine ; qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions d'appel de monsieur X... dont il résultait que son contrat de travail contenait une stipulation contraire à l'usage auquel elle faisait référence, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE monsieur X... se prévalait, en outre, du fait que l'avis d'inaptitude à son poste de chauffeur poids-lourds, sur le seul site de Tresses, était lié à ses mauvaises relations de travail avec son supérieur hiérarchique sur son lieu d'affectation ; qu'en retenant néanmoins que le lieu d'affectation du salarié n'avait que peu d'incidence sur son emploi, sans répondre à ces conclusions qui démontraient le contraire, la cour d'appel a de nouveau méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
4°) ALORS QU'un changement d'affectation géographique ne peut être imposé au salarié lorsqu'il porte une atteinte disproportionnée à son droit à une vie personnelle et familiale ; que la cour d'appel a, elle-même, constaté que la proposition d'affectation sur le poste de Mérignac avait été refusée par le salarié au motif que sa conjointe travaillait à Agen, qu'il venait de faire construire sa résidence principale à Feugarolles-soit à 228 kilomètres de sa nouvelle affectation-et qu'il lui était impossible d'envisager un changement de domicile ; qu'en se bornant à constater, pour dire que le licenciement de Monsieur X... reposait sur une cause réelle et sérieuse, que le salarié avait refusé de rejoindre son nouveau poste pour convenance personnelle, sans rechercher si ce changement d'affectation, qui impliquait un changement de domicile, ne portait pas atteinte à la vie personnelle et familiale du salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 1232-1 du code du travail ;
5°) ALORS QUE le changement d'affectation géographique, même lorsqu'il repose sur une clause de mobilité, doit être mis en oeuvre par l'employeur de manière loyale ; que Monsieur X... faisait, par ailleurs, valoir que le changement d'affectation imposé par l'employeur, après un premier refus du salarié, visait en réalité à pousser celui-ci à la faute pour tenter de justifier un licenciement disciplinaire ; qu'en laissant manifestement sans réponse ces conclusions caractérisant la déloyauté de l'employeur dans la mise en oeuvre du changement d'affectation, la cour d'appel a encore méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-14325
Date de la décision : 10/02/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Agen, 21 janvier 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 fév. 2016, pourvoi n°14-14325


Composition du Tribunal
Président : M. Chollet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.14325
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