LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Joint les pourvois n° U 14-23. 648, E 13-23. 654, P 13-25. 548 et F 14-28. 052 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Fort-de-France, 21 juin 2013), rendu sur renvoi après cassation (2e chambre, 4 décembre 2008, pourvoi n° 07-19. 872), que la caisse générale de sécurité sociale de la Martinique (CGSSM) a fait construire un immeuble de bureaux et a souscrit une police d'assurance dommages-ouvrage auprès de la société La Mutuelle du Mans assurances IARD (MMA) ; que le lot portant sur la climatisation a été attribué à la société Saga, assurée auprès de la société SMABTP, qui s'est approvisionnée en produits de calorifugeage auprès de la société Isolmat, assurée auprès de la MMA, qui a elle-même acquis des matériaux auprès de la société HGD, aux droits de laquelle vient la société Total Petrochemicals France ; que des désordres sont apparus dans le réseau de climatisation après réception de l'immeuble ; que la CGSSM a assigné, après expertise, la MMA, la société Saga et la SMABTP, la société bureau Veritas, contrôleur technique, MM. X... et Y..., architectes, la société Génipa, sous-traitant de la société Saga pour les travaux de calorifugeage, et la société Bet Scoop, bureau d'études sous-traitant des architectes pour le lot litigieux ; que, le 29 septembre 1997, la société Saga et la SMABTP ont appelé en garantie la société Gan, assurance des architectes, la société Isolmat et la MMA ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal de la société Isolmat et de la société MMA dans les pourvois n° U 14-23. 648, E 13-23. 654 :
Vu les articles 1792 et 1792-4 du code civil ;
Attendu que, pour déclarer la société Isolmat responsable et la condamner, avec la société MMA, à indemniser le maître d'ouvrage, l'arrêt retient que, le produit fourni par l'entreprise se trouvant incorporé à un immeuble, la garantie applicable est la garantie décennale et non celle due par le vendeur ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le vendeur de matériaux, qui n'est pas assimilé à un fabricant, n'est pas soumis à la garantie décennale, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident de la SMABTP et des sociétés Saga dans les pourvois n° U14-23. 648, E13-23. 654 et sur le troisième moyen du pourvoi principal et incident de la CGSSM n° P 13-25. 548, F 14-28. 052 et U 14-23. 648, réunis :
Vu l'article 1792 du code civil ;
Attendu que, pour mettre hors de cause MM.
Y...
et X..., l'arrêt retient que les architectes ont sous-traité au bureau d'études techniques Scoop le lot litigieux dans sa totalité et qu'aucun élément du dossier ne démontre qu'ils aient commis une faute ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'architecte, investi d'une mission complète de maîtrise d'oeuvre, est tenu envers le maître d'ouvrage d'une présomption de responsabilité dont il ne peut s'exonérer qu'en prouvant une cause étrangère qui ne peut provenir de l'action de son sous-traitant, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal et incident de la CGSSM dans les pourvois n° P 13-25. 548, F 14-28. 052, et U 14-23. 648, qui est recevable :
Vu les articles 1792, 1147 et 1203 du code civil ;
Attendu que l'arrêt retient que la responsabilité des désordres incombera au BET Scoop pour 40 %, à la société Saga et à la société Genipa pour 40 %, mais entre eux à 20 % chacun, et à la société Isolmat pour 20 % et que ces sociétés seront condamnées à la prise en charge de l'indemnisation du maître de l'ouvrage, à proportion de leurs parts respectives de responsabilité ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la CGSSM sollicitait une condamnation in solidum et que chaque responsable d'un même dommage doit être condamné à le réparer en totalité, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le deuxième moyen du pourvoi principal et incident de la CGSSM dans les pourvois n° P 13-25. 548, F 14-28. 052 et U 14-23. 648, qui est recevable :
Vu l'article L. 124-3 du code des assurances ;
Attendu que, pour condamner la SMABTP et la société MMA, l'arrêt retient que ces assureurs doivent garantir leurs assurés respectifs du montant des condamnations prononcées à leur encontre ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le tiers lésé dispose d'un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur et que la CGSSM demandait la condamnation in solidum des constructeurs et de leurs assurances, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
DIT n'y avoir lieu à mettre la société GAN hors de cause ;
Met hors de cause la société Bureau Veritas ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il retient la responsabilité de la société Isolmat sur le fondement décennal, met hors de cause les architectes X... et Y..., condamne la société Bet Scoop, la société Saga, la société Genipa et la société Isolmat à payer les sommes fixées à proportion de leurs parts de responsabilité et condamne la SMABTP et la société MMA à garantir leurs assurés du montant des condamnations prononcées à leur encontre, l'arrêt rendu le 21 juin 2013 par la cour d'appel de Fort-de-France ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre février deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit au pourvoi principal n° E 13-23. 654 et U 14-23. 648 par la SCP Boutet-Hourdeaux, Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour la société MMA IARD assurances et la société Isolmat
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué, D'AVOIR déclaré la société Isolmat responsable des désordres affectant le système de climatisation, avec le BET SCOOP, la société Saga et la société Alain Genipa, et D'AVOIR en conséquence condamné la société Isolmat à s'acquitter, à proportion de sa part de responsabilité qu'elle a fixée à 20 %, du paiement de la somme de 661. 674, 42 euros au titre de la réfection du réseau, de la somme de 107. 554, 30 euros au titre du prix de la maîtrise d'oeuvre et de la somme de 30. 489, 80 euros au titre des préjudices complémentaires ;
AUX MOTIFS QU'« aucune partie ne remet en cause la nature décennale des désordres affectant le bâtiment construit ; qu'il s'agit seulement pour la cour d'apprécier l'existence et le degré de responsabilité des sociétés et personnes ayant participé à la construction de l'immeuble ; qu'à cet effet, il ressort du rapport d'expertise judiciaire qu'il y a eu deux matériaux utilisés pour le calorifugeage des réseaux et que rien ne prouve que le matériau isolant vendu à la société ISOLMAT par la société aujourd'hui devenue PETROCHEMICALS France soit du phenexpan ; que l'expertise conclut ensuite à ce que les défauts de mise en oeuvre du matériau de calorifugeage sont parfaitement caractérisés ; qu'il est d'abord souligné que le matériau choisi est inadéquat car à cellules ouvertes et donc non hygrophobe ; qu'il est ensuite indiqué l'existence d'un pont thermique entre la tuyauterie en acier et l'isolant causant une humidité permanente, un traitement antirouille de la tuyauterie discontinu, un collage des demies coquilles constituant le matériau non étanche, un défaut d'étanchéité de la toile de verre pare vapeur extérieure, l'existence de nombreuses « blessures » affectant le matériau, l'absence de calorifugeage dans certaines traversées du gros oeuvre ¿ ; qu'il n'est contesté par aucune des parties au procès que le matériau de calorifugeage a été commandé par la SAS SAGA auprès de la société ISOLMAT, s'agissant de coquilles de mousse phénolique non inflammable et non hygroscopique, d'une part, et de phenexpan, d'autre part ; qu'il s'avère que la mise en oeuvre du matériau de calorifugeage a été exécutée par l'entreprise GENIPA, sur la demande de la SAS SAGA, sans que celle-ci n'exige de la première une attestation d'assurance et sans qu'un contrat de sous-traitance n'intervienne ; qu'il est ensuite certain que les architectes chargés de la maîtrise d'oeuvre, M.
Y...
et M. X..., ont sous-traité au BET SCOOP celle du lot relatif à la climatisation, consistant en la conception du réseau de climatisation et au suivi du chantier jusqu'à sa réception ; qu'au vu de ces éléments, le tribunal a, à bon droit, considéré que ce bureau technique, la SAS SAGA et l'entreprise GENIPA avait engagé leur responsabilité dans la mise en oeuvre défectueuse du réseau de climatisation ; qu'en effet, le BET SCOOP a conçu le réseau et a confié sa réalisation à la SAS SAGA, laquelle l'a fait exécuter par l'entreprise GENIPA sans respecter les règles, la dernière exécutant mal le travail ; qu'il est évident que la société ISOLMAT qui a fourni un matériau non conforme à la commande et qui s'avère ne pas être hydrophobe a elle aussi engagé sa responsabilité ; que le produit par elle fourni se trouvant incorporé à un immeuble, la garantie applicable est bien celle décennale et non celle due par un vendeur, au titre de la délivrance conforme ou des vices cachés ; que par contre, les premiers juges ont à juste titre mis hors de cause les deux architectes, la société devenue TOTAL PETROCHEMICALS France et le BUREAU VERITAS. En effet, M.
Y...
et X... ont confié à un bureau d'étude le lot litigieux dans sa totalité et aucun élément du dossier ne démontre qu'ils aient commis une faute ayant un lien de causalité avec les désordres existants ; que le fabricant du phénexpan ne peut se voir reprocher une quelconque responsabilité alors qu'il n'est pas démontré que c'est bien du phénexpan qui aurait été utilisé et qui se serait avéré défectueux ; qu'il n'est enfin justifié aucune intervention de BUREAU VERITAS dans le contrôle du lot « climatisation » ; que s'agissant enfin du partage de responsabilité, la cour déplore ne disposer ni du cahier des charges, ni de documents émanant du BET SCOOP ; qu'or, ces pièces auraient certainement permis à la cour de mieux apprécier le rôle du bureau d'étude, d'une part, et de la société titulaire du marché, d'autre part ; que faute de pouvoir se baser sur ces éléments, la juridiction entend définir la responsabilité de chacun comme suit :
- BET SCOOP : 40 %
- la SAS SAGA et l'entreprise GENIPA : 40 %, mais 20 % entre eux
- la société ISOLMAT : 20 % ;
qu'il n'est justifié par la SAS SAGA et son assureur d'aucune responsabilité du maître de l'ouvrage quant à l'aggravation des dommages ; que leurs allégations ne sont, en effet, corroborées par aucun élément, alors qu'aucun des experts mandatés par les différentes compagnies d'assurances en cause ne relève ce fait ; que sur les sommes dues à la CGSSM, l'expert judiciaire a préconisé un remplacement du réseau en réalisant un second réseau en parallèle pour éviter toute interruption dans la mission de service public de la CGSSM ; que les premiers juges ont parfaitement justifié le montant par eux retenu au titre de la réparation intégrale du dommage subi et il convient, par conséquent de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu la condamnation des succombant à verser la somme de 661. 674, 42 euros TTC au titre de la réfection du réseau et la somme de 107. 554, 30 euros TTC, au titre de la maîtrise d'oeuvre ; qu'il y a lieu, compte tenu de l'ancienneté des offres de marché, d'ordonner l'actualisation de ces montants sur la base de l'indice BT 01 du bâtiment entre la date du jugement et celle de la signification du présent arrêt ; que le jugement sera enfin confirmé quant au montant alloué au titre des préjudices complémentaires de la CGSSM dont elle a parfaitement démontré l'existence ; que la cour condamne en conséquence, et à hauteur de leurs parts de responsabilités respectives le BET SCOOP, la SAS SAGA, l'entreprise GENIPA et la société ISOLMAT à verser ces sommes à la CGSSM et les compagnies d'assurances à garantir leurs assurés respectifs desdites condamnations » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE « l'impropriété est, dans le cas d'espèce, démontrée car l'ouvrage a été édifié à des fins exclusives de bureaux, pour recevoir un personnel dans des conditions de travail incluant nécessairement le bénéfice d'une climatisation performante et durable ; que d'ailleurs, s'agissant du lot 14 « climatisation, ventilation et extraction », il suffit de rappeler que la société SAGA a passé un marché de 7. 379. 356 F pour se convaincre de l'importance du système mis en place, dans un immeuble professionnel, situé en zone subtropicale ; qu'il doit être rappelé que selon les experts le calorifuge des systèmes de provenance imprécise s'est relevé ne pas être en conformité avec l'usage auquel il était destiné, ne pas être en conformité avec les documents contractuels et ne pas être en conformité avec les règles de l'art ; qu'il doit être tenu pour certain que seule la présence d'une humidité permanente ou alternée dans les cavités de l'isolant est à l'origine de la corrosion perforante des tubes en aciers des tuyauteries ; que cette corrosion perforante non encore décidée par l'expert A... en 1989 a été décelée par la cabinet TEXA en 1995 ; qu'il s'agit donc d'un dommage irréversible rendant l'ouvrage impropre à sa destination, le système de climatisation devant être doublé d'un second réseau en parallèle, mis en place secteur par secteur ; que sur les responsabilités, les experts dont les travaux doivent être homologués ont toujours affirmé que la corrosion perforante des tubes était due à la présence d'une humidité permanente provoquée par l'existence de cavités dans la masse de l'isolant et la structure à cellule ouverte de la mousse, à l'origine de l'accumulation d'eau génératrice de la corrosion ; qu'il est admis que le CCTP prévoyait « la mise en place de coquilles de mousse phénolique non inflammable et non hydrotropique » avec interdiction de traverser le pare vapeur ; qu'or, il est acquis par les opérations d'expertise que :
- l'échantillon prélevé sur les gaines verticales en sous sol s'est révélé être un polyuréthane à cellule fermée, au demeurant parfaitement adapté à l'isolation de conduite réfrigérée mais demandant à être mis en place de façon appropriée (mousse injectée ou coquilles) afin d'éviter les ponts thermiques entre métal et isolant ;
- l'échantillon prélevé sur les gaines horizontales de la librairie s'est révélé être une mousse phénolique, d'origine indéterminée car même si les bons de livraison visés par la société ISOLMAT portent la mention phenexpan 3 kg de densité, aucun élément ne permet de dire que le produit vendu par HGD (société reprise par ATOFINA) soit du phenexpan, la climatisation de ce produit étant arrêtée depuis plus de 15 ans ;
qu'il est également acquis par les opérations d'expertises que les défauts de mise en oeuvre sont parfaitement caractérisés par les éléments suivants :
- choix d'un matériau à cellule ouverte non adéquat
- pont thermique entre tuyauterie acier et isolant
- discontinuité du traitement antirouille
- collage non étanche des coquilles
- manques d'enrobage de la toile de verre
- blessures de calorifugeage aux traversées de cloisons, chevauchement de canalisation,
- absence de calfeutrage dans certaines traversées de gros oeuvre et même traverse du calorifugeage par suspente métallique de faux plafond ;
que la précision de ce constat permet d'envisager les responsabilités encourues par les intervenants à l'acte de bâtir de la manière suivante :
- les architectes X... et Y..., liés par contrat d'architecture du 17 novembre 1977 ont signé spécialement un avenant avec le BET SCET-COOP représenté en MARTINIQUE par sa filiale le BECAR (Bureau d'Etude des Caraïbes) pour l'étude et le contrôle de certains lots ; notamment b lot n° 14 ; qu'ils seront donc mis hors de cause ;
- le BET a effectivement signé le procès verbal de réception le 26 juin 1986 ; qu'or la maîtrise d'oeuvre de conception et de suivi est responsable, selon le rappel de l'expert des défauts de réservations dans les murs pour le passage des tuyaux et de défauts d'exécution visibles à la réception ; qu'il n'est pas douteux, comme le note l'expert A... dès 1989 qu'ils étaient alors visibles ;
- le « noeud de vipère » entre canalisations-l'insuffisance du fourreautage
-le mauvais emploi du « Flincoat » qui se dessèche (défaut d'enrobage), II est également certain qu'en préconisant le phenexpan, le BET SCET-COOP n'a pas pris la peine d'actualiser l'ancienne fiche technique de cet isolant, qui n'a jamais eu comme propriété d'être hydrophobe ; que dans ces conditions, la responsabilité du BET sera retenue à raison de 30 % :
- l'entreprise SAGA et son sous traitant Alain GENIPA sont à l'origine des défauts de mise en oeuvre ; que la responsabilité de l'entreprise titulaire du lot est engagée parce qu'elle se devait de vérifier les fournitures de matériaux et la conformité de ceux-ci au CCTP, ce qu'elle n'a manifestement pas fait ; que le sous traitant a engagé sa responsabilité professionnelle (au regard de sa spécialisation) en négligeant de poser l'isolant dans les règles de l'art notamment le mauvais collage des coquilles et les rupture du calorifugeage ne permettant pas d'éviter les ponts thermiques) ; que dans ces conditions, leur responsabilité sera retenue in solidum à hauteur de 50 % et seulement entre eux à hauteur de 25 % ; que la société ISOLMAT ne peut que voir sa responsabilité retenue, non pas sur le fondement de l'article 1641 du Code Civil, dans le cadre duquel elle oppose le bref délai, mais sur le fondement de la responsabilité pour faute qui en matière de construction se trouve incluse dans le délai décennal ; qu'en effet la société a livré un matériau dont rien ne permet de dire qu'il s'agit de phenoxpan et sa fourniture auprès de la société HGD apparaît plus que douteuse ; qu'il s'agit là uniquement de « professionnels graves » (sic) rendant applicables l'article 1382 du Code Civil ; sa responsabilité sera retenue à hauteur de 20 % ; que la société ATOFINA demande sa mise hors de cause ; que celle-ci doit être accordée car rien dans les pièces produites ne permet d'accréditer la thèse selon laquelle selon laquelle la mousse phénolique partiellement appliquée sur le chantier proviendrait de chez HGD ; que le Bureau VERITAS conclut également à sa mise hors de cause car aucune des parties au procès ne réclament sa condamnation ; qu'au demeurant, il donne de son intervention sur le chantier l'exacte limite en rappelant qu'il intervient à la demande du maître d'ouvrage pour contribuer à la prévention des aléas techniques susceptibles de se rencontrer dans la réalisation de l'ouvrage, mais sans jamais se substituer aux intervenants à l'acte de bâtir chargés de la conception et de l'exécution de l'ouvrage, tenus à une obligation de résultat ; qu'il sera donc suivi dans ce raisonnement » ;
1°) ALORS QUE les parties qui invoquaient la mise en cause de la responsabilité de la société Isolmat ne soutenaient nullement que cette responsabilité relevait de la garantie décennale prévue par les articles 1792 et suivants du code civil ; que dès lors en déclarant d'office, et sans susciter les observations préalables des parties sur ce point, que le produit fourni par la société Isolmat se trouvant incorporé à un immeuble, « la garantie applicable était bien celle décennale et non celle due par un vendeur, au titre de la délivrance conforme ou des vices cachés », la cour d'appel a méconnu le principe de la contradiction, et a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE le simple fournisseur de matériaux n'est en principe pas tenu de la garantie décennale ; qu'il n'est fait exception à cette règle que pour les fournisseurs ayant importé un ouvrage, une partie d'ouvrage ou un élément d'équipement et à ceux qui les ont distribués en s'en attribuant la paternité ; qu'en l'espèce, il n'était pas contesté que la société Isolmat avait fourni à l'entrepreneur un matériau de calorifugeage sans le fabriquer ; qu'il n'était pas soutenu qu'elle l'aurait importé de l'étranger ou distribué en s'en attribuant la paternité ; qu'en retenant cependant la responsabilité décennale de la société Isolmat, la cour d'appel a violé les articles 1792, 1792-1, 1792-2 et 1792-4 du code civil ;
3°) ALORS QUE le simple fournisseur de matériaux n'est en principe pas tenu de la garantie décennale ; qu'il n'est fait exception à cette règle que pour les fournisseurs ayant importé un ouvrage, une partie d'ouvrage ou un élément d'équipement et à ceux qui les ont distribués en s'en attribuant la paternité ; que la circonstance que les éléments vendus soient incorporés à l'immeuble n'est pas de nature à soumettre le fournisseur non fabricant à la garantie décennale ; qu'en énonçant, pour retenir la responsabilité décennale de la société Isolmat, qu'elle avait fourni un matériau non conforme à la commande et qui n'était pas hydrophobe, et qu'il avait été incorporé à un immeuble, ce dont il résulterait que la garantie applicable serait décennale, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et a ainsi privé sa décision de base légale au regard des articles 1792, 1792-1, 1792-2 et 1792-4 du code civil ;
4°) ALORS subsidiairement QUE l'obligation de délivrance est parfaitement accomplie lorsque la chose correspond bien à ce qui a été commandé en connaissance de cause par un acheteur professionnel, même si elle est inapte à rendre le service qu'il en escomptait ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le phenexpan commandé à la société Isolmat n'était pas un matériau hydrophobe, car à cellules ouvertes, le choix de ce matériau étant à cet égard inadéquat ; que pour estimer que la société Isolmat n'avait pas livré un matériau conforme à la commande, la cour d'appel a déclaré que « rien ne prouv ait que le matériau isolant vendu à la société Isolmat par la société aujourd'hui devenue société Petrichémicals France était du phenexpan » et ainsi considéré qu'il était « évident que la société Isolmat a vait fourni un matériau non11 conforme à la commande et qui s'av érait ne pas être hydrophobe » ; qu'en statuant ainsi, sans expliquer en quoi les caractéristiques du matériau livré n'étaient pas conformes à celles du matériau commandé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1603 et 1604 du code civil ;
5°) ALORS en toute hypothèse QUE la mise en cause de la responsabilité délictuelle exige que soit rapportée la preuve d'une faute, d'un préjudice, et d'un lien de causalité entre cette faute et ce préjudice ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le phenexpan n'était pas un matériau hydrophobe, car à cellules ouvertes, le choix de ce matériau étant à cet égard inadéquat (arrêt, p. 10 ; jugement, p. 12), la cour d'appel précisant notamment, que le BET SCOOP, chargé de la conception du réseau de climatisation et du suivi du chantier jusqu'à sa réception (arrêt, p. 10), n'avait pas pris la peine d'actualiser l'ancienne fiche technique de cet isolant qui n'avait jamais eu comme propriété d'être hydrophobe (jugement, p. 13) ; que dès lors en retenant la responsabilité partielle de la société Isolmat dans les préjudices subi par la société CGSSM à raison des dysfonctionnements affectant la climatisation, du fait que la société Isolmat aurait livré un matériau non-conforme à la commande, qui s'avérait ne pas être hydrophobe, sans rechercher si, du fait que le phenexpan commandé ne présentait lui-même pas cette propriété, le défaut de conformité reproché à la société Isolmat n'était pas dépourvu d'incidence, et donc de lien de causalité, avec le dommage, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
6°) ALORS de surcroît QUE la cour d'appel constatait, au vu du rapport d'expertise, d'une part, que deux sortes de matériaux avaient été utilisés, à savoir une polyuréthane à cellule fermée « parfaitement adaptée à l'isolation mais demandant à être mise en place de façon appropriée », afin d'éviter les ponts thermiques entre métal et isolant, et une mousse phénolique d'origine indéterminée, même si les bons de livraison portaient la mention « phenexpan », qui était inadéquate, et d'autre part, qu'il y avait lieu de retenir des défauts de mise en oeuvre caractérisés par le choix d'un matériau à cellule ouverte non adéquat, l'existence de ponts thermiques entre tuyauterie acier et isolant, la discontinuité du traitement antirouille, le collage non étanche des coquilles, le manque d'enrobage de la toile de verre, les blessures de calorifugeage aux traversées de cloisons, chevauchements de canalisations, l'absence de calfeutrage dans certaines traversées de gros oeuvre et même traverses du calorifugeage par suspente métallique de faux plafond, de sorte qu'il convenait de retenir la responsabilité des sociétés Saga et Alain Genipa, en raison de la mise en oeuvre défectueuse du réseau de climatisation, et celle du BET SCOOP, chargé de la conception et suivi du chantier jusqu'à réception, ce dernier ayant notamment préconisé le phenexpan sans prendre la peine d'actualiser l'ancienne fiche technique de cet isolant qui n'avait jamais eu comme propriété d'être hydrophobe ; qu'il résultait de ces constatations que les sociétés Saga, Alain Genipa et BET SCOOP étaient entièrement responsables des dommages affectant la climatisation, notamment du fait qu'elles avaient opté pour le phenexpan, isolant inadéquat car non hydrophobe et qu'elles avaient mal mis en place l'isolant (polyuréthane à cellule fermée) dont les caractéristiques étaient adaptées à l'utilisation envisagée ; que dès lors en imputant à la société Isolmat une part de responsabilité dans les désordres du réseau de climatisation du fait qu'elle aurait livré un matériau dont il n'était pas établi que c'était du phenexpan, et qui n'était pas hydrophobe, la cour d'appel n'a pas tiré de ses propres constatations les conséquences légales et a violé l'article 1382 du code civil.
Moyen produit au pourvoi incident n° E 13-23. 654 et U 14-23. 648 par la SCP Odent et Poulet, avocat aux Conseils, pour les sociétés Saga et la société SMABTP
II est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR mis hors de cause MM. X... et Y... :
AUX MOTIFS QUE les architectes chargés de la maîtrise d'oeuvre, MM.
Y...
et X..., avaient sous-traité au BET SCOOP celle du lot relatif à la climatisation, consistant en la conception du réseau de climatisation et au suivi du chantier, jusqu'à la réception ; que les premiers juges avaient à juste titre mis hors de cause les deux architectes ; qu'en effet, MM.
Y...
et X... avaient confié à un bureau d'étude le lot litigieux dans sa totalité et aucun élément du dossier ne démontrait qu'ils avaient commis une faute ayant un lien de causalité avec les désordres existants :
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE les architectes X... et Y..., liés par contrat d'architecture du 17 novembre 1977, avaient signé spécialement un avenant avec le BET SCOOP, pour l'étude et le contrôle de certains lots, notamment le lot n° 14 ; qu'ils devaient donc être mis hors de cause ;
1°) ALORS QUE l'architecte, chargé d'une mission de maîtrise d'oeuvre complète, est responsable de plein droit des désordres affectant la construction qu'il est chargé de superviser ; qu'en mettant MM.
Y...
et X..., chargés d'une mission complète de maîtrise d'oeuvre, hors de cause, au prétexte qu'ils avaient sous-traité la conception et le suivi du lot climatisation, la cour d'appel a violé l'article 1792 du code civil ;
2°) ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut au défaut de motifs ; qu'en mettant MM.
Y...
et X... hors de cause, au prétexte qu'ils avaient sous-traité la maîtrise d'oeuvre du lot climatisation, sans répondre aux conclusions des exposantes (p. 12 et 13) ayant fait valoir que les architectes, chargés d'une mission complète de maîtrise d'oeuvre, avaient commis une erreur de conception du lot climatisation, en préconisant, dans le CCTP, la pose d'un calorifugeage en mousse phénolique à cellules ouvertes, et qu'ils avaient également manqué à leur mission de suivi des travaux de pose du calorifugeage, lesquels s'étaient avérés défectueux, la cour d'appel a méconnu les prescriptions de l'article 455 du code de procédure civile.
Moyens produits au pourvoi principal n° P 13-25. 548 et F 14-28. 052, et au pourvoi incident U 14-23. 648 par la SCP Boutet-Hourdeaux, avocat aux Conseils pour la caisse générale de sécurité sociale de la Martinique
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné à proportion de leur parts respectives de responsabilité le BET SCOOP, la SAS SAGA, l'entreprise GENIPA et la société ISOLMAT au paiement des sommes de 661. 674, 42 € TTC, correspondant au montant de la réfection du réseau, à celle de 107. 554, 30 € TTC, correspondant au prix de la maîtrise d'oeuvre et à celle de 30. 489, 80 € correspondant au montant des préjudices complémentaires ;
AUX MOTIFS QU'aucune des parties ne remet en cause la nature décennale des désordres affectant le bâtiment construit ; qu'il s'agit seulement pour la Cour d'apprécier l'existence et le degré de responsabilité des sociétés et personnes ayant participé à la construction de l'immeuble ; qu'à cet effet, il ressort du rapport d'expertise judiciaire qu'il y a eu deux matériaux utilisés pour le calorifugeage des réseaux et que rien ne prouve que le matériau isolant vendu à la société ISOLMAT par la société aujourd'hui devenue PETROCHEMICALS France soit du phenexpan ; que l'expertise conclut ensuite à ce que les défauts de mise en oeuvre du matériau de calorifugeage sont parfaitement caractérisés ; qu'il est d'abord souligné que le matériau choisi est inadéquat car à cellules ouvertes et donc non hygrophobe ; qu'il est ensuite indiqué l'existence d'un pont thermique entre la tuyauterie en acier et l'isolant causant une humidité permanente, un traitement antirouille de la tuyauterie discontinu, un collage des demies coquilles constituant le matériau non étanche, un défaut d'étanchéité de la toile de verre pare-vapeur extérieure, l'existence de nombreuses « blessures » affectant le matériau, l'absence de calorifugeage dans certaines traversées de gros oeuvre ; qu'il n'est contesté par aucune des parties au procès que le matériau de calorifugeage a été commandé par la SAS SAGA auprès de la société ISOLMAT, s'agissant de coquilles de mousse phénolique non inflammables et non hygroscopiques, d'une part, et de phénexpan, d'autre part ; qu'il s'avère que la mise en oeuvre du matériau de calorifugeage a été exécutée par l'entreprise GENIPA, sur la demande de la SAS SAGA, sans que celle-ci n'exige de la première une attestation d'assurance et sans qu'un contrat de sous-traitance n'intervienne ; qu'il est ensuite certain que les architectes chargés de la maîtrise d'oeuvre, Monsieur
Y...
et Monsieur X..., ont sous-traité au BET SCOOP celle du lot relatif à la climatisation, consistant en la conception du réseau de climatisation et au suivi du chantier jusqu'à sa réception ; qu'au vu de ces éléments, le Tribunal a, à bon droit, considéré que ce bureau technique, la SAS SAGA et l'entreprise GENIPA avaient engagé leur responsabilité dans la mise en oeuvre défectueuse du réseau de climatisation ; qu'en effet le BET SCOOP a conçu le réseau et a confié sa réalisation à la SAS SAGA, laquelle l'a fait exécuter par l'entreprise GENIPA sans respecter les règles la dernière exécutant mal le travail ; qu'il est évident que la société ISOLMAT qui a fourni le matériau non conforme à la commande et qui s'avère ne pas être hydrophobe a elle aussi engagé sa responsabilité ; que le produit fourni par elle se trouvant incorporé à un immeuble, la garantie applicable est bien celle décennale et non celle due par un vendeur, au titre de la délivrance conforme ou des vices cachés ; que s'agissant enfin du partage de responsabilité, la Cour déplore ne disposer ni du cahier des charges, ni de documents émanant du BET SCOOP ; qu'or, ces pièces auraient certainement permis à la Cour de mieux apprécier le rôle du bureau d'études, d'une part, et de la société titulaire du marché, d'autre part ; que faute de pouvoir se baser sur ces éléments, la juridiction entend définir la responsabilité de chacun comme suit : BET SCOOP, 40 %, la SAS SAGA et l'entreprise GENIPA, 40 %, mais 20 % entre eux, la société ISOLMAT, 20 % ; que la Cour condamne en conséquence, et à hauteur de leurs parts de responsabilités respectives le BET SCOOP, la SAS SAGA, l'entreprise GENIPA et la société ISOLMAT à verser ces sommes à la CGSSM et les compagnies d'assurances à garantir leurs assurés respectifs desdites condamnations ;
ALORS QUE chacun des coauteurs d'un même dommage doit être condamné in solidum envers la victime à le réparer intégralement, sauf le recours entre eux pour déterminer leurs contributions définitives ; qu'en prononçant une condamnation du BET SCOOP, de la SAS SAGA, de l'entreprise GENIPA et de la société ISOLMAT à proportion de leurs parts respectives de responsabilités quand elle constatait qu'ils avaient participé à la réalisation d'un même dommage, la Cour d'appel a violé ledit principe.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
:IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la SMABTP et les MUTUELLES DU MANS à garantir leurs assurés du montant des condamnations prononcées à leur encontre ;
AUX MOTIFS QUE la Cour condamne les compagnies d'assurances à garantir leurs assurés respectifs des condamnations prononcées ;
ALORS QUE le tiers lésé dispose d'un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable et que l'assureur ne peut payer à un autre que le tiers lésé tout ou partie de la somme due par lui, tant que ce tiers n'a pas été désintéressé jusqu'à concurrence de ladite somme, des conséquences pécuniaires du fait dommageable ayant entraîné la responsabilité de l'assuré ; qu'en se bornant à condamner les assureurs de responsabilité à garantir leurs assurés des condamnations prononcées contre eux au profit de la CGSSM quand celle-ci demandait la condamnation « solidairement et à tout le moins in solidum » des assurés responsables et de leurs assureurs, ce qui était de droit, la Cour d'appel a violé l'article L. 124-3 du Code des assurances.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
:IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement du Tribunal de Grande Instance de FORT-DE-FRANCE du 3 juillet 2001 en ce qu'il a ordonné la mise hors de cause de Monsieur X... et de Monsieur
Y...
;
AUX MOTIFS QUE les architectes chargés de la maîtrise d'oeuvre, Monsieur
Y...
et Monsieur X... ont sous-traité au BET SCOOP celle du lot relatif à la climatisation, consistant en la conception du réseau de climatisation et au suivi du chantier jusqu'à sa réception ; que les premiers juges ont à juste titre mis hors de cause les deux architectes ; qu'en effet, Messieurs
Y...
et X... ont confié à un bureau d'études le lot litigieux dans sa totalité et aucun élément du dossier ne démontre qu'ils aient commis une faute ayant un lien de causalité avec les désordres existant ;
ET AUX MOTIFS DU TRIBUNAL QUE les architectes X... et Y... liés par contrat d'architecture du 17 novembre 1977 ont signé spécialement un avenant avec le BET SCRET-COOP représenté en MARTINIQUE par sa filiale, le BECAR (Bureau d'Études des Caraïbes), pour l'étude et le contrôle de certains lots, notamment, le lot n° 14 ; ils seront donc mis hors de cause ;
ALORS QUE la conclusion d'un contrat de sous-traitance ne décharge pas l'entrepreneur principal de sa responsabilité vis-à-vis du maître de l'ouvrage ; qu'en mettant dès lors hors de cause les architectes X... et Y... pour cette seule raison qu'ils avaient sous-traité au BET SCOOP le lot dont la conception et la réalisation s'étaient avérées affectées de désordres, la Cour d'appel a violé les articles 1134, 1147 et 1165 du Code civil.