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26/01/2016 | FRANCE | N°14-20226

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 26 janvier 2016, 14-20226


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 16 avril 2014), que, par un acte du 19 janvier 2004, Mmes Patricia et Nathalie X... (les cautions) se sont rendues caution solidaire envers la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Loire Haute-Loire (la Caisse) d'un prêt consenti par celle-ci à la société GRIC ; qu'après la mise en redressement judiciaire de cette société, la Caisse a assigné en paiement les cautions, qui ont opposé la disproportion de leurs engagements ;
Attendu que Mm

es X... font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes alors, selon le...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 16 avril 2014), que, par un acte du 19 janvier 2004, Mmes Patricia et Nathalie X... (les cautions) se sont rendues caution solidaire envers la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Loire Haute-Loire (la Caisse) d'un prêt consenti par celle-ci à la société GRIC ; qu'après la mise en redressement judiciaire de cette société, la Caisse a assigné en paiement les cautions, qui ont opposé la disproportion de leurs engagements ;
Attendu que Mmes X... font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes alors, selon le moyen :
1°/ qu'un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation ; qu'en se bornant à énoncer, pour dire que la caisse régionale de crédit agricole mutuel de Haute-Loire pouvait se prévaloir des engagements de caution et condamner en conséquence Mmes Patricia et Nathalie X... à lui payer la somme de 167 661, 82 euros au titre de ce prêt, qu'au vu des ressources dont elles disposaient et de la faiblesse de leurs charges, leur engagement n'apparaissait pas manifestement disproportionné, après avoir pourtant constaté qu'elles avaient déclaré bénéficier de revenus mensuels de 4 000 euros, pour la première, et 4 500 euros, pour la seconde, et ne disposaient d'aucun patrimoine, la cour d'appel, qui n'a ainsi pas recherché, concrètement, si Mmes X... étaient susceptibles de pouvoir faire face à un engagement de caution d'un montant de 218 000 euros en principal, outre intérêts, frais, indemnités forfaitaires et accessoires dans la limite de 20 % du principal, soit un montant total de 261 600 euros, avec de tels revenus et une telle situation patrimoniale, a privé sa décision de base légale, au regard de l'article L. 341-4 du code de la consommation ;
2°/ que dans leurs conclusions d'appel, Mme Patricia X... et Mme Nathalie X... faisaient valoir que leur engagement de garantir les dettes de la société GRIC à hauteur de 218 000 euros (outre intérêts, frais, indemnités forfaitaires et accessoires dans la limite de 20 % du principal) au titre du prêt souscrit par cette dernière était manifestement disproportionné à leurs biens et revenus, dès lors qu'en l'absence de tout patrimoine et ayant pour seuls revenus les salaires versés par la société CIM France, qui distribuait les produits fournis par la société emprunteuse, leurs ressources dépendaient indirectement exclusivement de la situation de la société emprunteuse, fournisseur de leur employeur ; que dès lors, en se bornant à relever, pour dire que la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Haute-Loire pouvait se prévaloir des engagements de caution et condamner en conséquence Mmes Patricia et Nathalie X... à lui payer la somme de 167 661, 82 euros au titre de ce prêt, que leur engagement n'apparaissait pas manifestement disproportionné, au vu de leurs revenus mensuels, d'un montant respectif de 4 500 euros et de 4 000 euros, et de la faiblesse de leurs charges, la cour d'appel n'a pas répondu au moyen précité tenant à ce que la structure même des revenus de Mmes X... rendait le cautionnement disproportionné, dans la mesure où ces revenus, seules ressources de Mmes X..., dépendaient exclusivement de la situation de la société emprunteuse, et a ainsi violé les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que l'arrêt retient, dans l'exercice de son pouvoir souverain, que si les cautions ne disposaient pas d'un patrimoine, elles percevaient des salaires s'élevant, pour l'une, à 4 000 euros par mois et, pour l'autre, à 4 500 euros par mois, et n'avaient pas d'autres engagements que celui litigieux, de sorte que ce dernier n'apparaissait pas disproportionné ; que par ces constatations et appréciations, la cour d'appel qui, en se plaçant à la date de conclusion du cautionnement comme l'exige l'article L. 341-4 du code de la consommation, a effectué la recherche invoquée par la première branche et n'avait pas à répondre à des conclusions par lesquelles les cautions se bornaient à signaler, sans en tirer de conséquences juridiques, que leurs revenus dépendaient de la société cautionnée, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mmes Nathalie et Patricia X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Loire Haute-Loire la somme globale de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six janvier deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils, pour Mmes Patricia et Nathalie X...

Mme Patricia X... et Mme Nathalie X... font grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la caisse régionale de crédit agricole mutuel de Haute-Loire pouvait se prévaloir des engagements de la caution, de les avoir déboutées de leur demande en dommages et intérêts, de les avoir condamnées solidairement à payer à la caisse régionale de crédit agricole mutuel de Haute-Loire la somme de 167. 661, 82 euros, outre intérêts au taux contractuel à compter du 16 septembre 2009, au titre du prêt et n° 016053601 et dit qu'il y aurait lieu à application de l'article 1154 du code civil lorsque les intérêts seraient dus pour une année entière ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE le contrat de prêt (pièce 1 CRCAM) pour lesquelles Mme Nathalie X... épouse Y...et Mme Patricia X... se sont portées caution a été souscrit par la SA GRIC représentée par Mme Josette Z...; que cette dernière était un des principaux actionnaires de la société emprunteuse et donc partie à l'acte (pièce 9 CRCAM) par lequel des actionnaires de la SA GRIC se déclaraient disposés à céder, au prix symbolique de 21, 26 ¿, 2. 126 actions sur 2500 actions composant le capital à Mme Nathalie X... et à Mme Patricia X..., respectivement directeur administratif et directeur commercial de la SA CIM, dont la SA GRIC commercialisait les produits ; que Mmes X... apparaissaient ainsi être particulièrement avisées du fonctionnement de la société dont elles cautionnaient l'engagement ; qu'elles déclaraient par ailleurs (pièces 7 et 8 CRCAM) bénéficier de revenus mensuels de 4. 000 ¿, pour la première, et de 4. 500 ¿, pour la seconde, et ne pas avoir d'autres engagements, tout en déclarant ne disposer d'aucun patrimoine ; que dès lors c'est à juste titre que le premier juge a considéré que leur engagement au côté de la SA GRIC n'apparaissait pas disproportionné et que la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Loire Haute Loire n'était pas débitrice à leur égard d'un devoir de mise en garde ; que cette appréciation doit être opérée à l'époque de l'engagement quels que soient les engagements souscrits par la suite, dont l'existence n'est pas démontrée, et les difficultés rencontrées par les sociétés CIM et GRIC ; qu'il y a donc lieu de confirmer le jugement querellé en toutes ses dispositions ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE Mme Patricia X... et Mme Nathalie X... s'opposent aux demandes du Crédit agricole en se fondant sur l'article L. 341-4 du code de la consommation ; que cet article dispose qu'un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution au moment où celle-ci est appelée ne lui permette pas de faire face à son obligation ; que l'article L. 341-4 du code de la consommation issu de la loi du 1er août 2003 est entré en vigueur dès le 7 août 2003, contrairement aux articles L. 341-2, L. 341-3, L. 341-5 et L. 341-6 entrés en vigueur six mois après la publication de la loi ; que le contrat de cautionnement conclu le 19 janvier 2004 est donc soumis aux dispositions de l'article L. 341-4 du code de la consommation ; qu'il ressort des renseignements recueillis sur la caution par le banquier que le 19 janvier 2004, date du prêt, Mlle Patricia X... disposait de revenus mensuels de 4. 500 ¿, qu'elle était locataire, qu'elle n'avait pas d'enfant, qu'elle n'avait pas de patrimoine, ni d'autres charges, et que Mme Nathalie X..., quant à elle, avait des revenus mensuels de 4. 000 ¿, un enfant à sa charge et un loyer à payer et n'avait pas de patrimoine, ni d'autres charges ; qu'au vu des ressources dont disposaient les cautions et de la faiblesse de leurs charges, leur engagement n'apparaît pas manifestement disproportionné, étant précisé que la disproportion manifeste s'apprécie au jour de l'engagement et ne peut tenir compte des charges et engagements souscrits postérieurement ; qu'en outre, elles se gardent de produire à ce jour leur avis d'imposition ou des éléments sur leur patrimoine ; que dès lors, il convient de dire que le crédit agricole peut se prévaloir du contrat de cautionnement consenti le 19 janvier 2004 ; que s'agissant du devoir de mise en garde du banquier, il en est dispensé en présence d'une caution avertie ; qu'en l'espèce, Mme Patricia X..., directrice commerciale de la société CIM France et Mme Nathalie X..., quant à elle, directrice administrative de la société CIM France qui se sont portées cautions solidaires en garantie du remboursement du prêt souscrit par la société GRIC entendaient acquérir la totalité des actions de ladite société suivant promesse synallagmatique de cession et d'achat du 11 juin 2003 ; que cette acquisition avait pour but la commercialisation de biberons et que les dames X... savaient parfaitement dans quoi elles s'engageaient ; qu'elles ne démontrent pas que la caisse régionale de crédit agricole aurait eu sur le succès escompté de l'entreprise des informations qu'elles mêmes auraient ignorées ; que dès lors, en l'absence de responsabilité de la banque, la demande en dommages et intérêts doit être écartée ;
1°) ALORS QU'un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation ; qu'en se bornant à énoncer, pour dire que la caisse régionale de crédit agricole mutuel de Haute-Loire pouvait se prévaloir des engagements de caution et condamner en conséquence Mmes Patricia et Nathalie X... à lui payer la somme de 167. 661, 82 euros au titre de ce prêt, qu'au vu des ressources dont elles disposaient et de la faiblesse de leurs charges, leur engagement n'apparaissait pas manifestement disproportionné, après avoir pourtant constaté qu'elles avaient déclaré bénéficier de revenus mensuels de 4. 000 euros, pour la première, et 4. 500 euros, pour la seconde, et ne disposaient d'aucun patrimoine, la cour, qui n'a ainsi pas recherché concrètement, si Mmes X... étaient susceptibles de pouvoir faire face à un engagement de caution d'un montant de 218. 000 euros en principal, outre intérêts, frais, indemnités forfaitaires et accessoires dans la limite de 20 % du principal, soit un montant total de 261. 600 euros, avec de tels revenus et une telle situation patrimoniale, a privé sa décision de base légale, au regard de l'article L. 341-4 du code de la consommation ;
2°) ALORS QUE dans leurs conclusions d'appel, Mme Patricia X... et Mme Nathalie X... faisaient valoir que leur engagement de garantir les dettes de la société GRIC à hauteur de 218. 000 euros (outre intérêts, frais, indemnités forfaitaires et accessoires dans la limite de 20 % du principal) au titre du prêt souscrit par cette dernière était manifestement disproportionné à leurs biens et revenus, dès lors qu'en l'absence de tout patrimoine et ayant pour seuls revenus les salaires versés par la société CIM France, qui distribuait les produits fournis par la société emprunteuse, leurs ressources dépendaient indirectement exclusivement de la situation de la société emprunteuse, fournisseur de leur employeur ; que dès lors, en se bornant à relever, pour dire que la caisse régionale de crédit agricole mutuel de Haute-Loire pouvait se prévaloir des engagements de caution et condamner en conséquence Mmes Patricia et Nathalie X... à lui payer la somme de 167. 661, 82 euros au titre de ce prêt, que leur engagement n'apparaissait pas manifestement disproportionné, au vu de leurs revenus mensuels, d'un montant respectif de 4. 500 ¿ et de 4. 000 ¿, et de la faiblesse de leurs charges, la cour d'appel n'a pas répondu au moyen précité tenant à ce que la structure même des revenus de Mmes X... rendait le cautionnement disproportionné, dans la mesure où ces revenus, seules ressources de Mmes X..., dépendaient exclusivement de la situation de la société emprunteuse, et a ainsi violé les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 14-20226
Date de la décision : 26/01/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Riom, 16 avril 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 26 jan. 2016, pourvoi n°14-20226


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.20226
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