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25/01/2016 | FRANCE | N°14-29308

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 25 janvier 2016, 14-29308


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Nogent-sur-Marne, 8 décembre 2014) que par lettre du 29 octobre 2014, le syndicat national autonome de la propreté manutentions-RATP- aéroportuaire et services associés (Snapmrasa) a désigné M. X..., représentant de section syndicale au sein de la société Global facility services venant aux droits de la société Française de services groupe ; que la société, et MM. Y... et Z... en leur qualité respective d'administrateur j

udiciaire et de mandataire judiciaire, ont saisi le tribunal d'instance e...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Nogent-sur-Marne, 8 décembre 2014) que par lettre du 29 octobre 2014, le syndicat national autonome de la propreté manutentions-RATP- aéroportuaire et services associés (Snapmrasa) a désigné M. X..., représentant de section syndicale au sein de la société Global facility services venant aux droits de la société Française de services groupe ; que la société, et MM. Y... et Z... en leur qualité respective d'administrateur judiciaire et de mandataire judiciaire, ont saisi le tribunal d'instance en annulation de cette désignation, faisant valoir, notamment, que ce syndicat ne remplit pas la condition de respect des valeurs républicaines, posée par l'article L. 2142-1 du code du travail ;
Attendu que la société fait grief au jugement de le débouter de sa demande, alors, selon le moyen :
1°/ que le respect des valeurs républicaines s'apprécie au regard des statuts du syndicat, non de son action ni des articles de ces derniers ne portant pas atteinte à ces valeurs ; qu'en se fondant pour rejeter la requête en annulation de la désignation du représentant de section syndicale sur l'absence de preuve d'une action du syndicat contraire aux valeurs républicaines et sur les articles de ses statuts qui n'y portent pas atteinte, le tribunal d'instance n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 2142-1 du code du travail ;
2°/ que le droit de propriété et l'interdiction de toute discrimination sont des valeurs que protègent la Constitution, les engagements internationaux de la France et les lois de la République ; qu'en rejetant la requête en annulation de la désignation du représentant de section du syndicat dont les statuts s'inspirent dans leur action de la « lutte des classes » et s'assignent pour but la « suppression de l'exploitation capitaliste, notamment par la socialisation des moyens de proximité (en fait, de « production ») et d'échange dans l'intérêt même de tous les travailleurs », le tribunal d'instance a violé l'article L. 2142-1 du code du travail ;
Mais attendu que la référence à la lutte des classes et à la suppression de l'exploitation capitaliste dans les statuts d'un syndicat ne méconnaît aucune valeur républicaine ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé et signé par Mme Lambremon, conseiller le plus ancien en ayant délibéré, conformément aux dispositions de l'article 456 du code de procédure civile, en l'audience publique du vingt-cinq janvier deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils pour la société Global facility services, MM. Y... et Z..., ès qualités,
Il est fait grief au jugement attaqué d'avoir rejeté la requête en annulation de la désignation de Monsieur Mouhamed X..., opérée par le Syndicat National Autonome de la Propreté Manutentions ¿ RATP ¿ Aéroportuaire et Services Associés selon courrier du 29 octobre 2014, en qualité de représentant de section syndicale au sein de la Société Facility Services ;
AUX MOTIFS QUE selon les dispositions des articles L 2142-1 et L 2142-1 du code du travail, le syndicat doit satisfaire au critère de respect des valeurs républicaines, notamment pour pouvoir valablement désigner un représentant de section syndicale ; que ces dispositions, combinées à celles de l'article 9 du code de procédure civile, impliquent qu'il appartient à celui qui se prévaut du défaut de respect des valeurs républicaines par un syndicat d'en rapporter la preuve ; qu'en l'espèce, les demandeurs invoquent comme seul élément les statuts du syndicat SNAPMRASA, et plus précisément leur article II ¿ 6, selon lequel ce syndicat « s'inspire dans son orientation et dans son action des principes du syndicalisme de masse et de lutte des classes qui dominent l'histoire du mouvement syndical français ;s'assigne pour but la suppression de l'exploitation capitaliste, notamment par la socialisation des moyens de proximité et d'échange dans l'intérêt même de tous les travailleurs. Il se prononce pour la réalisation d'une organisation » ; que les demandeurs rapprochent ces termes, selon leurs écritures, de l'idéologie marxiste et notamment le concept de lutte des classes, qui sont contraires aux valeurs de paix et de liberté qui fondent la République française ; que cependant, le tribunal constate à la lecture de cette même pièce qu'aucun appel à une quelconque violence, qu'il s'agisse d'atteintes aux personnes ou aux biens, et de façon plus générale, aucun appel à la commission d'actes répréhensibles n'est contenu dans ces statuts, contrairement à ce que soutiennent les requérants, qui dans leurs écritures vont au-delà de l'interprétation des termes examinés ; qu'en effet, « l'inspiration » de ce syndicat dans « son orientation » telle que décrite dans ces statuts indique seulement le courant dans lequel il s'inscrit, à savoir un syndicalisme à l'origine révolutionnaire, qui pourrait désormais être qualifié de revendicatif, à l'inverser du syndicalisme plus réformateur, davantage tourné vers la négociation ; que, quant au but de ce syndicat, s'il faut convenir que l'expression « suppression de l'exploitation capitaliste » peut contenir des sous-entendus inquiétants, les moyens évoqués pour y parvenir, à savoir la « socialisation des moyens de proximité et d'échange » laisse dubitatif par son manque de clarté, mais exclut en tout cas toute action violente ou antirépublicaine ; surtout, cette partie de texte ne peut être prise isolément du reste de l'article II dont elle est extraite, et qui indique de façon très traditionnelle dans ses alinéas 1 à 5 que le but du syndicat SNAPMRASA est « de défendre les intérêts individuels et collectifs des salariés », « de créer et de réorganiser des sections syndicales dans toutes les entreprises de propreté », d'intensifier la propagande en vue du recrutement de salariés inorganisés », « de travailler à l'information et à la formation des adhérents », « de promouvoir le rassemblement et la solidarité de tous les travailleurs inorganisés », c'est-à-dire d'user de moyens d'action qui constituent le simple exercice de la liberté syndicale ; qu'enfin, le tribunal relève à la suite des défendeurs que les demandeurs n'apportent aucun élément visant à démontrer que le syndicat aurait, dans son action, violé les valeurs républicaines ; qu'au contraire, les défendeurs démontrent que le syndicat SNAPMRASA exerce depuis sa constitution une activité syndicale normale, par la désignation de représentants syndicaux, et la participation à des élections de représentants du personnel dans au moins deux entreprises du secteur d'activité de la propreté ; que par conséquent, la requête en vue de l'annulation de la désignation de M. X... en qualité de représentant de section syndicale au sein de la Sté Facility Services n'est pas fondée, et sera donc rejetée ;
1) alors d'une part que le respect des valeurs républicaines s'apprécie au regard des statuts du syndicat, non de son action ni des articles de ces derniers ne portant pas atteinte à ces valeurs ; qu'en se fondant pour rejeter la requête en annulation de la désignation du représentant de section syndicale sur l'absence de preuve d'une action du syndicat contraire aux valeurs républicaines et sur les articles de ses statuts qui n'y portent pas atteinte, le tribunal d'instance n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L 2142-1 du code du travail ;
2) alors d'autre part que le droit de propriété et l'interdiction de toute discrimination sont des valeurs que protègent la Constitution, les engagements internationaux de la France et les lois de la République ; qu'en rejetant la requête en annulation de la désignation du représentant de section du syndicat dont les statuts s'inspirent dans leur action de la « lutte des classes » et s'assignent pour but la « suppression de l'exploitation capitaliste, notamment par la socialisation des moyens de proximité (en fait, de « production ») et d'échange dans l'intérêt même de tous les travailleurs », le tribunal d'instance a violé l'article L 2142-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-29308
Date de la décision : 25/01/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Nogent-sur-Marne, 08 décembre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 25 jan. 2016, pourvoi n°14-29308


Composition du Tribunal
Président : M. Béraud (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.29308
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