LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 29 juillet 2014), que la société des Autoroutes du Sud de la France a confié au groupement d'entreprises solidaires constitué par la société Valerian, mandataire, et les sociétés Mazza TP, Perrier TP et Famy la réalisation de travaux de terrassement et d'assainissement en vue de la construction d'une portion d'autoroute ; que la pose de tuyaux canalisant un ruisseau a été sous-traitée à la société Socafl qui a acheté à la société BMR une partie des tuyaux entrant dans la composition de l'ouvrage ; que, des tassements étant apparus sur la chaussée, une cour administrative d'appel a condamné la société Valerian à indemniser le maître de l'ouvrage ; que celle-ci a assigné en garantie son assureur, la société L'Auxiliaire, les sociétés Socafl et BMR et son assureur, la société Axa France IARD ;
Attendu, d'une part, que, la société L'Auxiliaire ne s'étant pas prévalue dans ses conclusions d'appel d'une connaissance par l'assuré des stipulations des conditions générales par la référence à celles-ci dans les conventions spéciales, le moyen est nouveau, mélangé de fait et de droit ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant souverainement retenu que, compte tenu de la mise en page et de l'espacement entre les « conditions », seules les conditions spéciales avaient été jointes aux conditions particulières et étaient opposables à l'assuré et relevé que les conditions générales n'avaient fait l'objet par ailleurs d'aucune approbation formelle de la part de l'assuré, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, a pu en déduire, abstraction faite d'un motif surabondant, sans dénaturation, que la société L'Auxiliaire ne pouvait pas se prévaloir de la clause d'exclusion contenue dans les conditions générales ;
D'où il suit que le moyen, pour partie irrecevable, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société L'Auxiliaire aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société L'Auxiliaire et la condamne à payer à la société Valerian la somme de 3 000 euros et aux sociétés Axa France IARD et Arkenr BMR la somme globale de 1 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un janvier deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils pour la société mutuelle L'Auxiliaire
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir condamné un assureur (la mutuelle L'Auxiliaire, l'exposante) à garantir intégralement son assuré (la société Valérian) des condamnations mises à sa charge au profit du maître de l'ouvrage (la société ASF) par la juridiction administrative ;
AUX MOTIFS QUE, selon la police n° 3-910168 souscrite le 26 juillet 1991 par la société Perrier pour le compte des entreprises du groupement, la société L'Auxiliaire avait donné sa garantie, entre autres, pour « la responsabilité civile des entreprises VALERIAN, MAZZA, PERRIER » ; qu'en l'état des conditions particulières qui, paradoxalement, étaient très générales, seule une référence contractuellement acceptée aux conditions générales aurait permis de mieux connaître le périmètre des garanties réellement offertes par cet assureur ; qu'en page 1, il était certes fait référence à des "conditions générales" N C00374 et à des "conditions spéciales" N S000382 ; qu'une ligne plus bas, il était simplement écrit « jointes aux conditions particulières » ; qu'en l'état de la mise en page adoptée sur cette première page et eu égard à l'espacement dans le texte entre les unes et les autres "conditions", il apparaissait que seules les conditions dites spéciales avaient été jointes aux conditions particulières et étaient donc opposables aux assurés ; qu'il était constant que les conditions spéciales n'étaient d'aucun intérêt dans le présent litige et que les conditions dites générales n'avaient fait l'objet par ailleurs d'aucune approbation formelle de la part des assurés ; qu'ainsi n'étaient donc effectivement opposables aux assurés que les conditions particulières qui n'excluaient pas que la garantie de l'assureur eût été octroyée dans un cadre purement contractuel, pour une durée atypique de cinq années après réception, à l'occasion de dommages matériels et immatériels causés au maître de l'ouvrage par des malfaçons atteignant les ouvrages ainsi construits ; qu'une telle garantie, ne répondant pas aux dispositions d'ordre public de l'article 1792, apparaissait admissible dans la mesure où les ouvrages ainsi construits l'étaient dans un cadre de marché public échappant aux règles du code civil ; qu'il n'était pas contesté que les désordres litigieux et sanctionnés par la cour administrative d'appel étaient bien intervenus dans le délai des cinq années contractuellement convenu ; qu'ainsi, c'était à bon droit que le premier juge avait dit que la compagnie L'Auxiliaire devait sa garantie pleine et entière à la société Valérian dans le cadre des condamnations prononcées par la juridiction administrative (arrêt attaqué, p. 5, alinéa 9, à p. 6, alinéa 10) ; que l'assureur invoquait une exclusion de garantie pour les désordres de nature décennale, prévue par l'article 14.11 des conditions générales ; que l'exemplaire des conditions générales qu'elle produisait en pièce n° 2 n'était cependant ni daté, ni signé, de sorte que la mutuelle L'Auxiliaire n'établissait pas la preuve qu'elle avait donné connaissance à son assurée de cette exclusion de garantie ; que L'Auxiliaire devait donc garantir intégralement la société Valérian des condamnations mises à sa charge par la cour administrative de Lyon (jugement confirmé, p. 5, alinéas 7 et 8) ;
ALORS QUE, d'une part, la signature des conditions particulières d'une police d'assurance établit que l'assuré a eu connaissance des conditions générales auxquelles ces conditions particulières font référence ; que, pour déclarer inopposable à l'assuré l'exclusion de garantie stipulée à l'article 14-11 des conditions générales du contrat, l'arrêt attaqué a relevé que l'exemplaire des conditions générales produit n'était ni daté ni signé, de sorte que l'assureur n'établissait pas avoir donné connaissance à son assuré de ladite exclusion ; qu'en se déterminant ainsi par un motif juridiquement inopérant, quand elle constatait que les conditions particulières, qui avaient été signées par l'assuré, faisaient référence aux conditions générales, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil ainsi que L. 112-3 et L. 112-4 du code des assurances ;
ALORS QUE, d'autre part, pour déclarer inopposable à l'assuré l'exclusion de garantie stipulée à l'article 14-11 des conditions générales, l'arrêt attaqué s'est fondé sur l'absence de référence à celles-ci contractuellement acceptées ; qu'en statuant ainsi, quand elle constatait que les conditions particulières, signées par les parties, faisaient expressément référence aux conditions générales, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 1134 du code civil ainsi que L. 112-3 et L. 112-4 du code des assurances ;
ALORS QUE, en outre, en retenant l'inopposabilité de l'exclusion de garantie stipulée à l'article 14-11 des conditions générales en l'absence de référence à celles-ci contractuellement acceptées, quand les conventions spéciales, annexes et clauses, dont il n'était pas contesté qu'elles avaient été jointes aux conditions particulières signées par les parties, faisaient également expressément référence aux conditions générales, ce dont il résultait que ces dernières avaient été acceptées par l'assuré, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil ainsi que L. 112-3 et L. 112-4 du code des assurances ;
ALORS QUE, en toute hypothèse, en se déterminant comme elle l'a fait, sans vérifier que, comme le soutenait l'exposante, il résultait de ce que les conventions spéciales, annexes et clauses, dont il n'était pas contesté qu'elles avaient été jointes aux conditions particulières, faisaient expressément référence aux conditions générales, une référence contractuellement acceptée existait, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1134 du code civil ainsi que L. 112-3 et L. 112-4 du code des assurances ;
ALORS QUE, en outre, pour déclarer inopposable à l'assuré l'exclusion de garantie stipulée à l'article 14-11 des conditions générales du contrat, l'arrêt attaqué a affirmé qu'il résultait de la mise en page et des espacements des mentions figurant aux conditions particulières que seules les conventions spéciales y avaient été jointes et non les conditions générales ; qu'en statuant ainsi, sans préciser en quoi ladite mise en page et lesdits espacements permettaient d'en déduire que seules les conventions spéciales auraient été jointes, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS QUE, en tout état de cause, pour déclarer inopposable à l'assuré l'exclusion de garantie stipulée à l'article 14-11 des conditions générales du contrat, l'arrêt attaqué a énoncé qu'il résultait de la mise en page et des espacements des mentions figurant aux conditions particulières que seules les conventions spéciales y avaient été jointes et non les conditions générales ; qu'en se prononçant ainsi, bien que la stipulation "jointe aux conditions particulières" figurât dans un encadré mentionnant aussi bien les conditions générales que les conventions spéciales, ce dont il résultait que la stipulation litigieuse incluait les conditions générales et les conventions spéciales, la cour d'appel a dénaturé les conditions particulières du contrat en violation de l'article 1134 du code civil ;
ALORS QUE, enfin, pour déclarer que les conditions particulières seules opposables à l'assuré n'excluaient pas les dommages dont doivent répondre les constructeurs dans le cadre de la garantie décennale quand bien même la garantie litigieuse ne serait pas conforme aux dispositions d'ordre public des articles 1792 et suivants du code civil, notamment au regard de sa durée limitée à cinq ans, l'arrêt attaqué a relevé qu'une telle garantie apparaissait en l'espèce admissible dans le mesure où les ouvrages construits l'avaient été dans le cadre d'un marché public échappant aux règles du code civil ; qu'en statuant ainsi, quand la garantie décennale est applicable aux marchés publics et la responsabilité des constructeurs exécutant ledit marché est engagée et peut être poursuivie devant les juridictions administratives sur le fondement des articles 1792 et 2270 du code civil, la cour d'appel a violé lesdites dispositions.