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20/01/2016 | FRANCE | N°14-14214

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 janvier 2016, 14-14214


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Daniel X... a été engagé le 6 novembre 2002 par la société Esco France en qualité d'emballeur conducteur polyvalent, classé au coefficient 160 de la convention collective nationale des industries chimiques et connexes du 30 décembre 1952 ; qu'invoquant les dispositions de l'accord du 10 août 1978 portant révision des classifications prévues par cette convention collective, le salarié a demandé l'attribution du coefficient 175 à compter du 6 novembre 2002 puis celle du co

efficient 190 un an après cette date ; que le 9 juillet 2007, les p...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Daniel X... a été engagé le 6 novembre 2002 par la société Esco France en qualité d'emballeur conducteur polyvalent, classé au coefficient 160 de la convention collective nationale des industries chimiques et connexes du 30 décembre 1952 ; qu'invoquant les dispositions de l'accord du 10 août 1978 portant révision des classifications prévues par cette convention collective, le salarié a demandé l'attribution du coefficient 175 à compter du 6 novembre 2002 puis celle du coefficient 190 un an après cette date ; que le 9 juillet 2007, les parties ont conclu une transaction aux termes de laquelle l'employeur s'engageait à verser au salarié une indemnité transactionnelle, à lui attribuer le coefficient 175 à compter du 1er juin 2007 et à lui donner une priorité de promotion vers une fonction de catégorie supérieure ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant à l'annulation, subsidiairement à la résolution de la transaction, à son classement au coefficient 175 depuis son embauche et au coefficient 190 à compter du 6 novembre 2003 ainsi qu'au paiement de diverses sommes ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de prononcer la résolution judiciaire de la transaction et de le condamner au paiement de dommages-intérêts alors, selon le moyen :
1°/ que les parties à une transaction sont en droit d'en demander la résolution si les engagements souscrits dans l'acte ne sont pas respectés ; qu'il s'évince des constatations de l'arrêt attaqué que la société Esco France avait fait figurer trois concessions dans la transaction conclue avec M. X... le 9 juillet 2007, soit le versement d'une indemnité, le passage du coefficient 160 à 175 et une « priorité de promotion » en faveur de M. X... ; qu'en estimant que la société Esco France avait méconnu cette troisième condition, de sorte que la résolution de la transaction du 9 juillet 2007 était encourue, au motif que d'autres salariés avaient bénéficié d'une promotion, ce qui n'était pas le cas de M. X..., sans rechercher, comme elle y était invitée, si les promotions des autres salariés de l'entreprise invoquées par M. X... concernaient des postes qu'il aurait eu vocation à occuper, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1184 du code civil ;
2°/ que dans ses conclusions d'appel, la société Esco France faisait valoir qu'elle avait proposé à M. X..., par courrier du 5 décembre 2011, une promotion au poste de mécanicien-ajusteur avec une augmentation de 150 euros par mois et un passage à l'échelon 190 ; que ce courrier était régulièrement versé aux débats ; qu'en affirmant que la société Esco France avait manqué à son obligation contractuelle, issue de la transaction du 9 juillet 2007, de promouvoir M. X..., sans répondre aux conclusions susvisées de l'employeur qui établissait avoir proposé un poste de catégorie supérieure au salarié, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que sous le couvert de griefs non fondés de manque de base légale et de défaut de réponse à conclusions, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion devant la Cour de cassation l'appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de preuve et de fait par laquelle la cour d'appel, qui n'avait pas à entrer dans le détail de l'argumentation des parties, ni à s'expliquer sur les pièces qu'elle décidait d'écarter, a constaté l'inexécution partielle de la transaction par l'employeur et a estimé que ce manquement était suffisamment grave pour justifier la résolution de celle-ci ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour condamner l'employeur au paiement de rappels de salaire, de congés payés et de dommages-intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail, l'arrêt retient que le salarié se prévaut, à bon droit, de la reconnaissance de son bac professionnel comme équivalent à un bac technique visé par l'accord du 10 août 1978 et est fondé à réclamer l'application de l'accord du 17 juin 2010 qui prévoit également pour le personnel déjà en place la garantie d'un coefficient de 175 à l'embauche et, un an après, de 190 ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de l'employeur, reprises oralement lors de l'audience, qui faisait valoir que pour bénéficier des dispositions de l'accord du 17 juin 2010 relatif à la prise en compte du baccalauréat professionnel dans les classifications, le salarié devait avoir été embauché pour occuper une fonction ou un emploi correspondant à son diplôme, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIF :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Esco France à payer à M. X... des sommes au titre d'un rappel de salaire pour la période de juillet 2007 au 1er novembre 2013, de l'indemnité de congés payés, d'un rappel de salaire sur la participation, de congés payés sur ce rappel de salaire et de dommages-intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail, l'arrêt rendu le 12 février 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt janvier deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Balat, avocat aux Conseils, pour la société Esco France.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir prononcé la résolution de la transaction signée le 9 juillet 2007 et d'avoir condamné la société Esco France à payer à M. X... la somme de 4. 000 € à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE M. X... a été engagé par la société Esco France le 6 novembre 2002, selon un contrat d'adaptation à un emploi, contrat à durée indéterminée, en qualité d'« emballeur, conducteur polyvalent au service saline », au coefficient 160 de la convention collective nationale des industries chimiques ; que, le 9 juillet 1997, M. X... et son employeur ont signé une transaction pour « régler le différend survenu entre les parties sur l'application de l'accord du 10 août 1978 relatif aux garanties de coefficients pour les salariés titulaires du BTN » ; qu'aux termes de cette transaction, les parties ont pris les engagements suivants :- la société Esco France payait une indemnité transactionnelle de 3. 735 € bruts à M. X... ;- la société Esco France s'engageait à « passer » M. X... au coefficient 175 à partir du 1er juin 2007 et à " donner une priorité de promotion vers une fonction de catégorie supérieure à Monsieur X... » ;- M. X... renonçait à toute action devant les tribunaux de l'ordre judiciaire, administratif ou prud'homal en cours ou à venir, à l'encontre de la société Esco France, au titre du litige décrit ci-dessus ; que la société Esco France fait valoir, à juste titre, pour s'opposer à la demande d'annulation de la transaction, que M. X..., titulaire d'un baccalauréat professionnel, ne peut se prévaloir de l'accord du 17 juin 2010 sur la prise en compte du baccalauréat professionnel dans les classifications dans les industries chimiques ; qu'en effet, cet accord est postérieur à la transaction, de même que la jurisprudence visée par l'appelant dans laquelle la Cour de cassation affirme que « le bac professionnel créé en 1985 est l'équivalent du baccalauréat technique national (BTN) visé dans l'accord du 10 août 1978 » (arrêt du 24 septembre 2008) ; qu'il apparait que la société Esco France a fait figurer trois concessions dans la transaction : 1°) versement d'une indemnité -2°) passage du coefficient 160 à 175-3°) priorité de promotion ; que, de son côté, M. X... n'a pas renoncé aux dispositions d'ordre public contenues dans l'accord du 10 août 1978 mais seulement à engager une action en justice ; que la transaction repose sur des concessions réciproques et, à ce titre, elle ne peut pas être annulée ; que, cependant, il résulte des pièces produites, attestation de M. A..., délégué syndical de la société Esco France, selon laquelle la société aurait dû proposer à M. X... une promotion dans la catégorie supérieure, qui a bénéficié à plusieurs salariés que ce témoin précise que la transaction du 9 juillet 1997 concernait trois salariés et que seul M. X... n'a pas bénéficié d'une promotion ; que si cette attestation ne respecte pas les exigences de l'article 202 du code de procédure civile, elle doit être retenue néanmoins à titre de document d'information sur les manquements de l'employeur à l'égard de ses engagements contractuels ; que des salariés de la société Esco France ont bénéficié, entre 2007 et 2010, de promotions (MM. Y...et Z...), le document produit à cet égard par M. X... n'étant pas remis en cause, dans son contenu, par la société Esco France ; que l'inexécution partielle de la transaction par la société Esco France constitue, de la part de cette société, un manquement suffisamment grave pour justifier la résolution judiciaire de la transaction ; que M. X... est fondé à réclamer des dommages et intérêts qu'il a estimé, à juste titre, à 4. 000 € ;
ALORS, D'UNE PART, QUE les parties à une transaction sont en droit d'en demander la résolution si les engagements souscrits dans l'acte ne sont pas respectés ; qu'il s'évince des constatations de l'arrêt attaqué que la société Esco France avait fait figurer trois concessions dans la transaction conclue avec M. X... le 9 juillet 1997, soit le versement d'une indemnité, le passage du coefficient 160 à 175 et une « priorité de promotion » en faveur de M. X... (arrêt attaqué, p. 5, alinéa 3) ; qu'en estimant que la société Esco France avait méconnu cette troisième condition, de sorte que la résolution de la transaction du 9 juillet 2007 était encourue, au motif que d'autres salariés avaient bénéficié d'une promotion, ce qui n'était pas le cas de M. X... (arrêt attaqué, p. 5, alinéas 6 et 7), sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions d'appel de la société Esco France, p. 14, alinéa 8), si les promotions des autres salariés de l'entreprise invoquées par M. X... concernaient des postes qu'il aurait eu vocation à occuper, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1184 du code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE dans ses conclusions d'appel (p. 13, alinéa 7), la société Esco France faisait valoir qu'elle avait proposé à M. X..., par courrier du 5 décembre 2011, une promotion au poste de mécanicien-ajusteur avec une augmentation de 150 ¿ par mois et un passage à l'échelon 190 ; que ce courrier était régulièrement versé aux débats (pièce n° 2 du bordereau annexé aux conclusions d'appel de la société Esco France) ; qu'en affirmant que la société Esco France avait manqué à son obligation contractuelle, issue de la transaction du 9 juillet 1997, de promouvoir M. X..., sans répondre aux conclusions susvisées de l'employeur qui établissait avoir proposé un poste de catégorie supérieure au salarié, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société Esco France à payer à M. X... les sommes de 6. 701, 70 € à titre de rappel de salaire pour la période de juillet 2007 au 1er novembre 2013 et de 670, 17 € au titre des congés payés afférents, de 44, 89 € à titre de rappel de salaire sur la participation et de 4, 48 € au titre des congés payés afférents et de 2. 000 € à titre de dommages et intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail ;
AUX MOTIFS QUE M. X... se prévaut, à bon droit, de la reconnaissance de son bac professionnel, créé en 1985, comme équivalent à un bac technique visé par l'accord du 10 août 1978 ; qu'il réclame à bon droit l'application de l'accord du 17 juin 2010 qui prévoit également pour le « personnel déjà en place » la garantie d'un coefficient de 175 à l'embauche et, un an après, de 190 ; qu'en application de cet accord, M. X... réclame, à juste titre, sur la base d'un coefficient 190, les rappels de salaire suivants :- de juillet 2007 à octobre 2011 : 4. 803, 77 € ;- de novembre 2011 à novembre 2013 : 1. 897, 93 € ; total : 6. 701, 70 €, outre 670, 17 € à titre de congés payés ; qu'il y a lieu de faire droit à la demande de M. X... relative au rappel de salaire sur la participation ; que la mauvaise foi de l'employeur résulte de sa volonté délibérée de ne pas faire bénéficier M. X... d'un coefficient conforme à son diplôme ; que ce manquement à l'exécution de bonne foi du contrat de travail est distinct de celui qui a conduit à la résolution de la transaction ; qu'il y a lieu de faire droit à la demande de M. X... à concurrence de 2. 000 € ;
ALORS, D'UNE PART, QUE les accords collectifs n'ont pas d'effet rétroactif ; qu'en relevant que l'accord du 17 juin 2010 faisait obligation à la société Esco France de garantir à M. X... un coefficient de 190, puis en appliquant ce coefficient dès le mois de juillet 2007 pour calculer le rappel de salaire de M. X..., la cour d'appel, qui a fait une application rétroactive de l'accord du 17 juin 2010, l'a violé par fausse application en même temps qu'elle a violé l'article 2 du code civil ;
ET ALORS, D'AUTRE PART, QUE l'accord sur la prise en compte du baccalauréat professionnel dans les classifications du 17 juin 2010 dispose, dans son article 1er, que « tout salarié titulaire d'un baccalauréat professionnel et embauché pour occuper une fonction ou un emploi correspondant à ce diplôme aurait la garantie des coefficients suivants : à l'embauche : 175 ; et un an après : 190 » ; que dans ses conclusions d'appel (p. 18, alinéas 5 à 8), la société Esco France faisait valoir que M. X... produisait aux débats un diplôme de baccalauréat professionnel « équipements et installations électriques » et qu'il avait occupé au sein de l'entreprise le poste de « conducteur polyvalent » puis de « rondier essoreur », sans lien avec le diplôme dont il était titulaire ; qu'en estimant, sur le fondement de l'accord du 17 juin 2010, que la société Esco France aurait dû tenir compte du diplôme de M. X... et lui attribuer le coefficient de 190, sans répondre aux conclusions de l'employeur faisant valoir que la fonction de M. X... ne correspondait pas à son diplôme, de sorte que l'accord du 17 juin 2010 n'était pas applicable à l'espèce, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-14214
Date de la décision : 20/01/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 12 février 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 jan. 2016, pourvoi n°14-14214


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (président)
Avocat(s) : Me Balat

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.14214
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