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13/01/2016 | FRANCE | N°14-26050

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 janvier 2016, 14-26050


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 30 octobre 2000 en qualité de réceptionniste par la Société de gestion hôtelière Paris Saclay (la société), a été licencié le 14 mars 2005 pour faute grave ; que contestant son licenciement, il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes relatives notamment à une discrimination en raison de l'origine ou de la race et, subsidiairement, au titre de l'égalité de traitement ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer

par une décision spécialement motivée sur ce moyen annexé qui n'est manife...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 30 octobre 2000 en qualité de réceptionniste par la Société de gestion hôtelière Paris Saclay (la société), a été licencié le 14 mars 2005 pour faute grave ; que contestant son licenciement, il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes relatives notamment à une discrimination en raison de l'origine ou de la race et, subsidiairement, au titre de l'égalité de traitement ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Sur le second moyen, pris en sa première branche :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes fondées sur la discrimination et le principe « à travail égal, salaire égal », alors, selon le moyen, que la cour d'appel a elle-même constaté que l'employeur avait à tort omis de verser des primes versées aux autres salariés et l'a même condamné, dans le dispositif de sa décision, à verser ces primes ; qu'en énonçant pourtant que l'employeur n'avait commis aucune discrimination à l'encontre de M. X..., la cour d'appel a violé l'article L. 1132-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel, qui a constaté que l'employeur justifiait la perception par le salarié de primes sur objectifs moindres que ses collègues par l'application d'un système d'évaluation mis en place en 2002 en considération de critères objectifs et étrangers à toute discrimination vérifiables à l'aide de tableaux produits et basés sur les critères de ponctualité, respect du planning, amabilité, rigueur, savoir faire, a décidé, sans encourir les griefs du moyen, que les faits dénoncés par le salarié étaient justifiés par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen, pris en sa seconde branche :
Vu le principe d'égalité de traitement ;
Attendu que pour rejeter la demande du salarié au titre des primes de fin d'année 2003 et 2004, l'arrêt retient que s'il n'est pas contesté que le salarié n'a pas reçu de prime en décembre 2003 et décembre 2004, force est de constater que cette prime exceptionnelle, sans encourir le reproche de discrimination, a pu être allouée discrétionnairement par l'employeur à certains salariés et non distribuée à l'intéressé en 2003 et 2004 en fonction de la qualité du travail fourni, que l'employeur démontre ainsi que les faits dénoncés par le salarié sont justifiés par des éléments étrangers à toute discrimination ;
Attendu, cependant, que le seul fait qu'une prime soit laissée à la libre appréciation de l'employeur n'est pas de nature à justifier, en soi, une différence de traitement entre salariés placés dans une situation comparable au regard de l'avantage considéré ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'elle avait constaté que les primes litigieuses avaient été versées à d'autres salariés, sans caractériser l'existence de critères objectifs définis préalablement permettant de vérifier la qualité du travail du salarié pour l'octroi de ces primes, la cour d'appel a violé le principe susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de sa demande en paiement de la somme de 600 euros au titre des primes de fin d'année 2003 et 2004 et de celle de 60 euros au titre des congés payés afférents, l'arrêt rendu le 23 janvier 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la Société de gestion hôtelière Paris Saclay aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize janvier deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP de Nervo et Poupet, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué, infirmatif sur ce point
D'AVOIR dit que le licenciement pour faute grave de Monsieur X... était fondé
AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement faisait reproche à Monsieur X... d'avoir, le 24 février 2005 et après son service, fait une clé de chambre à l'insu du responsable de nuit, d'être entré dans l'hôtel et de ne s'être dénoncé que le 1er mars suivant, quand l'employeur allait sanctionner le responsable de nuit ; que Monsieur X... faisait état des circonstances exceptionnelles et dangereuses liées à la présence de neige sur la route, qui l'avaient amené à faire usage de la tolérance en vigueur antérieurement, consistant à occuper une chambre de l'hôtel, après son service, ce dont il avait informé son employeur, précisant que cet usage lui avait été refusé de manière discriminatoire ; que la Cour d'appel relevait qu'il n'était en rien justifié par le salarié de circonstances climatiques exceptionnelles ; que si l'usage allégué avait pu exister, il avait été dénoncé, ce que Monsieur X... ne pouvait ignorer pour l'avoir noté dans l'un de ses courriers ; qu'il ne justifiait pas avoir informé son employeur des contraintes climatiques alléguées et d'avoir demandé l'autorisation d'occuper cette nuit-là une chambre ; que Madame Y... attestait avoir retrouvé une chambre sale, alors qu'elle devait être libre ; qu'il était indifférent qu'une autre chambre ait été occupée par un autre salarié, une nuit de décembre 2004, cette chambre ayant été attribuée avec l'aval de l'employeur ; que Monsieur X... s'était dénoncé le 1er mars seulement, alors que l'employeur allait sanctionner son collègue, responsable de nuit ; que ce manquement à une directive claire de l'employeur et à l'obligation de loyauté, faisant suite à trois avertissements, dont un pour des faits de même nature et un autre pour une présence dans l'établissement non autorisée, constituait une violation d'une importance telle qu'elle rendait le maintien du salarié dans l'entreprise impossible, même pendant la durée du préavis et justifiait le licenciement de Monsieur X... pour faute grave ;
ALORS QUE la charge de la preuve de la faute grave pèse sur l'employeur qui l'invoque ; qu'en retenant la faute grave du salarié, sous prétexte qu'il ne justifiait pas des circonstances climatiques exceptionnelles l'ayant conduit à occuper une chambre dans l'hôtel, pendant une nuit, et qu'il ne justifiait pas avoir informé sa hiérarchie et avoir demandé l'autorisation de rester pendant une nuit dans l'hôtel, la Cour d'appel a inversé la charge de la preuve, violant l'article 1315 du code civil ;
ET ALORS QUE, en toute hypothèse, ne saurait constituer une faute grave, rendant impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis, le simple fait, pour un employé d'hôtel, de passer une nuit dans une chambre de l'hôtel, un tel usage ayant été toléré par l'employeur pour un autre salarié, deux mois auparavant ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé l'article L 1234-1 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué
D'AVOIR débouté Monsieur X... de ses demandes fondées sur la discrimination et le principe « à travail égal, salaire égal »
AUX MOTIFS QUE Monsieur X... soutenait, à l'appui de son affirmation d'une discrimination à son encontre liée à son origine ivoirienne et à sa race, que c'était lui qui était affecté le plus souvent aux horaires de nuit, sans bénéficier des primes de nuit attribuées à ses collègues, qu'il avait été le seul à ne pas recevoir la prime d'usage en décembre en 2003 et 2004, que les primes sur objectifs avaient été allouées de façon inégalitaire, selon un système opaque et non objectif, qu'il n'avait bénéficié d'aucune évolution de carrière, contrairement à ses collègues ; qu'il produisait notamment un tableau comparatif des veilles de nuit démontrant ses dires ; que l'employeur « objectivisait » ce constat en disant que Monsieur X... n'était pas hostile à faire des nuits ; que cette affirmation était corroborée par le fait qu'il avait travaillé de nuit en « extra », lorsqu'il était en formation Fongecif, ce qui n'avait pu se faire sans son accord ; que la comparaison avec Monsieur Z... n'était pas pertinente, ce collègue ayant un poste différent du sien ; qu'une autre collègue, Madame A..., ne recevait pas de prime de nuit ; qu'il n'était pas contesté que Monsieur X... n'avait pas reçu de prime en décembre 2003 et en décembre 2004 ; que toutefois, ces primes versées par l'employeur ne résultaient pas d'un engagement unilatéral, n'étaient pas contractuelles mais exceptionnelles et n'avaient aucun caractère d'usage ; que sans encourir le reproche d'une discrimination, cette prime avait pu être allouée discrétionnairement par l'employeur en fonction de la qualité du travail fourni ; que l'employeur justifiait le non-versement à Monsieur X... par un système d'évaluation mis en place en 2002 ; que la modification des modalités de calcul ne laissait pas supposer, à elle seule, l'existence d'une discrimination ; que toutefois, Monsieur X... était fondé à demander le paiement de sa prime sur le nombre de chambres individuelles vendues ; que pour prétendre à une discrimination salariale et d'évolution de carrière, Monsieur X... faisait une comparaison avec Mademoiselle C... et Madame B... ; qu'il reconnaissait toutefois avoir reçu un salaire légèrement supérieur à celui des autres salariées ; que son ancienneté n'était pas de nature à justifier seule une promotion professionnelle ; que l'employeur justifiait les promotions et le salaire supérieur des deux autres salariées par des critères objectifs constitués par les évaluations mensuelles ; que l'employeur démontrait ainsi que les faits dénoncés par Monsieur X... étaient justifiés par des faits objectifs étrangers à toute discrimination ;
ALORS QUE la Cour d'appel a elle-même constaté que l'employeur avait à tort omis de verser des primes versées aux autres salariés et l'a même condamné, dans le dispositif de sa décision, à verser ces primes ; qu'en énonçant pourtant que l'employeur n'avait commis aucune discrimination à l'encontre de Monsieur X..., la Cour d'appel a violé l'article L 1132-1 du code du travail ;
ET ALORS QUE si l'employeur peut accorder des avantages particuliers à certains salariés, c'est à la condition que tous les salariés de l'entreprise placés dans une situation identique puissent en bénéficier et que les règles déterminant l'octroi de cet avantage soient préalablement définis et contrôlables ; qu'en disant que les primes de fin d'année avaient pu être allouées « discrétionnairement » à certains salariés et non à Monsieur X..., en 2003 et 2004, « en fonction de la qualité du travail fourni », la Cour d'appel a de plus fort violé l'article L 1132-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-26050
Date de la décision : 13/01/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 23 janvier 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 jan. 2016, pourvoi n°14-26050


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, SCP de Nervo et Poupet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.26050
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