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17/12/2015 | FRANCE | N°14-29830

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 17 décembre 2015, 14-29830


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Richard X..., salarié de la société AMBS (l'employeur), a été victime, le 16 octobre 2007, d'un accident mortel que la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Opale (la caisse) a pris en charge, le 14 décembre 2007, au titre de la législation professionnelle ; que le 30 août 2011, Mme X..., sa veuve, a saisi la caisse d'une demande de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ; qu'elle a ensuite saisi, ainsi que ses deux enfants majeurs, Mme Elo

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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Richard X..., salarié de la société AMBS (l'employeur), a été victime, le 16 octobre 2007, d'un accident mortel que la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Opale (la caisse) a pris en charge, le 14 décembre 2007, au titre de la législation professionnelle ; que le 30 août 2011, Mme X..., sa veuve, a saisi la caisse d'une demande de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ; qu'elle a ensuite saisi, ainsi que ses deux enfants majeurs, Mme Elodie X... et M. Rémi X..., d'une même demande, une juridiction de sécurité sociale ;
Sur le second moyen :
Attendu que Mme Ghislaine X... fait grief à l'arrêt de déclarer son action irrecevable, alors, selon le moyen, que la prescription biennale de l'action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur est interrompue par l'exercice de l'action pénale engagée pour les mêmes faits ; que, le 4 septembre 2009, Mme X... a déposé plainte auprès du procureur de la République qui a diligenté, le 22 septembre 2009, une enquête confiée à la gendarmerie nationale ; qu'une décision de classement sans suite ayant été notifiée à Mme X... le 8 février 2010, le délai de prescription a été interrompu jusqu'à cette dernière date à compter de laquelle un nouveau délai de deux ans a pris naissance ; que les consorts X... ayant saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale le 23 décembre 2011, soit moins de deux ans après le 8 février 2010, l'action qu'ils ont engagée en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, la société AMBS, n'était pas prescrite ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu qu'il résulte du dernier alinéa de l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale qu'en cas d'accident susceptible d'entraîner la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, la prescription biennale opposable aux demandes d'indemnisation complémentaire de la victime ou de ses ayants droit est interrompue par l'exercice de l'action pénale engagée pour les mêmes faits ; que ne constituent pas une telle cause d'interruption le dépôt d'une plainte entre les mains du procureur de la République ou auprès des services de la police, ni l'ouverture d'une enquête préliminaire par le procureur de la République ;
Que la cour d'appel, qui a constaté qu'aucune plainte avec constitution de partie civile devant le pôle d'instruction compétent n'avait été déposée par Mme Ghislaine X... dans le délai de deux ans à compter du 14 décembre 2007 et que la prescription de deux années n'avait pas été interrompue par l'exercice d'une action pénale engagée pour les mêmes faits, a exactement décidé que l'action en reconnaissance de la faute inexcusable engagée par Mme X... le 30 août 2011 était prescrite ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour déclarer irrecevable l'action engagée par Mme Elodie X... et M. Rémi X..., l'arrêt retient qu'il ressort des pièces versées aux débats que la prise en charge au titre de la législation sur les risques professionnels de l'accident mortel du travail dont a été victime Richard X... le 16 octobre 2007 a été notifiée par la caisse le 14 décembre 2007 par courrier à l'adresse de l'employeur et du salarié dont les ayants droit n'ont d'ailleurs jamais engagé d'action en reconnaissance du caractère professionnel de l'accident ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans répondre aux conclusions des intéressés qui soutenaient ne pas avoir été informés par la caisse de la décision de prise en charge de l'accident dont avait été victime leur père au titre de la législation professionnelle, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande de Mme Elodie X... et de M. Rémi X..., l'arrêt rendu le 31 octobre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée ;
Condamne la société AMBS aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du dix-sept décembre deux mille quinze, et signé par Mme Flise, président, et par Mme Parchemal, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de l'arrêt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Brouchot, avocat aux Conseils, pour les consorts X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR constaté que le délai de prescription de l'action en reconnaissance d'une faute inexcusable pour l'accident du travail dont a été victime Richard X... le 16 octobre 2007 était expiré et d'AVOIR, en conséquence, déclaré irrecevable l'action engagée par ses ayants droit, Mme Elodie X... et M. Rémi X... ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'en application des dispositions du dernier alinéa de l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale, le délai de prescription de l'action du salarié pour faute inexcusable de l'employeur ne peut commencer à courir qu'à compter de la reconnaissance du caractère professionnel de l'accident ou de la maladie ; que selon Mme Ghislaine Y... veuve X..., Mme Elodie X... et M. Rémi X..., le délai de prescription n'a pu commencer à courir dès lors que Mme Elodie X... et M. Rémi X... n'ont jamais été informés de la reconnaissance du caractère professionnel de l'accident et que la Caisse primaire d'assurance maladie ne justifie pas de la réception par Mme Ghislaine Y... veuve X... de la lettre simple qu'elle verse aux débats ; que, cependant, il ressort des pièces versées aux débats que la prise en charge au titre de la législation sur les risques professionnels de l'accident mortel du travail dont a été victime Richard X... le 16 octobre 2007 a été notifié par la Caisse primaire d'assurance maladie le 14 décembre 2007 par courrier à l'adresse de l'employeur et du salarié dont les ayants droit n'ont d'ailleurs jamais engagé d'action en reconnaissance du caractère professionnel de l'accident ; que dès lors, le délai de prescription prévu à l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale précité a commencé à courir à compter du 14 décembre 2007, date à laquelle la Caisse primaire d'assurance maladie a notifié la prise en charge au titre de la législation sur les risques professionnels de l'accident mortel du travail dont a été victime Richard X..., le 16 octobre 2007 ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'en l'espèce, Richard X... est décédé le 16 octobre 2007, de sorte qu'en application de l'article 641 alinéa 2 du code de procédure civile, la prescription était acquise le 16 octobre 2009 à 24 heures ; que l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale ajoute, in fine, que, toutefois, en cas d'accident susceptible d'entraîner la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, ou de ceux qu'il s'est substitué dans la direction, la prescription de deux ans opposable aux demandes d'indemnisation complémentaire visée aux articles L. 452-1 et suivants est interrompue par l'exercice de l'action pénale engagée pour les mêmes faits ou de l'action en reconnaissance du caractère professionnel de l'accident ; qu'en application de cette disposition, le délai de prescription de l'action des ayants droit de la victime ne peut commencer à courir qu'à compter de la reconnaissance du caractère professionnel de l'accident, soit en l'espèce à compter du 14 décembre 2007, et seul l'exercice de l'action pénale engagée pour les faits liés à la faute inexcusable est susceptible de retarder le point de départ de cette prescription ; qu'en l'espèce, il est constant qu'aucune action pénale n'a été engagée à l'égard de la société AMBS pour ces faits par le ministère public, une décision de classement sans suite étant intervenue le 8 février 2010 ; qu'à cet égard, il n'y a donc pas eu d'interruption du cours de la prescription édictée par l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale ; que, par ailleurs, Mme Ghislaine X... n'a déposé plainte, contre la société AMBS, que plus de deux années après les faits, le 17 novembre 2009 ; qu'elle ne peut se prévaloir des dispositions de l'article 85 du code de procédure pénale, alors qu'elle n'a pas mis en oeuvre la possibilité prévue par ce texte consistant à se constituer partie civile passé un délai de trois mois à compter de l'envoi de sa plainte au procureur de la République ; qu'il en aurait été autrement si Mme X... avait porté plainte suffisamment tôt pour se constituer partie civile, et ainsi engager l'action pénale, avant l'expiration du délai de prescription biennale de l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale ; qu'enfin, les demandeurs n'ont sollicité la reconnaissance de la faute inexcusable de la société AMBS que le 31 août 2011, alors que la prescription de cette action était acquise au 14 décembre 2009 à minuit ; que compte tenu de ces éléments, force est de constater que l'action en reconnaissance d'une faute inexcusable pour les faits dont a été victime Richard X... le 16 octobre 2007 est prescrite ; que l'action de Mme Ghislaine X..., Mme Elodie X... et M. Rémi X... sera donc déclarée irrecevable ;
ALORS QUE le délai de prescription biennale de l'action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ne commence à courir qu'à compter du jour où les ayants droit de la victime d'un accident mortel du travail ont eu connaissance de la prise en charge au titre de la législation professionnelle et ont été mis en mesure d'agir ; que les exposants ont fait valoir que Mme Elodie X... et M. Rémi X..., enfants majeurs du salarié victime de l'accident, n'ont pas été informés de cette prise en charge par la Caisse primaire d'assurance maladie, de sorte que le délai de prescription n'avait pas commencé à courir à leur égard lorsqu'ils ont saisi le tribunal ; qu'en ne répondant pas à ce moyen décisif, la cour d'appel a privé sa décision de motifs suffisants, violant ainsi l'article 455 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR constaté que le délai de prescription de l'action en reconnaissance d'une faute inexcusable pour l'accident du travail dont a été victime Richard X... le 16 octobre 2007 était expiré et d'AVOIR, en conséquence, déclaré irrecevable l'action engagée par sa veuve, Mme Ghislaine X..., et par ses enfants majeurs, Mme Elodie X... et M. Rémi X... ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'en application des dispositions du dernier alinéa de l'article L. 431-2 précité, le délai de prescription de deux ans opposable aux demandes d'indemnisation complémentaire visée aux articles L. 452-1 et suivants est interrompu par l'exercice de l'action pénale engagée pour les mêmes faits ; que selon Mme Ghislaine Y... veuve X..., Mme Elodie X... et M. Rémi X..., le délai de prescription aurait été interrompu par les diligences du procureur de la République (soit-transmis du parquet d'Amiens reçu le 22 septembre 2009 à la compagnie de gendarmerie nationale de Montreuil Ecuires, BTP de Campagne-les-Hesdin ; audition le 4 janvier 2010 de M. Didier Z..., gérant de la société AMBS dans le cadre de l'enquête préliminaire) et par la plainte déposée par Mme Ghislaine Y... veuve X... auprès du procureur de la République du tribunal de grande instance d'Amiens le 4 septembre 2009 et le 17 novembre 2009 auprès des services de police, de sorte que le délai de prescription aurait été interrompu jusqu'au 8 février 2010, date à laquelle une décision de classement sans suite a été notifiée à Mme Ghislaine Y... veuve X... ; que cependant, aucune plainte avec constitution de partie civile devant le pôle d'instruction compétent n'a été déposée par les consorts X... dans le délai de deux ans à compter du 14 décembre 2007 ; qu'il s'ensuit que la prescription de deux ans opposable à la demande de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur de Richard X... engagée par Mme Ghislaine Y... veuve X..., Mme Elodie X... et M. Rémi X... n'a jamais été interrompue par l'exercice d'une action pénale engagée pour les mêmes faits ou d'une action en reconnaissance du caractère professionnel de l'accident ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE selon l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale, in fine, en cas d'accident susceptible d'entraîner la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, ou de ceux qu'il s'est substitué dans la direction, la prescription de deux ans opposable aux demandes d'indemnisation complémentaire visée aux articles L. 452-1 et suivants est interrompue par l'exercice de l'action pénale engagée pour les mêmes faits ou de l'action en reconnaissance du caractère professionnel de l'accident ; qu'en application de cette disposition, le délai de prescription de l'action des ayants droit de la victime ne peut commencer à courir qu'à compter de la reconnaissance du caractère professionnel de l'accident, soit en l'espèce à compter du 14 décembre 2007, et seul l'exercice de l'action pénale engagée pour les faits liés à la faute inexcusable est susceptible de retarder le point de départ de cette prescription ; qu'en l'espèce, il est constant qu'aucune action pénale n'a été engagée à l'égard de la société AMBS pour ces faits par le ministère public, une décision de classement sans suite étant intervenue le 8 février 2010 ; qu'à cet égard, il n'y a donc pas eu d'interruption du cours de la prescription édictée par l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale ; que, par ailleurs, Mme Ghislaine X... n'a déposé plainte, contre la société AMBS, que plus de deux années après les faits, le 17 novembre 2009 ; qu'elle ne peut se prévaloir des dispositions de l'article 85 du code de procédure pénale, alors qu'elle n'a pas mis en oeuvre la possibilité prévue par ce texte consistant à se constituer partie civile passé un délai de trois mois à compter de l'envoi de sa plainte au procureur de la République ; qu'il en aurait été autrement si Mme X... avait porté plainte suffisamment tôt pour se constituer partie civile, et ainsi engager l'action pénale, avant l'expiration du délai de prescription biennale de l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale ; qu'enfin, les demandeurs n'ont sollicité la reconnaissance de la faute inexcusable de la société AMBS que le 31 août 2011, alors que la prescription de cette action était acquise au 14 décembre 2009 à minuit ; que compte tenu de ces éléments, force est de constater que l'action en reconnaissance d'une faute inexcusable pour les faits dont a été victime Richard X... le 16 octobre 2007 est prescrite ; que l'action de Mme Ghislaine X..., Mme Elodie X... et M. Rémi X... sera donc déclarée irrecevable ;
ALORS QUE la prescription biennale de l'action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur est interrompue par l'exercice de l'action pénale engagée pour les mêmes faits ; que, le 4 septembre 2009, Mme X... a déposé plainte auprès du procureur de la République qui a diligenté, le 22 septembre 2009, une enquête confiée à la gendarmerie nationale ; qu'une décision de classement sans suite ayant été notifiée à Mme X... le 8 février 2010, le délai de prescription a été interrompu jusqu'à cette dernière date à compter de laquelle un nouveau délai de deux ans a pris naissance ; que les consorts X... ayant saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale le 23 décembre 2011, soit moins de deux ans après le 8 février 2010, l'action qu'ils ont engagée en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, la société AMBS, n'était pas prescrite ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 14-29830
Date de la décision : 17/12/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 31 octobre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 17 déc. 2015, pourvoi n°14-29830


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : Me Brouchot, SCP Foussard et Froger, SCP Odent et Poulet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.29830
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