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17/12/2015 | FRANCE | N°13-24224

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 17 décembre 2015, 13-24224


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 1er juillet 2013), que Mme Simone X..., aux droits de laquelle vient sa fille, Mme Denise X..., a donné à bail le 12 février 2002 à M. Y... diverses parcelles de terre ; qu'invoquant un arriéré de loyers de 215,30 euros pour la période de 2006 à 2010, elle a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux d'une demande en résiliation de bail pour non-paiement des fermages ; que M. Y..., qui a payé l'arriéré réclamé le 2 novembre 2011, a opposé à la demande le

fait que Mme X... a obtenu des dégrèvements d'impôt foncier d'un montant ...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 1er juillet 2013), que Mme Simone X..., aux droits de laquelle vient sa fille, Mme Denise X..., a donné à bail le 12 février 2002 à M. Y... diverses parcelles de terre ; qu'invoquant un arriéré de loyers de 215,30 euros pour la période de 2006 à 2010, elle a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux d'une demande en résiliation de bail pour non-paiement des fermages ; que M. Y..., qui a payé l'arriéré réclamé le 2 novembre 2011, a opposé à la demande le fait que Mme X... a obtenu des dégrèvements d'impôt foncier d'un montant de 265 euros pour 2006 et 137 euros pour 2011, qu'elle aurait dû lui rembourser en application de l'article L. 411-24 du code rural et de la pêche maritime ;
Sur les premier et second moyens du pourvoi principal, réunis, ci-après annexés :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les premier et second moyen du pourvoi principal qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi incident :
Vu l'article L. 411-24 du code rural et de la pêche maritime ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que, dans le cas où, par suite de calamités agricoles, le bailleur du bien rural obtient une exemption ou une réduction d'impôts fonciers, la somme dont il est exonéré ou exempté bénéficie au fermier ; que celui-ci peut la déduire du fermage et qu'à défaut le propriétaire doit lui en ristourner le montant ;
Attendu que, pour condamner Mme X... à rembourser à M. Y... une somme de 186,70 euros, l'arrêt retient que celui-ci est mal fondé, au titre de l'année 2006, à solliciter le paiement total du dégrèvement obtenu, mais peut obtenir le remboursement de la différence entre celui-ci et le fermage dû ;
Qu'en se déterminant ainsi, tout en constatant que M. Y... avait acquitté le 2 novembre 2011 l'intégralité du fermage dû, ce dont il se déduisait qu'il avait droit au remboursement de la totalité du dégrèvement obtenu au titre de l'année 2006, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui en découlaient ;
Et attendu qu'en application de l'article 627, alinéa 2, du code de procédure civile, la Cour de cassation est en mesure, en cassant sans renvoi, de mettre fin au litige par application de la règle de droit appropriée ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a limité à la somme de 186,70 euros le montant de la somme que Mme X... a été condamnée à payer à M. Y..., l'arrêt rendu le 1er juillet 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Condamne Mme X... à payer à M. Y... la somme de 402 euros ;
Condamne Mme X... aux dépens des pourvois ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme X... à payer à M. Y... la somme de 3 000 euros ; rejette la demande de Mme X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept décembre deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour Mme X..., demanderesse au pourvoi principal

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté Mme Z... de sa demande en résiliation du bail consenti à M. Y...,
AUX MOTIFS QUE « le bailleur a la possibilité de demander la résiliation du bail rural si les manquements commis avant le renouvellement de celui-ci font sentir leurs effets sous l'empire du nouveau bail ou se prolongent depuis le renouvellement, ce qui est bien le cas en l'espèce ; qu'en effet, le bail s'est renouvelé à compter du 11 novembre 2010 et que par lettre recommandée du 23 décembre 2010, valant mise en demeure, Mme Denise Z... a adressé à M. Laurent Y... une demande de règlement d'une somme totale de 215,30 ¿ au titre d'un arriéré dû sur la période comprise entre 2006 et 2010 et que le paiement est intervenu le 2 novembre 2011 après saisine du tribunal qui a été effective lors de l'enregistrement de la requête au greffe le 20 octobre 2011; mais qu'il résulte des dispositions des articles 1289 et 1298 code civil que les dettes réciproques des parties, certaines, liquides et exigibles se compensent de plein droit à l'instant où elles se trouvaient exister à la fois, jusqu'à concurrence de leur quotité respective et que M. Laurent Y... est d'une part recevable à faire valoir une compensation avec des sommes dues par sa bailleresse en application des dispositions de l'article L 411-24 du code rural et est d'autre part bien fondé, si la somme due est égale ou supérieure au montant de l'indexation qui était sollicité dans la mise en demeure, à s'opposer à la résiliation du bail ; que, sur la recevabilité de sa demande de compensation, il convient de souligner que l'appelant n'a pas agi dans le cadre d'une action en remboursement des sommes perçues par sa bailleresse au titre des dégrèvements d'impôts perçus par elle et qu'elle devait lui rétrocéder en raison de la sécheresse depuis 2003, mais qu'en défense, il a soulevé ce moyen par voie d'exception et que dans ce cadre aucune prescription ne peut lui être opposée ; qu'aucun élément du dossier ne permet d'établir que Mme Simone X... aurait renoncé à l'indexation du fermage ; qu'il appartient à M. Laurent Y... d'apporter la preuve de l'existence du montant des sommes qui lui seraient dues et qui viendraient en déduction de celles qui ont été réclamées le 23 décembre 2010 et qu'il ne conteste pas dans leur quantum ; qu'il résulte expressément du courrier adressé par la trésorerie des Martres de Veyre en date du 28 janvier 2013 que pour l'année 2006, un dégrèvement de 265 ¿ a été remboursé à Mme Simone X... par un chèque du 21 février 2006 qui a été encaissé; qu'il est ainsi établi que c'est à tort que le premier juge a indiqué que Mme Denise Z... en versant aux débats les avis d'imposition - taxes foncières - pour 2006 et 2007 avait apporté la preuve qu'aucun dégrèvement sécheresse n'avait été touché alors que tel n'est pas le cas et au surplus il résulte du courrier de la direction générale des finances publiques du 12 décembre 2012 qu'en aucun cas le montant des dégrèvements n'apparaît sur l'avis d'imposition; que la somme de 215,30 ¿ réclamée par Mme Denise Z..., par courrier du 30 décembre 2010 au titre de l'indexation du fermage depuis 2006 et payée tardivement le 2 octobre 2011 devait en conséquence se compenser avec les 265 ¿ précités de sorte que la résiliation du bail n'était pas encourue; qu'en conséquence il y a lieu de réformer le jugement en ce que cette résiliation du bail et l'expulsion du fermier ont été prononcées et de débouter Mme Denise Z... de l'intégralité des demandes présentées à ce titre » (arrêt p.3 et 4) ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la résiliation du bail est encourue, lorsque deux échéances de fermage sont restées impayées à l'issue d'un délai de trois mois après mise en demeure ; que le preneur qui entend s'opposer à la résiliation peut invoquer des raisons sérieuses et légitimes ; qu'enfin, la compensation entre deux dettes ne peut s'opérer que si elles sont certaines, liquides et exigibles ; que dès lors, en retenant, pour statuer comme elle l'a fait, qu'un dégrèvement de 265 euros avait été remboursé à Simone X... par un chèque du 21 février 2006, sans même préciser ni l'origine ni la nature de ce dégrèvement ni les parcelles au titre desquelles il avait été accordé, ni, enfin, en quoi ce montant devait être remboursé au fermier, et pouvait s'imputer par compensation sur le solde des fermages réclamés, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 411-24, L. 411-31 du code rural et de la pêche maritime et 1289, 1290 et 1291 du code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'en statuant encore comme elle l'a fait, sans répondre au chef des conclusions de Mme Z... faisant valoir que le dégrèvement à concurrence d'une somme de 265 euros ne correspondait pas aux seules parcelles données à bail à M. Y..., cependant que la trésorerie de Martres de Veyre avait elle-même précisé qu' « elle ne pouvait indiquer la nature des dégrèvements ordonnancés », (conclusions p.12) la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS, ENFIN, QUE le juge doit se prononcer sur l'ensemble des pièces versées aux débats à l'appui de ses prétentions ; qu'en l'espèce, il résultait de la liste des parcelles situées sur la commune de La Roche Blanche ayant fait l'objet d'un dégrèvement en 2005 au titre de la sécheresse, que celles données à bail à M. Y... cadastrées respectivement ZC 20 et 231 et ZI 31 et 35 avaient bénéficié d'un dégrèvement pour un montant de 83 euros, et non de 265 euros ; que dès lors, en statuant comme elle l'a fait, sans même tirer les conséquences de ce document dont il résultait que le montant du dégrèvement était très sensiblement inférieur au solde du fermage réclamé, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1315 et 1353 du code civil et 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné Mme Denise Z... à payer à M. Y... la somme de 186,70 euros au titre de la restitution des dégrèvements dont celle-ci avait bénéficié,
AUX MOTIFS QUE « M. Laurent Y... est mal fondé, du fait de la compensation opérée, à solliciter le paiement total de cette somme mais il peut obtenir le remboursement de la somme de 49,70 ¿ correspondant à la différence entre 265 ¿ et 215,30 ¿ dès lors que cette créance n'est pas prescrite ; que si en application de l'article 411-24 du code rural le fermier déduit du montant du fermage à payer au titre de l'année au cours de laquelle a eu lieu le sinistre une somme égale à celle représentant le dégrèvement dont a bénéficié le bailleur, dans le cas où le paiement du fermage est intervenu avant la fixation du dégrèvement, ce qui est le cas, le propriétaire doit en ristourner le montant au preneur et que sur ce point il y a lieu de faire application de l'article 2224 du code civil qui prévoit que la prescription de cinq ans ne court qu'à compter du jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que cette connaissance du droit à dégrèvement et de son montant n'a pu être effective en l'espèce, à défaut de communication par la bailleresse du montant perçu au titre de l'année 2006, que suite aux renseignements donnés par la direction générale des finances publiques le 28 janvier 2013 ; que le calcul précité était en effet impossible à réaliser avant cette date malgré les demandes faites par le preneur dès réception du courrier du 23 décembre 2010 pour obtenir de Mme Z... un compte aussi précis que celui qu'elle avait su réaliser sur l'indexation du fermage; qu'il convient en conséquence de condamner Mme Denise Z... à payer à la somme de 49,70 ¿ ainsi que 137 ¿ au titre de la sécheresse 2011, que le lien de connexité entre l'objet du litige initial et cette demande incidente est manifeste s'agissant du compte à réaliser entre les parties qui peut être établi dans l'intérêt de chacun au jour où la cour statue afin de vider l'ensemble du contentieux ; » (arrêt p.4 et 5)
ALORS, D'UNE PART, QUE la cassation encourue du chef des dispositions de l'arrêt attaqué relatives à la résiliation du bail, entraînera par voie de conséquence, celle du dispositif de cet arrêt relatif à la condamnation de Mme Z... à payer à M. Y... la somme ci-dessus visée, conformément à l'article 624 du code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'en toute hypothèse, en statuant comme elle l'a fait, sans s'expliquer, comme elle y avait pourtant été invitée par l'intimé, sur la nature et l'origine du dégrèvement de 137 euros dont la bailleresse avait bénéficié, et sans même rechercher si, en conséquence, le remboursement au preneur du montant de ce dégrèvement était justifié, bien qu'aucune sécheresse n'eût été reconnue au titre de l'année 2011, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 411-11, L. 411-24 du code rural et de la pêche maritime, et 1134 et 1376 du code civil ;
ALORS, ENFIN, QU'en toute hypothèse, en se déterminant comme elle l'a fait, la cour d'appel a dénaturé la lettre de la trésorerie de Martres de Veyre en date du 28 janvier 2013, violant ainsi l'article 1134 du code civil.Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour M. Y..., demandeur au pourvoi incident

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir limité à la somme de 186,70 ¿ le montant des sommes que Mme X... a été condamnée à rembourser à M. Y... ;
AUX MOTIFS QUE le bail s'est renouvelé à compter du 11 novembre 2010 et que par lettre recommandée du 23 décembre 2010, valant mis en demeure, Madame Denise Z... a adressé à Monsieur A... une demande de règlement d'une somme totale de 215,30 ¿ au titre d'un arriéré dû sur la période comprise entre 2006 et 2010 et que le paiement est intervenu le 2 novembre 2011 après saisine du tribunal qui a été effective lors de l'enregistrement de la requête au greffe le 20 octobre 2011 ;¿
QUE M. Laurent Y... est mal fondé du fait de la compensation opérée, à solliciter le paiement total de cette somme mais il peut obtenir le remboursement de la somme de 49,70 ¿ correspondant à la différence entre 265 ¿ et 215,30 ¿ dès lors que cette créance n'est pas prescrite ;
ALORS QUE la cour d'appel, qui avait constaté que M. Y... s'était acquitté de la somme de 215,30 ¿ le 2 novembre 2011 alors même qu'il avait déjà payé cette somme par compensation en février 2006, ne pouvait rejeter la demande de remboursement de la totalité de la somme perçue à titre de dégrèvement ; que la cour d'appel n'a donc pas tiré les conséquences légales de ses constatations au regard de l'article L. 411-24 du code rural et de la pêche maritime.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 13-24224
Date de la décision : 17/12/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Riom, 01 juillet 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 17 déc. 2015, pourvoi n°13-24224


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.24224
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