LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 7 septembre 2013), que M. X..., engagé par la société Compagnie des transports strasbourgeois en qualité de conducteur-receveur à compter du 13 septembre 2004, a été licencié par lettre du 12 janvier 2010 pour faute grave ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale en contestation de son licenciement ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire son licenciement fondé sur une faute grave et de le débouter de ses demandes indemnitaires, alors, selon le moyen, qu'aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales ; qu'en l'espèce, il résulte des propres énonciations de l'arrêt attaqué que les faits du 5 août étaient prescrits, la prescription n'ayant pas été interrompue ; que, par suite, en retenant ces faits pour établir le bien fondé du licenciement, la cour d'appel a méconnu ses propres constatations et a ainsi violé l'article L. 1332-4 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant retenu que les griefs prescrits procédaient du même comportement fautif que les griefs invoqués dans la lettre de licenciement, la cour d'appel en a exactement déduit que l'employeur était fondé à s'en prévaloir au soutien d'un licenciement pour motif disciplinaire ;
Sur le second moyen :
Attendu que le salarié fait le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen, qu'il est constant que le salarié exerçait son emploi de manière satisfaisante depuis près de six ans ; que par suite, en retenant que les incidents sus-rapportés se situant dans une brève période constituaient une faute grave, quand il s'agissait de simples altercations entre salariés au cours desquelles, selon l'arrêt attaqué, l'exposant a été qualifié de « bourricot », insulte de nature à lui faire perdre son sang froid, la cour d'appel a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant retenu que le salarié, non seulement avait mis en danger l'un de ses collègues de travail, mais avait ensuite eu un comportement agressif et insultant à son égard, puis envers un autre salarié qui avait dénoncé ses débordements, la cour d'appel a pu en déduire que, quelle que soit son ancienneté et peu important la réaction excessive de son collègue, ces comportements rendaient impossible son maintien dans l'entreprise et constituaient une faute grave ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze décembre deux mille quinze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Vincent et Ohl, avocat aux Conseils, pour M. X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
En ce que l'arrêt attaqué déboute M. X... de l'intégralité de ses demandes tendant notamment à voir dire et juger que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner la CTS à lui verser les sommes de 2 221, 99 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 222, 20 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis et 45 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
Aux motifs que les faits antérieurs de plus de deux mois du jour où l'employeur en a eu connaissance peuvent également faire l'objet de sanctions disciplinaires s'ils se sont poursuivis, répétés ou renouvelés dans ce délai, à la condition qu'ils soient de même nature ; qu'en l'espèce, par lettre du 29 septembre 2009, l'employeur a informé le salarié qu'il entendait prendre une sanction disciplinaire à son encontre pour l'incident du 5 août 2009 ; que toutefois que cette lettre qui ne convoque pas le salarié à un entretien préalable, ne peut être considérée comme l'engagement d'une procédure disciplinaire de sorte qu'elle n'a pas interrompu le délai de prescription de l'article L. 1332-4 du code du travail ; que néanmoins qu'il ressort des pièces versées aux débats que l'incident du 5 août 2009 est à l'origine directe d'un nouvel épisode qui s'est tenu le 13 septembre 2009 ; que M. X... ayant été convoqué le 20 octobre à un entretien préalable à une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'à son licenciement devant se tenir le 29 octobre 2009, les faits du 5 août 2009 pouvaient donner lieu à sanction disciplinaire en ce qu'ils se rattachent directement à l'incident du 23 septembre 2009 qui lui n'est pas prescrit ; que la fin de non recevoir tirée de la prescription doit donc être rejetée ; que, sur le fond, il convient d'examiner les trois griefs invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige ;- sur l'incident du 5 août 2009 : que la réalité de ce grief est établie par le témoignage précis et circonstancié de M. Mathieu Y..., salarié de la CTS, qui relate que ce jour-là, il était en réunion de chantier sur le pont de Saverne à STRASBOURG, qu'il fallait déterminer le cheminement des bus pendant le chantier, que le bus conduit par M. X... s'était présenté, que celui-ci n'avait pas respecté ses consignes sur la trajectoire à suivre, l'avait heurté au niveau avant droit du bus, l'avait contraint à se baisser pour ne pas être percuté par le rétroviseur et à reculer brutalement pour ne pas se faire écraser les pieds ; que M. Y... précise que le chauffeur s'était arrêté, avait ouvert la portière et lui avait dit : " Qu'est-ce-que tu fous au milieu de la route, tu m'emmerdes " ; que ce témoignage est conforté par celui parfaitement concordant de M. Claude Z... qui raconte exactement le même incident selon le déroulement décrit par M. Y... ; que ces deux témoignages circonstanciés, qui se confortent l'un l'autre, doivent se voir conférer une pleine force probante ; que ces deux personnes qui ne connaissaient pas M. X... avant cet incident, n'avaient aucun intérêt à inventer de toute pièce un événement imaginaire à ses dépens ; sur l'incident du 23 septembre 2009 : qu'il ressort toujours du témoignage de M. Y... que le 23 septembre 2009, vers 14 H, M. X... l'avait interpellé très agressivement sur l'incident du 5 août 2009, qu'il s'était montré arrogant, avait haussé le ton et avait même failli en venir aux mains après que M. Y... l'a traité de " bourricot " ; que M. Stéphane A..., salarié de la CTS, relate dans son rapport du 24 septembre 2009 que le 23 septembre 2009, vers 14 H 15, M. X... s'était présenté dans son bureau en menaçant de " vouloir mettre son poing dans la gueule à Mathieu Y... " et en proférant des injures à son encontre ; que ce grief est donc réel ; sur l'incident du 2 décembre 2009 : que dans un autre rapport du 3 décembre 2009, M. A... raconte que ce jour-là. M. X... lui avait réclamé publiquement des explications sur son précédent rapport du 24 septembre 2009 en haussant le ton et en prenant les autres membres du personnel présents à témoin ; que ces trois incidents qui constituent un enchaînement de faits liés entre eux par un événement générateur, à savoir le comportement de M. X... le 5 août 2009, constituaient des fautes réitérées rendant impossible son maintien dans l'entreprise ; qu'en effet le 5 août 2009, il a non seulement mis en danger la sécurité de M. Y... mais il a également eu une réaction inappropriée traduisant une grande désinvolture et un manque de respect à l'égard de cet autre salarié de l'entreprise qu'il avait mis en péril quelques instants auparavant ; qu'ensuite, loin de s'excuser et de rechercher l'apaisement, il a créé deux esclandres avec MM. Y... et A... qui avaient justement dénoncé ses débordements ; que l'obligation de sécurité de résultat qui pèse sur l'employeur lui imposait de se séparer immédiatement de M. X... dont le comportement ne pouvait être toléré sans remettre en cause la bonne marche de l'entreprise ; Et aux motifs réputés adoptés Sur la prescription des faits du 5 août 2009 que selon M. X..., la CTS. a entamé une procédure de licenciement plus de deux mois après les faits qui se sont déroulés le 5 août 2009. Il estime (à titre principal) que la société défenderesse était dans l'impossibilité de se prévaloir d'une quelconque faute du fait de la prescription. Que le Conseil relève qu'il est constant que le délai de prescription des faits fautifs n'est pas interrompu par la maladie du salarié. Cependant, le courrier du 29 septembre 2009 indique clairement que l'employeur entendait sanctionner, dès la reprise du salarié absent pour cause de maladie, les faits qui se sont produits le 5 août 2009. Qu'en l'espèce, le Conseil estime que ce courrier a interrompu la prescription de deux mois et a fait courir un nouveau délai à compter de la date de ce courrier (29 septembre 2009). Qu'en l'espèce, M. X... a été initialement convoqué à un entretien préalable fixé le 29 octobre 2009. Ce dernier a été reporté à la demande du salarié. Il s'est finalement tenu le 27 novembre 2009. En l'espèce, force est de constater que l'entretien préalable s'est tenu dans les deux mois suivants le courrier du 29 septembre 2009. Les faits du 5 août ne sont donc pas prescrits. Sur la réalité des faits du 5 août 2009. Qu'en l'espèce, la lettre de licenciement indique : « En date du 5 août 2009, alors que vous conduisiez un autobus en service commercial, vous avez abordé sur la voie publique la zone d'un futur chantier où se trouvaient, pour réaliser des repérages, plusieurs personnes dont l'un de vos responsables hiérarchiques. Or, malgré les signes que vous faisait celui-ci, vous avez poursuivi au ralenti, mais de manière dangereuse, votre progression dans sa direction, l'obligeant ainsi à esquiver le passage du bus. Vous avez ensuite lancé publiquement à l'attention de se responsable de ligne les propos suivants : « qu'est-ce que tu fous au milieu de la chaussée, tu m'emmerdes », avant de continuer votre route ». En l'espèce, il n'est pas contesté que M. X... a, en conduisant un autobus, abordé sur la voie publique la zone d'un futur chantier où se trouvaient notamment MM. Y..., C. Z... et G. X.... Qu'en l'espèce, le Conseil relève que les écrits de MM. Gennaro X..., Y... et Z... confirment que M. Y..., responsable de ligne, a fait des signes, le 5 août 2009 à M. X.... Le compte rendu de l'entretien préalable de M. B... précise d'ailleurs que M. X... a répondu à M. C... « qu'il n'avait pas eu de formation pour le langage des signes et que les seuls signes qu'il connaissait sont ceux du code de la route » (Annexe 7 de M. X...). Qu'en l'espèce, le Conseil relève que les écrits de MM. Gennaro X... et Z... confirment que M. Antonio X... s'est adressé à M. Y.... Qu'en l'espèce, M. X... conteste avoir dit à M. Y... : « qu'est-ce que tu fous au milieu de la route, tu m'emmerdes ». Cependant, ces propos sont confirmés par M. Z... qui indique dans son courrier du 30 septembre 2009 : « Sur ce, le conducteur du bus a ouvert la porte avant, et lui a demandé sur un ton agressif pourquoi il l'emmerdait en se plaçant sur la chaussée ». (Annexe 16 de la CTS). Que selon M. Gennaro X..., dans son deuxième témoignage, M. Z... n'aurait pas pu entendre une discussion entre son frère et M. Y... en raison du bruit du moteur de l'autobus, mais aussi des engins de chantier (annexe 17 de M. X...). Qu'en l'espèce, il ressort du premier témoignage de M. Gennaro X... que le bruit ambiant ne l'a pas empêché « d'échanger brièvement quelques mots » avec son frère. Il relate également que le demandeur, après avoir fermé la porte de l'autobus, l'a salué et lui a dit par la fenêtre qu'ils se verraient plus tard. Le Conseil estime que les pièces de la procédure sont suffisamment probantes pour établir que M. X... a indiqué à M. Y... : « qu'est ce que tu fous au milieu de la route ; tu m'emmerdes ». C) Sur les faits du 23 septembre 2009. Qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que M. X... a rencontré M. Y... dans les locaux de la CTS à CRONENBOURG le 23 septembre 2009. Qu'en l'espèce, M. X... affirme que M. Y... l'a invectivé. Il relève que M. X... l'a traité de « bourricot » et lui a dit « casse-toi ». Que le Conseil estime que M. Y... a été maladroit en traitant M. X... de « bourricot » et en lui demandant de « se casser ». Cependant, il s'agit de simples expressions de la vie courante. Que le Conseil relève que M. X... s'abstient d'indiquer quel était le sujet évoqué durant son entretien avec M. Y... et pourquoi ce dernier a décidé d'y mettre un terme de cette manière. Que la société défenderesse produit une feuille de rapport rédigée par M. Y... qui relate : «... j'ai croisé M. X... dans le couloir, il voulait débriefer les faits cités ci-dessus, je l'ai invité à venir dans mon bureau. Il avait un air arrogant, me fixait droit dans les yeux, me demandait à quoi je jouais pour l'embêter de la sorte en me mettant au milieu de la chaussée ». Qu'en l'espèce, il ressort de cette feuille de rapport que M. X... a voulu s'entretenir avec M. Y... au sujet de l'incident 5 août 2009. Les faits du 2 décembre 2009, qui seront évoqués ci-après, confirmeront que le demandeur apprécie tenter d'obtenir des explications. La CTS produit également une feuille de rapport rédigée par M. A... qui relate : « Ce mercredi 23 septembre 2009 vers 14h45, je me trouvais dans mon bureau quand M. X... Antonio (1537) s'est présenté en tenant des propos incohérents. Il proférait des insultes (fils de pute, dictateur chauve, etc...) et il disait vouloir mettre son poing dans la gueule à Matthieu Y... ». Le Conseil estime que les pièces de la procédure sont suffisamment probantes pour établir que M. X... a souhaité s'expliquer avec M. Y... sur les faits du 5 août 2009 et que son attitude dans le bureau de M.
A...
démontre qu'il injurie et menace facilement sa hiérarchie et ce même en présence d'un tiers. D) Sur les faits du 02 décembre 2009. Qu'en l'espèce, il est également reproché à M. X... d'avoir le 2 décembre 2009, consécutivement à l'entretien préalable du 27 novembre, exigé de M. A... qu'il lui parle devant témoins et affirmé que son témoignage était un faux. Qu'en l'espèce, M. X... produit l'attestation de M. Christian D..., qui relate « j'ai à ce moment vu et entendu M. X... s'adresser aux agents présents proches de la machine à café en s'exclamant : « écoutez ça les gars, je viens de lui dire qu'il aurait pu me relever, et lui me répond qu'il n'a pas d'ordre à recevoir de moi. Je lui réponds OK, on verra, et lui se met à dire que je le menace. C'est une menace ça les gars ?... ». Il indique également : «... M. X... lui a indiqué qu'il voulait s'expliquer avec un témoin... ». La CTS produit une lettre de témoignage de M. E... qui relate « j'ai vu qu'un conducteur s'en ai pris à un agent de Maîtrise, M. A... RL, en levant sa voix pour une histoire, don je n'ai aucune connaissance... ». En l'espèce, M. X... reconnaît dans ses écritures qu'il « a effectivement tenté d'obtenir des explications de M. A... quant au témoignage erroné qu'il avait effectué ». Selon lui, « ceci ne saurait en aucun cas être constitutif d'une faute et était au contraire une attitude parfaitement légitime ». Le Conseil estime, qu'il ressort des pièces de la procédure que M. X... a tenté une fois encore d'obtenir des explications et ce devant d'autres salariés avec la volonté de mettre mal à l'aise M. A..., à qui il reproche d'avoir rédigé un témoignage à tout le moins erroné. Il est patent que cette conduite, devant d'autres salariés de l'entreprise, avait également pour but de remettre en cause l'honnêteté de ce témoin. En l'espèce, le Conseil relève que le Conseil de Discipline a estimé, à l'unanimité, que M. X... a eu à plusieurs reprises un comportement inacceptable à l'égard de sa hiérarchie. En l'espèce, le Conseil constate que les griefs reprochés à M. X... sont réels et sérieux, et qu'ils ne permettaient pas la poursuite de la relation contractuelle et ce même durant la période de préavis.
Alors qu'aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales ; qu'en l'espèce, il résulte des propres énonciations de l'arrêt attaqué que les faits du 5 août étaient prescrits, la prescription n'ayant pas été interrompue ; que, par suite, en retenant ces faits pour établir le bien fondé du licenciement, la Cour d'appel a méconnu ses propres constatations et a ainsi violé l'article L. 1332-4 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
En ce que l'arrêt attaqué déboute M. X... de l'intégralité de ses demandes tendant notamment à voir dire et juger que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner la CTS à lui verser les sommes de 2 221, 99 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 222, 20 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis et 45 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
Aux motifs que les faits antérieurs de plus de deux mois du jour où l'employeur en a eu connaissance peuvent également faire l'objet de sanctions disciplinaires s'ils se sont poursuivis, répétés ou renouvelés dans ce délai, à la condition qu'ils soient de même nature ; qu'en l'espèce, par lettre du 29 septembre 2009, l'employeur a informé le salarié qu'il entendait prendre une sanction disciplinaire à son encontre pour l'incident du 5 août 2009 ; que toutefois que cette lettre qui ne convoque pas le salarié à un entretien préalable, ne peut être considérée comme l'engagement d'une procédure disciplinaire de sorte qu'elle n'a pas interrompu le délai de prescription de l'article L. 1332-4 du code du travail ; que néanmoins qu'il ressort des pièces versées aux débats que l'incident du 5 août 2009 est à l'origine directe d'un nouvel épisode qui s'est tenu le 13 septembre 2009 ; que M. X... ayant été convoqué le 20 octobre à un entretien préalable à une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'à son licenciement devant se tenir le 29 octobre 2009, les faits du 5 août 2009 pouvaient donner lieu à sanction disciplinaire en ce qu'ils se rattachent directement à l'incident du 23 septembre 2009 qui lui n'est pas prescrit ; que la fin de non recevoir tirée de la prescription doit donc être rejetée ; que, sur le fond, il convient d'examiner les trois griefs invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige ;- sur l'incident du 5 août 2009 : que la réalité de ce grief est établie par le témoignage précis et circonstancié de M. Mathieu Y..., salarié de la CTS, qui relate que ce jour-là, il était en réunion de chantier sur le pont de Saverne à STRASBOURG, qu'il fallait déterminer le cheminement des bus pendant le chantier, que le bus conduit par M. X... s'était présenté, que celui-ci n'avait pas respecté ses consignes sur la trajectoire à suivre, l'avait heurté au niveau avant droit du bus, l'avait contraint à se baisser pour ne pas être percuté par le rétroviseur et à reculer brutalement pour ne pas se faire écraser les pieds ; que M. Y... précise que le chauffeur s'était arrêté, avait ouvert la portière et lui avait dit : " Qu'est-ce-que tu fous au milieu de la route, tu m'emmerdes " ; que ce témoignage est conforté par celui parfaitement concordant de M. Claude Z... qui raconte exactement le même incident selon le déroulement décrit par M. Y... ; que ces deux témoignages circonstanciés, qui se confortent l'un l'autre, doivent se voir conférer une pleine force probante ; que ces deux personnes qui ne connaissaient pas M. X... avant cet incident, n'avaient aucun intérêt à inventer de toute pièce un événement imaginaire à ses dépens ; sur l'incident du 23 septembre 2009 : qu'il ressort toujours du témoignage de M. Y... que le 23 septembre 2009, vers 14 H, M. X... l'avait interpellé très agressivement sur l'incident du 5 août 2009, qu'il s'était montré arrogant, avait haussé le ton et avait même failli en venir aux mains après que M. Y... l'a traité de " bourricot " ; que M. Stéphane A..., salarié de la CTS, relate dans son rapport du 24 septembre 2009 que le 23 septembre 2009, vers 14 H 15, M. X... s'était présenté dans son bureau en menaçant de " vouloir mettre son poing dans la gueule à Mathieu Y... " et en proférant des injures à son encontre ; que ce grief est donc réel ; sur l'incident du 2 décembre 2009 : que dans un autre rapport du 3 décembre 2009, M. A... raconte que ce jour-là. M. X... lui avait réclamé publiquement des explications sur son précédent rapport du 24 septembre 2009 en haussant le ton et en prenant les autres membres du personnel présents à témoin ; que ces trois incidents qui constituent un enchaînement de faits liés entre eux par un événement générateur, à savoir le comportement de M. X... le 5 août 2009, constituaient des fautes réitérées rendant impossible son maintien dans l'entreprise ; qu'en effet le 5 août 2009, il a non seulement mis en danger la sécurité de M. Y... mais il a également eu une réaction inappropriée traduisant une grande désinvolture et un manque de respect à l'égard de cet autre salarié de l'entreprise qu'il avait mis en péril quelques instants auparavant ; qu'ensuite, loin de s'excuser et de rechercher l'apaisement, il a créé deux esclandres avec MM. Y... et A... qui avaient justement dénoncé ses débordements ; que l'obligation de sécurité de résultat qui pèse sur l'employeur lui imposait de se séparer immédiatement de M. X... dont le comportement ne pouvait être toléré sans remettre en cause la bonne marche de l'entreprise ; Et aux motifs réputés adoptés Sur la prescription des faits du 5 août 2009 que selon M. X..., la CTS. a entamé une procédure de licenciement plus de deux mois après les faits qui se sont déroulés le 5 août 2009. Il estime (à titre principal) que la société défenderesse était dans l'impossibilité de se prévaloir d'une quelconque faute du fait de la prescription. Que le Conseil relève qu'il est constant que le délai de prescription des faits fautifs n'est pas interrompu par la maladie du salarié. Cependant, le courrier du 29 septembre 2009 indique clairement que l'employeur entendait sanctionner, dès la reprise du salarié absent pour cause de maladie, les faits qui se sont produits le 5 août 2009. Qu'en l'espèce, le Conseil estime que ce courrier a interrompu la prescription de deux mois et a fait courir un nouveau délai à compter de la date de ce courrier (29 septembre 2009). Qu'en l'espèce, M. X... a été initialement convoqué à un entretien préalable fixé le 29 octobre 2009. Ce dernier a été reporté à la demande du salarié. Il s'est finalement tenu le 27 novembre 2009. En l'espèce, force est de constater que l'entretien préalable s'est tenu dans les deux mois suivants le courrier du 29 septembre 2009. Les faits du 5 août ne sont donc pas prescrits. Sur la réalité des faits du 5 août 2009. Qu'en l'espèce, la lettre de licenciement indique : « En date du 5 août 2009, alors que vous conduisiez un autobus en service commercial, vous avez abordé sur la voie publique la zone d'un futur chantier où se trouvaient, pour réaliser des repérages, plusieurs personnes dont l'un de vos responsables hiérarchiques. Or, malgré les signes que vous faisait celui-ci, vous avez poursuivi au ralenti, mais de manière dangereuse, votre progression dans sa direction, l'obligeant ainsi à esquiver le passage du bus. Vous avez ensuite lancé publiquement à l'attention de se responsable de ligne les propos suivants : « qu'est-ce que tu fous au milieu de la chaussée, tu m'emmerdes », avant de continuer votre route ». En l'espèce, il n'est pas contesté que M. X... a, en conduisant un autobus, abordé sur la voie publique la zone d'un futur chantier où se trouvaient notamment MM. Y..., C. Z... et G. X.... Qu'en l'espèce, le Conseil relève que les écrits de MM. Gennaro X..., Y... et Z... confirment que M. Y..., responsable de ligne, a fait des signes, le 5 août 2009 à M. X.... Le compte rendu de l'entretien préalable de M. B... précise d'ailleurs que M. X... a répondu à M. C... « qu'il n'avait pas eu de formation pour le langage des signes et que les seuls signes qu'il connaissait sont ceux du code de la route » (Annexe 7 de M. X...). Qu'en l'espèce, le Conseil relève que les écrits de MM. Gennaro X... et Z... confirment que M. Antonio X... s'est adressé à M. Y.... Qu'en l'espèce, M. X... conteste avoir dit à M. Y... : « qu'est-ce que tu fous au milieu de la route, tu m'emmerdes ». Cependant, ces propos sont confirmés par M. Z... qui indique dans son courrier du 30 septembre 2009 : « Sur ce, le conducteur du bus a ouvert la porte avant, et lui a demandé sur un ton agressif pourquoi il l'emmerdait en se plaçant sur la chaussée ». (Annexe 16 de la CTS). Que selon M. Gennaro X..., dans son deuxième témoignage, M. Z... n'aurait pas pu entendre une discussion entre son frère et M. Y... en raison du bruit du moteur de l'autobus, mais aussi des engins de chantier (annexe 17 de M. X...). Qu'en l'espèce, il ressort du premier témoignage de M. Gennaro X... que le bruit ambiant ne l'a pas empêché « d'échanger brièvement quelques mots » avec son frère. Il relate également que le demandeur, après avoir fermé la porte de l'autobus, l'a salué et lui a dit par la fenêtre qu'ils se verraient plus tard. Le Conseil estime que les pièces de la procédure sont suffisamment probantes pour établir que M. X... a indiqué à M. Y... : « qu'est ce que tu fous au milieu de la route ; tu m'emmerdes ». C) Sur les faits du 23 septembre 2009. Qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que M. X... a rencontré M. Y... dans les locaux de la CTS à CRONENBOURG le 23 septembre 2009. Qu'en l'espèce, M. X... affirme que M. Y... l'a invectivé. Il relève que M. X... l'a traité de « bourricot » et lui a dit « casse-toi ». Que le Conseil estime que M. Y... a été maladroit en traitant M. X... de « bourricot » et en lui demandant de « se casser ». Cependant, il s'agit de simples expressions de la vie courante. Que le Conseil relève que M. X... s'abstient d'indiquer quel était le sujet évoqué durant son entretien avec M. Y... et pourquoi ce dernier a décidé d'y mettre un terme de cette manière. Que la société défenderesse produit une feuille de rapport rédigée par M. Y... qui relate : «... j'ai croisé M. X... dans le couloir, il voulait débriefer les faits cités ci-dessus, je l'ai invité à venir dans mon bureau. Il avait un air arrogant, me fixait droit dans les yeux, me demandait à quoi je jouais pour l'embêter de la sorte en me mettant au milieu de la chaussée ». Qu'en l'espèce, il ressort de cette feuille de rapport que M. X... a voulu s'entretenir avec M. Y... au sujet de l'incident 5 août 2009. Les faits du 2 décembre 2009, qui seront évoqués ci-après, confirmeront que le demandeur apprécie tenter d'obtenir des explications. La CTS produit également une feuille de rapport rédigée par M. A... qui relate : « Ce mercredi 23 septembre 2009 vers 14h45, je me trouvais dans mon bureau quand M. X... Antonio (1537) s'est présenté en tenant des propos incohérents. Il proférait des insultes (fils de pute, dictateur chauve, etc...) et il disait vouloir mettre son poing dans la gueule à Matthieu Y... ». Le Conseil estime que les pièces de la procédure sont suffisamment probantes pour établir que M. X... a souhaité s'expliquer avec M. Y... sur les faits du 5 août 2009 et que son attitude dans le bureau de M.
A...
démontre qu'il injurie et menace facilement sa hiérarchie et ce même en présence d'un tiers. D) Sur les faits du 02 décembre 2009. Qu'en l'espèce, il est également reproché à M. X... d'avoir le 2 décembre 2009, consécutivement à l'entretien préalable du 27 novembre, exigé de M. A... qu'il lui parle devant témoins et affirmé que son témoignage était un faux. Qu'en l'espèce, M. X... produit l'attestation de M. Christian D..., qui relate « j'ai à ce moment vu et entendu M. X... s'adresser aux agents présents proches de la machine à café en s'exclamant : « écoutez ça les gars, je viens de lui dire qu'il aurait pu me relever, et lui me répond qu'il n'a pas d'ordre à recevoir de moi. Je lui réponds OK, on verra, et lui se met à dire que je le menace. C'est une menace ça les gars ?... ». Il indique également : «... M. X... lui a indiqué qu'il voulait s'expliquer avec un témoin... ». La CTS produit une lettre de témoignage de M. E... qui relate « j'ai vu qu'un conducteur s'en ai pris à un agent de Maîtrise, M. A... RL, en levant sa voix pour une histoire, don je n'ai aucune connaissance... ». En l'espèce, M. X... reconnaît dans ses écritures qu'il « a effectivement tenté d'obtenir des explications de M. A... quant au témoignage erroné qu'il avait effectué ». Selon lui, « ceci ne saurait en aucun cas être constitutif d'une faute et était au contraire une attitude parfaitement légitime ». Le Conseil estime, qu'il ressort des pièces de la procédure que M. X... a tenté une fois encore d'obtenir des explications et ce devant d'autres salariés avec la volonté de mettre mal à l'aise M. A..., à qui il reproche d'avoir rédigé un témoignage à tout le moins erroné. Il est patent que cette conduite, devant d'autres salariés de l'entreprise, avait également pour but de remettre en cause l'honnêteté de ce témoin. En l'espèce, le Conseil relève que le Conseil de Discipline a estimé, à l'unanimité, que M. X... a eu à plusieurs reprises un comportement inacceptable à l'égard de sa hiérarchie. En l'espèce, le Conseil constate que les griefs reprochés à M. X... sont réels et sérieux, et qu'ils ne permettaient pas la poursuite de la relation contractuelle et ce même durant la période de préavis.
Alors qu'il est constant que le salarié exerçait son emploi de manière satisfaisante depuis près de 6 ans ; que par suite en retenant que les incidents susrapportés se situant dans une brève période constituaient une faute grave, quand il s'agissait de simples altercations entre salariés au cours desquelles selon l'arrêt attaqué l'exposant a été qualifié de « bourricot », insulte de nature à lui faire perdre son sang froid, la Cour d'appel a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail.