LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée le 1er mars 1997, par la Direction opérationnelle territoriale courrier Auvergne de La Poste (La Poste) en qualité d'agent contractuel de droit privé pour occuper un emploi de production au centre de tri du courrier, a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir le bénéfice des quatre jours par an de repos exceptionnel, prévu par l'article 50 de la convention commune La Poste-France Télécom, pour la période 2006 à 2009, ainsi qu'un rappel de rémunération, au titre du « complément poste », sur le fondement du principe « à travail égal, salaire égal » ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article 50 de la convention commune La Poste-France Télécom ;
Attendu selon ce texte qu'en cas d'utilisation ininterrompue, quatre jours de repos exceptionnels sont octroyés pour une année de services accomplis, aux agents contractuels dans les mêmes conditions que pour les fonctionnaires ; que lorsque cette condition d'utilisation n'est pas remplie, il est attribué un repos exceptionnel par trimestre de travail ininterrompu ; qu'en cas de recrutement ou de départ en cours d'année, les droits des intéressés sont calculés au prorata de la durée des périodes d'activité ;
Attendu que pour rejeter la demande de la salariée tendant à l'octroi de jours de repos exceptionnels pour la période 2006 à 2009, l'arrêt énonce que la salariée qui était employée à temps partiel jusqu'au 1er novembre 2009, ne peut pas réclamer pour la période antérieure au 2 novembre 2009 des jours de repos exceptionnels supplémentaires, le nombre de repos octroyés pour cette période étant en effet conforme à celui auquel elle avait droit, à savoir deux jours et demi par an ; qu'en revanche, pour la période postérieure, son droit au repos exceptionnel doit être calculé comme si elle avait travaillé à temps complet, soit trois jours par an, en application de la circulaire du 6 juin 2006, par suite de l'affectation d'un jour de repos exceptionnel par an à l'accomplissement de la journée nationale de solidarité ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'étendue des droits du salarié en matière de repos exceptionnels est déterminée par référence aux périodes de présence et d'activité dans l'entreprise au cours de l'année écoulée et non en fonction de la durée hebdomadaire de travail, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le second moyen :
Vu le principe d'égalité de traitement, ensemble la délibération du 25 janvier 1995 du conseil d'administration de La Poste et la décision n° 717 du 4 mai 1995 du président du conseil d'administration de La Poste ;
Attendu, que selon le premier de ces textes, les primes et indemnités perçues par les agents de droit public et les agents de droit privé et initialement regroupées au sein d'un complément indemnitaire ont été supprimées et incorporées dans un tout indivisible appelé complément poste constituant désormais de façon indissociable l'un des sous-ensembles de la rémunération de base de chaque catégorie de personnel ; que selon le second, la rémunération des agents de La Poste se compose désormais de deux éléments, d'une part, le traitement indiciaire pour les fonctionnaires ou le salaire de base pour les agents contractuels, lié au grade et rémunérant l'ancienneté et l'expérience, et d'autre part, le complément poste perçu par l'ensemble des agents, qui rétribue le niveau de fonction et tient compte de la maîtrise du poste ;
Attendu que pour rejeter la demande de la salariée en paiement d'un rappel de « complément poste », l'arrêt énonce que l'examen du bulletin de paie de M. Y..., fait apparaître que ce dernier travaille comme elle au centre de tri de Lempdes, en qualité d'agent de production fonctionnaire et qu'il perçoit un « complément poste » plus important que le sien, ce qui caractérise une inégalité de traitement ; que cependant, Mme X... a exposé oralement à l'audience que M. Y... avait 21 ans d'ancienneté tandis que la sienne en la décomptant à partir de l'année 1997 s'élève seulement à 16 ans ; que cette différence importante d'ancienneté justifie la différence de traitement critiquée, dès lors que l'ancienneté respective de Mme X... et de M. Y... n'est pas déjà prise en compte par une prime d'ancienneté distincte de leur salaire de base ;
Qu'en statuant ainsi, en se référant à l'ancienneté respective du fonctionnaire et de la salariée qui exercent au même niveau les mêmes fonctions, alors que le complément poste étant appelé à rétribuer un niveau de fonction en tenant compte de la maîtrise personnelle du poste, seuls ces critères devaient être pris en considération, la cour d'appel a violé le principe et les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en qu'il rejette les demandes relatives aux jours de repos exceptionnels pour la période 2006 à 2009 et au complément poste, l'arrêt rendu le 19 novembre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Limoges ;
Condamne la DOTC Auvergne de La Poste (La Poste) aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf décembre deux mille quinze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Madame Anne X... de sa demande tendant à l'octroi de jours de repos exceptionnels pour la période 2006 ¿ 2009 ;
Aux motifs qu'au regard des éléments fournis par les parties (circulaire n° 29 du 20 mars 1975, convention commune aux salariés de la Poste, circulaires des 3 février et 6 juin 2006, guide du chef d'établissement, guide de l'utilisateur géode), tout fonctionnaire, agent contractuel de droit public, ou agent contractuel de droit privé sous contrat à durée indéterminée employé par La Poste, a droit à 4 jours de repos exceptionnels pour une année de service accompli, dès lors qu'il travaille à temps complet ; qu'Anne X... produit des pièces (contrat à durée indéterminée en date du 21 juillet 2000, avenant du 9 avril 2001, avenant du 16 octobre 2009) desquelles il ressort que jusqu'au 1er novembre 2009, elle était employée à temps incomplet, et qu'elle est employée à temps complet depuis le 2 novembre de la même année ; que dans ces conditions elle ne peut pas réclamer pour la période antérieure au 2 novembre 2009 des jours de repos exceptionnels supplémentaires, le nombre de repos octroyés pour cette période étant en effet conforme à celui auquel elle avait droit, à savoir 2, 5 jours par an ; qu'en revanche, pour la période postérieure, son droit au repos exceptionnel doit être calculé comme si elle avait travaillé à temps complet, soit trois jours par an, en application de la circulaire du 6 juin 2006, par suite de l'affectation d'un jour de repos exceptionnel par an à l'accomplissement de la journée nationale de solidarité ; qu'ayant bénéficié pour l'année 2010 seulement de 2, 5 jour de repos exceptionnel, il y a donc lieu d'enjoindre à la Poste de lui accorder 0, 5 jour de repos supplémentaire ;
Alors que, de première part, les juges du fond sont liés par les conclusions prises devant eux et ne peuvent modifier les termes du litige dont ils sont saisis ; qu'il résulte de leurs conclusions écrites, reprises oralement à l'audience, que la contestation portait sur le bien-fondé de la position de l'employeur selon laquelle la diminution du nombre de jours de repos exceptionnels de la salariée était fondée sur la différenciation existant entre les salariés travaillant 5 ou 6 jours par semaine et ceux travaillant moins de 5 jours par semaine et résultant de la circulaire du 6 juin 2006 ; qu'en décidant que Madame X... ne pouvait réclamer pour la période antérieure au 2 novembre 2009 des jours de repos exceptionnels supplémentaires parce qu'il ressortait des pièces produites qu'étant alors employée à temps incomplet, le nombre de repos octroyés pour cette période était conforme à celui auquel elle avait droit, la Cour d'appel a violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
Alors que, de deuxième part, le juge tenu, en toutes circonstances, d'observer lui-même le principe de la contradiction, ne peut retenir dans sa décision un moyen qu'il a relevé d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en relevant d'office le moyen selon lequel qu'il ressortait des pièces produites qu'étant alors employée à temps incomplet, le nombre de repos octroyés pour cette période était conforme à celui auquel elle avait droit en application de la circulaire du 6 juin 2006 sans inviter au préalable les parties à présenter leurs observations, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile ;
Alors que, de troisième part, aux termes de l'article 50 de la convention commune La Poste ¿ France Telecom, en cas d'utilisation ininterrompue, 4 jours de repos exceptionnels sont octroyés pour une année de services accomplis, dans les mêmes conditions que pour les fonctionnaires ; que la circulaire n° 29 du 20 mars 1975 a attribué quatre jours de repos exceptionnels par an à l'ensemble des personnels de la Poste, agents titulaires comme auxiliaires à utilisation continue ; qu'il en résulte que l'étendue des droits d'un salarié en matière de repos exceptionnels est déterminée en fonction de l'exécution de sa prestation de travail tout au long de l'année et non en fonction de la durée de travail ; qu'ainsi, en déboutant Madame Anne X... de sa demande d'obtention des jours de repos exceptionnels pour la période 2006 ¿ 2009 au motif qu'elle était employée à temps incomplet, la Cour d'appel a violé l'article 50 de la Convention commune La Poste-France Telecom.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Madame Anne X... de sa demande tendant à la condamnation de La Poste au paiement d'un rappel de complément indemnitaire dit " complément Poste » ;
Aux motifs que l'employeur est tenu d'assurer l'égalité de rémunération entre salariés, pour autant que les salariés en cause sont placés dans une situation identique ; que le " complément poste " regroupe l'ensemble des primes non spécifiques de la fonction publique mise en place pour les agents fonctionnaires par décision du directeur de La Poste du 27 avril 1993, étendue aux agents contractuels de droit privé par décision du 25 janvier 1995 ; que pour prétendre avoir droit au " complément poste " versé aux fonctionnaires classés au grade APN1, Anne X... compare sa situation à celles de trois fonctionnaires de La Poste, Mrs Frédéric Y..., Bernard Z... et Jean-Pierre A... ; que cependant, elle n'effectue pas le même travail que Mrs Z... et A..., puisque ces derniers, au regard des bulletins de paie produits, exercent la fonction de facteur, alors qu'elle est agent de production, chargé de la manutention et du tri dans un centre de tri ; que l'examen du bulletin de paie de M. Y... fait apparaître que ce dernier travaille comme elle au centre de tri de Lempdes, en qualité d'agent de production et qu'il perçoit un " complément poste " plus important que le sien ; que cet élément est donc susceptible de caractériser une atteinte au principe d'égalité de rémunération ; que cependant, Anne X... a exposé oralement à l'audience que M. Y... a 21 ans d'ancienneté alors que la sienne en la décomptant à partir de l'année 1997 s'élève seulement à 16 ans ; que cette différence importante d'ancienneté justifie la différence de traitement critiquée, dès lors que l'ancienneté respective d'Anne X... et de M. Y... n'est pas déjà prise en compte par une prime d'ancienneté distincte de leur salaire de base ; dans ces conditions qu'Anne X... et les fonctionnaires auxquels elle se compare n'étant pas placés dans une situation identique La Poste n'a pas porté atteinte au principe de l'égalité de traitement, et il y a lieu en conséquence de débouter la salariée de sa demande en paiement d'un rappel de " complément poste " ;
Alors que, d'une part, le juge tenu, en toutes circonstances, d'observer lui-même le principe de la contradiction, ne peut retenir dans sa décision un moyen qu'il a relevé d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en relevant d'office le moyen selon lequel la différence importante d'ancienneté justifie la différence de traitement critiquée, dès lors que l'ancienneté respective de Madame Anne X... et de Monsieur Y... n'est pas déjà prise en compte par une prime d'ancienneté distincte de leur salaire de base sans inviter au préalable les parties à présenter leurs observations, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile ;
Alors que, d'autre part, en s'abstenant de rechercher si, en sa qualité de fonctionnaire, le traitement de Monsieur Y... n'est pas fixé en fonction de son grade et de l'échelon auquel il est parvenu et si son ancienneté n'est pas prise en compte dans son avancement, de sorte qu'il n'y avait pas lieu de récompenser son ancienneté par le paiement d'une prime d'ancienneté, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe « à travail égal, salaire égal » ;
Alors, de troisième part, que Madame X... avait produit le Guide mémento recueil PS-II relatif aux compléments poste de mars 2011, dont il résulte que le « complément poste », qui regroupe l'ensemble des primes et indemnités existantes non spécifiques de la fonction publique, avait été initialement mis en place pour les agents fonctionnaires et a seulement pour objet de rétribuer le niveau de la fonction et la maîtrise du poste ; qu'en retenant que la différence importante d'ancienneté entre Madame Anne X... et Monsieur Y... justifie la différence de traitement critiquée dès lors que l'ancienneté respective de ces deux agents n'est pas prise en compte par une prime d'ancienneté distincte de leur salaire de base, la Cour d'appel qui n'a pas examiné le contenu du Guide mémento, pourtant déterminant pour l'issue du litige, l'a dénaturé par omission, violant ainsi l'article 1134 du Code.