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01/12/2015 | FRANCE | N°14-19556

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 01 décembre 2015, 14-19556


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier et le second moyens, réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Agen, 31 mars 2014), que la société Occitane de services a été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 30 janvier et 12 mars 2004, Mme A... étant désignée d'abord en qualité de représentant des créanciers puis en celle de liquidateur ; que l'arrêt du 3 octobre 2005, ayant annulé ces décisions et ouvert d'office une nouvelle procédure de redressement judiciaire a été cassé sans renvoi par un arrêt du 13 fév

rier 2007 ; que la société Occitane de services a recherché la responsabilit...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier et le second moyens, réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Agen, 31 mars 2014), que la société Occitane de services a été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 30 janvier et 12 mars 2004, Mme A... étant désignée d'abord en qualité de représentant des créanciers puis en celle de liquidateur ; que l'arrêt du 3 octobre 2005, ayant annulé ces décisions et ouvert d'office une nouvelle procédure de redressement judiciaire a été cassé sans renvoi par un arrêt du 13 février 2007 ; que la société Occitane de services a recherché la responsabilité personnelle du liquidateur pour avoir vendu, dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire de la société Occitane de transports, deux véhicules lui appartenant ;
Attendu que la société Occitane de services fait grief à l'arrêt de rejeter l'intégralité de ses demandes alors, selon le moyen :
1°/ que la mission de réalisation des actifs qui incombe au liquidateur judiciaire suppose, pour être menée sans risque de méconnaître les droits de propriété de quiconque, que préalablement à toute cession soit établi un inventaire précis des biens de l'entreprise ; que s'il appartenait au juge-commissaire, tenu de veiller au bon déroulement de la procédure, d'ordonner qu'il soit procédé à un inventaire, Mme A... aurait dû, devant la carence de celui-ci et le particularisme né de la proximité des sociétés Occitane de services et Occitane de transports, solliciter sa désignation ou celle d'un officier ministériel ou de procéder elle-même à un inventaire ; que pour avoir omis de le faire en temps utile, le liquidateur a commis une faute ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;
2°/ que le liquidateur est tenu de s'assurer de l'identité du propriétaire des biens qu'il décide de céder dans le cadre de la réalisation des actifs de l'entreprise qu'il liquide ; qu'en décidant que Mme A... n'avait pas commis de faute en cédant, dans le cadre de la liquidation des biens de la société Occitane de transports, un fourgon Mercedes et un tracteur Sciana dont la société Occitane de services était en réalité propriétaire, opérant ainsi une confusion du patrimoine de ces deux sociétés, pour ne pas s'être assurée de l'identité du propriétaire de ces deux véhicules, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;
3°/ qu'en écartant la faute de Mme A... pour n'avoir pas vérifié l'identité du propriétaire des véhicules litigieux, aux motifs inopérants que l'inventaire de la société Occitane de transports faisait état de ces deux véhicules, que le liquidateur ne disposait d'aucun document comptable contraire, qu'aucun recours n'avait été formé contre la décision du juge-commissaire d'autoriser la cession de ces deux biens, la cour d'appel qui, ce faisant, a affranchi le liquidateur d'une partie de la mission qui lui est dévolue, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
4°/ que dans ses conclusions d'appel, la société Occitane de services faisait valoir qu'au mois d'août 2004, Mme X..., sa gérante, avait reprécisé à Mme A... que la société Occitane de services était propriétaire des deux véhicules litigieux ; qu'elle en déduisait que le liquidateur qui a procédé aux cessions respectivement en mai 2004 et août 2004, ne pouvait faire état, à tout le moins pour la cession réalisée en août 2004, d'une « erreur légitime » ; qu'en ne répondant pas au moyen ainsi développé, la cour d'appel a privé sa décision de motifs, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
5°/ que la société Occitane de services faisait valoir que, par lettre du 7 décembre 2006, M. Y..., qui l'administrait alors, avait sommé Mme A... de lui restituer les sommes perçues indûment, à raison de la cession du tracteur Sciana et du fourgon Mercedes, dans le cadre de la liquidation de la société Occitane de transports ; qu'elle mettait ainsi en évidence qu'à considérer même que Mme A... ait pu valablement penser et céder que les deux véhicules appartenait à la société Occitane de transports, elle avait commis une faute lorsque, informée de son erreur, elle ne lui avait pas restitué le produit de cette vente ; qu'en s'abstenant de répondre au moyen opérant ainsi développé, la cour d'appel a derechef privé sa décision de motifs, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'après avoir énoncé qu'il n'incombait pas au liquidateur d'attirer l'attention du juge-commissaire sur l'absence d'inventaire obligatoire des biens de la société Occitane de services et que la faute du liquidateur devait s'apprécier à la date de la vente des deux véhicules litigieux, c'est-à-dire en mai et août 2004, l'arrêt retient qu'à ce moment, Mme A... était en possession d'un inventaire des actifs de la société Occitane de transports mentionnant que celle-ci détenait les deux véhicules litigieux, que le commissaire-priseur, qui avait dressé cet inventaire, disposait de leurs cartes grises, que le gérant de la société Occitane de transports, par ailleurs dirigeant de fait de la société Occitane de services, n'avait élevé aucune protestation contre l'ordonnance du juge-commissaire autorisant la vente des véhicules lorsqu'elle lui avait été notifiée, ni formé de recours contre cette décision et, enfin, qu'il n'est pas justifié qu'avant la cession de ces actifs, Mme A... aurait été informée d'une quelconque manière que les véhicules seraient devenus la propriété de la société Occitane de transports ; que par ces énonciations, constatations et appréciations, dont il résulte que le liquidateur, qui n'est tenu qu'à une obligation de moyens, pouvait estimer que la société Occitane de services n'était pas propriétaire des deux véhicules, la cour d'appel a légalement justifié sa décision, sans avoir à répondre à des conclusions qui, contrairement aux allégations des troisième et quatrième branches du moyen, ne soutenaient pas que le dirigeant de la société avait « reprécisé que la société Occitane de services était propriétaire » ni n'imputaient à Mme A... d'autre faute que celle d'avoir vendu les véhicules ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Occitane de services aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 3 000 euros à Mme A... et rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du premier décembre deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Boutet-Hourdeaux, avocat aux Conseils, pour la société Occitane de services
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté la société OCCITANE DE SERVICES de l'intégralité de ses demandes tendant à voir condamner Maître A... ;
AUX MOTIFS QUE c'est par des motifs pertinents que les premiers juges ont considéré qu'il ne pouvait être reproché à Maître A... de ne pas avoir soutenu l'appel de Madame X... et de ne pas avoir attiré l'attention du juge-commissaire sur la nécessité de procéder à un inventaire et de faire désigner un officier ministériel à cet effet ; qu'il suffira d'ajouter qu'aucune obligation ne pèse sur le mandataire judiciaire à cet égard et que c'est au juge-commissaire de contrôler le bon déroulement de la procédure et non au mandataire judiciaire ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il ne peut pas être fait grief à Maître A... de ne pas avoir procédé à l'inventaire du patrimoine de la société OCCITANE DE SERVICES, ce qu'elle n'avait pas à diligenter d'office à défaut de désignation par le juge-commissaire d'un officier public pour y procéder, que ce soit à l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, ou de liquidation judiciaire, conformément à l'article L. 621-18 du Code de commerce applicable à ces dates ; que l'absence d'inventaire ne fait toutefois pas obstacle à une action en revendication ou en restitution selon l'article L. 621-18 précité ;
ALORS QUE la mission de réalisation des actifs qui incombe au liquidateur judicaire suppose, pour être menée sans risque de méconnaître les droits de propriété de quiconque, que préalablement à toute cession soit établi un inventaire précis des biens de l'entreprise ; que s'il appartenait au juge-commissaire, tenu de veiller au bon déroulement de la procédure, d'ordonner qu'il soit procédé à un inventaire, Maître A... aurait dû, devant la carence de celui-ci et le particularisme né de la proximité des sociétés OCCITANE DE SERVICES et OCCITANE DE TRANSPORTS, solliciter sa désignation ou celle d'un officier ministériel ou de procéder elle-même à un inventaire ; que pour avoir omis de le faire en temps utile, le liquidateur a commis une faute ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté la société OCCITANE DE SERVICES de l'intégralité de ses demandes tendant à voir condamner Maître A... ;
AUX MOTIFS QUE c'est à tort que les premiers juges ont retenu que Me A... avait commis une faute en procédant, dans le cadre de la réalisation des actifs de la société OCCITANE DE TRANSPORTS, elle-même en liquidation judiciaire, à la cession du fourgon Mercedes et du tracteur Scania ; qu'en effet c'est à la date de la cession de ces véhicules, c'est-à-dire en mai et en août 2004, qu'il convient de se placer pour apprécier le comportement de Me A... ; que force est de constater qu'à l'époque Me A... était en possession de l'inventaire des actifs de la SOCIETE OCCITANE DE TRANSPORTS, dressé par Me PUYOL, que ce dernier était en possession des cartes grises des deux véhicules, mentionnant la société OCCITANE DE TRANSPORTS comme locataire en vertu d'un contrat de leasing conclu avec BNP Lease, que Me A... n'avait aucune raison de mettre en doute cet inventaire et qu'elle a sollicité et obtenu l'autorisation du juge-commissaire de procéder à la cession de gré à gré de l'ensemble des véhicules prisés dans l'inventaire et donc notamment des deux véhicules litigieux ; que l'ordonnance du juge-commissaire du 23 juin 2004 a été notifiée à Monsieur Z..., gérant de droit de la société OCCITANE DE TRANSPORTS, mais aussi dirigeant de fait de la société OCCITANE DE SERVICES et caution de certains engagements de celle-ci, que Monsieur Z... n'a élevé aucune protestation, ni formé aucun recours contre cette ordonnance et n'a notamment alors pas soutenu que lesdits véhicules n'appartenaient plus à la société OCCITANE DE TRANSPORTS pour avoir été quelques mois plus tôt à la société OCCITANE DE SERVICES ; qu'il n'est pas allégué et a fortiori justifié qu'avant la cession d'actifs critiquée, Maître A... aurait été informée d'une quelconque manière que les biens litigieux, mentionnés dans l'inventaire et accompagnés de cartes grises conformes, n'étaient en réalité plus la propriété de la société OCCITANE DE TRANSPORTS ; que c'est vainement que la société OCCITANE DE SERVICES invoque, pour soutenir que Me A... devait avoir connaissance de la cession, une facture du 31 octobre 2003 relative à la vente de ces véhicules par l'OCCITANE DE TRANSPORTS à l'OCCITANE DE SERVICES, l'extrait de son grand livre et l'état des immobilisations en 2003 ; que rien ne permet en effet d'établir que la facture ait été communiquée à Me A... avant la vente et par ailleurs les comptes ont été établis a posteriori, la lecture des pièces révélant selon mentions dactylographiées figurant en bas de page de l'extrait du Grand Livre produit a été établi par le comptable le « 02 07 2007 » et l'extrait des immobilisations le « 14/ 10/ 2012 », c'est-à-dire plusieurs années après la vente ; qu'il ne peut donc être imputé aucune faute à Me A... pour avoir, en possession d'un inventaire corroboré par les cartes grises, sans documents comptables contraires, sans recours contre la décision du juge-commissaire l'y autorisant, procédé à la vente de gré à gré du fourgon Mercedes et du tracteur Scania ; que le jugement, qui a retenu sa faute et l'a condamnée à verser une indemnité à ce titre, sera donc réformé, étant simplement ajouté que le fait qu'après la vente des informations complémentaires lui aient été communiquées, relatives à la cession d'octobre 2003, est sans incidence sur le litige, puisque c'est à la date de la cession que le comportement de Maître A... doit être apprécié ;
ALORS DE PREMIERE PART QUE le liquidateur est tenu de s'assurer de l'identité du propriétaire des biens qu'il décide de céder dans le cadre de la réalisation des actifs de l'entreprise qu'il liquide ; qu'en décidant que Maître A... n'avait pas commis de faute en cédant, dans le cadre de la liquidation des biens de la société OCCITANE DE TRANSPORTS, un fourgon Mercedes et un tracteur Sciana dont la société OCCITANE DE SERVICES était en réalité propriétaire, opérant ainsi une confusion du patrimoine de ces deux sociétés, pour ne pas s'être assurée de l'identité du propriétaire de ces deux véhicules, la Cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;
ALORS DE DEUXIEME PART QU'en écartant la faute de Maître A... pour n'avoir pas vérifié l'identité du propriétaire des véhicules litigieux, aux motifs inopérants que l'inventaire de la société OCCITANE DE TRANSPORTS faisait état de ces deux véhicules, que le liquidateur ne disposait d'aucun document comptable contraire, qu'aucun recours n'avait été formé contre la décision du juge-commissaire d'autoriser la cession de ces deux biens, la Cour d'appel qui, ce faisant, a affranchi le liquidateur d'une partie de la mission qui lui est dévolue, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;
ALORS DE TROISEME PART QUE dans ses conclusions d'appel, la société OCCITANE DE SERVICES faisait valoir qu'au mois d'août 2004, Madame X..., sa gérante, avait reprécisé à Maître A... que la société OCCITANE DE SERVICES était propriétaire des deux véhicules litigieux ; qu'elle en déduisait que le liquidateur qui a procédé aux cessions respectivement en mai 2004 et août 2004, ne pouvait faire état, à tout le moins pour la cession réalisée en août 2004, d'une « erreur légitime » ; qu'en ne répondant au moyen ainsi développé, la Cour d'appel a privé sa décision de motifs, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS DE QUATRIEME PART et SUBSIDIAIREMENT QUE la société OCCITANE DE SERVICES faisait valoir que, par lettre du 7 décembre 2006, Maître B..., qui l'administrait alors, avait sommé Maître A... de lui restituer les sommes perçues indûment, à raison de la cession du tracteur Sciana et du fourgon Mercedes, dans le cadre de la liquidation de la société OCCITANE DE TRANSPORTS ; qu'elle mettait ainsi en évidence qu'à considérer même que Maître A... ait pu valablement penser et céder que les deux véhicules appartenait à la société OCCITANE DE TRANSPORTS, elle avait commis une faute lorsque, informée de son erreur, elle ne lui avait pas restitué le produit de cette vente ; qu'en s'abstenant de répondre au moyen opérant ainsi développé, la Cour d'appel a derechef privé sa décision de motifs, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 14-19556
Date de la décision : 01/12/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Agen, 31 mars 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 01 déc. 2015, pourvoi n°14-19556


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Boutet-Hourdeaux

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.19556
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