LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 29 mai 2012), que M. X... a été engagé le 2 mai 2006 par la société HD International en qualité de vendeur ; qu'ayant démissionné le 21 février 2007, le salarié a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'ayant fait ressortir que le tribunal correctionnel avait prononcé la relaxe des faits de travail dissimulé sans fonder sa décision sur l'absence d'accomplissement d'heures supplémentaires non rémunérées, la cour d'appel, par ce seul motif, en a exactement déduit que l'autorité, au civil, de la chose jugée au pénal ne s'opposait pas à ce que le salarié fût admis à soutenir devant elle, dans une instance civile, avoir effectué des heures supplémentaires qui ne lui avaient pas été payées ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que le rejet des premier et deuxième moyens prive de portée le troisième moyen qui invoque une cassation par voie de conséquence ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société HD International aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société HD International à payer à la SCP Guillaume et Antoine Delvolvé la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille quinze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
.Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société HD International.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR dit que la demande de M. X... en paiement d'heures supplémentaires était recevable, d'AVOIR condamné la société HD International à lui payer des rappels de salaire à titre d'heures supplémentaires et de congés payés afférents et d'AVOIR en conséquence requalifié la démission de M. X... en licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamné la société HD International à lui payer des dommages et intérêts à ce titre ;
AUX MOTIFS QU'il est constant que le dispositif des décisions rendues en matière pénale a, au civil, autorité absolue, en ce qui concerne l'existence du fait incriminé, sa qualification, la culpabilité ou l'innocence de ceux auxquels le fait est imputé ; que le jugement rendu par le tribunal correctionnel, le 18 septembre 2008, prononce dans son dispositif la relaxe de M. Brahim
Y...
du délit de travail dissimulé ; que cependant, la société HD International ne peut utilement soutenir que l'autorité de chose jugée s'applique à la présente instance ; qu'en effet, devant la juridiction pénale, il était reproché à M.
Y...
la dissimulation intentionnelle d'heures de travail alors que, devant la juridiction civile, M. X... sollicite la reconnaissance d'heures supplémentaires ; que dès lors que le jugement du tribunal correctionnel de Rouen est très peu motivé, il n'est pas exclu que l'absence d'élément intentionnel ait été la cause de la relaxe ; qu'ainsi le dispositif du jugement correctionnel relaxant M. Y...du délit de travail dissimulé ne peut à lui seul exclure l'existence d'heures supplémentaires non rémunérées ; qu'il en résulte que la demande d'heures supplémentaires formulée par M. X... est recevable et doit être examinée ;
1°- ALORS QU'une décision de relaxe rendue par la juridiction pénale a autorité de la chose jugée au civil et le juge civil ne peut la méconnaître ; que par jugement définitif du 18 septembre 2008, le tribunal correctionnel de Rouen a relaxé les gérants de la société HD International prévenus du chef d'exécution d'un travail dissimulé par défaut de mention sur les bulletins de paie de M. X... d'un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué au motif qu'« il ne résulte pas du dossier et des débats la preuve que MM.
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Brahim et Y... Rafed se soient rendus coupables des faits qui leurs sont reprochés », ce dont il s'évince que le juge pénal a constaté que la matérialité d'heures supplémentaires n'est pas établie ; qu'en retenant cependant que « le dispositif du jugement relaxant M.
Y...
du délit de travail dissimulé ne peut à lui seul exclure l'existence d'heures supplémentaires non rémunérées », la Cour d'appel a violé ensemble le principe de l'autorité de la chose jugée au pénal sur le civil et l'article 1351 du code civil ;
2°- ALORS DE PLUS QU'un motif hypothétique constitue une absence de motif ; qu'en retenant que « le jugement du tribunal correctionnel est très peu motivé, il n'est pas exclu que l'absence d'élément intentionnel ait été la cause de la relaxe », pour en déduire que le dispositif du jugement correctionnel relaxant M.
Y...
du délit de travail dissimulé ne peut à lui seul exclure l'existence d'heures supplémentaires non rémunérées, la cour d'appel a statué par un motif hypothétique et a violé l'article 455 du code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société HD International à payer à M. X... une somme de 22 926 € à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires, outre une somme de 2 292 € à titre de congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS QUE M. X... soutient avoir effectué des heures supplémentaires entre le 2 mai 2006 et février 2007 et verse un décompte de ses horaires ; que celuici mentionne que le salarié travaillait de 7h30 à 20h00 ; que ces horaires sont corroborés par l'attestation de M. Toufik B...qui a, à deux reprises, certifié que l'appelant travaillait au magasin « Le panier vert » chaque semaine du mardi au dimanche, et qu'il quittait son lieu de travail chaque soir à 20 h 00 ; que de son côté, la société HD International produit un listing signé de membres de son personnel sur lequel figurent des horaires de travail ; que ce document n'établit pas que les signataires confirment ainsi a posteriori qu'ils ont effectivement travaillé selon ces horaires ; que M. X... n'en est d'ailleurs pas signataire ; qu'il n'est pas établi que la feuille intitulée « Horaires de travail » a été remise aux salariés et, quand bien même tel serait le cas, une telle remise serait impropre à exclure la réalisation de fait de tels horaires ; que la fiche de répartition des horaires de travail émane du seul employeur et n'est même pas daté : elle est dès lors dépourvue de valeur probante ; quant aux feuilles de pointage, relativement illisibles, le prénom de M. X... n'y figure pas ; qu'il en résulte que c'est à bon droit que M. X... réclame le paiement des 40 heures supplémentaires hebdomadaires non réglées chaque semaine ;
1°- ALORS QUE par application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation relatif à l'irrecevabilité de la demande d'heures supplémentaires formulée par M. X... rendra sans la moindre portée les motifs relatifs aux heures supplémentaires et s'étendra au chef du dispositif qui a condamné la société HD International à payer au salarié un rappel de salaire à ce titre assorti des congés payés afférents ;
2°- ALORS de plus que ne motive pas sa décision la cour d'appel qui décide de condamner la société HD International à payer au salarié 40 heures supplémentaires par semaine en se fondant exclusivement sur le propre décompte du salarié et sur l'attestation d'une seule personne externe à l'entreprise qui voyait M. X... quitter son travail chaque soir à 20 heures ce qui ne révèle en rien le temps de travail effectif du salarié ; qu'ainsi la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile
3°- ALORS en outre que M. X... a prétendu avoir effectué 35 heures supplémentaires hebdomadaires ; qu'en considérant que « c'est à bon droit que M. X... réclame le paiement des 40 heures supplémentaires hebdomadaires non réglées chaque semaine », la cour d'appel a méconnu les termes du litige tels que fixés par les prétentions des parties et a violé l'article 4 du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que la démission de M. X... s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'avoir condamné la société HD International à lui payer des dommages et intérêts à ce titre ;
AUX MOTIFS QUE si la lettre de démission du 21 février 2007 de M. X... ne comportait aucune réserve, il n'en demeure pas moins que l'existence d'heures supplémentaires non rémunérées caractérisait des circonstances antérieures et contemporaines à la démission rendant cette dernière équivoque ; qu'ainsi la démission doit être requalifiée en prise d'acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur ; que le non-paiement des heures supplémentaires effectuées par le salarié constitue un manquement grave de l'employeur à ses obligations rendant impossible le maintien de la relation contractuelle ; qu'il en résulte que la prise d'acte produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
ALORS QUE par application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation à intervenir sur le premier moyen relatif à l'irrecevabilité de la demande relative aux heures supplémentaires ou sur le deuxième moyen relatif à la condamnation de la société HD International au paiement d'une somme à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires rendra sans la moindre portée le motif selon lequel « l'existence d'heures supplémentaires non rémunérées caractérisait des circonstances antérieures et contemporaines à la démission rendant cette dernière équivoque » et s'étendra au chef du dispositif relatif à la rupture du contrat de travail dès lors qu'aucun manquement de la société société HD International à son obligation de paiement du salaire ne pourra lui être imputé.