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13/11/2015 | FRANCE | N°14-25346

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 13 novembre 2015, 14-25346


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Guy Dauphin environnement, invoquant le blocage de l'entrée de son site d'enfouissement de déchets par la société Haras des Capucines et son gérant M. X..., a assigné ceux-ci devant le juge des référés d'un tribunal de grande instance pour obtenir le paiement d'une provision à valoir sur son préjudice et l'autorisation d'enlever et placer à la fourrière aux frais et risques de la société Haras des Capucines tous véhicules, engins ou matériels ap

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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Guy Dauphin environnement, invoquant le blocage de l'entrée de son site d'enfouissement de déchets par la société Haras des Capucines et son gérant M. X..., a assigné ceux-ci devant le juge des référés d'un tribunal de grande instance pour obtenir le paiement d'une provision à valoir sur son préjudice et l'autorisation d'enlever et placer à la fourrière aux frais et risques de la société Haras des Capucines tous véhicules, engins ou matériels appartenant à celle-ci et stationnant sur sa propriété, au besoin avec le concours de la force publique ;
Sur le second moyen, tel que reproduit en annexe :
Attendu que la société Haras des Capucines et M. X... font grief à l'arrêt d'autoriser la société Guy Dauphin environnement à faire enlever et placer en fourrière tous engins, véhicules, matériels appartenant à la société Haras des Capucines avec, en tant que de besoin, le concours de la force publique ;
Mais attendu qu'ayant retenu qu'il était suffisamment démontré que les lieux occupés faisaient partie de la propriété privée de la société Guy Dauphin environnement et non du domaine public, la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'entrer dans le détail de l'argumentation des parties, a répondu aux conclusions prétendument délaissées ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l'article 809, alinéa 2, du code de procédure civile et l'article L. 223-22 du code de commerce ;
Attendu que pour accueillir la demande de provision, l'arrêt retient que l'action de blocage interdisant à la société Guy Dauphin environnement d'exploiter le site a causé à cette société un préjudice évident et qu'en engageant la société dont il est le gérant à utiliser les véhicules de l'entreprise dans une action ne relevant pas strictement de son objet social M. X... a lui-même commis une faute manifeste qui l'oblige personnellement ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher si la contestation opposée par la société Haras des Capucines et M. X..., tirée de l'illicéité du préjudice allégué, était sérieuse, et sans s'expliquer sur le caractère non sérieusement contestable de l'obligation mise à la charge de M. X..., la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Haras des Capucines et M. X... in solidum à payer à la société Guy Dauphin environnement la somme de 25 000 euros à titre de provision à valoir sur la réparation de son préjudice, l'arrêt rendu le 1er juillet 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen ;
Condamne la société Guy Dauphin environnement aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Guy Dauphin environnement à payer à la société Haras des Capucines et M. X... la somme globale de 3 000 euros ; rejette la demande de la société Guy Dauphin environnement ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize novembre deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour la société Haras des Capucines et autre
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société Haras des Capucines et M. X... in solidum à payer à la société Guy Dauphin Environnement la somme de 25. 000 ¿ à titre de provision à valoir sur la réparation de son préjudice
AUX MOTIFS QUE « Sur la demande de provision Le juge des référés peut accorder au créancier une provision lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable (article 809 du code de procédure civile) ;
Lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation et jusqu'à son dessaisissement, le juge de la mise en état est seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour accorder une telle provision (article 771 du code de procédure civile) ;
En l'espèce, la société Guy Dauphin Environnement a saisi, par assignation du 20 janvier 2014, le tribunal de grande instance d'Alençon d'une demande de dommages et intérêts à l'encontre de la SARL Haras des Capucines et de M. X... notamment ;
Or, la demande de provision a été présentée par la société Guy Dauphin Environnement en référé le 17 décembre 2013, soit antérieurement à la saisine du tribunal de grande instance d'Alençon et à la désignation supposée du juge de la mise en état de cette juridiction ;
Si bien que le juge des référés du tribunal de grande instance d'Argentan était compétent pour statuer ;
Les pièces du dossier (constats d'huissier des 31 octobre 2013, 8 novembre 2013, 26 novembre 2013, 14 décembre 2013 et 3 avril 2014) révèlent la présence de deux véhicules de la société Haras des Capucines stationnés aux entrées principale et secondaire du site de la société Guy Dauphin Environnement et en bloquant, avec d'autres, l'accès ;
Cette action de blocage interdisant de fait à la société Guy Dauphin Environnement d'exploiter le site cause à celle-ci un préjudice évident.

Or, par sa participation active au blocage, participation établie de façon non sérieusement contestable aux 5 dates d'établissement des procès-verbaux de constat, la société Haras des Capucines contribue à la réalisation de ce préjudice ;
Son obligation à réparation dans les limites de cette occupation illicite à cinq reprises est donc caractérisée ;
En engageant la société dont il est le gérant à utiliser les véhicules de l'entreprise dans une action ne relevant pas strictement de son objet social M. X... a lui-même commis une faute manifeste qui l'oblige personnellement ;
Au regard des éléments de preuve versés aux débats (la société Guy Dauphin Environnement procédant essentiellement par voie de simulation pour chiffrer son préjudice commercial) et des aléas relatifs à l'exploitation du centre de déchets non dangereux (dont le tribunal correctionnel de Caen en réalité, d'Argentan, par un jugement certes frappé d'appel, du 13 mai 2014, a ordonné la fermeture définitive) une provision de 25. 000 ¿ sera allouée à la société Guy Dauphin Environnement »,
ALORS, D'UNE PART, QU'est sérieusement contestable l'obligation à réparer le préjudice commercial prétendument subi dans l'exercice d'une activité dont l'illicéité a été judiciairement constatée ; qu'en condamnant la société Haras des Capucines et son gérant, in solidum, au paiement d'une provision au profit de la société Guy Dauphin Environnement pour avoir entravé l'exercice de son activité sur son site d'enfouissement des déchets, après avoir pourtant constaté que par jugement du 13 mai 2014, le tribunal correctionnel de Caen en réalité, d'Argentan avait ordonné la fermeture définitive du site litigieux en raison des pratiques illicites de cette société en matière de stockage des déchets, ce qui excluait toute indemnisation de ce chef et rendait donc parfaitement contestable la créance alléguée, la cour d'appel a violé l'article 809, alinéa 2 du code de procédure civile,
ALORS, D'AUTRE PART, QU'est sérieusement contestable l'obligation imposée au gérant, in solidum avec la société qu'il dirige, de réparer le préjudice commercial prétendument subi par un tiers, en l'absence de preuve d'une faute intentionnelle suffisamment grave pour être détachable des fonctions de gérant ; qu'en condamnant M. X..., gérant de la SARL Haras des Capucines, in solidum avec cette société, au paiement d'une provision de 25. 000 ¿ à valoir sur l'indemnisation du préjudice commercial prétendument subi par la société GDE, après s'être bornée à affirmer qu'en utilisant les véhicules de l'entreprise dans une action ne relevant pas strictement de son objet social, il aurait commis une faute manifeste qui l'oblige personnellement, sans préciser en quoi un tel comportement constituerait une faute intentionnelle suffisamment grave pour être détachable des fonctions de gérant, rendant non sérieusement contestable l'obligation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 809 du code de procédure civile, ensemble, l'article L. 223-22 du code de commerce.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir autorisé la société Guy Dauphin Environnement à faire enlever et placer en fourrière, aux frais et risques de la société Haras des Capucines, tous véhicules, engins, matériels appartenant à celle-ci, et stationnant sur la propriété de la société Guy Dauphin Environnement à Nonant-le-Pin avec, en tant que de besoin, le concours de la force publique,
AUX MOTIFS QUE « Sur la demande d'enlèvement et de placement en fourrière Le contexte procédural est particulier puisqu'après avoir, le 9 janvier 2014, sursis à statuer en invitant la société Guy Dauphin Environnement à produire une attestation précise d'un géomètre expert, le premier juge s'est dessaisi par ordonnance du 6 mars 2014 (non soumise à l'examen de la Cour) en invoquant l'effet dévolutif de l'appel de l'ordonnance du 9 janvier 2014 ;
Et d'ajouter que le litige étant désormais dévolu à la Cour d'appel ;
Même si cette " attribution de compétence " ne peut lier la juridiction du 2ème degré, force est de constater qu'en l'état, il n'existe plus de procédure en cours, devant le juge des référés d'Argentan s'agissant de la demande formulée par la société Guy Dauphin Environnement ;
L'effet dévolutif de l'appel général interjeté par celle-ci conduit ainsi la Cour à examiner cette demande qui n'a pas reçu de réponse en première instance ;
Sur le fond, il convient de rappeler que le juge des référés peut ordonner toutes les mesures qui s'imposent pour faire cesser un trouble manifestement illicite ;
Or, il ressort des pièces du dossier que la société Haras des Capucines et M. X... ont stationné des véhicules à l'entrée du site de la société Guy Dauphin Environnement sans avoir, pour ce faire, ni droit ni titre ;
Il est suffisamment démontré que les lieux occupés font partie de la propriété privée de la société Guy Dauphin Environnement et non du domaine public ;

Ceci résulte tant de la configuration des lieux que de l'attestation établie par Me Y..., notaire à Bourguebus, le 12 décembre 2013 (pièce n° 17 de l'appelante), du plan d'alignement (pièce n° 16) et surtout, de l'attestation du géomètre expert Z... du 9 janvier 2014 (pièce n° 15) ;
Ce dernier certifie, au vu des plans qu'il a dressés et du constat d'huissier du 26 novembre 2013, que les véhicules portant le nom de la société Haras des Capucines sont stationnés sur les parcelles cadastrées section AO n° 56 et AO n° 28 appartenant à la société Guy Dauphin Environnement ;
Dès lors, il convient d'autoriser l'appelante à faire enlever et placer en fourrière les véhicules, engins et matériels de la société Haras des Capucines »,
ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motif ; que dès lors, en omettant de répondre aux conclusions des exposants (cf. p. 9 et s.), qui contestaient le droit de propriété dont se prétendait investie la société GDE sur les parcelles formant l'accès à son site d'enfouissement des déchets, notamment faute pour elle d'avoir entrepris les travaux prescrits par l'arrêté préfectoral du 12 juillet 2011 pour permettre l'exploitation du site, ce qui excluait de considérer que le stationnement, à l'entrée du site, de véhicules appartenant à la société Haras des Capucines caractériserait un trouble manifestement illicite, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 14-25346
Date de la décision : 13/11/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 01 juillet 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 13 nov. 2015, pourvoi n°14-25346


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.25346
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