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12/11/2015 | FRANCE | N°14-17043

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 12 novembre 2015, 14-17043


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 10 février 2014), que la société 4M promotion, aux droits de laquelle vient la société Akerys Promotion (société Akerys), a vendu à Mme X... une maison en l'état futur d'achèvement ; que cet investissement, destiné à la location en vue de bénéficier d'avantages fiscaux, lui a été proposé par la société IFB France (société IFB) ; que, la maison n'ayant pu être louée que vi

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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 10 février 2014), que la société 4M promotion, aux droits de laquelle vient la société Akerys Promotion (société Akerys), a vendu à Mme X... une maison en l'état futur d'achèvement ; que cet investissement, destiné à la location en vue de bénéficier d'avantages fiscaux, lui a été proposé par la société IFB France (société IFB) ; que, la maison n'ayant pu être louée que vingt mois après sa livraison, Mme X... a assigné la société Akerys en nullité de la vente pour dol et, à titre subsidiaire, en indemnisation de ses préjudices ;
Attendu que, pour rejeter sa demande d'annulation de la vente, l'arrêt retient que le tribunal a jugé que l'utilisation du label EDC par la société IFB n'avait pas déterminé le consentement de l'acquéreur à l'achat de cet immeuble et a qualifié à tort l'utilisation de ce label comme un dol ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de Mme X... qui soutenait que le caractère erroné et trompeur des tableaux de simulation, les mensonges sur le haut potentiel de rentabilité du bien acquis, la réticence de la société Akerys sur les risques financiers de l'opération et sur la date effective de sortie du dispositif de défiscalisation et la surestimation délibérée du loyer à percevoir constituaient des manoeuvres dolosives, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 février 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;
Condamne la société Akerys aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Akerys et la condamne à payer la somme de 3 000 euros à Mme X... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze novembre deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme X... de sa demande d'annulation de la vente pour dol et de ses demandes en restitution de sommes d'argent et en paiement de dommages-intérêts ;
Aux motifs qu'aux termes de l'article 1116 du code civil, le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté ; qu'à la suite d'une exacte analyse des faits de la cause, le tribunal a retenu que l'utilisation du label EDC par l'agent immobilier, quelle que soit la nature des relations existant entre IFB et Akerys, n'avait pas déterminé le consentement de l'acquéreur à l'achat de l'appartement litigieux ; qu'il s'ensuit que c'est à tort que le tribunal a qualifié l'utilisation du label EDC comme un dol alors même qu'il n'a pas vicié le consentement de Mme X... ; que s'il est de principe que des dommages-intérêts peuvent être alloués en cas de dol, en sus de la nullité du contrat, il n'y a pas lieu de prononcer cette condamnation au cas d'espèce où le dol n'existe pas ;
Et aux motifs appropriés du jugement que Mme X... se plaint d'avoir été victime d'une présentation faussée des résultats financiers de l'opération ; qu'elle affirme que les charges se sont révélées plus élevées que prévu ; que les économies d'impôts sont largement inférieures à ce qu'annoncé ; que la trésorerie placée a été nettement surévaluée ; qu'il s'ensuit qu'elle doit supporter et financer annuellement un solde déficitaire en lieu et place des soldes créditeurs annoncés dans les tableaux de financement ; qu'enfin, si elle devait vendre aujourd'hui, loin de rentrer dans ses fonds, elle perdrait une somme d'environ 72. 900 € ; que la plupart des arguments invoqués par Mme X... doivent être écartés dans la mesure où tout placement de ce type comporte en principe un risque, où il était indiqué sur la projection financière qu'il s'agissait d'une situation non contractuelle, où un tel investissement amoindrit forcément la capacité d'investissement pour l'avenir, et où il n'est pas établi à ce jour que l'appartement n'aura pas la valeur proche de celle fixée à l'échéance de dix ans ; qu'en définitive, l'erreur invoquée par Mme X... s'analyse de fait comme une erreur sur la rentabilité d'un investissement qui ne constitue pas une erreur sur la substance de la chose susceptible de vicier le consentement de l'acquéreur ; (...) que la référence au label EDC, présenté comme garantissant en toute indépendance la pertinence de l'investissement, vérifiée par des études préalables, constitue une manoeuvre mensongère positive destinée à tromper la vigilance des acquéreurs ; qu'il n'est justifié ni de l'indépendance de cette association par rapport à Akerys comme il n'est justifié d'aucune des études ou vérifications réalisées par EDC, notamment du marché immobilier dans la commune où l'opération devait se réaliser, alors qu'une telle étude constituait un préalable indispensable à la vérification de la pertinence d'un investissement immobilier destiné à la location et qu'elle aurait été particulièrement utile en l'espèce au vu des difficultés de location rencontrées par Mme X... (vacance de près de deux ans) ; que la confusion délibérément entretenue dans l'esprit des personnes démarchées qui souscrivent le contrat préliminaire à leur domicile, sur la qualité de l'agent commercial et son indépendance par rapport au promoteur, constituent des méthodes commerciales déloyales et des manoeuvres dolosives qui ouvrent droit à dommages et intérêts s'il en est résulté directement un préjudice pour l'acquéreur ; que ces manoeuvres dolosives doivent être retenues à l'encontre de la société Akerys promotion dès lors qu'elle a confié à la société IFB, filiale du groupe Akerys, le mandat de vendre les appartements qu'elle a édifiés, qu'elle avait de ce fait obligatoirement connaissance des informations fallacieuses communiquées et qu'elle a bénéficié du dol ; que sans l'emploi de méthodes déloyales visant à faire croire que le bien avait été sélectionné au terme d'études de marché sérieuses, vérifiées par une association indépendante, Mme X... aurait été plus vigilante et aurait pu éviter les tracas et difficultés de trésorerie qu'elle a rencontrés ; qu'elle a perdu une chance de pouvoir choisir un investissement plus rentable et subi, en outre, comme toute victime de manoeuvres dolosives, un préjudice moral de principe justifiant une réparation ;
1) ALORS QU'en retenant que le tribunal, dont elle s'appropriait les motifs, avait retenu que l'utilisation du label EDC par l'agent immobilier n'avait pas déterminé le consentement de Mme X..., la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du jugement du 31 août 2012, et a violé le principe d'interdiction faite aux juges de dénaturer les documents de la cause ;
2) ALORS QUE dans ses conclusions d'appel, outre l'utilisation abusive du label EDC, Mme X... reprochait à la société Akerys promotion, au titre des manoeuvres dolosives, le caractère erroné et trompeur des tableaux de simulation (conclusions, pp. 12-15), les mensonges sur le haut potentiel de rentabilité du bien acquis et en tout cas la réticence dolosive sur les risques financiers de l'opération (conclusions, p. 16 et p. 24), la surestimation délibérée par le promoteur du loyer à percevoir (conclusions, pp. 17-18), ou encore la réticence dolosive sur la date effective de sortie du dispositif de défiscalisation (conclusions, p. 23) ; qu'en statuant uniquement sur l'utilisation abusive du label EDC sans répondre aux conclusions précitées de Mme X..., la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Subsidiairement :
3) ALORS QUE dans un contrat d'investissement locatif, la rentabilité du produit proposé par le promoteur constitue une qualité substantielle de l'immeuble vendu ; qu'en retenant le contraire, pour écarter le dol de la société Akerys promotion, la cour d'appel a violé les articles 1110 et 1116 du code civil ;
4) ALORS EN TOUTE HYPOTHESE QUE l'erreur provoquée par le dol peut être prise en considération même si elle ne porte pas sur la substance de la chose qui fait l'objet du contrat ; qu'en retenant que l'erreur sur la rentabilité de l'investissement ne portait pas sur la substance de la chose vendue, la cour d'appel s'est prononcée par un motif impropre à exclure le dol de la société Akerys promotion, et a violé l'article 1116 du code civil ;
5) ALORS QUE l'absence de caractère contractuel des tableaux de simulation des éléments financiers du projet d'investissement communiqués par le promoteur au client n'exclut pas en elle-même le dol ; que Mme X... soutenait que les chiffres particulièrement attractifs figurant dans les tableaux de simulation communiqués par la société Akerys promotion étaient sans rapport avec la réalité financière du projet et avaient été présentés ainsi en vue de déterminer son consentement ; qu'en écartant le dol à ce titre au regard du motif inopérant tiré du caractère non contractuel des tableaux de simulation, la cour d'appel a violé l'article 1116 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
subsidiaire
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande en paiement de dommages-intérêts formée par Mme X... contre la société Akerys promotion ;
Aux motifs que le fondement du dol par l'utilisation du label EDC ayant été écarté, l'action ne peut être fondée subsidiairement que sur la responsabilité contractuelle de l'agent immobilier et du vendeur pour inexécution d'une obligation d'information et de conseil ; qu'en l'espèce où l'opération a pour objet une défiscalisation des revenus et non pas une acquisition immobilière à des fins de logement, la qualité du conseil doit être appréciée au regard de l'opération de défiscalisation poursuivie ; que le premier juge a justement retenu que Mme X... ne rapporte pas la preuve que l'agent commercial d'IFB ne lui ait pas fourni les renseignements généraux lui permettant d'apprécier les mécanismes de la défiscalisation et ses conséquences ; qu'elle ne pouvait ignorer que les avantages fiscaux ne s'appliquaient qu'à compter de la location du bien, les tableaux de simulation faisant état d'un remboursement du crédit au moyen des loyers et de l'avantage fiscal, sur une période de dix ans qui, compte tenu du décalage de l'amortissement fiscal conduit à une sortie du dispositif au bout de 12 ans ; que l'opération de défiscalisation a réussi en ce que Mme X... bénéficie de la défiscalisation depuis l'entrée du premier locataire ; qu'elle a, en outre, bénéficié de la perception de compensations financières entre la date de livraison et la date d'entrée du premier locataire, au titre de la garantie « carence locative » ; qu'enfin, il ressort que l'estimation du bien telle que justifiée par Mme X... est proche de la valeur du bien acquis, nette de frais et de TVA de sorte que le préjudice invoqué n'est pas démontré ; que la demande de dommages-intérêts sur ce fondement contractuel sera donc rejetée et le jugement sera réformé de ce chef ;
1) ALORS QUE la charge de la preuve de l'exécution d'une obligation d'information pèse sur le débiteur de celle-ci ; qu'en retenant que Mme X... ne rapportait pas la preuve que l'agent commercial IFB ne lui avait pas fourni les renseignements généraux lui permettant d'apprécier les mécanismes de la défiscalisation et ses conséquences, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, et a violé l'article 1315 du code civil ;
2) ALORS QUE le professionnel spécialisé dans l'immobilier de placement est tenu d'informer les investisseurs éventuels sur les caractéristiques essentielles, y compris les moins favorables, du placement qu'il leur propose ainsi que sur les risques qui lui sont associés, et peuvent être le corollaire des avantages annoncés ; que celui qui est tenu d'une obligation d'information n'est pas déchargé de celle-ci en raison des connaissances ou compétences personnelles, réelles ou supposées, du consommateur ; qu'en retenant, pour décharger la société Akerys promotion de son obligation d'information à l'égard de Mme X..., investisseur profane, que cette dernière ne pouvait ignorer que les avantages fiscaux ne s'appliquaient qu'à compter de la location du bien, les tableaux de simulation faisant état d'un remboursement du crédit au moyen des loyers et de l'avantage fiscal, sur une période de dix ans qui, compte tenu du décalage de l'amortissement fiscal conduit à une sortie du dispositif au bout de 12 ans, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil, ensemble l'article L. 111-1 du code de la consommation ;
3) ALORS QU'en retenant que l'opération de défiscalisation avait réussi en ce que Mme X... bénéficie de la défiscalisation depuis l'entrée du premier locataire, la cour d'appel s'est prononcée par un motif impropre à écarter l'existence de tout préjudice subi par Mme X..., et a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, ensemble le principe de réparation intégrale du préjudice ;
4) ALORS QU'en se bornant à relever que Mme X... avait bénéficié de compensations financières entre la date de livraison et la date d'entrée du premier locataire au titre de la garantie « carence locative », sans rechercher, comme elle y était invitée, si le niveau du loyer perçu conférait à l'opération un caractère rentable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, ensemble le principe de réparation intégrale du préjudice ;
5) ALORS QU'en retenant, pour écarter le préjudice relatif à la valeur de l'immeuble en relevant que la valeur du bien telle que justifiée par Mme X... est proche de la valeur du bien acquis, nette de frais et de TVA, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la rentabilité de l'opération supposait, non pas une stagnation de la valeur du bien, mais une augmentation de celle-ci, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, ensemble le principe de réparation intégrale du préjudice.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 14-17043
Date de la décision : 12/11/2015
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 10 février 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 12 nov. 2015, pourvoi n°14-17043


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Rousseau et Tapie, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.17043
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