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22/10/2015 | FRANCE | N°14-15768;14-16350

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 22 octobre 2015, 14-15768 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois n° D 14-15. 768 et M 14-16. 350 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée à compter du 1er janvier 1991 en qualité d'adjointe au contrôleur de gestion par la société SNPE ; que son contrat de travail a été repris par la société Livbag (la société) où elle occupait le poste de responsable du service financier et administratif ; qu'elle a bénéficié à compter du 1er février 2007 d'un congé parental d'éducation prolongé jusqu'au 18 avril 2008

; que par courrier du 5 mars 2008, l'intéressée a sollicité la reprise à son pos...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois n° D 14-15. 768 et M 14-16. 350 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée à compter du 1er janvier 1991 en qualité d'adjointe au contrôleur de gestion par la société SNPE ; que son contrat de travail a été repris par la société Livbag (la société) où elle occupait le poste de responsable du service financier et administratif ; qu'elle a bénéficié à compter du 1er février 2007 d'un congé parental d'éducation prolongé jusqu'au 18 avril 2008 ; que par courrier du 5 mars 2008, l'intéressée a sollicité la reprise à son poste de travail à laquelle s'est opposée la société au motif qu'elle avait été remplacée par suite de sa volonté exprimée de démissionner à l'issue de son congé parental ; que la salariée a été licenciée par lettre du 11 avril 2008 ; qu'une transaction a été conclue entre les parties le 24 avril 2008 ; que remettant en cause la validité de cette transaction, la salariée a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes en paiement ;
Sur le premier moyen, pris en ses quatre premières branches :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la déclarer irrecevable en son action et de la débouter de ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que la transaction ne peut être valablement conclue que si le salarié a eu connaissance effective des motifs du licenciement par la réception de la lettre de licenciement adressée en recommandée avec demande d'avis de réception ; que le mot manuscrit porté sur la carte de visite de M. Y... énonce « envoi en recommandé comme nous en avons convenu. Je reprends contact avec toi à mon retour de congé le 21 pour te transmettre l'attestation attendue » ; qu'en énonçant que le seul document qui pouvait être visé comme envoyé en recommandé est la lettre de licenciement du 11 avril 2008 alors qu'il n'a été fait référence par ce mot manuscrit à aucun document envoyé en recommandé mais seulement indiqué « envoi en recommandé », la cour d'appel a dénaturé le document produit et a violé le principe de l'interdiction faite au juge de dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;
2°/ qu'en retenant, sur la seule base de ce mot manuscrit, l'existence d'une notification du licenciement le 11 avril 2008 par l'envoi d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception au motif que la salariée n'a jamais réagi à réception de l'envoi recommandé ni même depuis, se fondant ainsi sur l'absence de réaction de la salariée qui ne pouvait constituer ni une présomption ni une renonciation à faire valoir la nullité de la transaction, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1232-6 et L. 1231-4 du code du travail et de l'article 2044 du code civil ;
3°/ qu'en considérant que la détention par la salariée de la lettre de licenciement non pliée signée par l'employeur pouvait très bien s'expliquer comme le soutient la société par une remise à la demande de la salariée lors de la signature de la transaction, se fondant ainsi sur une simple hypothèse, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1232-6 et L. 1231-4 du code du travail et de l'article 2044 du code civil ;
4°/ qu'en retenant que la salariée ne rapporte pas la preuve que l'enveloppe ait été vide alors pourtant qu'elle avait produit la lettre de licenciement originale signée par l'employeur non pliée ce dont il résultait que cette lettre n'avait pas été placée dans l'enveloppe de format ordinaire envoyée en recommandé avec accusé réception en sorte qu'il appartenait à l'employeur de prouver comme il l'alléguait, l'existence d'un second original de la lettre de licenciement qu'il aurait selon lui placé dans l'enveloppe, la cour d'appel qui a inversé la charge de la preuve, a violé l'article 1315 du code civil ;
Mais attendu que c'est hors toute dénaturation et sans méconnaître les règles de preuve que la cour d'appel a estimé que la lettre de licenciement avait bien été adressée à la salariée par lettre recommandée du 11 avril 2008 ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa cinquième branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour débouter la salariée de sa demande en nullité de transaction, l'arrêt retient qu'eu égard au fait que la rupture du contrat a été prononcée à effet immédiat et n'emporte aucun versement d'indemnité, il s'en déduit nécessairement que le licenciement a été prononcé pour faute grave et que la concession faite par l'employeur, malgré la faute grave retenue, d'une indemnité transactionnelle correspondant à quatre mois de salaire correspond à une réelle concession ;
Qu'en statuant ainsi sans répondre aux conclusions de la salariée qui soutenait que le licenciement avait été prononcé pour motif personnel, sans référence à la faute grave que l'attestation Assedic ne mentionnait pas alors que la dispense de préavis était justifiée par l'existence du congé parental, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, sans qu'il soit nécessaire de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 février 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ;
Condamne la société Livbag aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Livbag et condamne celle-ci à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux octobre deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits aux pourvois par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit irrecevable l'action de la salariée et débouté cette dernière de sa demande de voir juger que le licenciement ne repose ni sur une cause réelle et sérieuse ni sur une faute grave et condamner l'employeur à lui verser, les sommes de 23. 449, 83 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 2. 344, 98 € bruts à titre de congés payés sur préavis, 71. 907, 20 € nets à titre d'indemnité de licenciement, 100. 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et non respect de la procédure en ordonnant la compensation entre ces sommes et la somme de 30. 000 € nets versée au titre de l'indemnité transactionnelle ;
AUX MOTIFS QUE Madame X... prétend que, alors que seul l'envoi de la lettre de licenciement par LR-AR permet ensuite la conclusion d'une transaction, en l'espèce la lettre ne lui aurait pas été transmise par courrier recommandé, puisque l'enveloppe reçue ne renfermait qu'une simple carte de visite et qu'elle en rapporte la preuve dans la mesure où elle produit l'original de la lettre, qui ne peut exister en deux exemplaires, original portant la signature de l'employeur, non plié et qui n'a donc pu être inséré dans une enveloppe ; que la société LIVBAG explique que la carte de visite, à laquelle se réfère l'appelante a été jointe à la lettre de licenciement par Monsieur Y..., que sur cette carte ce dernier mentionne, d'une part, qu'il lui adresse cette lettre par la voie recommandée comme évoqué lors de l'entretien préalable et, d'autre part, qu'il lui adressera son attestation ASSEDIC à son retour de congés le 21 avril 2008 (envoi qui lui a permis de s'inscrire comme demandeur d'emploi dès le 23 avril 2008) ; qu'elle ajoute que cette carte s'explique par le fait que, nonobstant le désaccord entre la salariée et la société LIVBAG, il existait des relations de proximité entre Madame X... et les membres du comité de direction dont Monsieur Y... faisait partie en sa qualité de directeur des ressources humaines ; qu'elle ajoute que la lettre non pliée dont elle fait état et dont est en possession la salariée n'est en réalité qu'un double de la lettre de licenciement qui lui a été remise à sa demande à l'occasion de la signature de la transaction, qui ne remet pas en cause la notification intervenue le 11 avril 2008, soit antérieurement à l'accord transactionnel ; qu'elle considère que Madame X... ne rapporte pas la preuve qui lui incombe que l'envoi n'aurait pas comporté la lettre de licenciement ; QUE de fait, il résulte du contenu même du pet i t mot manuscrit de Monsieur Y... que l'attestation (sous-entendu Pole Emploi) sera transmise après son retour de congé, le seul document qui pouvait être visé comme envoyé en recommandée comme convenu est donc bien la lettre de licenciement du 11 avril 2011, sauf à ce que l'enveloppe ait été vide, ce dont Madame X..., qui n'a jamais réagi à réception ni même depuis, ne rapporte pas la preuve, sa détention d'un exemplaire de l a lettre même signé par l'employeur comme l'original, rien ne s'y opposant, pouvant très bien s'expliquer, comme le soutient la société LIVBAG par une remise à la demande de la salariée lors de la signature de la transaction ; que la transaction a donc bien été conclue postérieurement à la notification du licenciement dans un délai suffisant entre la notification de celui-ci et sa conclusion ;
ALORS QUE la transaction ne peut être valablement conclue que si le salarié a eu connaissance effective des motifs du licenciement par la réception de la lettre de licenciement adressée en recommandée avec demande d'avis de réception ;
QUE le mot manuscrit porté sur la carte de visite de Monsieur Y... énonce « envoi en recommandé comme nous en avons convenu. Je reprends contact avec toi à mon retour de congé le 21 pour te transmettre l'attestation attendue » ; qu'en énonçant que le seul document qui pouvait être visé comme envoyé en recommandé est la lettre de licenciement du 11 avril 2008 alors qu'il n'a été fait référence par ce mot manuscrit à aucun document envoyé en recommandé mais seulement indiqué « envoi en recommandé », la Cour d'appel a dénaturé le document produit et a violé le principe de l'interdiction faite au juge de dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;
QU'en retenant, sur la seule base de ce mot manuscrit, l'existence d'une notification du licenciement le 11 avril 2008 par l'envoi d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception au motif que la salariée n'a jamais réagi à réception de l'envoi recommandé ni même depuis, se fondant ainsi sur l'absence de réaction de la salariée qui ne pouvait constituer ni une présomption ni une renonciation à faire valoir la nullité de la transaction, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1232-6 et L 1231-4 du code du travail et de l'article 2044 du code civil ;
QU'en considérant que la détention par la salariée de la lettre de licenciement non pliée signée par l'employeur pouvait très bien s'expliquer comme le soutient la société LIVBAG par une remise à la demande de la salariée lors de la signature de la transaction, se fondant ainsi sur une simple hypothèse, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1232-6 et L 1231-4 du code du travail et de l'article 2044 du code civil ;
QU'en retenant enfin que la salariée ne rapporte pas la preuve que l'enveloppe ait été vide alors pourtant qu'elle avait produit la lettre de licenciement originale signée par l'employeur non pliée ce dont il résultait que cette lettre n'avait pas été placée dans l'enveloppe de format ordinaire envoyée en recommandé avec accusé réception en sorte qu'il appartenait à l'employeur de prouver comme il l'alléguait, l'existence d'un second original de la lettre de licenciement qu'il aurait selon lui placé dans l'enveloppe, la cour d'appel qui a inversé la charge de la preuve, a violé l'article 1315 du code civil ;
ET AUX MOTIFS encore QU'ainsi que le relève justement le premier juge et comme le soutient l'intimé, eu égard au fait que la rupture a été prononcée à effet immédiat et n'emporte aucun versement d'indemnité, il s'en déduit nécessairement que le licenciement a été prononcé pour faute grave ; QUE la concession faite par l'employeur, malgré la faute grave retenue, à la salariée qui avait 16 ans d'ancienneté, d'une indemnité transactionnelle correspond à quatre mois de salaire, indemnité en contrepartie de laquelle la salariée renonçait à toute action en justice contre la société LIVBAG ayant trait à la conclusion, l'exécution et la rupture du contrat, correspondait à une réelle concession, et il y a bien eu, en l'espèce, concessions réelles réciproques ; qu'en vertu de l'autorité de chose jugée de la transaction, Madame X... est donc irrecevable en son action, ainsi que le soutient la société LIVBAG ;
ET AUX MOTIFS éventuellement adoptés QU'eu égard au fait que la rupture du contrat de travail a été prononcée à effet immédiat et n'emporte aucun versement d'indemnité il s'en déduit nécessairement que le licenciement a été prononcé pour faute grave ;
ALORS QU'est nulle pour défaut de concessions réciproques la transaction qui prévoit une indemnité transactionnelle dérisoire, inférieure à l'indemnité de licenciement et l'indemnité compensatrice de préavis ; que ne peut être considéré comme prononcé pour faute grave un licenciement prononcé sans préavis en raison seulement du congé parental ; que la salariée soutenait qu'en l'espèce le licenciement avait été prononcé pour motif personnel, sans référence à la faute grave, que l'attestation ASSEDIC ne mentionnait pas la faute grave et justifiait la dispense de préavis par l'existence du congé parental ; qu'en qualifiant pourtant le licenciement de licenciement pour faute grave, en sorte que les indemnités de rupture n'étaient pas dues, sans se prononcer sur ce moyen déterminant, la Cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS QU'est nulle pour défaut de concessions réciproques la transaction qui prévoit une indemnité transactionnelle dérisoire, inférieure à l'indemnité de licenciement et l'indemnité compensatrice de préavis, intervenue à la suite d'un licenciement prononcé pour faute grave qui est nécessairement dénué de cause réelle et sérieuse ; qu'en l'espèce, l'employeur n'était pas fondé pour licencier la salariée, à invoquer un engagement à démissionner à l'issue de son congé parental d'éducation qu'elle aurait pris avant le commencement de ce congé et qui emportait renonciation à l'avance à se prévaloir du droit de retrouver son précédent emploi ou un emploi similaire à l'issue de la suspension du contrat de travail ; qu'en retenant néanmoins la validité de la transaction, la cour d'appel a violé les articles L 1231-4, L 1225-55 et L 1225-70 du code du travail et l'article 2044 du code civil ;
ALORS AU SURPLUS QUE le caractère frauduleux ou illicite du licenciement affecte la validité de la transaction ensuite conclue ; qu'en retenant la validité de la transaction faisant suite à un licenciement prononcé pour méconnaissance par la salariée d'un engagement qu'elle aurait pris avant le commencement du congé parental d'éducation, de démissionner à l'issue de ce congé en violation du droit de retrouver son emploi ou un emploi similaire à l'issue de la suspension du contrat de travail, la cour d'appel a violé les articles L 1231-4, L 1225-55 et L 1225-70 du code du travail et 2044 du code civil ;
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR, à supposer les motifs du jugement adoptés, débouté la salariée de sa demande de voir juger que le licenciement ne repose ni sur une cause réelle et sérieuse ni sur une faute grave et condamner l'employeur à lui verser, les sommes de 23. 449, 83 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 2. 344, 98 € bruts à titre de congés payés sur préavis, 71. 907, 20 € nets à titre d'indemnité de licenciement, 100. 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et non respect de la procédure en ordonnant la compensation entre ces sommes et la somme de 30. 000 € nets versée au titre de l'indemnité transactionnelle ;
AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE l'article L. 1234-1 du code du travail prévoit que lorsque le licenciement n'est pas motivé par une faute grave, le salarie a droit : 1° S'il justifie chez le même employeur d'une ancienneté de services continus inferieure à six mois, à un préavis dont la durée est déterminée par la loi, la convention ou l'accord collectif de travail ou, à défaut, par les usages pratiques dans la localité et la profession, 2° S'il justifie chez le même employeur d'une ancienneté de services continus comprise entre six mois et moins de deux ans, à un préavis d'un mois ; 3° S'il justifie chez le même employeur d'une ancienneté de services continus d'au moins deux ans, à un préavis de deux mois. Toutefois, les dispositions des 2° et 3° ne sont applicables que si la loi, la convention ou l'accord collectif de travail, le contrat de travail ou les usages ne prévoient pas un préavis ou une condition d'ancienneté de services plus favorable pour le salarié ; que l'article L. 1234-9 d u même code énonce que le salarié titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu'il compte une année d'ancienneté ininterrompue au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement. Les modalités de calcul de cette indemnité sont fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail. Ce taux et ces modalités sont déterminés par voie réglementaire ; que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise (Cour de cassation, chambre sociale, 27 septembre 2007) ; que Lucie C... épouse X... a été embauchée par la société SNPE, à compter du 1er janvier 1991 ; que selon convention de mutation, en date du 22 décembre 1992, la salariée a été mutée au sein de la société LIVBAG en qualité de responsable du service financier et administratif ; qu'en cette qualité elle est membre du comité de direction de l'entreprise ; que Lucie C... épouse X... a sollicité le 20 février 2006 un congé parental d'éducation ; que l'entreprise a accédé à cette demande le 17 janvier 2007, pour un congé d'un an à compter du 1er février 2007 ; qu'à la demande de la salariée, le congé parental d'éducation a été prolongé jusqu'au 16 avril 2008 ; que Ludovic Z... a été recruté, à compter du 2 janvier 2007, selon contrat à durée indéterminée, par la société LIVBAG afin de pourvoir au remplacement de Lucie C... épouse X... ; que la direction a pourvu à son remplacement par un emploi permanent à recruter en externe, selon demande du 17 février 2006, en faisant appel à un cabinet de recrutement, moyennant un coût de 39. 216 euros ; que le 19 janvier 2007, Lucie C... épouse X... a adressé un courrier électronique à ses collègues au sujet de son départ, les informant qu'elle ne partait pas comme un voleur mais qu'elle reviendrait leur dire au revoir à l'issue d'un comité de direction à quinzaine ; que Laurent A..., directeur des opérations chez LIVBAG atteste que le 17 février 2006, lors du comité de direction, lors de l'annonce du départ de Lucie C... épouse X..., en sa présence, il a été convenu du remplacement de celle-ci en externe ; que le témoin indique que cette solution a été rendue nécessaire par la confirmation lors de ce comité par Lucie C... épouse X... de son souhait de ne pas revenir dans l'entreprise ; que Arnaud D..., salarié de la société LIVBAG et subordonné de Lucie C... épouse X... à la direction financière, atteste qu'en mars 2006 celle-ci a annoncé son congé parental suivi de son départ de la société, annonçant l'arrivée d'un successeur ; que le témoin ajoute que cette succession n'a impliqué aucun doute quant au départ de la société de Lucie C... épouse X... ; que Ludovic Z... atteste que lors de son entretien du 28 aout 2006 avec Lucie C... épouse X..., en vue de son embauche éventuelle, il lui a demandé si son remplacement était permanent ou temporaire et que celle-ci lui a spécifié qu'elle n'avait nullement l'intention de revenir dans l'entreprise à l'issue de son congé ; que le témoin ajoute que pendant la période de transition en janvier 2007 effectuée avec Lucie C... épouse X... celle-ci lui a expliqué son souhait de prendre son congé parental pour bénéficier d'avantages sociaux liés à la qualité de cadre (actions de groupe et stock options) à une certaine date et lui a redit son intention de ne pas revenir dans la société ; que lors de cette transition, le témoin atteste avoir été présenté par Lucie C... épouse X... comme son successeur et que pour tous les collaborateurs du service il était clairement entendu qu'elle ne reviendrait pas à l'issue de son congé ; qu'un « pot de départ » a été organisé à l'occasion du départ de la salariée de l'entreprise ; que par courrier du 7 janvier 2008 l'employeur a indiqué à la salariée son devoir de l'informer un mois avant la fin du congé de sa volonté de réintégrer la société ou de rompre son contrat ; que le 5 mars 2008, Lucie C... épouse X... a sollicité la reprise de son activité à son poste de travail à l'issue de son congé ; que le 12 mars 2008, la société LIVBAG a manifesté sa grande interrogation au regard des accords passés au moment du départ en congé, rappelant à la salariée du fait qu'elle l'avait informée fin 2006 de son souhait de démissionner à l'issue du congé parental ; que le 2 avril 2008, la société LIVBAG a convoqué sa salariée à un entretien préalable fixé au 9 avril 2008 ; que par courrier date du 11 avril 2008, l'employeur a notifié à la salariée son licenciement pour les motifs suivants : " Madame, Nous nous sommes rencontrés le 9 avril dans le cadre de la procédure fixée à l'article L 122-14 du code du travail et vous n'avez pas souhaité vous faire assister d'un membre du personnel comme le prévoit ladite procédure. Je vous ai alors rappelé les faits ayant conduit à l'engagement de cet entretien et ai écouté vos explications. Par courrier du 5 mars 2008 vous nous informiez de votre volonté de réintégrer la Société à la fin de votre congé parental d'éducation dont le terme était fixé au 16 avril 2008. Salariée de la Société occupant le poste de Directeur Administratif et Financier vous nous aviez fait part de votre volonté le 20 février 2006 de bénéficier d'un congé parental d'éducation pour élever votre jeune enfant. A la suite de différentes discussions intervenues entre nous et de la recherche de la solution optimisée pour assurer votre remplacement, nous avions accédé à votre demande avec votre accord sur les bases suivantes :- Souhait affiché de votre part lors de nos différents entretiens de démissionner à l'issue du congé parental,- Décision prise et annoncée par vous, vous permettant à l'issue du congé de réaliser des projets personnels et familiaux mis entre parenthèses durant vos premières années d'expérience professionnelle,- Décision concertée avec la direction de la Société de vous associer à la recherche de votre successeur qui a pris ses fonctions le 2 janvier 2007. C'est dans ce contexte et sur ces bases arrêtées avec vous que votre congé a débuté le 1er février 2007 pour une durée initiale d'un an qui a été prolongé jusqu'au 16 avril 2008, date du troisième anniversaire de votre fille. Notre surprise fut grande de recevoir votre courrier du 5 mars, interprété par nous comme le dédit de nos accords passés. Nous nous sommes rapprochés de vous le 12 mars pour comprendre vos motivations nouvelles qui étaient en contradiction avec nos accords et qui rendaient la situation ingérable du fait du recrutement mis en oeuvre pour pourvoir à votre remplacement définitif. Nous devions nous rencontrer le 25 mars pour trouver un terme à cette situation, mais vous m'avez téléphoné pour me rappeler que vous reprendriez votre poste de travail le 16 avril. Devant cette situation, j'ai été contraint de provoquer l'entretien du 9 avril au cours duquel nous n'avons pas pu rapprocher nos points de vue. Vous réfutez le fait d'avoir passé un accord prévoyant votre démission à l'issue du congé, vous reconnaissez avoir évoqué l'opportunité d'une telle démarche mais sans l'avoir actée de manière formelle, vous soulevez l'évolution de votre situation personnelle qui vous contraint à reprendre votre emploi. En ce qui concerne la Société je vous ai fait savoir : que sans l'annonce préalable de votre démission, il n'aurait jamais été recruté votre remplaçant en CDI sur votre poste, que vous aviez vous-même annoncé votre départ définitif à vos collègues à l'issue de votre congé, que les fonctions occupées par vous dans la Société reposaient sur une confiance réciproque dans l'accomplissement des actes de gestion, confiance très fortement ébranlée par ce revirement de position, qu'en tout état de cause il nous était impossible de vous proposer une réintégration dans la société, ne disposant d'aucun poste disponible correspondant à vos compétences et qualifications. Je vous ai alors demandé de respecter les engagements pris par vous au moment de votre départ en congé, proposition que vous avez refusée, prétendant faire valoir justement vos droits à réintégration sur votre poste ou un poste similaire. Devant cette situation de blocage, le non respect des accords passés qui a induit la Société en erreur quant à la gestion faite de votre remplacement et de la confiance qui a disparu entre vous et la Direction de la Société élément indissociable à la tenue du poste qui était le votre, nous sommes dans l'obligation de prononcer la rupture de nos relations contractuelles à effet immédiat de la fin de votre congé parental. Devant la situation exceptionnelle rencontrée et à ses conséquences, votre contrat sera rompu le 16 avril 2008 et n'ouvrira pas droit à l'exécution d'un préavis ou son indemnisation ainsi qu'au versement d'indemnité conventionnelle de rupture. Nous tiendrons alors à votre disposition votre certificat de travail et votre solde de tout compte. Nous regrettons vivement le non respect des accords passés et l'issue que nous sommes amenés à donner à votre contrat, mais toutes les voies permettant de trouver un règlement à cette situation n'ont pu aboutir. » ; que le 15 avril 2008, Lucie C... épouse X... a remis en main propre à M. Y... directeur des ressources humaines de la société LIVBAG un courrier contestant son licenciement ; que le 24 avril 2008, les parties ont signé un protocole d'accord transactionnel pour régler leur différend, prévoyant un maintien de la rupture du contrat, le versement d'une indemnité de 30. 000 euros à la salariée et renonciation de cette dernière à agir en justice contre l'entreprise et à exercer toute action de quelque nature que ce soit, à propos des rapports ayant existé entre les parties, au titre de la conclusion, l'exécution comme de la rupture du contrat de travail ; que la société LIVBAG a versé à Lucie C... épouse X... l'indemnité de 30. 000 euros ; qu'eu égard au fait que la rupture du contrat de travail a été prononcée à effet immédiat et n'emporte aucun versement d'indemnité, il s'en déduit nécessairement que le licenciement a été prononcé pour faute grave ; que cette lettre a été portée à la connaissance de la salariée au plus tard le 24 avril 2008, date à laquelle les parties ont formalisé une transaction, la salariée reconnaissant en avoir reçu un exemplaire à cette occasion, alléguant avoir reçu une enveloppe vide de cette lettre le 12 avril 2008, ne contenant qu'une carte de visite ; que le licenciement a donc été notifié à la salariée, à tout le moins en main propre le 24 avril 2008 ; que la lettre de licenciement comporte expressément les motifs de celui-ci et cette lettre fixe les termes du litige, peu important la qualification donnée à la rupture dans l'attestation à destination de l'assurance chômage et autres documents de fin de contrat ; que la salariée plaide que le motif de son licenciement est directement lié à son congé parental ; que toutefois, le licenciement n'est pas lié au congé parental d'éducation mais à la volonté de Lucie C... épouse X... de revenir sur sa décision de donner sa démission à l'issue de son congé ; que de ce chef, le grief est donc inopérant ; que le courrier du 7 janvier 2008 de l'employeur indiquant à la salariée de son devoir de l'informer un mois avant la fin du congé de sa volonté de réintégrer la société ou de rompre son contrat ne saurait valoir renonciation de celui-ci à se prévaloir de l'intention de son directeur administratif et financier de quitter la société à l'issue du congé ; que Lucie C... épouse X... occupait les fonctions de directeur administratif et financier de l'entreprise, appartenant au comité de direction ; que si tous les salariés ont un devoir de loyauté envers leur employeur, devant exécuter le contrat de travail de bonne foi, ce devoir est particulièrement renforcé pour un cadre dirigeant, l'entreprise devant compter sur sa loyauté sans faille pour accomplir l'objet social ; que Lucie C... épouse X... a clairement annoncé à son employeur son intention de quitter la société à l'issue de son congé parental d'éducation, ainsi qu'il ressort des attestations des membres de l'entreprise (Laurent A..., Arnaud D... et Ludovic Z...) dont les témoignages ne sauraient être écartée pour ce seul motif, chacun ayant indiqué qu'il avait connaissance de l'usage de son attestation en justice ; que consciente de l'importance, de son poste et avouant elle-même que ce poste ne pouvait être confié à un salarié embauché à durée déterminée, elle a participé au recrutement et à la formation de son successeur ; qu'elle a ainsi manifesté aux yeux de son employeur son intention de quitter l'entreprise à l'issue de son congé et confirmé les propos qu'elle a tenus au directeur général, Daniel B..., qu'en revenant brutalement sur sa décision de démissionner à l'issue de son congé, la salariée a trahi la confiance de son employeur ; qu'eu égard à la qualité de la salariée, membre du comité de direction, cadre dirigeant, cette perte de confiance ne permet pas à l'entreprise de la garder à son service ne serait-ce que pendant le court laps de temps du préavis, et d'autant que par son fait Lucie C... épouse X... a conduit l'entreprise à embaucher un successeur à son poste, la privant de pouvoir l'occuper de nouveau ; que l'entreprise ne pouvait confier à sa salariée aucune tâche de cadre dirigeant dans la mesure où ces tâches impliquent que la société LIVBAG puisse s'appuyer sur une loyauté sans faille de son directeur administratif et financier ; qu'en considération de ces éléments d'appréciation, il y a lieu de juger que le licenciement de Lucie C... épouse X... est régulier ; que dans la mesure où le licenciement de Lucie C... épouse X... pour faute grave est bien fondé, celle-ci ne pouvait prétendre à aucune indemnité de rupture du contrat, de préavis ou de licenciement ; qu'à la lumière de ces éléments, la question de la validité de la transaction devient sans objet dans la mesure où le licenciement pour faute grave est fondé et n'ouvre droit en faveur de Lucie C... épouse X... à aucune des indemnités qu'elle réclame sur le fondement d'un licenciement qu'elle allègue irrégulier ; qu'en effet, Lucie C... épouse X... ayant été régulièrement licenciée pour faute grave, elle ne pouvait prétendre a aucune indemnité de préavis ou de licenciement ; qu'ayant perçu 30. 000 euros de la part de l'entreprise, la transaction signée ne saurait dans ces conditions être regardée comme ne contenant pas de concessions réciproques ; que de même, peu importe que la transaction ait été conclue alors que le licenciement n'aurait pas été notifié, comme il est plaidé par la demanderesse et encourrait de ce chef l'annulation, puisqu'aussi bien Lucie C... épouse X... s'est vue notifier un licenciement régulier et fondé ; qu'en outre, annuler la transaction reviendrait à rendre Lucie C... épouse X... débitrice de l'indemnité versée ; qu'en considération de l'ensemble de ces éléments d'appréciation, il convient de débouter Lucie C... épouse X... de ses demandes.
ALORS QUE le salarié ne peut renoncer par avance aux règles prévues au titre de la rupture du contrat de travail à durée indéterminée ; qu'en estimant que la salariée avait clairement annoncé son intention de quitter la société à l'issue de son congé parental et qu'elle a confirmé ses propos en participant au recrutement et à la formation de son successeur et qu'elle est ainsi revenue brutalement sur sa décision de démissionner en méconnaissance de la loyauté pour dire que le licenciement pour faute grave était régulier, la cour d'appel a, par motifs adoptés, violé les articles L 231-4, L 1237-1, L 1225-55 et L 1225-70 du code du travail et l'article 2044 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-15768;14-16350
Date de la décision : 22/10/2015
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 26 février 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 22 oct. 2015, pourvoi n°14-15768;14-16350


Composition du Tribunal
Président : M. Ludet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Monod, Colin et Stoclet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.15768
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