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13/10/2015 | FRANCE | N°14-20859

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 octobre 2015, 14-20859


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article 16 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a saisi la juridiction prud'homale aux fins d'obtenir la condamnation de Mme Y..., qui exploitait un restaurant, à lui payer diverses sommes, notamment à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive de son contrat de travail verbal sur le fondement de l'article L. 1235-5 du code du travail, contrat dont l'existence était contestée par la défenderesse ; que la créance du salarié a été fi

xée sur le redressement judiciaire de Mme Y..., qui a ensuite été placée e...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article 16 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a saisi la juridiction prud'homale aux fins d'obtenir la condamnation de Mme Y..., qui exploitait un restaurant, à lui payer diverses sommes, notamment à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive de son contrat de travail verbal sur le fondement de l'article L. 1235-5 du code du travail, contrat dont l'existence était contestée par la défenderesse ; que la créance du salarié a été fixée sur le redressement judiciaire de Mme Y..., qui a ensuite été placée en liquidation judiciaire, la SCP Z...- A... étant désignée en qualité de mandataire liquidateur ;
Attendu que pour rejeter la demande du salarié au titre d'une indemnité pour rupture abusive du contrat de travail, l'arrêt retient que l'intéressé, salarié étranger, embauché alors qu'il n'était pas muni d'un titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France et dont la situation n'avait pas été régularisée au cours de la relation de travail, ne pouvait prétendre à une indemnité pour licenciement abusif ;
Attendu, cependant, que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; que si, lorsque la procédure est orale, les moyens soulevés d'office sont présumés avoir été débattus contradictoirement à l'audience, il peut être apporté la preuve contraire ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'elle énonçait que les parties avaient repris oralement à l'audience leurs conclusions écrites et qu'il résultait de celles-ci que ni l'employeur ni l'AGS n'avaient invoqué le moyen tiré de l'impossibilité pour le travailleur étranger non muni d'un titre l'autorisant à exercer une activité en France de percevoir des dommages-intérêts pour rupture abusive de son contrat de travail sur le fondement de l'article L. 1235-5 du code du travail, la cour d'appel, qui a soulevé ce moyen sans avoir préalablement sollicité les observations des parties, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de sa demande d'indemnité pour rupture abusive du contrat de travail, l'arrêt rendu le 27 juin 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne la SCP Z...- A..., ès qualités, aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize octobre deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. X...

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté Monsieur X... de sa demande d'indemnité pour rupture abusive du contrat de travail ;
AUX MOTIFS QUE « Monsieur X..., salarié étranger embauché alors qu'il n'était pas muni d'un titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France et dont la situation n'a pas été régularisée au cours de la relation de travail, ne peut prétendre à une indemnité pour licenciement abusif » ;
ALORS d'une part QUE les dispositions du Code du travail régissant le licenciement ne sont écartées pour les étrangers ne disposant pas d'un titre de séjour les autorisant à exercer une activité salariée en France que lorsque la rupture de leur contrat de travail est motivée par leur emploi irrégulier ; qu'en l'espèce, il ressort des constatations de la Cour d'appel que la rupture du contrat de travail de Monsieur X..., intervenue verbalement, n'était pas motivée ; qu'il s'en déduisait que cette rupture n'était pas intervenue en raison de l'emploi irrégulier de Monsieur X... ; qu'en retenant néanmoins qu'ayant travaillé sans titre de séjour l'autorisant à exercer une activité salariée en France, Monsieur X... ne pouvait prétendre à un indemnité pour licenciement abusif, la Cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 8252-1 et L. 8252-2 du Code du travail par fausse application et celles de l'article L. 1235-5 du même Code par refus d'application ;
ALORS d'autre part QU'en cas de licenciement abusif, le salarié peut prétendre à une indemnité correspondant au préjudice subi ; que la seule constatation de l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement doit entraîner la condamnation de l'employeur à réparer le préjudice dont il appartient au juge d'apprécier l'étendue ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel après avoir retenu qu'en l'absence de lettre de licenciement, la rupture, non motivée du contrat de travail de Monsieur X... devait être considérée comme abusive, la Cour d'appel a néanmoins retenu qu'il ne pouvait prétendre à une indemnité pour rupture abusive de son contrat de travail au motif qu'il avait été embauché alors qu'il n'était pas muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France et que sa situation n'avait pas été régularisée au cours de la relation de travail ; qu'en statuant par ces motifs inopérants, la Cour d'appel a violé l'article L. 1235-5 du Code du travail ;
ALORS encore, à titre subsidiaire, QUE le salarié étranger non muni d'un titre de séjour l'autorisant à exercer une activité salariée en France a la possibilité de demander en justice une indemnisation supplémentaire s'il est en mesure d'établir l'existence d'un préjudice non réparé au titre des dispositions de l'article L. 8252-2 ; qu'en l'espèce, Monsieur X... sollicitait l'allocation de dommages et intérêts pour rupture abusive de son contrat de travail en faisant valoir que cette rupture était intervenue verbalement sans l'énonciation d'aucun motif ; qu'après avoir relevé que la rupture du contrat de travail de Monsieur X..., non motivée, devait être considérée comme abusive, la Cour d'appel, pour rejeter la demande de dommages et intérêts du salarié, s'est contentée de retenir que Monsieur X... ne pouvait pas prétendre à une indemnité pour licenciement abusif du fait qu'il avait travaillé sans titre de séjour l'autorisant à exercer une activité salariée en France ; qu'en statuant par ces motifs inopérants sans rechercher si Monsieur X... établissait, du fait de cette rupture abusive, l'existence d'un préjudice non réparé au titre des dispositions de l'article L. 8252-2, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de cet article ;
ALORS enfin, à titre infiniment subsidiaire, QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur des moyens qu'il a relevé d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; que, si dans les procédures sans représentation obligatoire de tels moyens sont présumés avoir été débattus contradictoirement à l'audience, il peut être apporté la preuve du contraire ; qu'en l'espèce, il ressort des énonciations de la Cour d'appel que les parties ont soutenu oralement à l'audience leurs conclusions écrites et que, dans celles-ci, ni Madame Y... ni l'AGS CGEA IDF OUEST ne soutenaient que Monsieur X... ne pouvait pas prétendre à une indemnité pour licenciement abusif du fait de sa qualité d'étranger en situation irrégulière ; qu'en soulevant ce moyen d'office sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations, la Cour d'appel a violé les dispositions de l'article 16 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-20859
Date de la décision : 13/10/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 27 juin 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 oct. 2015, pourvoi n°14-20859


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Bertrand, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.20859
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