LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 18 février 2014), que la société Diffusion représentation électromécanique automatique concept (la société DREAC) a été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 15 mars et 12 avril 2005, Mme Z... étant désignée représentant des créanciers puis liquidateur ; qu'une créance de loyers impayés invoquée par M. X... et la SCI Talbani avant l'ouverture de la procédure collective a été rejetée postérieurement à celle-ci, faute d'avoir été déclarée au passif de la société DREAC ; que M. X... et la SCI Talbani, imputant l'extinction de leur créance à Mme Z..., qui ne les avait pas avertis d'avoir à la déclarer, ont assigné celle-ci, à titre personnel, en réparation de leur préjudice ;
Attendu que M. X... et la SCI Talbani font grief à l'arrêt de rejeter leur demande alors, selon le moyen :
1°/ que, faute d'aviser les créanciers connus de la nécessité de déclarer leurs créances, le représentant des créanciers, de même que le liquidateur, engage sa responsabilité personnelle à leur égard ; que la carence propre du débiteur dans l'établissement de la liste de ses créanciers n'exonère pas le mandataire de justice normalement diligent de la charge d'établir pareille liste en vertu des dispositions des articles L. 621-45 du code de commerce et 66 du décret du 27 décembre 1985 dans leur rédaction applicable en la cause ; qu'en n'exonérant cependant de toute responsabilité l'organe de la procédure collective motif inopérant pris de la carence du débiteur, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
2°/ que les appelants ont fait valoir que Mme Z..., en sa qualité de représentant des créanciers puis de liquidateur de la société, ne pouvait légitimement ignorer l'existence du contentieux opposant le débiteur au bailleur commercial pour des créances de loyers et de charges impayés figurant notamment dans les pièces de la procédure ; qu'en se bornant à affirmer, motif inopérant pris du changement de dénomination du débiteur, que les appelants ne démontreraient pas que Mme Z... avait eu connaissance effective de ce contentieux, sans autrement caractériser l'ignorance légitime de cette dernière, la cour d'appel a derechef privé sa décision de toute base légale en violation des dispositions de l'article L. 621-45 du code de commerce ;
Mais attendu qu'ayant retenu, par motifs adoptés et non critiqués, que, même déclarée et admise, la créance chirographaire de loyers de M. X... et de la SCI Talbani n'aurait pu être payée dans le cadre des répartitions, l'actif de la société DREAC étant entièrement absorbé par son passif superprivilégié et privilégié, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, abstraction faite de tous autres surabondants, légalement justifié sa décision ; que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... et la SCI Talbani aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer la somme globale de 3 000 euros à Mme Z... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize octobre deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Bouthors, avocat aux Conseils, pour M. X... et la société Talbani
Le moyen reproche à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir rejeté les demandes de la SCI Talbani et de M. X... à l'encontre de Me Liliane Z..., liquidateur de la société Dréac.
aux motifs que M. X... et la SCI Talbani sont recevables à rechercher la responsabilité de Mme Z... en sa qualité de mandataire judiciaire, à charge pour eux de démontrer qu'elle a commis une faute ayant entraîné pour eux un préjudice et qu'il existe un lien causal entre cette faute et le préjudice ; que le représentant des créanciers n'avait pas l'obligation de pallier la carence du débiteur dans l'établissement et le dépôt de la liste des créanciers prescrits par les articles L. 621-45 du code de commerce dans sa rédaction-applicable en la cause-antérieure à la loi de sauvegarde des entreprises du 26 juillet 2005 et 69 du décret n° 85-1388 du 27 décembre 1985 ; que le redressement judiciaire de la société Dréac a été ouvert, le 15 mars 2005, sur déclaration de son état de cessation des paiements, déclaration à laquelle devait, en application de l'article 6-4° du décret précité, être joint «/'état chiffré des créances et des dettes avec l'indication des noms et du domicile des créanciers » ; que les appelants-d'ailleurs non titulaires de sûretés au sens de l'article L. 621-43, alinéa 1 du code de commerce dans sa rédaction applicable au litige-ne figuraient pas sur la liste des avis à déclarer en date du 11 avril 2005 ; que, par ailleurs, les bailleurs du débiteur étaient, non pas M. X... et la SCI Talbani, mais la SCI Lafran pour le fonds sis à Toulouse et la SCI Fraber pour celui de Bordeaux, ainsi que cela ressort des rapports établis par Mme Z..., es qualités, les 11 mai et 7 décembre 2005 ; que, concernant les pièces comptables du débiteur, tout au plus est-il mentionné sur le compte de résultat de l'exercice 2004 une charge exceptionnelle de 51 070 euros précédée de l'indication : « Solde jugement litige/ X... », ce qui signifie qu'il s'agit d'une charge payée au cours de cet exercice ; que concernant le litige afférent aux loyers impayés, il a opposé M. X... et la SCI Talbani, d'une part, à la société X... Electronique, d'autre part, et non à la société Dréac, ainsi que cela ressort du jugement du tribunal d'instance de Toulouse du 5 juin 2000, de l'arrêt de la cour d'appel de Toulouse du 13 novembre 2001 et de l'arrêt de la cour de cassation du 22 février 2005 ; qu'il s'ensuit qu'il ne peut être reproché au liquidateur judiciaire, à qui cette diligence n'incombait pas, d'avoir omis d'aviser M. X... et la SCI Talbani d'avoir à déclarer leurs créances, étant observé que le jugement d'ouverture du redressement judiciaire a été régulièrement publié au Bodacc et que cette publication est destinée, notamment, à informer les créanciers afin qu'ils fassent valoir leurs droits et qu'en outre, les appelants ont soutenu dans leur assignation introductive d'instance du 4 décembre 2009 et dans leurs écritures devant la cour qu'ils « n'avaient en tout cas aucun intérêt à procéder à une quelconque déclaration de créance, étant bénéficiaires de décisions de justice qui avaient été exécutées », ce qui tend à établir qu'ils avaient connaissance de la procédure collective de la société Dréac ; qu'il ne peut non plus lui être imputé à faute de n'avoir pas « fait le point sur les procédures en cours », alors que la preuve qu'elle en avait connaissance n'est pas rapportée ; que, de même, alors que l'arrêt de la cour de cassation a été signifié, au nom de la société Dréac, par M. Y..., qui n'avait aucune qualité pour la représenter, et alors que cette société avait été placée en redressement judiciaire quinze jours auparavant, il ne peut être fait quelque grief à Mme Z..., en sa qualité de liquidateur judiciaire, à cet égard, ni non plus dans sa demande tendant à l'annulation de cette signification manifestement irrégulière, ni enfin dans le fait qu'elle a saisi la cour d'appel de renvoi dès qu'elle a eu connaissance de la procédure ayant opposé les bailleurs à la société X... Electronique ; que, concernant la prétendue gérance de fait par M. Y... de la société Dréac, que M. X... et la SCI Talbani reprochent au liquidateur judiciaire de n'avoir pas recherché en lançant une action en justice en ce sens, rien ne démontre son bien-fondé ni le bénéfice qu'en auraient retiré les deux appelants, puisque que toute condamnation sur ce point aurait bénéficié à l'ensemble des créanciers de la liquidation judiciaire, dont ils ne font pas partie faute de déclaration de leurs créances ; enfin, que les appelants ne peuvent prétendre solliciter la restitution des sommes qu'ils avaient reçues en vertu de l'exécution de l'arrêt de la cour d'appel de Toulouse du 13 novembre 2011, mais que le liquidateur judiciaire leur a légitimement demandé de rembourser suite à l'annulation de cette décision par la cour de cassation et alors que la cour de renvoi a infirmé le jugement initial du 5 juin 2000 ayant prononcé des condamnations au paiement en leur faveur ; que c'est donc par une juste appréciation que le premier juge a rejeté la demande ; que les appelants, qui succombent, seront condamnés à payer à l'intimé la somme de 5. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, verront leur propre demande de ce chef rejetée et supporteront les dépens (arrêt p. 7 à 9) ;
1°) alors que, d'une part, faute d'aviser les créanciers connus de la nécessité de déclarer leurs créances, le représentant des créanciers, de même que le liquidateur, engage sa responsabilité personnelle à leur égard ; que la carence propre du débiteur dans l'établissement de la liste de ses créanciers n'exonère pas le mandataire de justice normalement diligent de la charge d'établir pareille liste en vertu des dispositions des articles L. 621-45 du code de commerce et 66 du décret du 27 décembre 1985 dans leur rédaction applicable en la cause ; qu'en n'exonérant cependant de toute responsabilité l'organe de la procédure collective motif inopérant pris de la carence du débiteur, la cour a violé les textes susvisés ;
2°) alors, en tout état de cause, que les appelants ont fait valoir que Me Z..., en sa qualité de représentant des créanciers puis de liquidateur de la société, ne pouvait légitimement ignorer l'existence du contentieux opposant le débiteur au bailleur commercial pour des créances de loyers et de charges impayés figurant notamment dans les pièces de la procédure (concl. p. 9 et p. 26 et s.) ; qu'en se bornant à affirmer, motif inopérant pris du changement de dénomination du débiteur, que les appelants ne démontreraient pas que Me Z... avait eu connaissance effective de ce contentieux, sans autrement caractériser l'ignorance légitime de cette dernière, la cour a derechef privé sa décision de toute base légale en violation des dispositions de l'article L. 621-45 du code de commerce.