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06/10/2015 | FRANCE | N°14-18432

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 06 octobre 2015, 14-18432


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... exerçait en dernier lieu les fonctions de responsable de magasin dans la société Aldi marché Ablis ; qu'elle a été en arrêt de travail pour maladie professionnelle puis déclarée inapte par le médecin du travail, à tous postes de l'entreprise ; qu'elle a été licenciée pour inaptitude et refus des propositions de reclassement ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la d

ébouter de sa demande de rappel de salaires au titre des heures supplémentaires ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... exerçait en dernier lieu les fonctions de responsable de magasin dans la société Aldi marché Ablis ; qu'elle a été en arrêt de travail pour maladie professionnelle puis déclarée inapte par le médecin du travail, à tous postes de l'entreprise ; qu'elle a été licenciée pour inaptitude et refus des propositions de reclassement ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande de rappel de salaires au titre des heures supplémentaires effectuées du fait que la convention de forfait était privée d'effet, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que « la salariée produit un décompte des heures de travail par semaine sur la base d'un horaire quotidien de 8 heures à 12h30 et de 13h00 à 20h00 », mais elle a néanmoins débouté la salariée de ses demandes en relevant, par motifs propres, que « la pause méridienne calculée par la salariée est particulièrement courte et l'ouverture et la fermeture du magasin pouvait être assurée par d'autres salariés » et par motifs adoptés « que la société ne communique rien de précis sur le décompte des heures supplémentaires effectuées ou sur les temps de récupération » ; qu'en statuant ainsi, en faisant uniquement peser la charge de la preuve sur la salariée, sans jamais rechercher les heures de travail réellement effectuées, la cour d'appel a violé l'article L. 3171-4 du code du travail ;
2°/ que les juges du fond ne sauraient justifier leur décision par une motivation dubitative, laquelle s'entend de toute formulation marquant un doute reconnu par les juges du fond sur un point de fait essentiel à la solution du litige ; qu'en affirmant, par motifs propres, que « l'ouverture et la fermeture du magasin pouvait être assurée par d'autres salariés » et, par motifs adoptés, que « une directrice adjointe était susceptible de suppléer pour les ouvertures et fermetures », la cour d'appel s'est livrée à une conjecture hypothétique sur un point de fait pourtant essentiel à la solution du litige, puisqu'il s'agit de l'amplitude horaire du travail accompli et du nombre subséquent d'heures supplémentaires réalisées, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que n'est pas motivée la décision qui procède d'affirmations générales et péremptoires ; qu'en affirmant de manière péremptoire, par motifs propres et adoptés, que « la pause méridienne calculée par la salariée est particulièrement courte » et que « la coupure pour le déjeuner apparaît très brève (30 mn) », sans justifier en fait cette appréciation, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ que la contradiction de motifs équivaut une absence de motifs ; qu'après avoir, par motifs propres et adoptés, déclaré la convention de forfait inopposable à la salariée, la cour d'appel, pour déterminer le nombre d'heures supplémentaires effectuées par la salariée, s'est fondée sur « le volume horaire budgété comme indiqué sur les états mensuels de suivi pour l'annualisation » établi forfaitairement par l'employeur pour tous les cadres de l'entreprise à « 1920 heures annuelles » ; qu'en statuant ainsi, par des motifs directement contradictoires entre eux ¿ car on ne peut tout à la fois déclarer la convention de forfait inopposable à la salariée et en même temps lui opposer un horaire de travail annuel forfaitaire ¿ la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant constaté que l'employeur versait aux débats des états de suivi de mensualisation ainsi que les listes de présence mensuelle signées par la salariée mentionnant un horaire hebdomadaire de 45,15 heures, la cour d'appel a pu retenir, sans faire peser la charge de la preuve sur la salariée ni se contredire, que l'intéressée effectuait des heures supplémentaires dont elle a souverainement apprécié le volume ; que le moyen, qui vise un motif surabondant de l'arrêt dans ses deuxième et troisième branches, n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l'article L. 1226-10 du code du travail, ensemble l'article 1315 du code civil ;
Attendu que pour dire que le licenciement pour inaptitude reposait sur une cause réelle et sérieuse et la débouter de toutes ses demandes indemnitaires, l'arrêt retient qu'il n'est pas démontré que la société appartiendrait à un groupe mondial comme prétendu et que d'autres sociétés auraient dû être consultées ;
Attendu cependant qu'il appartient à l'employeur de justifier du périmètre de reclassement et de l'impossibilité, à la date du licenciement, de reclasser le salarié dans l'entreprise et, le cas échéant, le groupe auquel il appartient ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel qui a inversé la charge de la preuve, a violé les textes susvisés ;
Sur le deuxième moyen :
Vu l'article L. 1226-12, alinéa 1, du code du travail ;
Attendu que pour débouter la salariée de sa demande de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure, l'arrêt retient que la société a adressé à la salariée par lettre du 25 juillet 2012 des propositions de reclassement à laquelle celle-ci n'a pas donné suite, et lui a fixé un rendez-vous le 2 août 2012 afin de s'en entretenir auquel elle ne s'est pas présentée ;
Attendu cependant qu'il appartient à l'employeur de faire connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement du salarié ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le quatrième moyen :
Vu l'article 2224 du code civil ;
Attendu que pour débouter la salariée de sa demande concernant les rappels de salaire au titre de la modulation illicite, l'arrêt retient que c'est à tort que la salariée soutient que le délai de prescription quinquennale n'avait pas commencé à courir et que la jurisprudence qu'elle évoque ne peut s'appliquer à son cas particulier dès lors que l'intéressée avait connaissance de l'accord de modulation critiqué, et était en mesure de le remettre en cause sans délai ;
Attendu cependant que la prescription quinquennale ne court pas lorsque la créance, même périodique, dépend d'éléments qui ne sont pas connus du créancier et doivent résulter de déclarations que le débiteur est tenu de faire ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'il résultait de ses constatations que la créance de rappel de salaire, même si elle était périodique, dépendait d'éléments qui n'étaient pas connus de la salariée puisqu'ils résultaient de l'information que l'employeur était tenu de fournir au titre du délai conventionnel de prévenance qui n'avait pas été respecté, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que le licenciement pour inaptitude reposait sur une cause réelle et sérieuse et qu'il déboute la salariée de toutes ses demandes indemnitaires, ainsi que de ses demandes de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure et en rappels de salaire au titre de la modulation illicite pour la période antérieure au 28 novembre 2007, l'arrêt rendu le 1er avril 2014, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ;
Condamne la société Aldi marché Ablis aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à Mme X..., la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six octobre deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

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Moyens produits par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR dit que le licenciement pour inaptitude reposait sur une cause réelle et sérieuse et d'avoir en conséquence débouté la salariée de toutes ses demandes indemnitaires sur ce point,
AUX MOTIFS PROPRES QUE, sur le respect de l'obligation de reclassement, aux termes de l'article L. 1226-10 du code du travail, lorsque, à L'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, des conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, le médecin du travail formule également des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation destinée à lui proposer un poste adapté. L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail. En l'espèce, il est établi par le courrier du médecin du travail rappelé ci-dessus qu'il n'était pas possible de procéder à un aménagement du poste de responsable de magasin de Chinon compte tenu de la polyvalence de l'emploi impliquant des tâches de manutention et en l'absence de fonctions purement administratives. Il est en outre justifié par la production de l'étude de pénibilité que les postes en magasins du niveau de celui occupé par Madame X... impliquent tous d'effectuer de la manutention et que les tâches administratives sont marginales. Il ressort des échanges de courriers entre la société et la salariée que, par lettre du 11 juillet 2012 il lui a été demandé, à la suite de l'avis d'inaptitude, de faire part de ses souhaits afin de mieux cibler les recherches de reclassement, qu'il lui a été proposé deux postes de reclassement ; un de chauffeur livreur et l'autre d'assistant administratif tous deux basés à Albis, la société s'engageant à prendre en charge les frais de déménagement, et que les responsables de la société se sont déplacés à Chinon pour rencontrer Madame X... afin de s'entretenir avec elle. Toutefois, la salariée n'a pas répondu aux sollicitations et propositions de son employeur, n'a pas assisté au rendez-vous évoquant des contraintes personnelles et n'a pas exprimé de souhaits. Les délégués du personnel qui ont été consultés ont validé la proposition d'emploi administratif. La société justifie avoir consulté par écrit 14 sociétés du groupe situées en France auxquelles a été transmis le dossier de Madame X... et que toutes ont répondu par la négative faute de postes de reclassement. Il n'est pas démontré que la société ALDI appartiendrait à un groupe mondial comme prétendu et que d'autres sociétés auraient dû être consultées. Il résulte de ce qui précède que la société ALDI a satisfait de manière loyale et sérieuse à son obligation de reclassement en offrant à Madame X... de la reclasser sur un poste administratif qu'elle s'apprêtait à créer et en consultant les entreprises du groupe, étant relevé que Madame X... ne propose pas de solution alternative crédible. La décision du conseil de prud'hommes qui a jugé que le licenciement de Madame X... reposait sur une cause réelle et sérieuse et l'a débouté de sa demande indemnitaire sera confirmée,
AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE, la rupture des relations professionnelles Le droit Lorsqu'un salarié est déclaré par le médecin inapte à reprendre l'emploi qu'il occupait, l'employeur est tenu de lui proposer un autre emploi ; approprié à ses capacités, compte tenu des conclusions écrites du médecin du Travail aussi comparables que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en place de mesures (mutations, transformations de poste de travail ou aménagement du temps de travail (articles L. 1226-2 et L. 1226-10 du Code du Travail). Cette recherche doit s'étendre à l'ensemble des activités de l'entreprise et, le cas échéant, au sein du groupe auquel elle appartient, voir d'autres entreprises ayant un lien étroit, lorsque les permutations sont possibles (Jurisprudence), Les faits Il est extrait de la lettre de rupture du 23 août 2012, le motif suivant Lors de cette deuxième visite en date du 10/0/12 le docteur Y... médecin du travail vous a déclaré apte selon les termes suivants "Inapte à tous les postes de l'entreprise," Compte tenu des prescriptions du docteur Y..., notamment au cours de la première visite d'inaptitude, ce sont alors ouvertes plusieurs pistes de reclassement avec l'absence de manutention. Nous vous avons fait parvenir ces offres le 25/07/12 après avoir consulté les délégués du personnel le même jour. A- Proposition d'un poste administratif B-Chauffeur livreur Les autres sociétés du groupe ne nous ont pas fait d'autres propositions. Avec les descriptions de postes, nous vous avons fixé un rendez-vous le 25/07/12 au 02/08/12 à votre magasin de CHINON pour vous éviter tous déplacement. Le 08/08/12 (...) vous ne vous prononciez toujours pas sur ces deux offres de reclassement que vous aviez en votre possession maintenant depuis le 25/07/12 (AR numéro 1A 059 027 8961 9). A nouveau nous avons fixé le rendez-vous sur votre magasin de CHINON et vous ne vous êtes pas présentée. Dans un premier temps le docteur Y... avait exclu le port de charges supérieures à 2 kg, par la suite, il a déclaré Madame X... inapte à tout poste existant, ce qui sous entend qu'un poids inférieur puisse poser problème et qu'aucun poste répondant à cet impératif n'existe chez ALDI MARCHE ABLIS. Il est présomptueux de la part de Madame X... d'affirmer que la SARL ALBI MARCHE ABUS aurait pu, par la suite, lui proposer un poste comportant de la manutention. La défenderesse justifie avoir 1°) contacté utilement la centrale d'achat et ses homologues installés à QUINCY, ENNERY, DANMARTIN, BEAUNE, CAVAILLON, BOIS GRENIER, TOULOUSE, REIMS, COLMAR, HONFLEUR, OYTIER, SAINT OBLAS et GESTAS, 2°) proposé un poste créé à son attention sur ABLIS ; Quoique qu'en dise Madame X... l'étude relative à la pénibilité et mentionnée dans la lettre de rupture, est bien versée aux débats (pièce 9 c). Les avis des délégués du personnel ont bien été requis et la polyvalence des salariés ALDI MARCHE ABLIS apparaît évidente, d'autant que Madame X... excipe à d'autres égards, la faiblesse des effectifs. Elle fait état d'une myriade de sociétés, sans démontrer (alors qu'elle est attaquée à ce sujet) le lien entre les différentes sociétés exploitant la marque ALDI MARCHE. L'hypothèse d'entreprises indépendantes, jouissant d'une "franchise commerciale" ne peut être exclue présentement. Le poste de chauffeur livreur n'avait évidemment pas à être proposé puisque le médecin du travail n'avait pas validé. Dans ce contexte, la SARL ALDI MARCHE ABLIS apparaît de bonne foi dans sa recherche de reclassement. Le licenciement de Madame X... en raison d'une inaptitude médicale, est juridiquement entériné. Elle n'obtiendra pas de dommages-intérêts sur le fondement des dispositions de l'article L. 1235-3 du Code du Travail,
ALORS D'UNE PART QUE, l'employeur, quelle que soit la position prise par le salarié, doit rechercher les possibilités de reclassement par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations ou transformations de postes de travail au sein du groupe auquel elle appartient, la recherche devant s'apprécier parmi toutes les entreprises de ce groupe, en France comme à l'étranger, dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation lui permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel ; qu'il appartient à l'employeur de justifier du périmètre de reclassement et de l'impossibilité, à la date du licenciement, de reclasser le salarié tant dans l'entreprise que dans ce groupe ; qu'en affirmant que la salariée ne démontrait pas que l'employeur appartenait à un groupe mondial et que d'autres sociétés aurait dû être consultées, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, violant ainsi l'article L. 1226-2 du code du travail, ensemble l'article 1315 du code civil,
ALORS D'AUTRE PART QUE, tout jugement doit être motivé ; qu'en ne procédant à aucune analyse, même sommaire, des éléments de preuve pourtant régulièrement produits par la salariée à l'appui de ses écritures, notamment « L'analyse des comptes 2010 » du Comité de Groupe Aldi, établi par une société d'expertise comptable et de commissariat aux comptes, dont il ressort pourtant que « le groupe poursuit le maillage du territoire hexagonal, le parc s'est accru de 70 magasins ... » (p. 11 et p. 34), que « la politique de financement intègre de plus en plus des emprunts octroyés par des sociétés faisant partie du Groupe Aldi en Allemagne » (p. 20) et que l'organigramme du groupe montre que « Aldi SARL Dammartin en Goële », la société mère française, est détenue à 50 % par « Weba Holding GmbH » et par « UTHA Holding GmbH » deux sociétés allemandes (p. 26 et p. 31) et que « depuis 2008, l'effectif global du Groupe Aldi a franchi la barre des 5 000 personnes... » (p. 42 et p. 54), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile,
ALORS ENFIN QU'en affirmant que la salariée n'a pas répondu aux sollicitations et propositions de son employeur et n'a pas exprimé de souhaits, la cour d'appel a dénaturé le sens pourtant clair et précis de la lettre de la salariée du 6 août 2012 dans laquelle elle écrivait pourtant « pour ce qui est des offres de reclassement, je souhaiterais lever toute ambiguïté sur l'offre chauffeur livreur car vous me proposez ce poste en me précisant que la médecine du travail vous a émis des réserves ainsi je souhaiterais savoir si ce poste sera aménagé en tenant compte des recommandations faites par celle-ci » ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil,
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté la salariée de sa demande de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure,
AUX MOTIFS QUE selon l'article L. 1226-12 du code du travail, lorsque l'employeur est dans l'impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement. En l'espèce, la société a adressé à Madame X... par lettre du 25 juillet 2012 des propositions de reclassement à laquelle celle-ci n'a pas donné suite, et lui a fixé un rendez-vous le 2 août 2012 afin de s'en entretenir auquel elle ne s'est pas présentée, ce qui a conduit la société à la convoquer à un entretien préalable à son licenciement suivant lettre du 10 août 2012. La société ayant proposé un autre emploi à Madame X... avant d'engager la procédure de licenciement, il ne peut lui être reproché d'avoir méconnu les dispositions de l'article précité. La demande de dommages et intérêts sera en conséquence rejetée
ALORS QUE selon l'article L. 1226-12 alinéa 1 du code du travail, lorsque l'employeur est dans l'impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement ; que le non-respect de cette obligation, laquelle doit être remplie avant que ne soit engagée la procédure de licenciement, entraîne pour le salarié un préjudice réparé par l'allocation de dommages-intérêts ; qu'en déboutant la salariée de sa demande sur ce point, sans avoir constaté que l'employeur lui aurait notifié son impossibilité de reclassement avant d'engager la procédure de licenciement, et même en constatant l'inverse, à savoir que « la société avait proposé un autre emploi à Madame X... avant d'engager la procédure de licenciement », la cour d'appel a violé l'article L. 1226-12 du code du travail,
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR débouté la salariée de sa demande de rappel de salaires au titre de la convention de forfaits jours et d'heures supplémentaires effectuées,
AUX MOTIFS PROPRES QUE, Sur la demande de rappel de salaires au titre de la convention de forfaits jours. Il est constant que Madame X... était soumise à une convention de forfaits en jours. La société ALDI n'a pas organisé l'entretien annuel individuel prévu par l'article L. 3121-46 du code du travail durant toute la période d'application de la convention. Par suite et sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres moyens, c'est à bon droit que les premiers juges ont constaté que la convention de forfaits en jours était inopposable à la salariée et que celle-ci pouvait prétendre au paiement d'heures supplémentaires. Aux termes de l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes tes mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande. Madame X... produit un décompte des heures de travail par semaine sur la base d'un horaire quotidien de 8 heures à 12h30 et de 13h00 à 20h00. La société qui soutient que les responsables de magasin effectuent 1920 heures annuelles et qui évalue le nombre d'heures supplémentaires en déduisant la durée légale de travail annuel de 1607 heures, produit des listes de présence mensuelles signées par Madame X... et des états de suivi de mensualisation. Comme l'a justement relevé le conseil la pause méridienne calculée par Madame X... est particulièrement courte et l'ouverture et la fermeture du magasin pouvait être assurée par d'autres salariés. Par ailleurs les listes de présences mensuelles signées par Madame X... mentionnent un horaire hebdomadaire la concernant de 45,15 heures. Ainsi au vu des éléments produits de part et d'autre, le conseil a fait une juste appréciation du volume d'heures supplémentaires en retenant 406 heures supplémentaires en 2009 et 324 heures 80 en 2010. C'est également à juste titre que le conseil a retenu, pour fixer le montant des rappels de salaires au titre des heures supplémentaires et des repos compensateurs, un taux horaire de 18,27 euros, calculé sur la base du salaire brut de 2.900,34 euros et de 158,75 heures de travail, temps de pause compris. Le jugement sera par suite confirmé en ce qu'il a alloué à Madame X... 17.396,59 euros au titre des heures supplémentaires, 1.739,66 euros pour les congés payés y afférents et 8.042,44 euros pour les repos compensateurs,
AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE, la convention forfait - les heures supplémentaires En droit Un entretien annuel est organisé par l'employeur avec chaque salarié ayant conclu une convention de forfait jours sur l'année. Il porte sur la charge de travail du salarié, l'organisation du travail dans l'entreprise, l'articulation entre la vie professionnelle et la vie personnelle et familiale, ainsi que sur la rémunération du salarié ( article L. 3121-46 du Code du Travail ) issu de la loi 2008-789 du 20/08/2008). Les faits Madame X... a signé u n avenant le 10 décembre 2008. L'employeur admet n'avoir pas organisé chaque année depuis, un entretien à ce sujet. En l'occurrence, il ne produit rien à propos de ceux qui ont été conduits. Ces entretiens sont indispensables et ne peut être compensés par " le suivi des jours travaillés sur les listes de présence ou par celui de la charge de travail par l'intermédiaire de ses responsables de secteur - conclusions point 3). Au demeurant, aucun élément tangible, relatif à un contrôle effectif, n'est produit. En conséquence, la convention de " forfaits jours " est privée d'effet. Il faut donc calculer les heures supplémentaires à la semaine. La charge de la preuve est partagée ( article L. 3171-4 du Code du Travail) Néanmoins : la SARL ALBI MARCHE ABLIS ne communique rien de précis sur le décompte des heures supplémentaires effectuées ou sur les temps de récupération, Madame X... se base sur un nombre d'heures systématique de 11 h 50 par jour pour une présence de 8 h à 12 h 30 et 13 h a 20 h, Or, une directrice adjointe était susceptible de suppléer pour les ouvertures et fermetures. De surcroît, la coupure pour le déjeuner apparaît très brève (30 mn) Le conseil retiendra pour ses calculs le volume horaire budgété soit généralement 45 h 15 hebdomadaires comme indiqué sur les états mensuels de suivi pour l'annualisation (pièces 5 à 7 c) et pour les semaines d'un horaire supérieur qui ont servi au chiffrage de Madame X... (pièces 22 et 23 s) ce qui donne 406 heures supplémentaires en 2009 et 324 h 80 pour 2011, impliquant une majoration de 25 % pour les huit premières et 50 % au-delà, sachant que le taux horaire de base non controversé est de 18,27 €, soit une créance de 9 664,74 pour 2009 et 7 731,85 € pour 2010. Les congés payés s'ajoutent pour le dixième. Les repos compensateurs sont à calculer en fonction du seuil de 220 heures par an, puisque les parties n'informent pas d'un accord collectif spécifique et au-delà de 41 heures pour la majoration de 50 % et 100 % pour ce qui excède mais à partir de la 36 ème heure, soit une créance en repos compensateur de - 4 914,63 € au titre de 2009 ( 45 h 15 - 41 h x 40 semaines x 9,135 €) ( 186 h x 18,27 € ) -3 127,81 € au titre de 2010 ( 45 h 15 - 41 h x 32 semaines x 9,135 f )+( 104 h 80 18,27 € ) Une fiche de paie et une attestation POLE EMPLOI régularisatrice devront être adressées le plus rapidement possible, comme il est dit dans le dispositif,
ALORS D'UNE PART QU'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que « Madame X... produit un décompte des heures de travail par semaine sur la base d'un horaire quotidien de 8 heures à 12h30 et de 13h00 à 20h00 », mais elle a néanmoins débouté la salariée de ses demandes en relevant, par motifs propres, que « la pause méridienne calculée par Madame X... est particulièrement courte et l'ouverture et la fermeture du magasin pouvait être assurée par d'autres salariés » et par motifs adoptés « que la SARL ALBI MARCHE ABLIS ne communique rien de précis sur le décompte des heures supplémentaires effectuées ou sur les temps de récupération » ; qu'en statuant ainsi, en faisant uniquement peser la charge de la preuve sur la salariée, sans jamais rechercher les heures de travail réellement effectuées, la cour d'appel a violé l'article L. 3171-4 du code du travail,
ALORS D'AUTRE PART QUE les juges du fond ne sauraient justifier leur décision par une motivation dubitative, laquelle s'entend de toute formulation marquant un doute reconnu par les juges du fond sur un point de fait essentiel à la solution du litige ; qu'en affirmant, par motifs propres, que « l'ouverture et la fermeture du magasin pouvait être assurée par d'autres salariés » et, par motifs adoptés, que « une directrice adjointe était susceptible de suppléer pour les ouvertures et fermetures », la cour d'appel s'est livrée à une conjecture hypothétique sur un point de fait pourtant essentiel à la solution du litige, puisqu'il s'agit de l'amplitude horaire du travail accompli et du nombre subséquent d'heures supplémentaires réalisées, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile,
ALORS EN OUTRE QUE n'est pas motivée la décision qui procède d'affirmations générales et péremptoires ; qu'en affirmant de manière péremptoire, par motifs propres et adoptés, que « la pause méridienne calculée par la salariée est particulièrement courte » et que « la coupure pour le déjeuner apparaît très brève (30 mn) », sans justifier en fait cette appréciation, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile,
ALORS ENFIN QUE, la contradiction de motifs équivaut une absence de motifs ; qu'après avoir, par motifs propres et adoptés, déclaré la convention de forfait inopposable à la salariée, la cour d'appel, pour déterminer le nombre d'heures supplémentaires effectuées par la salariée, s'est fondée sur « le volume horaire budgété comme indiqué sur les états mensuels de suivi pour l'annualisation » établi forfaitairement par l'employeur pour tous les cadres de l'entreprise à « 1920 heures annuelles » ; qu'en statuant ainsi, par des motifs directement contradictoires entre eux ¿ car on ne peut tout à la fois déclarer la convention de forfait inopposable à la salariée et en même temps lui opposer un horaire de travail annuel forfaitaire ¿ la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile,
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt D'AVOIR dit la demande de la salariée concernant les rappels de salaire au titre de la modulation illicite soumise à la prescription quinquennale,
AUX MOTIFS QUE, Sur la demande de rappel de salaires au titre de la modulation illicite : L'article 212-8 du code du travail dans sa rédaction à l'époque de la signature de l'accord de d'entreprise du 18 juin 2001, prévoyait que la durée hebdomadaire de travail pouvait varier sur tout ou partie de l'année à condition que cela soit prévu par une convention ou un accord collectif étendu ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement, et que ces conventions ou accords respectent diverses conditions posées par ce texte. Selon l'alinéa 5 de ce texte, les conventions et accords doivent fixer le programme indicatif de la durée du travail, les conditions de recours au chômage partiel pour les heures qui ne sont pas prises en compte dans la modulation. L'alinéa 6 dispose que le programme de la modulation est soumis pour avis avant sa mise en oeuvre au comité d'entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel. Le chef d'entreprise communique au moins une fois par an au comité d'entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel, un bilan de l'application de la modulation. L'alinéa 7 prévoit que les salariés doivent être prévenus des changements de leurs horaires de travail dans un délai de sept jours ouvrés au moins avant la date à laquelle ce changement doit intervenir. Ce délai peut être réduit dans des conditions fixées par la convention ou l'accord collectif lorsque les caractéristiques particulières de l'activité, précisées dans l'accord, le justifient. Des contreparties au bénéfice du salarié doivent alors être prévues dans ta convention ou l'accord. Enfin, l'alinéa 9 mentionne que la convention et l'accord définis par le présent article fixent les règles selon lesquelles est établi le programme indicatif de la modulation pour chacun des services ou ateliers concernés et organisent, le cas échéant, l'activité des salariés selon des calendriers individualisés. Dans ce cas, la convention ou l'accord doit préciser les conditions de changement des calendriers individualisés, les modalités selon lesquelles la durée du travail de chaque salarié sera décomptée ainsi que la prise en compte et les conditions de rémunération des périodes de la modulation pendant lesquelles les salariés ont été absents. La convention collective stipule en son article 5.6.7.3 que pour préserver la nécessaire réactivité face à des variations imprévues, les heures de travail et les horaires de travail pourront être modifiés en respectant un délai de prévenance de 3 jours ouvrés. Dans ce cas, les salariés devront bénéficier d'une contrepartie financière ou en repos proportionnelle à la contrainte imposée, qui sera fixée au niveau de l'entreprise tors de l'introduction de l'organisation du temps de travail sur l'année. En l'espèce, l'examen de l'accord d'entreprise du 18 juin 2001 révèle qu'il ne fixe aucun programme indicatif de la répartition de la durée du travail et ne prévoit aucune contrepartie au profit des salariés en cas de réduction du délai de prévenance de 7 à 3 jours et ce en violation des dispositions précitées, ce qui a pour conséquence de rendre l'accord inopposable à la salariée. Par suite le temps de travail doit être apprécié à la semaine et les heures au-delà de 35 constituent des heures supplémentaires qui doivent être payées. C'est à tort que l'appelante soutient que le délai de prescription quinquennale n'a pas commencé à courir et évoque une jurisprudence qui ne peut s'appliquer au cas particulier dès lors qu'elle avait connaissance de l'accord de modulation critiqué et était en mesure de le remettre en cause sans délai. Madame X... ayant introduit son action le 28 novembre 2012, la prescription est acquise pour la période antérieure au 28 novembre 2007. Au vu des récapitulatifs des heures de travail de Madame X... pour la période postérieure à la prescription et des fiches de salaires, la demande en paiement est justifiée à concurrence de 504,90 euros comprenant les congés payés. La décision du conseil de prud'hommes sera réformée de ce chef.
ALORS QUE la prescription quinquennale ne s'applique pas lorsque la créance, même périodique, dépend d'éléments qui ne sont pas connus du créancier, en particulier lorsque ces éléments résultent de déclarations que le débiteur était tenu de faire ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a d'abord constaté que l'accord d'entreprise du 18 juin 2001 ne fixait aucun programme indicatif de la répartition de la durée du travail et ne prévoyait aucune contrepartie au profit des salariés en cas de réduction du délai de prévenance de 7 à 3 jours et ce en violation de l'article 212-8 du code du travail dans sa rédaction à l'époque et de l'article 5.6.7.3 de la convention collective ; qu'elle a également constaté que cet accord de modulation illicite avait été appliqué par l'employeur ; qu'il s'ensuit que, l'employeur était débiteur d'une obligation d'information dans le cadre d'un délai de prévenance légal et conventionnel qu'il n'avait pas respecté, au détriment de la salariée, créancière de cette obligation d'information et de la contrepartie financière et du rappel de salaires qui en découlaient ; qu'en décidant néanmoins d'appliquer la prescription quinquennale à la demande de rappels de la salariée alors que sa créance dépendait du comportement de l'employeur lors de l'exécution du contrat de travail, et non de l'existence de l'accord de modulation illicite qui lui était inopposable, la cour d'appel a violé l'article 212-8 du code du travail, dans sa rédaction applicable, et l'article 2277 ancien et 2224 nouveau du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-18432
Date de la décision : 06/10/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans, 01 avril 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 06 oct. 2015, pourvoi n°14-18432


Composition du Tribunal
Président : Mme Vallée (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.18432
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